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21/04/2022 | FRANCE | N°20/04896

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 21 avril 2022, 20/04896


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 21 AVRIL 2022



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04896 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBUOZ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 décembre 2019 - Tribunal d'Instance de NOGENT SUR MARNE - RG n° 11-19-000453





APPELANTE



La CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE IDF, so

ciété coopérative de banque à forme anonyme à capital fixe agissant poursuites et diligences de son représentant légal, représenté par son mandataire, NEUILLY CONTENTIEUX, groupem...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 21 AVRIL 2022

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04896 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBUOZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 décembre 2019 - Tribunal d'Instance de NOGENT SUR MARNE - RG n° 11-19-000453

APPELANTE

La CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE IDF, société coopérative de banque à forme anonyme à capital fixe agissant poursuites et diligences de son représentant légal, représenté par son mandataire, NEUILLY CONTENTIEUX, groupement d'intérêt économique régi par l'ordonnance du 23 septembre 1967 agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié ès-qualités audit siège

N° SIRET : 382 900 942 00014

19, rue du Louvre

75001 PARIS

représentée et assistée de Me Coralie-Alexandra GOUTAIL de la SARL Goutail Avocat, avocat au barreau de PARIS, toque : A0201

INTIMÉS

Monsieur [G] [Y]

né le 12 octobre 1964 à SIDI BEL ABBES (ALGÉRIE)

7, rue du Clocher

94500 CHAMPIGNY SUR MARNE

DÉFAILLANT

Madame [K] [M] épouse [Y]

née le 25 juillet 1966 à SIDI BEL ABBES (ALGÉRIE)

7, rue du Clocher

94500 CHAMPIGNY SUR MARNE

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 1er mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Christophe BACONNIER, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 20 septembre 2012, la société Caisse d'épargne et de prévoyance d'Île-de-France (la Caisse d'épargne ci-après) a consenti à M. [G] [Y] et Mme [K] [M] épouse [Y] un crédit personnel d'un montant en capital de 14 000 euros remboursable au taux nominal de 10,45 % l'an (soit un TAEG de 11,23 %) en 120 mensualités de 209,76 euros avec assurance.

Des échéances étant demeurées impayées, la Caisse d'épargne a fait assigner M. et Mme [Y] devant le tribunal d'instance de Nogent-sur-Marne, par acte d'huissier en date du 11 avril 2019, en paiement des sommes suivantes, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- 11 409,97 euros au titre du crédit, avec intérêts contractuels au taux de 10,45 % l'an à compter du 19 septembre 2018, avec prononcé de la résolution judiciaire aux torts de l'emprunteur si le tribunal estimait la déchéance du terme irrégulière,

- 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

Devant le premier juge, la forclusion, la déchéance du droit aux intérêts contractuels (FIPEN, notice d'assurance, FICP) ont été mis dans le débat d'office.

Par jugement contradictoire du 31 décembre 2019 auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le tribunal d'instance de Nogent-sur-Marne a rendu la décision suivante :

« Dit la Caisse d'Epargne d'Ile de France recevable en ses demandes,

Dit que la Caisse d'Epargne d'Ile de France est déchue de son droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat de crédit personnel conclu entre les parties le 20 septembre 2012,

Condamne solidairement M. [G] [Y] et Mme [K] [M] épouse [Y] à payer à la Caisse d'Epargne d'Ile de France la somme de 2 942,68 euros, selon décompte arrêté au 1er avril 2019, et avec intérêts au taux légal à compter du 11 avril 2019,

Dit que ces intérêts au taux légal ne pourront faire l'objet d'une majoration de cinq points deux mois après le caractère exécutoire de ce jugement,

Autorise M. [G] [Y] et Mme [K] [M] épouse [Y] à s'acquitter de cette somme selon un échéancier établi sur 24 mois, ledit échéancier prenant effet le mois suivant la signification du jugement et se décomposant comme suit :

- le versement mensuel de 100 euros, chaque mensualité étant payable avant le 30 de chaque mois, et ce pendant 23 mois,

- le versement du solde de la dette à la dernière et 24ème échéance,

Dit que tous les paiements ainsi effectués s'imputeront sur le capital,

Rappelle que conformément à l'article 1244-1 devenu article 1343-5 du code civil, la présente décision suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier et que les majorations d'intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d'être dues pendant le délai fixé par la présente décision,

Dit en revanche qu'à défaut de règlement d'une seule mensualité à son échéance, l'intégralité de la somme restant due deviendra immédiatement exigible,

Rejette les demandes plus amples ou contraires de la Caisse d'Epargne d'Ile de France,

Rejette la demande de la Caisse d'Epargne d'Ile de France au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. [G] [Y] et Mme [K] [M] épouse [Y] aux dépens,

Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision ».

Le tribunal a principalement retenu que le non respect des prescriptions des articles L. 312-28 du code de la consommation prive la Caisse d'épargne de son droit aux intérêts contractuels dès la conclusion du contrat, en ce que seul figure dans l'encadré le montant hors assurance des mensualités. En outre, le juge écarte la majoration de 5 points du taux légal en ce que le crédit personnel ayant été accordé à un taux d'intérêt annuel fixe de 10,45 %, les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur à ce titre ne seraient pas significativement inférieur à ce taux conventionnel.

La Caisse d'épargne a relevé appel de ce jugement par déclaration du 6 mars 2020.

Aux termes de conclusions remises le 28 mai 2020, l'appelante demande à la cour de :

« Infirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de Nogent sur Marne rendu le 31 décembre 2019 en ce qu'il a jugé que :

« DIT que la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France est déchue de son droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat de prêt personnel conclu entre les parties le 20 septembre 2012,

CONDAMNE solidairement M. et Mme [Y] à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France la somme de 2 942,68 euros, selon décompte arrêté au 1er avril 2019, et avec intérêts au taux légal à compter du 11 avril 2019,

DIT que ces intérêts au taux légal ne pourront faire l'objet d'une majoration de cinq points deux mois après le caractère exécutoire du jugement,

AUTORISE M. et Mme [Y] à s'acquitter de cette somme selon un échéancier établi sur 24 mois, ledit échéancier prenant effet le mois suivant la signification du jugement et se décomposant comme suit :

- Le versement mensuel de 100 euros, chaque mensualité étant payable avant le 30 de chaque mois, et ce pendant 23 mois,

- Le versement du solde de la dette à la dernière et 24ème échéance,

DIT que tous les paiements ainsi effectués s'imputeront sur le capital,

RAPPELLE que, conformément à l 'article 1244-1 devenu article 1343-5 du code civil, la présente décision suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier et que les majorations de retard ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d'être dues pendant le délai fixé par la présente décision,

DIT en revanche qu'à défaut de règlement d'une seule mensualité à son échéance, l'intégralité de la somme restant due deviendra immédiatement exigible,

REJETTE les demandes plus amples ou contraires de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France,

REJETTE la demande de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France au titre de l'article 700 du code de procédure civile ».

Statuant de nouveau

- Dire et juger que la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France est recevable en son action ;

- Dire et juger que l'action en contestation de la régularité de l'offre est prescrite depuis le 21 septembre 2017 ;

- Dire et juger en conséquence la juridiction saisie, irrecevable à prononcer la déchéance du droit aux intérêts du fait d'une prétendue irrégularité de l'offre de prêt ;

Subsidiairement,

- Dire et juger que l'offre préalable de prêt est valide et régulière

En tout état de cause,

- Constater que la déchéance du terme du contrat objet de la présente a été régulièrement prononcée par la demanderesse ;

Subsidiairement,

- Dire et juger qu'en l'absence de régularisation des échéances impayées, il y a lieu de prononcer la déchéance du terme du contrat objet de la présente ;

Encore plus subsidiairement,

- Dire et juger qu'il a été commis une faute dans la cessation du règlement des échéances du prêt ;

- Prononcer la résiliation judiciaire de l'offre de prêt ;

En conséquence,

- Condamner solidairement M. et Mme [Y] à verser à la société Caisse d'épargne et de prévoyance IDF la somme de 11 409,97 euros, outre intérêts au taux de 11.23 % à compter du 19 décembre 2018 jusqu'au jour du parfait paiement.

- Condamner solidairement M. et Mme [Y] à verser à la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Coralie Goutail, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ».

La Caisse d'épargne soutient principalement que :

- elle ne doit pas être déchue de son droit aux intérêts conventionnels tout d'abord en ce que le tribunal ne pouvait pas soulever d'office le moyen tiré de l'irrégularité de l'offre préalable du fait de la prescription, mais également parce que l'offre était régulière du fait du respect des prescriptions des articles L. 311-18 et R. 311-5 du code de la consommation ;

- elle est bien fondée à réclamer la condamnation de M. et Mme [Y] à hauteur de 11 409,97 euros outre les intérêts au taux conventionnel, à compter du 19 septembre 2019, date de déchéance du terme jusqu'au jour du parfait paiement.

La déclaration d'appel et les conclusions d'appel de la Caisse d'épargne ont été régulièrement signifiées à M. et Mme [Y] par procès-verbal de remise à étude délivré le 4 juin 2020 ; M. et Mme [Y] n'ont pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue à la date du 7 décembre 2021.

L'affaire a été appelée à l'audience du 1er mars 2022.

Lors de l'audience, l'affaire a été examinée et mise en délibéré à la date du 21 avril 2022 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 CPC).

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

L'article L. 141-4 (R. 632-1 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation permet au juge de relever d'office tous les moyens tirés de l'application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le premier juge.

L'article L. 311-24 (L. 312-39 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation prévoit qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 (dans leur rédaction alors applicable) du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret. L'article D. 311-6 (D. 312-16 dans la nouvelle numérotation) du même code précise que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l'article L. 311-24 (L. 312-39 dans la nouvelle numérotation), il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

Ce texte n'a toutefois vocation à être appliqué au titre du calcul des sommes dues qu'après vérification de l'absence de forclusion de la créance, de ce que le terme du contrat est bien échu et de l'absence de déchéance du droit aux intérêts conventionnels.

Sur la forclusion

L'article L. 311-52 devenu R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur dans le cadre d'un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le tribunal d'instance dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

En l'espèce, au regard de l'historique du compte produit, il apparaît que le premier incident de paiement non régularisé est intervenu pour l'échéance du 28 mai 2017 de sorte que l'action introduite le 11 avril 2019 n'est pas atteinte par la forclusion dès lors qu'il ne s'est pas écoulé plus de deux ans à compter du premier incident de paiement non régularisé.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a déclaré que la Caisse d'épargne est recevable en son action en paiement.

Sur la déchéance du terme

Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Par ailleurs, selon l'article 1103 du code civil, les conventions légalement formées engagent leurs signataires et en application de l'article 1224 du même code, lorsque l'emprunteur cesse de verser les mensualités stipulées, le prêteur est en droit de se prévaloir de la déchéance du terme et de demander le remboursement des fonds avancés soit en raison de l'existence d'une clause résolutoire soit en cas d'inexécution suffisamment grave. L'article 1225 précise qu'en présence d'une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution.

En matière de crédit à la consommation en particulier, il résulte des dispositions de l'article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation, que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l'espèce, le contrat de prêt contient une clause d'exigibilité anticipée en cas de défaut de paiement (article IV-2) et une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme de payer la somme de 1 413,24 euros précisant le délai de régularisation (de 15 jours) a bien été envoyée le 3 septembre 2018 ainsi qu'il en ressort de l'avis de recommandé produit (l'avis de réception ayant été par ailleurs signé le 5 septembre 2018) de sorte qu'en l'absence de régularisation dans le délai, ainsi qu'il en ressort de l'historique de compte, l'établissement de crédit a pu régulièrement prononcer la déchéance du terme le 19 septembre 2018 étant précisé que la déchéance du terme a elle-même été notifiée avec une mise en demeure de payer le solde dû.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Sur la recevabilité du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts

En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.

Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive. En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.

Par ailleurs, au regard de sa date de conclusion, le contrat signé le 26 juin 2013 est soumis aux dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 qui a porté ratification de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil. Il a été dit pour droit par la Cour de justice de l'Union européenne que les articles 8 et 23 de cette directive doivent être interprétés en ce sens qu'ils imposent à une juridiction nationale d'examiner d'office l'existence d'une violation de l'obligation précontractuelle du prêteur d'évaluer la solvabilité du consommateur, prévue à l'article 8 de cette directive et de tirer les conséquences qui découlent en droit national d'une violation de cette obligation, à condition que les sanctions satisfassent aux exigences dudit article 23.

Il s'en déduit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.

C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat litigieux à l'article L. 311-12 devenu L. 312-21 et la Caisse d'épargne est mal fondée à invoquer la prescription du moyen discuté.

Sur le fond du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts

La Caisse d'épargne produit :

- l'offre de contrat de crédit,

- la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées,

- la fiche de solvabilité,

- la notice d'assurance,

- la fiche d'explications,

- le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement,

- le tableau d'amortissement,

- l'historique de prêt,

- un décompte de créance.

Selon l'article L. 311-48 du code de la consommation, le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l'emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées, notamment, par l'article L. 311-18, est déchu du droit aux intérêts.

Dans son arrêt du 8 avril 2021, la cour de cassation répond au moyen qui faisait grief à l'arrêt de prononcer la déchéance du droit aux intérêts alors « que dans sa rédaction applicable au litige l'article R. 311-5 du code de la consommation (devenu R. 312-10) n'exige pas que le coût des assurances facultatives figure dans l'encadré prévu à l'article L. 311-18 du même code » dans les termes suivants (points 4 à 6 de l'arrêt) et au visa des articles L. 311-18 et L. 311-48, alinéa 1er et R. 311-25 du code de la consommation :

« 4. Selon les deux premiers textes, un encadré, inséré au début du contrat, informe l'emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit, sous peine de déchéance du prêteur du droit aux intérêts.

5. Aux termes du dernier, qui fixe la liste des informations figurant dans l'encadré, à l'exclusion de toute autre, doivent être mentionnés :

d) Le montant, le nombre et la périodicité des échéances que l'emprunteur doit verser et, le cas échéant, l'ordre dans lequel les échéances seront affectées aux différents soldes dus fixés à des taux débiteurs différents aux fins du remboursement. Pour les découverts, il est indiqué le montant et la durée de l'autorisation que l'emprunteur doit rembourser ;

h) Les sûretés et les assurances exigées, le cas échéant ;

6. Il s'en déduit que le montant de l'échéance qui figure dans l'encadré au titre des informations sur les caractéristiques essentielles du contrat de crédit n'inclut pas le coût mensuel de l'assurance souscrite par l'emprunteur accessoirement à ce contrat ».

A l'examen des pièces produites, la cour retient que c'est à tort que le premier juge a prononcé la déchéance du droit aux intérêts au motif que le prêteur avait méconnu les exigences de l'article R. 311-5 du code de la consommation en ne mentionnant pas les mensualités assurance comprise dans le contrat alors que celle-ci avait été souscrite ; en effet la cour constate que l'encadré comporte les mentions suivantes qui sont conformes à l'article R. 311-5 du code de la consommation :

« Type de crédit : Prêt personnel

Montant total du crédit : 14 000 euros

Conditions de mise à disposition des fonds :

Le montant total du crédit est versé en une seule fois à l'emprunteur après expiration du délai de rétractation, à la date qu'il a indiqué lors de sa demande de crédit, sauf option" Versements successifs ou sur demande expresse de la "part de l'emprunteur de mise à disposition des fonds à l'expiration des sept premiers jours suivant l'acceptation de l'offre de contrat de crédit. Si le contrat prévoit une "Garantie: Caution solidaire sous seing privé aucune mise à "disposition des fonds ne pourra intervenir avant la régularisation de l'acte de cautionnement par les cautions dans le respect des dispositions légales et la remise dudit acte au prêteur.

Durée du contrat de crédit (1) : 121 mois

Montant des échéances (1) : 190,18 euros (hors assurance facultative)

Nombre des échéances : 120

Périodicité des échéances : mensuelle

Taux débiteur annuel fixe : 10,45 %

TAEG (taux annuel effectif global) fixe : 11,23 %

L'hypothèse retenue pour calculer ce TAEG tient compte des éléments relatifs au montant total du crédit, aux éventuels frais de dossier, à la durée du crédit, à la fréquence des échéances, ainsi qu'au montant des échéances décrits ci-dessus, avec un déblocage des fonds en une seule fois.

Montant total da par l'emprunteur : 22 961,60 euros (hors assurance facultative)

Frais liés à l'exécution du contrat de crédit: Frais de dossier déduits du 1er versement : 140 euros

Frais de report : En cas de report, des frais de gestion de 4 % du montant des échéances reportées pourront être demandés

(1) Le montant des échéances et la durée indiqués ci-dessus sont calculés pour le paiement de la 1ère échéance 30 jours (ou 60, 90 ou 120 jours en cas d'option « report de la 1ère échéance ») après la date de mise à disposition des fonds ».

La cour constate que l'assurance est facultative et que les informations de la section « adhésion à l'assurance facultative » font ressortir qu'avec l'assurance proposée, la mensualité s'élève à 209,76 euros.

Compte tenu de ce qui précède la cour dit que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts n'est pas encourue.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, et statuant à nouveau de ce chef, la cour dit n'y avoir lieu à prononcer d'office la déchéance du droit aux intérêts.

Sur le montant de la créance

La cour constate que la somme demandée à hauteur de 11 409,97 euros se décompose comme suit :

- 3 484,92 euros au titre des échéances échues impayées,

- 7 925,05 euros au titre du capital à échoir restant dû.

En application de l'article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation et au regard du décompte de créance, du tableau d'amortissement et de l'historique de compte, il résulte qu'à la date de la déchéance du terme, il est dû à la Caisse d'épargne :

- 3 484,92 euros au titre des échéances échues impayées, avec intérêts au taux contractuel à compter du 19 décembre 2018,

- 7 925,05 euros au titre du capital à échoir restant dû, avec intérêts au taux contractuel à compter du 19 décembre 2018.

M. et Mme [Y] sont ainsi tenus au paiement de la somme totale de 11 409,97 euros (3 484,92 + 7 925,05) avec intérêts au taux contractuel de 10,45 % l'an à compter du 19 décembre 2018.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a condamné solidairement M. et Mme [Y] à payer à la Caisse d'épargne la somme de 2 948,68 euros au titre du crédit impayé avec intérêts au taux légal à compter du 11 avril 2019, et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne solidairement M. et Mme [Y] à payer à la Caisse d'épargne la somme de 11 409,97 euros avec intérêts au taux contractuel de 10,45 % l'an à compter du 19 décembre 2018.

Sur les délais de paiement

En vertu de l'article 1343-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.

La cour constate que les délais de paiement retenus par le premier juge ne sont pas de nature à permettre à M. et Mme [Y] de se libérer de leur dette de 11 409,97 euros en deux ans ; par suite, la cour infirme le jugement qui les a autorisés à se libérer du montant de leur dette.

Sur les autres demandes

La cour condamne in solidum M. et Mme [Y] aux dépens de la procédure d'appel en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Le jugement déféré est confirmé en ce qui concerne l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'apparaît pas inéquitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de laisser à la charge de la Caisse d'épargne les frais irrépétibles de la procédure d'appel.

L'ensemble des autres demandes plus amples ou contraires est rejeté, leur rejet découlant des motifs amplement développés dans tout l'arrêt.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a dit la Caisse d'Epargne d'Ile de France recevable en ses demandes, en ce qu'il a rejeté la demande de la Caisse d'Epargne d'Ile de France au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il a condamné in solidum M. [G] [Y] et Mme [K] [M] épouse [Y] aux dépens ;

Statuant de nouveau sur tous les chefs infirmés, et ajoutant,

Condamne solidairement M. [G] [Y] et Mme [K] [M] épouse [Y] à payer à la société Caisse d'épargne et de prévoyance d'Île-de-France la somme de 11 409,97 euros avec intérêts au taux contractuel de 10,45 % l'an à compter du 19 décembre 2018 ;

Déboute la société Caisse d'épargne et de prévoyance d'Île-de-France de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne in solidum M. [G] [Y] et Mme [K] [M] épouse [Y] aux dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Coralie Goutail, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 20/04896
Date de la décision : 21/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-21;20.04896 ?
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