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02/03/2021 | FRANCE | N°18/28723

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 02 mars 2021, 18/28723


REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 8

anciennement Pôle 2 - Chambre 5



ARRÊT DU 02 MARS 2021



(n° , 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/28723 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B67FW



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Octobre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/05368





APPELANTE



SA GMF ASSURANCES agissant poursuites et diligences

de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 398 972 901



Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la...

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8

anciennement Pôle 2 - Chambre 5

ARRÊT DU 02 MARS 2021

(n° , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/28723 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B67FW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Octobre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/05368

APPELANTE

SA GMF ASSURANCES agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 398 972 901

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Assistée par Me Aude GERIGNY, de l'AIARPI ELEOM AVOCATS intervenant par la SCP ROZE SALLELES PUECH GERIGNY DELL'OVA SMALLWOOD AUSSEDAT, avocat au barreau de Montpellier, avocat plaidant

INTIMÉES

Société LIBERTY SEGUROS V/AUX DROITS DE LA COMPAGNIE ERCOS ERCOS

[Adresse 6]

[Localité 3]

Organisme BUREAU CENTRAL FRANCAIS

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentées par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Assistées par Me Jean-Philippe DOMMÉE de la SCP CASCIO ORTAL DOMMÉE MARC, avocat au barreau de Montpellier, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Janvier 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre

M. Christian BYK, Conseiller

M. Julien SENEL, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Joëlle COULMANCE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre et par Joëlle COULMANCE, Greffière présente lors du prononcé.

*******

Le 11 avril 1987, une collision s'est produite en FRANCE entre le véhicule conduit par M. [H] [E] [N] (auteur responsable), de nationalité espagnole, assuré auprès de la société ERCOS, aux droits de laquelle vient la société LIBERTY SEGUROS, et celui conduit par [R] [U], assuré auprès de la GMF, accident au cours duquel [F] [U], passagère transportée alors âgée de 11 mois, a été très grièvement blessée.

Plusieurs expertises médicales réalisées sur la personne d'[F] [U] ont conclu à une tétraplégie de type C6-C7.

Le 26 octobre 1988, M. [E] [N] a été condamné par le tribunal correctionnel de PERPIGNAN pour blessures involontaires ayant entraîné une infirmité permanente sur la personne d'[F] [U].

Par jugement du 2 décembre 1993, le tribunal de grande instance de PERPIGNAN a :

- condamné in solidum la société ERCOS, le BCF et la GMF à indemniser intégralement le préjudice subi tant par [F] [U] que ses parents,

- dit que la société ERCOS et le BCF sont tenus d'indemniser dans la limite de 5 millions de francs pour chaque victime, en application de l'article R 211-7 du code des assurances,

- condamné in solidum ERCOS, le BCF et la GMF à indemniser le préjudice des parents [U] à hauteur de 299.957,44 francs, outre 30.000 francs au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à payer par provision pour le préjudice d'[F] [U] :

- 1.575.000 francs, soit 240.107,20 euros au titre de l'IPP, l'ITT, le PD, le PE, le PA,

- 298.045 francs, soit 45.436,67 euros arrêté au 30/09/93 ainsi qu'une rente annuelle au capital de 118.000 francs, soit 17.988,98 euros courant à compter du 01/10/93, payable le premier janvier et le premier juillet de chaque année,

- 394.775,20 francs, soit 60.183,09 euros au titre des débours exposés à ce jour au nom de l'enfant, le tout sous déduction des provisions déjà versées.

Il a condamné en outre in solidum la GMF et le BCF à payer à la caisse autonome de sécurité sociale SNCF la somme de 435.624,96 francs déduction faite des provisions déjà versées.

Par acte d'huissier délivré le 22 novembre 2006, [F] [U], devenue majeure, a saisi au fond aux fins de liquidation de son préjudice le tribunal de grande instance de PERPIGNAN, lequel par jugement du 10 mars 2009, a condamné in solidum la GMF, la compagnie ERCOS, M. [E] [N] et le BCF, les trois derniers dans la limite de 762.245,09 euros (cinq millions de francs) à verser à [F] [U] et à la caisse de prévoyance et de retraite de la SNCF diverses sommes en capital ou sous forme de rente viagère en réparation de ses différents postes de préjudice.

Statuant sur l'appel interjeté par la GMF à l'encontre de cette décision, la cour d'appel de MONTPELLIER, par un arrêt du 23 mars 2010, a, entre autres dispositions :

- prononcé la nullité de l'assignation délivrée à l'encontre de M. [E] [N] (ce dernier n'ayant pas été valablement assigné devant le tribunal de grande instance de PERPIGNAN) et dit en conséquence que le jugement du 10 mars 2009 ne lui est pas opposable ;

- au fond condamné in solidum la société GMF, la compagnie LIBERTY SEGUROS venue aux droits de la compagnie ERCOS et le BCF, ces deux derniers dans la limite de 762.245,09 euros à indemniser le préjudice d'[F] [U], en infirmant sur les montant alloués.

La GMF a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cette décision qui a fait l'objet d'une décision de non-admission.

De son côté, [F] [U] a également formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cet arrêt sur les conditions d'application de l'article L 211-13 du code des assurances et le calcul de la tierce personne. Par arrêt du 12 mai 2011, elle a obtenu une cassation partielle, avec renvoi devant la cour d'appel de TOULOUSE.

Par arrêt du 14 mai 2013, la cour d'appel de TOULOUSE a confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné in solidum la GMF, la compagnie LIBERTY SEGUROS venant aux droits de la société ERCOS et le BCF, ces deux derniers dans la limite de 762.245,09 euros à verser à [F] [U] la somme de 60.000 euros au titre du préjudice d'établissement et a infirmé le jugement de première instance sur le calcul de la tierce personne et l'application des règles du doublement des intérêts au taux légal.

Le pourvoi formé sur cette décision par la société LIBERTY SEGUROS a été rejeté par décision de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 8 juin 2017.

M. [E] [N], mis hors de cause par la décision de la cour d'appel de MONTPELLIER du 23 mars 2010, a interjeté appel le 12 mars 2010 du jugement du 2 décembre 1993 contestant la limite de garantie de la compagnie LIBERTY SEGUROS et du BCF à la somme de 5.000.000 de francs et la GMF a formé appel incident.

Il a également déposé plainte auprès du procureur de la République de MONTPELLIER puis s'est constitué partie civile devant le juge d'instruction pour des faits de faux, usage de faux et tentative d'escroquerie au jugement, faisant notamment valoir qu'une signature contrefaite avait été apposée sur le contrat conclu avec la compagnie d'assurance qui a été produit dans le cadre d'une procédure civile. Une ordonnance de non-lieu rendue le 28 septembre 2015 a été confirmée par la chambre de l'instruction le 17 décembre 2015.

Par arrêt du 4 novembre 2014, la cour d'appel de MONTPELLIER a, notamment :

-infirmé le jugement déféré (du 2 décembre 1993) en ce qu'il a dit que la compagnie ERCOS, devenue LIBERTY SEGUROS, et le BCF étaient tenus à indemnisation des consorts [U] dans la limite de 762.245,09 euros pour chaque victime ;

-statuant à nouveau sur ce chef infirmé, y ajoutant, dit que la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF seront tenus in solidum à garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987.

Le BCF et la compagnie LIBERTY SEGUROS ont formé un pourvoi que la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a rejeté par arrêt du 13 décembre 2018.

Par acte d'huissier du 25 mars 2014, la GMF a assigné le BCF et la société LIBERTY SEGUROS devant le tribunal de grande instance de PARIS aux fins de les voir condamner à rembourser les sommes avancées à la victime, dans le cadre de son recours subrogatoire.

Par acte du 22 avril 2014, la société LIBERTY SEGUROS et le BCF ont eux-mêmes assigné la GMF devant le même tribunal afin de la voir condamner à la prise en charge de toutes les sommes mises à leur charge en exécution de l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER du 23 mars 2010 et de l'arrêt rendu par la cour d'appel de TOULOUSE du 14 mai 2013 allant au-delà du plafond de 762.195 euros.

Suivant ordonnance du juge de la mise en état du 29 mars 2016, le BCF et la société LIBERTY SEGUROS ont été déboutés de leurs demandes de retrait du rôle ou de sursis à statuer dans l'attente de la décision définitive sur l'arrêt rendu par la cour d'appel de MONTPELLIER faisant l'objet d'un pourvoi en cassation et de la décision définitive sur l'arrêt rendu par la cour d'appel de TOULOUSE du 14 mai 2013 faisant également l'objet d'un pourvoi en cassation.

Par jugement du 30 octobre 2018, le tribunal de grande instance de PARIS a:

- déclaré recevable le recours subrogatoire de la GMF à l'encontre de la compagnie d'assurance LIBERTY SEGUROS, venant aux droits de la compagnie ERCOS, et du BCF concernant le versement des indemnités versées à [F] [U] en réparation de son préjudice corporel ;

- déclaré irrecevable la GMF en ses demandes visant à condamner la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF pour une somme supérieure au plafond de 762.245,09 euros ;

- constaté que la LIBERTY SEGUROS justifie avoir versé à la GMF une somme de 762.245,09 euros ;

- débouté la GMF de sa demande de condamnation de la LIBERTY SEGUROS venant aux droits de la compagnie ERCOS et du BCF à lui rembourser la somme de 7.356.351,14 euros ;

- débouté la GMF de sa demande de dommages et intérêts ;

- dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de LIBERTY SEGUROS et du BCF visant à condamner la GMF à lui payer toutes les sommes mises éventuellement à leur charge au-delà de la limite de 762.195 euros ;

- condamné la GMF aux dépens et à payer à LIBERTY SEGUROS et au BCF la somme totale de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, cette somme avec intérêts au taux légal à compter du jour de la décision ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration électronique au greffe du 21 décembre 2018, la GMF a interjeté appel du jugement.

Aux termes de ses dernières écritures (n°2) notifiées par voie électronique le 6 septembre 2019, la GMF demande à la cour, au visa de l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER du 4/11/14, de l'article 1355 du code civil, des articles L 121-12 et L 172-29 du code des assurances, de l'article 1251-3° du code civil, de la loi BADINTER du 05/07/85, et notamment en ses articles 1 à 6, de l'article 1250 1° du code civil, de l'article 1240 du code civil, de :

- CONFIRMER le jugement du 30/10/18 en ce qu'il déclare recevable le recours subrogatoire de la GMF à l'encontre de la compagnie LIBERTY SEGUROS, venant aux droits de ERCOS, et du BCF concernant le versement des indemnités versées à [F] [U] en réparation du préjudice corporel ;

- REFORMER le jugement en ce qu'il :

- a déclaré irrecevable la GMF en ses demandes visant à condamner la LIBERTY SEGUROS et le BCF pour une somme supérieure au plafond de 762.245,09 euros ;

- l'a déboutée de sa demande de condamnation de la LIBERTY SEGUROS et du BCF ayant atteint le plafond de garantie fixé ;

- s'est déclaré non saisi des demandes formulées au titre du recours entre co-impliqués ;

- l'a déboutée de sa demande de condamnation de LIBERTY SEGUROS et du BCF à lui rembourser les sommes versées sur le fondement de l'article 1240 du code civil ;

- l'a déboutée de sa demande de condamnation de LIBERTY SEGUROS et du BCF à lui rembourser la somme de 7.356.351,14 euros, avec intérêts, et intérêts doublés, et intérêts capitalisés ;

- n'a pas fait droit à sa demande de réactualisation ;

- l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;

- l'a condamnée à un article 700 et déboutée de ses demandes à ce titre, et plus généralement en toutes ses dispositions lui causant grief.

Ce faisant,

- dire recevable et bien fondé le recours subrogatoire de la GMF à l'encontre de LIBERTY SEGUROS venant aux droits de la compagnie ERCOS et du BCF ;

A TITRE PRINCIPAL,

Vu l'article L121-12 du code des assurances, la loi Badinter du 05/07/85 et notamment ses articles 1 à 6, le recours entre co-impliqués, l'article 1251-3° du code civil, l'article 1250-1° du code civil,

- rejeter le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée attachée aux arrêts de la cour d'appel de MONTPELLIER du 23/03/10 et de la cour d'appel de TOULOUSE du 14/05/13 ;

- dire que l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER du 4/11/14 qui « dit que la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF seront tenus in solidum à garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice de Mme [F] [U] et des époux [U] » a autorité de la chose jugée au sens de l'article 1355 du code civil ;

- condamner in solidum la compagnie LIBERTY SEGUROS, venant aux droits de la compagnie ERCOS, et le BCF à rembourser à la GMF la somme de 7.562.275,93 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance du 18/03/14, au titre du capital et du doublement des intérêts légaux et des rentes échues jusqu'au 31/03/19, au bénéfice de Mme [F] [U], de ses parents, et de la Caisse de sécurité sociale, outre la somme de 5.048.144,95 euros représentant le capital représentatif des rentes versées au 31/12/18 ;

- déduire la provision versée par LIBERTY SEGUROS à hauteur de 762.745 euros ;

- dire n'y avoir lieu à déduire la somme de 145.877,35 euros invoquée par LIBERTY SEGUROS et le BCF, cette somme correspondant au doublement des intérêts légaux pour la période antérieure à 1991, période où LIBERTY SEGUROS et le BCF sont seuls condamnés à régler ces intérêts ;

- dire que ne pourra être déduit que le règlement de juillet 2017, à savoir 944.415 euros (et non 994.415,36 €) et 1.568.004,60 euros ;

- réactualiser la condamnation au jour du jugement à intervenir à compter du 1/10/17 au titre des rentes trimestrielles de 30.603,82 euros pour la rente tierce personne et 3.489,64 euros pour la rente PGPF, tenant le virement automatique que la GMF justifie avoir mis en place ;

- ordonner l'anatocisme des intérêts et dire qu'en application de l'article 1154 du code civil, les intérêts échus depuis plus d'un an produiront eux-mêmes intérêts ;

- condamner in solidum LIBERTY SEGUROS et le BCF à payer à la GMF la somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE,

Vu l'article 1240 du code civil,

- dire que la compagnie espagnole s'est rendue coupable d'un comportement fautif consistant à cacher sa garantie illimitée, provoquant par la même le jugement du tribunal de grande instance de PERPIGNAN réformé par l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER du 4/11/14, ainsi que les arrêts des cours d'appel de MONTPELLIER du 23/03/10 et de TOULOUSE du 14/03/13 ;

Si, par impossible le juge de céans retenait le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée, dire que c'est le comportement fautif de LIBERTY SEGUROS qui est la cause de la condamnation de la GMF à indemniser seule l'entier préjudice des consorts [U], victimes ;

- condamner in solidum LIBERTY SEGUROS et le BCF à rembourser à la GMF l'intégralité des sommes versées par cette dernière en exécution des décisions de justice ayant liquidé le préjudice des consorts [U], de ses parents et de la caisse de sécurité sociale ;

Par conséquent,

- condamner in solidum la compagnie LIBERTY SEGUROS venant aux droits de la compagnie ERCOS et le BCF à rembourser à la GMF la somme de 7.562.275,93 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance du 18/03/14, au titre du capital et du doublement des intérêts légaux et des rentes échues jusqu'au 31/03/19, au bénéfice de Mlle [U], de ses parents, et de la Caisse de sécurité sociale, outre la somme de 5 048 144,95 euros représentant le capital représentatif des rentes versées au 31/12/18 ;

- déduire la provision versée par LIBERTY SEGUROS à hauteur de 762.745 euros ;

- dire n'y avoir lieu à déduire la somme de 145 877,35 euros invoquée par LIBERTY SEGUROS et le BCF, cette somme correspondant au doublement des intérêts légaux pour la période antérieure à 1991, période où LIBERTY SEGUROS et le BCF sont seuls condamnés à régler ces intérêts ;

- dire que ne pourra être déduit que le règlement de juillet 2017, à savoir 944.415 euros (et non 994.415,36 euros) et 1.568.004,60 euros ;

- réactualiser la condamnation au jour du jugement à intervenir à compter du 31/03/19 au titre des rentes trimestrielles de 30.909,82 euros pour la rente tierce personne et 3.524,54 euros pour la rente PGPF, tenant le virement automatique que la GMF justifie avoir mis en place ;

- ordonner l'anatocisme des intérêts et dire qu'en application de l'article 1154 du code civil, les intérêts échus depuis plus d'un an produiront eux-mêmes intérêts ;

- condamner in solidum LIBERTY SEGUROS et le BCF à payer à la GMF la somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

En tout état de cause,

- rejeter l'appel incident formé par LIBERTY SEGUROS et le BCF ;

- rejeter purement et simplement le recours formé par ces derniers à l'encontre de la GMF ;

-condamner in solidum la compagnie LIBERTY SEGUROS, venant aux droits de la compagnie ERCOS, et le BCF à payer à la GMF la somme de 30.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance ainsi qu'aux entiers de première instance ;

Y ajoutant,

- condamner in solidum la compagnie LIBERTY SEGUROS, venant aux droits de la compagnie ERCOS, et le BCF à payer à la GMF la somme de 30.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ainsi qu'aux entiers de l'appel.

Aux termes de leurs dernières écritures (n°2) notifiées par voie électronique le 13 décembre 2019, les intimés demandent à la cour, au visa de l'article L 121-12 du code des assurances, de l'article 1250 1° du code civil, de l'article 1351 du code civil et l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt rendu par la cour d'appel de MONTPELLIER du 23 mars 2010 et à l'arrêt rendu par la cour d'appel de TOULOUSE du 14 mai 2013, du principe de concentration des moyens et du principe de sécurité juridique, de l'article 1240 du code civil, de l'article 1103 du code civil et de l'article 2226 du code civil, de :

A titre principal :

- CONFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté la GMF de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de LIBERTY SEGUROS et du BCF ;

- dire et juger irrecevable et infondée la GMF dans ses demandes à l'encontre de LIBERTY SEGUROS et du BCF aux motifs que :

- le recours subrogatoire au titre du principal ainsi que des rentes, se heurte à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt rendu par la cour d'appel de MONTPELLIER du 23 mars 2010 et par l'arrêt rendu par la cour d'appel de TOULOUSE du 14 mai 2013 qui ont limité toute condamnation de LIBERTY SEGUROS et du BCF au bénéfice de Mlle [F] [U] à 762.245 euros ;

- la demande de condamnation aux sommes payées par la GMF au titre du doublement de l'intérêt légal (DIL) se heurte à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt rendu par la cour d'appel de MONTPELLIER le 23 mars 2010 et par l'arrêt rendu par la cour d'appel de TOULOUSE le 14 mai 2013 ;

-la demande fondée sur le fondement du recours entre co-impliqués est nouvelle en cause d'appel, se heurte à l'autorité de la chose jugée, au principe de concentration des moyens, et est de surplus irrecevable pour cause de prescription ;

-la demande fondée sur l'article 1240 du code civil est infondée ;

- débouter en conséquence la GMF de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la GMF au paiement de la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

A titre subsidiaire : si la cour d'appel infirmait le jugement sur la recevabilité de l'action et son bien-fondé,

- limiter toute éventuelle condamnation au titre du principal, à la moitié des réclamations en l'état d'une condamnation in solidum de LIBERTY SEGUROS et de la GMF ;

- limiter toute éventuelle condamnation aux sommes payées par la GMF au titre des dommages et intérêts et rentes à hauteur de 3.768.128,19 euros à l'exclusion des sommes payées au titre du DIL, ainsi qu'à l'exclusion des rentes capitalisées non payées à la victime ;

- dire et juger que toute éventuelle condamnation au titre des dommages et intérêts et rentes se fera sous déduction de la somme de 1.756.660,30 euros (762.245 + 944.415) ;

- dire et juger à titre très subsidiaire que toute éventuelle condamnation au titre du DIL se fera sous déduction de la somme de 145.877,35 euros déjà payée au titre du DIL dû postérieurement au 23 juillet 1991, et de la somme de 1.568.004,60 euros déjà payée au titre du DIL dû à Mlle [U] sur la période postérieure au 23 juillet 2011, soit sous déduction de la somme totale de 1.713 .881,90 euros ;

- dire et juger que toute éventuelle condamnation sera prononcée en deniers et quittances ;

En toutes hypothèses :

Vu l'article 1101 et suivants du code civil,

-INFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté LIBERTY SEGUROS et le BCF de leur action à l'encontre de la GMF ;

- condamner la GMF à payer à LIBERTY SEGUROS et au BCF toutes les sommes mises éventuellement à leur charge au-delà de la limite de 762.195 euros en l'état de son engagement à prendre « en charge les conséquences financières de la décision rendue devant la cour d'appel de MONTPELLIER» tel qu'indiqué dans son courrier du 23 avril 2009 ;

- condamner la GMF à payer à LIBERTY SEGUROS et au BCF la somme de 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se reporter à leurs conclusions notifiées ci-dessus conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 décembre 2020.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le recours subrogatoire de la GMF

La GMF sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il l'a déclaré recevable à agir à l'encontre de la compagnie LIBERTY SEGUROS, venant aux droits de ERCOS, assureur du tiers responsable de l'accident, ainsi que du BCF, sur le fondement de la subrogation légale des articles L121-12 du code des assurances et de l'article 1251-3° du code civil (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10/02/16) ainsi que sur les droits et actions de son assuré sur le fondement de la loi du 05/07/85, concernant les indemnités versées à [F] [U] en réparation de son préjudice corporel.

Les intimées n'ayant pas formé appel incident sur ce point, le jugement est d'ores et déjà définitif sans qu'il soit besoin de le confirmer.

Sur l'irrecevabilité au titre de l'autorité de la chose jugée attachée aux arrêts de la cour d'appel de MONTPELLIER du 23 mars 2010 et de la cour d'appel de TOULOUSE du 14 mars 2013

Concernant l'indemnisation de la victime

La GMF sollicite, dans le cadre de son recours subrogatoire, l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déclarée irrecevable en ses demandes visant à condamner la compagnie LIBERTY SEGUROS, assureur de l'auteur responsable, et le BCF pour une somme supérieure au plafond de 762.245,09 euros.

Elle réclame leur condamnation in solidum à lui rembourser l'intégralité des sommes versées à son assurée, y compris pour une somme supérieure au plafond de 762.245,09 euros faisant essentiellement valoir que :

- la seule décision ayant tranché la garantie illimitée de LIBERTY SEGUROS et du BCF est le jugement du tribunal de grande instance de PERPIGNAN du 2 décembre 1993 ;

- les arrêts des cours d'appel de MONTPELLIER (23/03/10) et TOULOUSE (14/05/13) n'ont pas autorité de chose jugée dès lors qu'ils n'ont pas tranché le point relatif à la garantie illimitée et n'ont fait que reprendre les termes du jugement de 1993, considéré par tous comme définitif; le débat et les demandes qui ont eu lieu entre les consorts [U] et la GMF ne concernaient que la liquidation du préjudice et la GMF ne discutait pas la question de la limitation de la garantie de LIBERTY SEGUROS ;

- en tout état de cause, l'autorité de chose jugée ne peut être opposée lorsque des évènements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice ; si la GMF n'a pas demandé devant ces cours la condamnation de LIBERTY SEGUROS à régler l'intégralité du préjudice, c'est qu'elle croyait que le jugement du 2 décembre 1993 était définitif ; ce n'est qu'après plaidoirie devant la cour d'appel de MONTPELLIER ayant abouti à l'arrêt de 2010 qu'elle a appris que le jugement n'avait pas été signifié à M. [E] et que LIBERTY SEGUROS avait faussement invoqué un contrat signé limitant sa garantie ; c'est ainsi que suite à l'appel de M. [E], elle a formé appel incident et s'est jointe à la procédure ;

- le jugement du tribunal de PERPIGNAN de 1993 a ainsi été réformé par l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER du 4 novembre 2014 qui a jugé que :'la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF seront tenus in solidum à garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice d'[F] [U] et de ses parents' ; cet arrêt est devenu définitif, le pourvoi formé tant par le BCF que par LIBERTY SEGUROS ayant été rejeté par arrêt de la Cour de cassation du 13 décembre 2018 ;.

La compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF sollicitent la confirmation du jugement querellé faisant essentiellement valoir que :

- les demandes de la GMF sont irrecevables en application du principe de concentration des moyens et de l'article 480 du code de procédure civile qui consacre le principe de l'autorité de la chose jugée garant d'une sécurité juridique elle-même consacrée par le droit européen ;

- les arrêts de la cour d'appel de MONTPELLIER (23/03/10) et de celle de TOULOUSE (14/05/13) ont bien tranché la question de la limite de garantie et il existe une identité d'objet, de cause et de parties ; l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER (23/03/10) qui a condamné la compagnie LIBERTY et le BCF dans la limite de 762.245,09 euros est définitif en l'état notamment de la décision de non-admission de la Cour de cassation du 7 avril 2011 l'objet même de ce pourvoi étant la contestation par la GMF de l'application d'une limite à la condamnation de LIBERTY SEGUROS et du B.C.F; l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE (14/05/13) a également autorité de chose jugée, dès lors que Mme [F] [U] sollicitait toujours la condamnation de LIBERTY SEGUROS et du BCF à l'ensemble de ses prétentions in solidum avec la GMF .

- en réplique aux arguments de la GMF, ils soutiennent qu'il appartenait à la GMF de s'assurer du caractère définitif du jugement de 1993 et que l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER du 4/11/14 ne constitue pas un fait ou une situation juridique nouvelle mais une décision faisant droit à une argumentation jamais soulevée jusqu'alors.

Sur ce,

L'article 1355 du code civil dispose : « L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité »

L'autorité de la chose jugée exige donc que trois conditions soient réunies : identité de parties, identité de la chose demandée, identité de la cause.

Il résulte des décisions de la cour d'appel de MONTPELLIER du 23/03/10 et de la cour d'appel de TOULOUSE du 14/05/13 que la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF ont été condamnés avec la GMF à indemniser [F] [U], dans la limite de 762.245,09 euros pour les deux derniers.

Le jugement dont appel a relevé à juste titre : que ces décisions étaient définitives, le pourvoi en cassation formé à leur encontre par la GMF dont l'objet était de contester l'application d'une limite à la condamnation de LIBERTY SEGUROS et du BCF, ayant fait l'objet d'une décision de non admission ; qu'il résulte en effet des moyens développés devant le Cour de cassation que la GMF considérait qu'ayant décidé d'une limitation de garantie, la cour d'appel avait violé les articles 480 du code de procédure civile et 1351 du code civil ; que selon l'article 480 du code de procédure civile, l'autorité de la chose jugée est attachée au dispositif du jugement relativement à la contestation qu'il tranche, et que dès lors il est inopérant de soulever que certains moyens n'ont pas été tranchés, alors même que le principe d'une garantie limitée des assureurs a été retenu dans les motifs et dans le dispositif des arrêts de la cour d'appel de MONTPELLIER et de TOULOUSE ; que ces dispositifs ont bien autorité de la chose jugée concernant les points qui ont été tranchés, en ce compris le principe de la limitation de garantie, les demandes de la GMF formées ayant le même objet, la même cause et concernant les mêmes parties.

Cependant, l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice.

La cour relève à cet égard que :

* les arrêts de la cour de MONTPELLIER du 23/03/10 et de TOULOUSE du 14/05/13 ont été rendus alors que tant les juridictions que l'ensemble des parties croyaient que le jugement du tribunal de grande instance de PERPIGNAN du 2/12/93 était devenu définitif ;

* or, le 12 mars 2010, alors que la procédure devant la cour de MONTPELLIER était en cours de délibéré, M. [E] [N] a interjeté appel de ce jugement qui ne lui avait pas été signifié, a contesté le caractère limité de la garantie de LIBERTY SEGUROS et du BCF et déposé plainte pour faux, usage de faux et escroquerie au jugement ; la GMF a alors elle-même formé appel incident et sollicité la réformation du jugement pour voir dire que la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF seront tenus à une garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987.

C'est ainsi que par arrêt du 4 novembre 2014, la cour d'appel de MONTPELLIER, a :

- rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la compagnie LIBERTY SEGUROS et par le BCF et tirées de la prescription biennale ou décennale de l'action engagée par M. [E] [N] ;

Statuant à nouveau sur ce chef infirmé et y ajoutant,

- dit que la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF seront tenus in solidum à garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice de Mme [F] [U] et des époux [U] ;

- condamné la compagnie LIBERTY SEGUROS à payer diverses sommes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à M. [E] [N], à la GMF et aux consorts [U].

La compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF ont formé un pourvoi en cassation.

L'examen de ce pourvoi a dans un premier temps été suspendu par ordonnance de radiation rendue le 5 novembre 2015, en raison de l'absence totale d'exécution par LIBERTY SEGUROS et le BCF des causes de l'arrêt attaqué, même dans la limite des sommes non contestées.

Puis la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par LIBERTY SEGUROS et le BCF, par arrêt du 13 décembre 2018 ainsi motivé :

' Ayant relevé, d'une part, que la police d'assurance contractée par M. [E] [N] auprès de la société LIBERTY SEGUROS prévoyait une couverture illimitée des préjudices engendrés par un accident de la circulation, qu'aucune clause ne spécifiait expressément une limitation territoriale de l'assurance au seul territoire espagnol et que l'article 28 des conditions générales, intitulé 'Objet de la couverture' spécifiait que 'l'assureur garantit avec le champ et jusqu'aux limites stipulées dans les conditions particulières de cette police le paiement des indemnités..', d'autre part, que l'article 22 des conditions générales prévoyait que, lorsque le sinistre se produira à l'étranger, dans la principauté d'ANDORRE ou tout autre pays stipulé par le ministère de l'économie et des finances, par application du traité d'adhésion de l'Espagne à la CEE, 'la garantie sera accordée dans les limites et conditions minimales prévues par la législation du pays de survenance du sinistre', faisant ainsi ressortir l'ambiguïté née du rapprochement de ces clauses, c'est sans méconnaître les stipulations de la police qu'elle a souverainement interprétées, que la cour d'appel, après avoir écarté la clause limitative par application du droit espagnol, a retenu que la garantie de l'assureur était illimitée.'

La Cour de cassation a également considéré sur le second moyen que 'le BCF est tenu dans les mêmes limites que l'assureur étranger qu'il représente et qu'ayant jugé que la société LIBERTY SEGUROS était tenue à une garantie illimitée des conséquences de l'accident du 11 avril 1987, la cour d'appel a décidé à bon droit que le BCF était tenu de manière identique'.

Le caractère illimité de la garantie tant de la société LIBERTY que du BCF est ainsi définitivement tranché par l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER du 4 novembre 2014, lequel est postérieur aux arrêts de la cour de MONTPELLIER et de celle de TOULOUSE, a autorité de la chose jugée en vertu de l'article 1351 du code civil et est devenu définitif, la Cour de Cassation ayant rejeté les pourvois du BCF et de LIBERTY à son encontre le 13 décembre 2018.

L'évènement ayant conduit à l'arrêt du 4 novembre 2014 qui a réformé le jugement du 2 décembre 1993 en disant « illimitée la garantie de LIBERTY SEGUROS et du BCF » constitue bien un fait juridique nouveau modifiant la situation antérieurement reconnue en justice, aucune prescription ne pouvant dès lors être opposée à la GMF.

La GMF peut donc valablement invoquer cette décision pour exercer son recours subrogatoire à l'encontre de la compagnie LIBERTY SEGUROS et du BCF, rien ne permettant en outre de retenir qu'elle a offert de prendre seule en charge l'indemnisation de la victime.

Le jugement sera en conséquence infirmé.

Concernant le doublement des intérêts légaux (DIL) en application de l'article L 221-20 du code des assurances

La GMF sollicite le remboursement de diverses sommes versées au titre du doublement des intérêts légaux. Les intimées s'y opposent considérant, d'une part, qu'il se heurte à l'autorité de chose jugée, d'autre part, qu'il s'agit d'une sanction financière prévue pour non-respect des règles spécifiques d'indemnisation des victimes d'accident de la circulation et non de l'application d'une garantie au titre du contrat d'assurance.

Le recours de la GMF est parfaitement fondé sur les dispositions de l'article 1251-3° du code civil qui dispose que : 'la subrogation a lieu de plein droit : ...

3° Au profit de celui qui étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt à l'acquitter'.

La GMF réclame le doublement des intérêts légaux réglés par elle seule alors que LIBERTY SEGUROS et le BCF étaient tenus in solidum à ses côtés en vertu des arrêts du 23 mars 2010 et du 14 mai 2013. La période durant laquelle le BCF et LIBERTY SEGUROS ont été seuls condamnés (du 11 avril 1988 au 23 juillet 1991) n'étant pas incluse, il n'y a donc pas lieu de déduire des sommes qui seront dues, la somme de 145 877,35 euros correspondant à cette période.

L'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER du 14 novembre 2014, exécutoire et définitif, dispose que 'LIBERTY SEGUROS et le BCF seront tenus in solidum à garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice d'[F] [U] et de ses parents'. Il en résulte que, contrairement à leurs allégations, la compagnie LIBERTY SEGUROS, assureur du tiers responsable, ainsi que le BCF qui étaient légalement tenus en application de l'article L 221-20 du code des assurances de présenter une offre à la victime, quelle que soit l'étendue de la garantie, doivent assumer le coût total des conséquences dommageables résultant du sinistre et donc, y compris du doublement des intérêts au taux légal quelle que soit la période concernée.

Compte tenu de la décision entreprise, il ne sera pas répondu aux moyens développés subsidiairement et les intimées seront déboutées de leurs demandes de condamnation de la GMF à leur payer les sommes mises à leur charge en exécution de l'arrêt rendu par la cour d'appel de MONTPELLIER du 23/03/10 et l'arrêt rendu par la cour d'appel de TOULOUSE le 14/05/13 allant au-delà du plafond de 762.195 euros.

Sur la condamnation à remboursement des sommes versées par la GMF

La GMF sollicite l'infirmation du jugement et la condamnation in solidum de la compagnie LIBERTY SEGUROS, venant aux droits de la compagnie ERCOS, et du BCF à lui rembourser l'intégralité des sommes réglées au bénéfice d'[F] [U], de ses parents, et de la Caisse de sécurité sociale, outre le capital représentatif des rentes versées au 31 décembre 2018, dont il conviendra de déduire les sommes versées par LIBERTY SEGUROS et le BCF.

Les intimées sollicitent la confirmation du jugement, contestant partiellement les sommes réclamées, sollicitant en tout état de cause leur réduction dans de notables proportions et invoquant un certain nombre de règlements effectués par leurs soins.

Sur ce,

La compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF devront prendre en charge les règlements effectuées par la GMF qui seront retenus par la cour tant au bénéfice d'[F] [U], que de ses parents, les époux [U], et de la caisse de sécurité sociale.

La cour constate cependant qu'en l'état de conclusions particulièrement confuses de part et d'autre s'agissant des décomptes établis et des chiffres avancés par chacune des parties, elle n'est pas en mesure de trancher le litige sur ce point.

Il convient en conséquence d'ordonner avant dire droit la réouverture des débats exclusivement sur ce point ainsi qu'il sera précisé au dispositif et de surseoir à statuer dans cette attente sur les autres demandes.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, par arrêt mixte, rendu par mise à disposition au greffe,

Dit que le jugement est définitif sur le recours subrogatoire de la GMF ;

INFIRME le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable la GMF en ses demandes visant à condamner la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF pour une somme supérieure au plafond de 762.245, 09 euros ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé, et y ajoutant,

Dit que le caractère illimité de la garantie tant de la société LIBERTY SEGUROS que du BCF a été définitivement tranché par l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER du 4 novembre 2014, qui est postérieur aux arrêts de la cour d'appel de MONTPELLIER du 23 mars 2010 et de la cour d'appel de TOULOUSE du 14 mars 2013, a autorité de la chose jugée en vertu de l'article 1351 du code civil et est devenu définitif, la Cour de Cassation ayant rejeté les pourvois du BCF et de LIBERTY à son encontre le 13 décembre 2018 ;

Dit que la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF devront en conséquence prendre en charge les règlements effectués par la GMF qui seront postérieurement retenus par la cour tant au bénéfice d'[F] [U], que de ses parents et de la caisse de sécurité sociale ;

Dit qu'il n'y aura pas lieu de déduire des sommes dues, la somme de 145.877,35 euros correspondant à la période du 11 avril 1988 au 23 juillet 1991 ;

Dit que la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF devront assumer le coût total des conséquences dommageables résultant du sinistre et en conséquence, y compris du doublement des intérêts au taux légal quelle que soit la période concernée ;

Déboute la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF de leurs demandes de condamnation de la GMF à leur payer les sommes mises à leur charge en exécution de l'arrêt rendu par la cour d'appel de MONTPELLIER du 23/03/10 et l'arrêt rendu par la cour d'appel de TOULOUSE le 14/05/13 allant au-delà du plafond de 762.195 euros ;

Avant dire droit,

Ordonne la réouverture des débats, exclusivement s'agissant de la fixation des sommes versées par la GMF qui devront être remboursées par la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF,

Dit que :

- la GMF devra produire aux débats un décompte complet et détaillé, y compris sous forme de tableau récapitulatif précis et permettant la distinction :

* des sommes réclamées pour chacune des victimes ([F] [U], les époux [U] et la caisse d'assurance maladie) avec la date des paiements correspondants ;

* des sommes réclamées s'agissant d'[F] [U] de manière séparée au titre des capitaux, des rentes, de leur réactualisation, des DIL, etc.., ainsi que les dates des paiements correspondants ;

* des sommes exactes réglées par la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF qui devront être déduites des sommes dues ;

* du solde exact des sommes au paiement desquelles la condamnation est sollicitée ainsi que des points de départ des intérêts ;

- la compagnie LIBERTY SEGUROS et le BCF devront établir en réponse un décompte complet et détaillé, y compris sous forme de tableau récapitulatif précis, faisant notamment état des sommes non contestées, de celles qui le demeurent, ainsi que des sommes versées par eux outre les dates des paiements correspondants ;

Surseoit à statuer sur toutes autres demandes ;

Dit que l'affaire sera renvoyée à l'audience du 7 juin 2021 à 13h pour faire le point avec les conseils des parties.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 18/28723
Date de la décision : 02/03/2021

Références :

Cour d'appel de Paris G8, arrêt n°18/28723 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-03-02;18.28723 ?
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