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18/06/2021 | FRANCE | N°21/00465

France | France, Cour d'appel de Paris, 18 juin 2021, 21/00465


Copies exécutoires délivrées aux parties le RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCE


COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1


ARRÊT DU 18 JUIN 2021


(no , pages)


Numéro d'inscription au répertoire général :RG 21/00465 -Portalis 35L7-V-B7F-CC4KN


Décision déférée à la Cour : jugement du 20 novembre 2020 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'EVRY - RG 20/04706


APPELANTES


Madame [S] [I]
[Adresse 1]
[Adresse 1]


Représentée par Me Wilfried SCHAEFFER de la SELEURL SCHAEFFER AVOCA

T, avocat au barreau de PARIS, toque : D0615 substitué par Me Frédérique ROUSSEL-STHAL, avocat au barreau de PARIS


SCI MIEL
[Adresse 1]
[Adresse 1]...

Copies exécutoires délivrées aux parties le RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCE

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1

ARRÊT DU 18 JUIN 2021

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :RG 21/00465 -Portalis 35L7-V-B7F-CC4KN

Décision déférée à la Cour : jugement du 20 novembre 2020 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'EVRY - RG 20/04706

APPELANTES

Madame [S] [I]
[Adresse 1]
[Adresse 1]

Représentée par Me Wilfried SCHAEFFER de la SELEURL SCHAEFFER AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0615 substitué par Me Frédérique ROUSSEL-STHAL, avocat au barreau de PARIS

SCI MIEL
[Adresse 1]
[Adresse 1]

Représentée par Me Wilfried SCHAEFFER de la SELEURL SCHAEFFER AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0615 substitué par Me Frédérique ROUSSEL-STHAL, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS

Monsieur [J] [Y]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

Représenté par Me Françoise BRUNET-LEVINE de la SELARL BRUNET-LEVINE & LE BRAS, avocat au barreau de l'ESSONNE

Madame [V] [Z] épouse [Y]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

Représentée par Me Françoise BRUNET-LEVINE de la SELARL BRUNET-LEVINE & LE BRAS, avocat au barreau de l'ESSONNE

SARL JPMD IMMOBILIER
[Adresse 3]
[Adresse 3]

n'a pas constitué avocat

SOCIÉTÉ CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE PARIS ET D'ILE-DE-FRANCE,
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
[Adresse 4]
[Adresse 4]

Représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050
Ayant pour avocat plaidant Me Eric GILLERON, avocat au barreau de PARIS

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 mai 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Claude Creton, président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Claude Creton, président
Mme Muriel Page, conseillère
Mme Monique Chaulet, conseillère

Greffier, lors des débats : M. Grégoire Grospellier

Arrêt :
- réputé contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Claude Creton,président et par Grégoire Grospellier, greffier présent lors de la mise à disposition.

*****
Par acte du 2 août 2019, avec le concours de la société JPMD immobilier, agent immobilier, la SCI Miel a conclu avec M. et Mme [Y] une promesse synallagmatique de vente au prix de 117 000 euros portant sur les lots no 3028, 3169 et 3189 dont elle est propriétaire dans l'ensemble immobilier situé à [Adresse 5].

La promesse stipule que "les travaux votés lors de l'assemblée générale du 20 juin 2019 avant la date de signature de l'acte authentique restent à l'entière et pleine charge de l'acquéreur mais à concurrence de la somme maximale de 19 202,43 euros. L'acquéreur déclare avoir spécialement pris connaissance du procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires en date du 20 juin 2019, aux termes de laquelle ont été votés les travaux du plan de sauvegarde pour une quote-part de 44 237,05 euros ramenés à 19 202,43 euros maximum en incluant les subventions au bénéfice de l'acquéreur".

Ces travaux, d'un montant de 2 429 346,20 euros, devaient être en partie financés par des subventions estimées à un montant de 1 641 981,54 euros.

La SCI Miel ayant refusé de signer l'acte de vente, M. et Mme [Y], qui ont obtenu de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Paris et d'Île-de-France (le Crédit agricole) le prêt destiné à financer cette acquisition, ont assigné la SCI Miel et sa gérante, Mme [I], la société JPMD immobilier et le Crédit agricole aux fins de :
- voir ordonner sous astreinte à la SCI Miel de signer l'acte de vente ;
- dire qu'à défaut le jugement vaudra acte de vente ;
- déclarer le jugement commun à la société JMPD immobilier et au Crédit agricole ;
- dire que l'indemnité d'immobilisation de 5 000 euros séquestrée entre les mains de la société JMPD immobilier sera affectée au paiement du prix de vente ;
- condamner la SCI Miel à leur payer la somme de 37 000 euros à titre de dommages-intérêts pour refus abusif, la somme de 11 700 euros au titre de la clause pénale et la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour s'opposer à ces demandes, la SCI Miel et Mme [I] se sont fondées sur les dispositions de la théorie de l'imprévision de l'article 1995 du code civil et font valoir qu'ils n'ont eu connaissance qu'après la signature de la promesse de vente du fait que la SCI Miel ne pourrait bénéficier des subventions finançant les travaux votés par l'assemblée générale des copropriétaires alors qu'il était convenu entre les parties que le vendeur ne supporterait aucune charge de copropriété relative au bien vendu.

Par jugement du 20 novembre 2020, le tribunal judiciaire d'Evry a :
- rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée du défaut de publication de l'assignation au service de la publicité foncière ;
- ordonné à la SCI Miel de procéder à la régularisation définitive de la vente dans un délai de trois mois à compter de la signification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
- dit qu'en cas de refus de la SCI Miel de s'exécuter, constaté par un procès-verbal de carence établi par le notaire, le jugement vaudra acte de vente et sera publié au service de la publicité foncière ;
- déclaré le jugement opposable à la société JMPD immobilier et au Crédit agricole ;
- condamné la société JMPD immobilier à restituer la somme de 5 000 euros séquestrée entre ses mains auprès de Mme [F], notaire ;
- condamné la SCI Miel à payer à M. et Mme [Y] la somme de 5 520 euros au titre de l'indemnisation de la perte de chance de percevoir des loyers ;
- condamné la SCI Miel à payer à M. et Mme [Y] la somme de 1 000 euros au titre de la clause pénale ;
- ordonné la compensation des créances réciproques de sorte que le prix de vente devant être réglé à la SCI Miel sera diminué de la somme de 6 620 euros ;
- condamné la SCI Miel à payer la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu qu'avant la conclusion de la promesse, la SCI Miel ne disposait d'aucune certitude sur les conditions d'attribution des subventions et sur leur montant, le procès-verbal de l'assemblée générale du 20 juin 2019 faisant état d'estimations et évoquant une pluralité d'organismes de financement et de types de subventions.

La SCI Miel et Mme [I] ont interjeté appel de ce jugement.

Ils font valoir que selon les termes de l'assemblée générale du 20 juin 2019, le principe de l'acquisition des subventions était acquis et que c'est dans ces conditions que la promesse de vente, conclue sur la base d'un prix tenant compte de cette situation, a prévu que M. et Mme [Y] devaient supporter sa quote-part du coût des travaux, soit la somme de 19 202,43 euros après déduction du montant de la subvention.

Ils soutiennent que la remise en cause de cette subvention, qui est certaine, constitue une circonstance établissant l'imprévision ou la réalisation d'une condition résolutoire implicitement convenue entre les parties.

M. et Mme [Y] ont formé un appel incident et sollicitent la condamnation de la SCI Miel à leur payer :
- la somme de 5 365,80 euros au titre du remboursement du prêt ;
- la somme de 51 300 euros au titre de la perte de loyers ;
- la somme de 3 540,15 euros au titre des frais de travaux engagés ;
- la somme de 11 700 euros au titre de la clause pénale.

Ils réclament en outre une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Crédit agricole sollicite la condamnation de la partie succombante à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE,

1 - Sur l'appel de la SCI Miel et de Mme [I]

Attendu que l'article 1995 du code civil, qui ne contient aucune restriction quant au champ d'application de l'imprévision, s'applique à tous les contrats qu'ils soient à exécution instantanée ou à exécution successive ; qu'il s'applique aussi bien à un avant-contrat qu'au contrat définitif ;

Attendu qu'en prévoyant pour son application "un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat", ce texte n'envisage que la situation dans laquelle un événement survenu postérieurement à la conclusion du contrat rend son exécution excessivement onéreuse ; qu'il ne s'applique pas lorsque l'événement survenu avant la conclusion du contrat ne s'est révélé que postérieurement à cette conclusion ; qu'en l'espèce, la non-éligibilité de la SCI Miel aux subventions finançant les travaux réalisés par la copropriété résulte d'une situation acquise avant la conclusion du contrat et non, par exemple, d'un changement de la réglementation ; qu'en conséquence, la SCI Miel et Mme [I] ne sont pas fondés à agir sur ce fondement aux fins de résolution de la promesse de vente ;

Attendu qu'il ne peut être admis qu'a été implicitement convenue une condition résolutoire tenant à l'obtention par la SCI Miel de subventions pour financer les travaux réalisés par la copropriété ; qu'en effet, s'il appartenait à la société JMPD immobilier, tenue d'une obligation de conseil, de conseiller à sa mandante de prévoir une telle condition, sa stipulation suppose qu'elle ait été acceptée par l'ensemble des parties ; que le consentement de M. et Mme [Y] à la stipulation d'une telle condition n'est pas justifié ;

Attendu qu'il convient de débouter la SCI Miel et Mme [I] de leur demande tendant et de confirmer le jugement en ce qu'il ordonne à la SCI Miel de procéder à la régularisation de l'acte de vente devant notaire et en ses dispositions subséquentes ;

2 - Sur l'appel incident de M. et Mme [Y]

Attendu que M. et Mme [Y] invoque d'abord un préjudice financier pour avoir commencé à rembourser les échéances du prêt qu'ils ont contracté pour financer l' acquisition du bien litigieux ; que toutefois le remboursement de ce prêt ne constitue pas un préjudice indemnisable ;

Attendu qu'ils réclament ensuite l'indemnisation de la perte de loyers ; qu'ainsi que l'a retenu le tribunal, ce préjudice est constitué par la seule perte de chance de percevoir les loyers escomptés qui a été justement évaluée à la somme de 5 520 euros ;

Attendu que la demande d'indemnisation correspondant aux acomptes réglés au titre des travaux d'aménagement du bien qu'ils ont commandés ne constitue pas un préjudice indemnisable, ces acomptes devant venir en déduction du coût de ces travaux destinés à l'amélioration de l'appartement litigieux ;

Attendu enfin, qu'il y a lieu d'allouer à M. et Mme [Y] la somme de 1 000 euros au titre de la clause pénale contenue dans la promesse de vente après réduction de son montant qui apparaît manifestement excessif au regard du préjudice effectivement subi ; qu'en effet, M. et Mme [Y] ayant acquis l'appartement en vue de sa location, le seul préjudice qu'ils subissent est constitué par la perte de chance de percevoir les loyers dont l'indemnisation a été accordée ;

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement,

Confirme le jugement sauf en ses dispositions relatives à l'astreinte assortissant la condamnation de la SCI Miel à procéder à la régularisation de l'acte de vente devant notaire ;

Statuant à nouveau de ce chef,

Dit n'y avoir lieu à assortir cette condamnation d'une astreinte ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les différentes demandes ;

Condamne in solidum la SCI Miel et Mme [I] aux dépens d'appel

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 21/00465
Date de la décision : 18/06/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-06-18;21.00465 ?
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