La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/04/2022 | FRANCE | N°18/15385

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 21 avril 2022, 18/15385


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 21 AVRIL 2022



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/15385 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B54IM - Jonction avec le dossier RG N° 20/06122



Décision déférée à la Cour : Jugement du 3 avril 2018 - Tribunal d'Instance de SAINT DENIS - RG n° 11-15-000674





APPELANTS



Monsieur [M] [O]

né le 4 octobre 1957

à ROUBAIX (59)

210, boulevard des Ambassadeurs

95220 HERBLAY



représenté et assisté de Me Virginie PEJOUT CHAVANON, avocat au barreau de PARIS, toque : C1324





Madame [H] [O] née [G]

n...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 21 AVRIL 2022

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/15385 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B54IM - Jonction avec le dossier RG N° 20/06122

Décision déférée à la Cour : Jugement du 3 avril 2018 - Tribunal d'Instance de SAINT DENIS - RG n° 11-15-000674

APPELANTS

Monsieur [M] [O]

né le 4 octobre 1957 à ROUBAIX (59)

210, boulevard des Ambassadeurs

95220 HERBLAY

représenté et assisté de Me Virginie PEJOUT CHAVANON, avocat au barreau de PARIS, toque : C1324

Madame [H] [O] née [G]

née le 2 janvier 1969 à BLIDA (ALGÉRIE)

210, boulevard des Ambassadeurs

95220 HERBLAY

représentée et assistée de Me Virginie PEJOUT CHAVANON, avocat au barreau de PARIS, toque : C1324

INTIMÉE

La société BNP PARIBAS, société anonyme agissant poursuites et diligences du directeur général domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 662 042 449 00014

16, boulevard des Italiens

75009 PARIS

représentée par Me Johanna GUILHEM de l'ASSOCIATION ASSOCIATION LASNIER-BEROSE et GUILHEM, avocat au barreau de PARIS, toque : R239

substitué à l'audience par Me Cheikhou NIANG, avocat au barreau de PARIS, toque : A0229

PARTIES INTERVENANTES

La société CARDIF ASSURANCE VIE, société anonyme représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 732 028 154 00084

1, boulevard Haussmann

75009 PARIS

représentée par Me Bruno QUINT de la SCP Herald anciennement Granrut, avocat au barreau de PARIS, toque : P0014

substitué à l'audience par Maître Brigitte RAKKAH

La société CARDIF ASSURANCES RISQUES DIVERS, société anonyme représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 308 896 547 00038

1, boulevard Haussmann

75009 PARIS

représentée par Me Bruno QUINT de la SCP Herald anciennement Granrut, avocat au barreau de PARIS, toque : P0014

substitué à l'audience par Me Brigitte RAKKAH

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 2 mars 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère chargée du rapport

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [M] [O] et Mme [H] [G] épouse [O] ont ouvert un compte chèque dans les livres de la société BNP Paribas.

Suivant offre préalable acceptée le 22 juillet 2008, la société BNP Paribas a consenti à M. et Mme [O] un prêt personnel d'un montant de 50 000 euros, remboursable en 108 mensualités de 674,02 euros incluant les intérêts au taux débiteur annuel de 6,85 % et l'assurance facultative.

Les emprunteurs ont souscrit une assurance groupe n° 4216 auprès de la société Cardif assurance vie, couvrant le décès, l'invalidité et l'incapacité et M. [O] a souscrit un contrat d'assurance n° 290 auprès la société Cardif assurances risques divers le garantissant en cas de perte d'emploi.

M. et Mme [O] ont accepté une seconde offre préalable le 30 novembre 2010 aux termes de laquelle la banque leur a consenti un prêt personnel d'un montant de 30 000 euros remboursable en 72 mensualités de 556,50 euros incluant les intérêts au taux débiteur de 7,21 % l'an et l'assurance facultative.

Pour cet emprunt, les emprunteurs ont souscrit une assurance groupe n° 4216 auprès de la société Cardif assurance vie pour ce second prêt couvrant le décès et l'invalidité pour les deux, outre la maladie et la perte d'emploi suite à licenciement pour M. [O].

Mme [O] a été admise en invalidité le 23 octobre 2013, avec une pension à compter de novembre 2013 et M. [O] a été licencié le 27 novembre 2013 pour abandon de poste et a perçu des indemnités de pôle emploi à compter de mars 2014.

Après préavis du 15 octobre 2013, le compte chèque a été clôturé par lettre recommandée du 26 décembre 2013.

Saisi le 22 mai 2015 par la société BNB Paribas d'une demande tendant à la condamnation des emprunteurs au paiement des soldes restant dus, le tribunal d'instance de Saint-Denis, par un jugement réputé contradictoire rendu le 3 avril 2018 auquel il convient de se reporter, a :

- condamné solidairement M. et Mme [O] à payer à la société BNP Paribas :

* la somme de 24 510,25 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 6,85 % à compter du 8 avril 2015 sur la somme de 24 122,61 euros et à compter du 22 mai 2015 pour le surplus,

* la somme de 17 875,93 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 7,21 % à compter du 8 avril 2015 sur la somme de 17 023,35 euros et à compter du 22 mai 2015 pour le surplus,

- condamné in solidum M. et Mme [O] à verser à la société BNP Paribas une indemnité de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Après avoir rappelé le principe de l'effet relatif des conventions entre les époux [O] et la BNP Paribas, le tribunal a rappelé que les emprunteurs ne sauraient se prévaloir du contrat d'assurance souscrit après de la société Cardif pour se dégager de leurs obligations à l'encontre du prêteur et qu'il leur appartenait d'appeler ladite société à la cause, ce qu'ils n'ont pas fait en dépit du délai conséquent écoulé.

Par une déclaration en date du 19 juin 2018, les époux [O] ont relevé appel de cette décision et ont, par déclaration de saisine du 23 avril 2020, appelé en intervention forcée la société Cardif Assurance vie et la société Cardif assurances risques divers assignées par actes du 11 mars 2020.

Par ordonnance de jonction du 30 juin 2020, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux procédures sous le n°18/15385.

Aux termes de conclusions remises le 21 octobre 2020, M. et Mme [O] demandent à la cour :

- de dire et juger leur appel bien-fondé,

- de dire et juger les interventions forcées de Cardif assurance vie et Cardif assurance risques divers recevables et bien fondées,

- de dire et juger leurs demandes à l'encontre de Cardif assurance vie et Cardif assurances risques divers recevables et bien fondées,

- d'infirmer le jugement,

- de débouter la société BNP Paribas de l'ensemble de ses demandes,

- à titre subsidiaire, de dire et juger que la société BNP Paribas a commis des fautes engageant sa responsabilité et la condamner à payer des dommages-intérêts qui ne sauraient être inférieurs à 52 574,29 euros à actualiser,

- en tout état de cause, de condamner la société Cardif assurance vie et Cardif assurances risques divers à les garantir de toute condamnation qui pourrait être mise à leur charge,

- de condamner solidairement la société BNP Paribas, la société Cardif assurance vie et Cardif assurances risques divers à la somme de 2 500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les appelants indiquent qu'ils ont contracté avec la société BNP Paribas, mandataire apparent de la société Cardif assurance vie et Cardif assurances risques divers des contrats d'assurance, que les contrats sont opposables à la société BNP Paribas qui s'est elle-même présentée comme la société BNP Paribas Cardif à l'instar d'une lettre envoyée aux appelants confirmant leur demande de « prise en charge des échéances du prêt ».

Ils affirment que la garantie du sinistre n'a jamais été dénoncée par la société Cardif, que le contrat d'assurance n'a jamais été résilié et que la prise en charge du sinistre n'a jamais été dénoncée.

En outre, ils estiment que la banque a manqué à son devoir d'information dans la mesure où elle aurait dû les informer de manière claire, précise et explicite que seule la compagnie d'assurance Cardif devait être actionnée en cas de sinistre.

Ils considèrent par ailleurs que la banque a commis une faute en clôturant les comptes chèque, support des différents prêts, sans attendre la mise en 'uvre de l'indemnisation des deux sinistres concernant les emprunteurs, perte d'emploi pour M. [O] et invalidité pour Mme [O] et qu'elle a exclusivement concouru à la création du dommage dont elle estime pouvoir solliciter réparation.

Ils indiquent enfin que la société BNP Paribas n'a pas mis en cause l'assureur et que les appelants ont dû être contraints de les appeler à la cause, que leur action n'est ni irrecevable, ni prescrite en vertu de l'article L. 114-1 du code des assurances. Ils rappellent qu'ils n'ont jamais été notifiés de l'arrêt de la prise en charge des mensualités et que la banque ne les a jamais informés de cette cessation des paiements. Selon eux, le point de départ de la prescription n'est pas tangible et seule la décision de première instance les a informés de la nécessité de mettre en cause l'assureur.

Aux termes de conclusions remises le 24 janvier 2022, la société BNP Paribas demande à la cour :

- de déclarer M. et Mme [O] irrecevables et mal fondés en leur appel et les débouter de toutes leurs demandes,

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer la somme de 24 510,25 euros, au titre du prêt du 22 juillet 2008, avec intérêts au taux de 6,85 % à compter du 8 avril 2015 sur la somme de 24 122,61 euros et à compter du 22 mai 2015, pour le surplus et à payer la somme de 17 875,93 euros au titre du prêt du 30 novembre 2010, avec intérêts au taux de 7,21 % à compter du 8 avril 2015,

- de condamner solidairement les appelants à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- d'ordonner la capitalisation des intérêts dus depuis plus d'un an.

L'intimée indique que la théorie du mandat apparent est dilatoire et qu'il appartenait aux appelants de faire le nécessaire pour solliciter la prise en charge des échéances des prêts, au titre de leurs garanties et de fournir tous les justificatifs, auprès de l'assureur.

Elle affirme qu'en première instance, les appelants n'ont pas jugé utile de mettre en cause la société Cardif malgré le conseil d'un avocat et ayant pris connaissance des arguments de la société BNP Paribas. De plus, elle indique que les appelants ne sont pas recevables à invoquer le bénéfice de l'assurance et qu'ils leur restent à devoir le solde des prêts.

En outre, elle affirme qu'elle a fait signer le bulletin d'adhésion à l'assurance groupe en présence d'une notice détaillant toutes les conditions d'assurance, qu'elle n'a donc pas commis de manquements à son devoir d'information au moment de la souscription. Elle précise que leur demande de dommages et intérêts à ce titre est prescrite.

De plus, elle indique que les appelants n'ont pas démontré une faute de la banque au moment de la survenance de leur sinistre, n'étant qu'un intermédiaire, qu'il leur appartenait de fournir les justificatifs utiles à la prise en charge du prêt tels que demandés par l'assurance et qu'elle n'avait pas à donner un véritable conseil qui dépasse son devoir de banquier dans le cadre d'une assurance groupe. Elle rappelle qu'elle n'a pas eu connaissance des conditions de l'arrêt des versements par la société Cardif.

Pour finir, elle soutient que la clôture des comptes chèques afférents aux prêts, a été prononcée avant la déclaration de perte d'emploi de M. [O] et qu'elle était en droit de prononcer la mise en exigibilité des prêts, aucune faute ne pouvant lui être reprochée.

Aux termes de conclusions remises le 4 décembre 2020, les sociétés Cardif assurance vie et Cardif assurance risques divers, demandent à la cour :

- de déclarer les demandes formulées par les époux [O] à leur encontre irrecevables et subsidiairement, mal fondées,

- en tout état de cause, de condamner les époux [O] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les intimées affirment que leur mise en cause dans le cadre de la procédure en appel n'est pas recevable dès lors qu'elle n'est pas justifiée par un nouvel élément modifiant les données du litige en vertu de l'article 555 du code de procédure civile. Elles indiquent qu'il appartenait aux appelants d'appeler les intimées à la cause en première instance et que lors de l'intervention forcée, l'assignation n'était pas valable car l'action en garantie était prescrite en vertu de l'article L. 114-1 du code des assurances.

Elles affirment que les appelants ont su faire la différence entre la banque BNP Paribas et la compagnie d'assurance, l'affirmation du contraire est de mauvaise foi dès lors qu'ils ont assigné la compagnie en intervention forcée, d'autant qu'ils étaient représentés d'un avocat en première instance qui ne pouvait pas ne pas les avoir informés. Dès lors, les intimées considèrent qu'il appartenait aux appelants et non à la banque BNP Paribas de les assigner en intervention forcée.

En outre, les intimées indiquent que Mme [O] a souscrit une garantie « incapacité totale de travail » au titre de son contrat d'assurance, laquelle a déjà été mise en 'uvre dans les limites contractuelles prévues au contrat pour une durée de 6 mois. De plus, les intimées précisent que l'appelante n'a pas apporté plus de précisions quant à la nature de la pathologie de Mme [O] à l'origine de la limitation dans la durée de la prise en charge des échéances en raison du secret médical dans la mesure où Mme [O] n'a pas choisi de préciser la nature de sa maladie tout en étant informée de la prise en charge maximale de 6 mensualités par courrier.

Les intimées indiquent que Mme [O] souhaite mettre en 'uvre la garantie « perte totale et irréversible d'autonomie » pour laquelle elle a adhéré dans le cadre de ses deux d'assurances, sans en démontrer les conditions contractuelles de mise en 'uvre.

S'agissant de M. [O], les intimées indiquent que ce dernier sollicite la mise en 'uvre de son contrat d'assurance « perte d'emploi » en vertu de ses deux contrats d'assurance accessoires au prêt, alors que la garantie a été résiliée antérieurement au licenciement pour faute grave de M. [O] car il a cessé d'en régler les cotisations en vertu de l'article L. 113-3 du code des assurances. De plus, les intimées précisent que cette garantie ne peut être mise en 'uvre en cas de licenciement pour faute grave ou lourde.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est renvoyé aux écritures des parties conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 janvier 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 2 mars 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'intervention forcée des sociétés Cardif assurance vie et Cardif assurance risques divers

Il ressort des pièces du dossier que les époux [O] ont, par assignation du 11 mars 2020, soit plus de deux ans après avoir interjeté appel du jugement du 3 avril 2018 les condamnant au remboursement de leurs prêts, mis en cause les sociétés Cardif assurance vie et Cardif assurance risques divers qui n'étaient pas parties au litige tranché en première instance.

Pour justifier cette mise en cause, les appelants font valoir qu'à la lecture du jugement et face à l'inertie de la banque, ils ont été contraints d'introduire une action en intervention forcée.

Ils estiment, au visa de l'article 555 du code de procédure civile, que leur assignation n'est pas tardive puisqu'ils pensaient de bonne foi que la société BNP Paribas et les sociétés Cardif étaient trois entités similaires puisque les contrats d'assurance groupe étaient édités sur papier à entête de la BNP qui a entretenu la confusion dans son courrier du 1er mars 2017. Ils considèrent que c'est le jugement qui leur a révélé une circonstance de fait et de droit.

Ils relèvent enfin que leur action à l'encontre des assureurs n'est pas prescrite et que le délai de deux ans n'a débuté au mieux qu'à compter du 23 mai 2018, date de la signification du jugement ou même qu'il n'a pas débuté. Ils soulignent que les sociétés Cardif ne leur ont jamais notifié l'arrêt de la prise en charge des mensualités et que les courriers de la BNP Paribas ne peuvent constituer le point de départ du délai de prescription. Selon eux, c'est le jugement qui les a informés de la cessation de la prise en charge du sinistre par l'assureur.

En application de l'article 555 du code de procédure civile, les parties qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance peuvent être appelées devant la cour, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause.

L'évolution du litige impliquant la mise en cause d'un tiers devant la cour d'appel n'est caractérisée que par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit, née du jugement ou postérieure à celui-ci, modifiant les données juridiques du litige. Elle implique donc l'existence d'un élément nouveau, révélé par le jugement ou survenu postérieurement à celui-ci. Tel n'est pas le cas lorsque les éléments invoqués étaient déjà connus en première instance ou lorsque dès le début du litige, la responsabilité d'un tiers a été invoquée.

En l'espèce, plus de quatre ans avant l'assignation en intervention forcée, M. et Mme [O] ont été assignés en remboursement des échéances dues au titre de leurs prêts, impayées depuis le 15 octobre et le 5 décembre 2013.

Il ressort des débats et des pièces produites qu'en première instance, les défendeurs, représentés par un avocat, avaient invoqué la nécessaire prise en charge des échéances impayées par la société Cardif, qu'entre l'assignation du 23 mai 2015 et l'audience du 12 février 2018, ils ont eu largement le temps de mettre en cause leur assureur et ont même sollicité un renvoi à cette fin et qu'ils ont procédé à cette mise en cause plus de cinq ans après le début du litige.

Bien qu'ils s'en défendent, non sans une certaine mauvaise foi, M. et Mme [O] disposaient, dès la première instance, de l'ensemble des documents nécessaires pour leur permettre de mettre en cause les sociétés Cardif.

Il convient de relever que dans un litige similaire, concernant leur prêt immobilier porté devant le tribunal de grande instance de Bobigny, les emprunteurs, assignés en remboursement le 29 avril 2016, ont assigné en intervention forcée la société Cardif le 1er juin 2017. Ils ont donc su faire la différence entre la banque BNP Paribas, banquier, et les sociétés Cardif, assureurs.

Au surplus, les appelants ne sauraient invoquer la notion d'évolution du litige, dès lors que la décision rendue était prévisible.

Dès lors, la mise en cause des assureurs par les époux [O] est tardive dans la mesure où les appelants ne justifient pas de la révélation d'une circonstance de fait ou de droit, née du jugement ou d'une révélation postérieure.

Cette intervention forcée est par conséquent irrecevable, soit qu'il soit nécessaire de statuer sur la prescription biennale de l'action.

Sur la demande en paiement

Pour s'opposer à la demande en paiement, les appelants invoquent l'opposabilité des contrats d'assurance à la société BNP Paribas et la théorie du mandat apparent. Ils font valoir que les termes de la notice d'assurance les a placés dans la croyance que leur seul interlocuteur était la société BNP Paribas et que le courrier adressé par la société Cardif le 1er mars 2017 a contribué à renforcer cette croyance. Ils ajoutent que la garantie du sinistre n'a jamais été dénoncée par la société Cardif, que le contrat d'assurance n'a jamais été résilié et que la prise en charge du sinistre n'a jamais été dénoncée.

Il ressort néanmoins des pièces produites que Mme [O] a été destinataire d'un courrier de la société Cardif daté du 23 décembre 2013 l'informant du refus d'une prise en charge supplémentaire à celle, maximale, accordée pour une durée de six mois.

Quand bien même, l'établissement de crédit aurait pu effectuer des diligences en application d'un mandat apparent, force est de constater que les appelants ne justifient d'aucune démarche pour solliciter la prise en charge de leurs échéances de prêt, ni auprès de la banque, ni auprès de l'assureur.

Partant, le jugement est confirmé en ce qu'il a relevé que les emprunteurs ne sauraient se prévaloir des contrats d'assurance souscrits auprès des sociétés Cardif pour se dégager de leurs obligations à l'encontre du prêteur.

En l'absence de toute contestation sur le montant de la créance de la société BNP Paribas telle que fixée par le premier juge, le jugement est confirmé en toutes ses dispositions.

Aucune capitalisation des intérêts ne sera ordonnée, celle-ci étant prohibée en application des articles L. 311-23 à L. 311-25 du code de la consommation qui énumèrent les droits du prêteur en cas de défaillance.

Sur la demande reconventionnelle de dommages-intérêts

Pour réclamer des dommages-intérêts « qui ne sauraient être inférieurs à 23 574,29 euros », les appelants font valoir que la banque a violé son obligation d'information de l'emprunteur profane en ne les informant pas de manière claire, précise et explicite que la seule compagnie d'assurance Cardif devait être actionnée en cas de sinistre.

Ils ajoutent qu'elle a commis une faute en clôturant le compte chèque, support des deux prêts, sans attendre la mise en 'uvre de l'indemnisation des deux sinistres (invalidité de Mme [O] et perte d'emploi de M. [O]) et qu'elle aurait dû les conseiller sur la mise en 'uvre des garanties permettant de pallier les difficultés qu'ils traversaient. Ils estiment qu'elle a concouru à la création du dommage et que par sa faute, la banque a empêché la prise en charge du dommage.

Néanmoins, il ressort des pièces produites que la société BNP Paribas justifie avoir rempli son obligation d'information relative à la souscription d'une assurance groupe, en remettant et en produisant les deux notices d'assurance détaillant clairement et expressément les conditions de garantie et les risques d'exclusion. Les appelants ont signé le bulletin d'adhésion et ont reconnu avoir reçu les notices d'assurance.

La société BNP Paribas souligne de surcroît que leur demande de dommages-intérêts à ce titre est prescrite au regard de la date de signature des contrats.

Concernant les fautes alléguées, il convient de relever qu'aucune disposition contractuelle ne créé à l'encontre du banquier une obligation d'assistance pour la constitution d'un dossier de sinistre et que la demande des appelants est par conséquent sans fondement.

Enfin, il ressort du dossier que les appelants ont cessé de régler leurs échéances à compter du 15 octobre puis du 5 décembre 2013 et que leur compte bancaire présentait un solde débiteur de 2 281,78 euros au 18 novembre 2013. Il ne peut être reproché à la banque d'avoir, après préavis, clôturé le compte le 26 décembre 2013 et mis les prêts en exigibilité.

A cet égard, il convient de relever que les appelants n'ont pas infirmé les écritures des sociétés Cardif démontrant que la garantie perte d'emploi de M. [O] ne pouvait s'appliquer en présence d'un licenciement pour faute grave et que Mme [O] avait pu bénéficier de sa garantie incapacité totale de travail pendant six mois, conformément aux dispositions contractuelles.

Ainsi, les époux [O] invoquent l'exécution d'une obligation sans en rapporter la preuve et ne peuvent donc affirmer, sans aucun fondement, que la clôture de leur compte les a empêchés d'en bénéficier.

Partant, ils sont déboutés de leur demande indemnitaire sans fondement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Déclare irrecevable l'intervention forcée des sociétés Cardif assurance vie et Cardif assurance risques divers ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute M. [M] [O] et Mme [H] [G] épouse [O] de leur demande reconventionnelle en dommages-intérêts ;

Rejette la demande de capitalisation des intérêts ;

Condamne in solidum M. [M] [O] et Mme [H] [G] épouse [O] à payer à la société BNP Paribas la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [M] [O] et Mme [H] [G] épouse [O] à payer aux sociétés Cardif assurance vie et Cardif assurance risques divers la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [M] [O] et Mme [H] [G] épouse [O] aux dépens d'appel.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 18/15385
Date de la décision : 21/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-21;18.15385 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award