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11/12/2020 | FRANCE | N°19/228167

France | France, Cour d'appel de Paris, G1, 11 décembre 2020, 19/228167


Copies exécutoires délivrées aux parties le REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Cour d'appel de Paris

Pôle 4 - chambre 1

Arrêt du 11 décembre 2020

Saisine sur renvoi après cassation

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :RG 19/22816 - Portalis 35L7-V-B7D-CBFE4

Décision déférée à la cour : arrêt du 14 novembre 2019 -Cour de cassation - pourvoi no C18-21.142

DEMANDERESSE A LA SAISINE

Maître [H] [N]
notaire associé de la SCP [N], titulaire d'un office notarial

[Adresse 1]<

br>[Localité 1]

Représenté par Me Thierry KUHN de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0090

DEFENDEURS A LA SAISINE

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Copies exécutoires délivrées aux parties le REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Cour d'appel de Paris

Pôle 4 - chambre 1

Arrêt du 11 décembre 2020

Saisine sur renvoi après cassation

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :RG 19/22816 - Portalis 35L7-V-B7D-CBFE4

Décision déférée à la cour : arrêt du 14 novembre 2019 -Cour de cassation - pourvoi no C18-21.142

DEMANDERESSE A LA SAISINE

Maître [H] [N]
notaire associé de la SCP [N], titulaire d'un office notarial

[Adresse 1]
[Localité 1]

Représenté par Me Thierry KUHN de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0090

DEFENDEURS A LA SAISINE

Madame [Q] [W]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

Madame [K] [W]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

Monsieur [M] [W]
[Adresse 4]
[Adresse 4]

Monsieur [X] [W]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Adresse 5]

Représentés par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753
Ayant pour avocat plaidant, Me Jean-Michel CRETOT, avocat au barreau de TOULOUSE

Monsieur [E] [K]
[Adresse 6]
[Adresse 6]

n'a pas constitué avocat

Madame [D] [X] épouse [K]
[Adresse 6]
[Adresse 6]

n'a pas constitué avocat

SARL Agence de l'Hôtel de Ville
[Adresse 7]
[Localité 1]

n'a pas constitué avocat

SA Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France
Agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 8]
[Adresse 8]

Représentée par Me Valérie DESFORGES de la SARL ADEMA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0540 et par Me Stéphane FERTIER de la SELARL JRF AVOCATS et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075 substitué à l'audience par Me Hugo DAUSTER du même cabinet

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 12 novembre 2020, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Claude Creton, président
Mme Bénédicte Pruvost, présidente de chambre
Mme Monique Chaulet, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par M. Claude Creton, président, dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : M. Grégoire Grospellier

Arrêt :
- défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Claude Creton, Président et par Grégoire Grospellier, greffier présent lors de la mise à disposition.

*****
Par acte du 8 juillet 2011 reçu par Mme [N], notaire, [T] [W], aujourd'hui décédé, M. [M] [W], Mme [Q] [W], Mme [K] [W] et M. [X] [W] (les consorts [W]) ont vendu à M. et Mme [K], par l'intermédiaire de la société Agence de l'hôtel de ville, agent immobilier, une maison d'habitation située à [Adresse 9], moyennant un prix de 140 000 euros financé par deux prêts d'un montant total de 151 767,67 euros consentis par la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Ile-de-France (la banque).

Ayant ensuite constaté que le bien était soumis au statut de la copropriété, ce dont ils n'avaient pas été informés lors de la vente, M. et Mme [K] ont assigné les consorts [W], la société Agence de l'hôtel de ville, la Caisse d'épargne et Mme [N] en résolution de la vente et des contrats de prêt ainsi qu'en paiement de dommages-intérêts.

Par jugement du 14 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Meaux a :
- déclaré l'action de M. et Mme [K] recevable ;
- prononcé l'annulation de la vente du 8 juillet 2011 sur le fondement du dol ;
- ordonné les restitutions réciproques ;
- prononcé l'annulation des prêts consentis par la Caisse d'épargne ;
- condamné M. et Mme [K] à rembourser à la banque la somme de 151 767,67 ;
- condamné la Caisse d'épargne à rembourser à M. et Mme [K] les sommes réglées au titre des échéances de remboursement des prêts en capital et intérêts, la somme due devant être arrêtée au jour du jugement et venant en compensation avec le montant du capital à rembourser ;
- condamné in solidum les consorts [W] à payer à M. et Mme [K] la somme de 7 500 euros en réparation de leur préjudice moral et la somme de 16 801,28 euros en réparation de leur préjudice matériel ;
- condamné in solidum les consorts [W], Mme [N] et la société Agence de l'hôtel de ville à payer à la banque la somme de 125 833,82 euros à titre de dommages-intérêts en compensation de la perte des intérêts contractuels ;
- condamné in solidum les consorts [W], Mme [N] et la société Agence de l'hôtel de ville sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à payer à la Caisse d'épargne la somme de 3 000 euros et à M. et Mme [K] la somme de 3 000 euros.

Les consorts [W] ont interjeté appel de ce jugement.

Par arrêt du 16 mars 2018, la cour d'appel de Paris a confirmé ce jugement sauf en ses dispositions condamnant les consorts [W] à payer à M. et Mme [K] la somme de 16 801,28 euros en réparation de leur préjudice matériel et à la banque la somme de 125 833,82 euros en réparation de son préjudice financier et déboutant la banque de ses demandes au titre des frais de garantie. Statuant à nouveau, elle a condamné in solidum les consorts [W], Mme [N] et la société Agence de l'hôtel de ville à payer à M. et Mme [K] la somme de 13 783,28 euros en réparation de leur préjudice matériel et à la Caisse d'épargne la somme de 126 975,79 en réparation de son préjudice financier.

Par arrêt du 14 novembre 2019, la Cour de cassation a cassé cet arrêt en ce qu'il condamne in solidum les consorts [W], Mme [N] et la société Agences de l'hôtel de ville à payer à la banque la somme de 92 789,30 euros correspondant aux intérêts à échoir, incluse dans celle de 126 975,79 euros. Elle a reproché à la cour d'appel d'avoir privé sa décision de base légale pour avoir ainsi statué sans rechercher, comme elle y était invitée, si le préjudice consécutif à la perte des intérêts conventionnels subis par la banque n'était pas, en tout ou partie, compensé par l'avantage lié à la restitution immédiate du capital emprunté.

Mme [N] a saisi la cour de renvoi.

Elle conclut principalement au rejet de la demande de la banque au motif que celle-ci n'est pas fondée à réclamer l'indemnisation d'un dommage causé par la perte des intérêts qu'aurait produit un prêt qui a été annulé et est réputé n'avoir jamais existé. Elle ajoute qu'elle était tiers au contrat de prêt et qu'elle ne peut en conséquence être tenue à payer des indemnités correspondant à des intérêts produits par un contrat auquel elle n'a pas donné son consentement. Elle fait ensuite valoir que la banque n'est en outre pas fondée à réclamer le montant d'intérêts rémunérant le prêt d'un capital qui lui a été remboursé, ce qui constituerait un enrichissement sans cause. Elle soutient en outre que le manquement à son obligation de conseil n'a pu lui causer qu'une perte de chance qui ne correspond pas à l'avantage perdu mais à une fraction de celui-ci mais qu'en l'espèce ce préjudice n'est pas justifié, la banque qui a recouvré l'intégralité du capital prêté ayant pu utiliser cette somme pour consentir de nouveaux prêts à d'autres emprunteurs. Elle explique que si le taux d'intérêt applicable à ces prêts est inférieur à celui rémunérant les prêts qu'elle avait consentis à M. et Mme [K], cette différence ne lui a pas causé de préjudice dès lors que les sommes prêtées ont été empruntées sur les marchés financiers à un taux lui-même plus faible.

Mme [N] réclame enfin la condamnation in solidum des consorts [W] et de M. et Mme [K] à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La banque s'est désistée de l'instance qu'elle a engagée contre la société Agence de l'hôtel de ville.

Elle rappelle ensuite qu'il a été définitivement jugé que sont nuls les prêts qu'elle a consentis à M. et Mme [K] par l'effet de la nullité de la vente imputable aux fautes des consorts [W], de Mme [N] et de la société Agence hôtel de ville.

Elle ajoute que ces fautes lui ont causé un préjudice en raison de la perte de chance de percevoir les intérêts conventionnels à échoir auxquels elle aurait pu prétendre si les contrats de prêt n'avaient pas été annulés et évalue ce préjudice à la somme de 97 789,30 euros, subsidiairement à la somme de 51 666,87 euros correspondant à la différence entre les intérêts à échoir au titre des prêts litigieux, soit 97 789,30 euros, et les intérêts produits par des fonds replacés sur la même période aux conditions applicables à la date d'annulation du prêt (taux d'intérêt de 1,95 % l'an), soit la somme de 41 122,43 euros.

Elle réclame en outre la condamnation in solidum des consorts [W] et de Mme [N] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les consorts [W] concluent à l'infirmation du jugement et demandent à la cour de limiter l'indemnisation du préjudice subi par la banque à la somme de 34 186,49 euros correspondant aux intérêts échus et aux frais de garantie.

Ils sollicitent la condamnation de Mme [N], subsidiairement de la banque, à lui restituer la somme de 57 448,59 euros qu'elle lui a réglée les 6, 7 et 15 octobre 2019.

Ils réclament enfin la condamnation in solidum de la banque et de Mme [N] à leur payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE,

Attendu que si en cas d'annulation d'un prêt, une banque est fondée à réclamer à tous ceux dont la faute est à l'origine de cette annulation une indemnité correspondant au montant des intérêts échus qu'elle a été tenue de restituer à l'emprunteur, le préjudice causé par la perte des intérêts à échoir n'est constitué que par la perte de chance de percevoir ces intérêts dans la mesure où d'une part il n'est pas certain que le prêt aurait été exécuté jusqu'à son terme compte tenu de la faculté de résiliation que peut exercer à tout moment l'emprunteur en réglant l'indemnité de remboursement anticipé et où d'autre part la restitution à la banque du capital permet à la banque de prêter à nouveau ces fonds de sorte que l'existence de son préjudice dépend du taux d'intérêt comparé à celui du prêt annulé ;

Attendu qu'en l'espèce, les intérêts à échoir au jour de l'annulation du prêt par jugement exécutoire par provision du 19 mai 2016 s'élèvent à la somme de 92 789,30 euros ; que le taux d'intérêt conventionnel de ce prêt était de 4,40 % l'an alors que le taux d'intérêt de la période suivant l'annulation du prêt est de 1,50 % ; que compte tenu de ces éléments, il convient d'évaluer à la somme de 15 000 euros le préjudice subi par la banque, constitué par la perte de chance de percevoir les intérêts qu'aurait produits le prêt annulé ; qu'il convient en conséquence de condamner in solidum les consorts [W] et Mme [N] à payer cette somme à la banque ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la restitution des sommes versées en exécution des dispositions du jugement infirmées par le présent arrêt qui constitue le titre justifiant ces restitutions ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement,

Vu l'arrêt du 14 novembre 2019 cassant l'arrêt du 16 mars 2018 de la cour d'appel de Paris mais seulement en ce qu'il condamne in solidum M. [M] [W], Mme [Q] [W], Mme [K] [W], M. [X] [W] , Mme [N] et la société Agence de l'hôtel de ville à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France, à titre de dommages-intérêts, la somme de 92 789,30 euros correspondant aux intérêts à échoir, incluse dans celle de 126 975,79 euros ;

Infirme le jugement en ce qu'il condamne in solidum M. [M] [W], Mme [Q] [W], Mme [K] [W], M. [X] [W], Mme [N] et la société Agence de l'hôtel de ville à payer, à titre de dommages-intérêts, à la Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France la somme de 92 789,30 euros, correspondant aux intérêts à échoir, incluse dans celle de 125 833,82 euros ;

Statuant à nouveau de ce chef ;

Constate le désistement de la Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France de son instance contre la société Agence de l'hôtel de ville et dit que chacune des parties supportera la charge de ses dépens d'appel ;

Condamne in solidum M. [M] [W], Mme [Q] [W], M. [X] [W], Mme [N] à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France la somme de 15 000 euros en réparation de la perte de chance de percevoir les intérêts à échoir au titre de l'exécution du prêt qu'elle avait consenti à M. et Mme [K] ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les différentes demandes ;

Condamne la Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France aux dépens d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : G1
Numéro d'arrêt : 19/228167
Date de la décision : 11/12/2020
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2020-12-11;19.228167 ?
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