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20/11/2020 | FRANCE | N°15/00386

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 6, 20 novembre 2020, 15/00386


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 6



ORDONNANCE DU 20 NOVEMBRE 2020

Contestations d'Honoraires d'Avocat



(N° /2020 , 2 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 15/00386 - N° Portalis 35L7-V-B67-BWJLN





NOUS, Florence LAGEMI, Présidente de chambre à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assis

tée de Sarah-Lisa GILBERT, Greffière à la mise à disposition de l'ordonnance.





Vu le recours formé par :





Madame [U] [Y] divorcée [O]

[Adresse 2]

[Adres...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 6

ORDONNANCE DU 20 NOVEMBRE 2020

Contestations d'Honoraires d'Avocat

(N° /2020 , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 15/00386 - N° Portalis 35L7-V-B67-BWJLN

NOUS, Florence LAGEMI, Présidente de chambre à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Sarah-Lisa GILBERT, Greffière à la mise à disposition de l'ordonnance.

Vu le recours formé par :

Madame [U] [Y] divorcée [O]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Comparante en personne, assistée de Me Dimitri DEBORD, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 331

Demanderesse au recours,

contre une décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS dans un litige l'opposant à :

Maître [Z] [H]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Anne-Carine JACOBY, avocate au barreau de PARIS, toque : P0306

Défenderesse au recours,

Par décision contradictoire, statuant publiquement, et après avoir entendu les parties présentes à notre audience du 18 septembre 2020 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,

L'affaire a été mise en délibéré au 20 novembre 2020 :

Vu les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;

Mme [O] a saisi Maître [H] de la défense de ses intérêts dans le cadre d'une procédure de divorce.

Statuant sur saisine de Mme [O], le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris a, par décision du 17 avril 2015, notamment :

- fixé à la somme de 35.833,33 euros HT, soit 45.400 euros TTC les honoraires dus par Mme [O] à Maître [H] ;

- constaté le règlement intégral de cette somme ;

- rejeté toute autre demande.

Cette décision a été notifiée à Mme [O] par lettre recommandée reçue le 30 avril 2015.

Par lettre recommandée reçue le 19 mai 2015, Mme [O] a formé un recours à l'encontre de cette ordonnance.

L'affaire fixée initialement à l'audience du 6 mars 2018, a fait l'objet de plusieurs renvois et a été appelée à l'audience du 18 septembre 2020.

Aux termes de conclusions déposées et développées à l'audience, Mme [O] demande de :

- dire son recours recevable et fondé,

- infirmer la décision du bâtonnier en ce qu'elle a fixé à la somme de 37.833,33 euros HT (rectifiant l'erreur matérielle contenue dans cette décision sur le montant HT des honoraires fixés), soit 45.400 euros TTC les honoraires dus à Maître [H] ;

- statuant à nouveau,

- fixer à la somme de 16.000 euros HT, soit 19.200 euros TTC, le montant des honoraires dus à Maître [H],

- ordonner la restitution du trop perçu, soit la somme de 21.833,33 HT, soit 26.000 euros TTC,

- condamner Maître [H] au règlement de ladite somme outre les intérêts au taux légal à compter de la date de la saisine du bâtonnier,

- condamner Maître [H] au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses conclusions déposées et développées à l'audience, Maître [H] demande de :

- dire le recours irrecevable et mal fondé,

- confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

- condamner Mme [O] à lui régler la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.

SUR CE

Le recours exercé par Mme [O], selon les formes et délai prévus par le décret du 27 novembre 1991, est recevable.

La procédure spéciale prévue par les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 a pour seul objet la fixation et le recouvrement des honoraires d'avocat.

Dans le cadre de cette procédure, ni le bâtonnier en première instance ni le premier président ou son délégataire n'ont le pouvoir de se prononcer sur les fautes ou manquements éventuels, à les supposer établis, qu'aurait pu commettre l'avocat dans le suivi de la mission qui lui a été confiée ni à plus forte raison procéder à la réduction d'honoraires facturés pour des prestations dont l'exécution est justifiée, aux motifs d'une insuffisance de qualité de celles-ci, ni ordonner le remboursement par l'avocat de condamnations personnelles prononcées à l'encontre du client.

En l'espèce, aucune convention d'honoraires n'a été régularisée entre Mme [O] et Maître [H]. Il sera observé à cet égard, que cette dernière indique avoir adressé une convention d'honoraires à sa cliente qui ne l'a pas signée.

Selon l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, à défaut de convention entre l'avocat et son client, l'honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.

Il ressort des débats et des éléments du dossier que Mme [O] a contacté Maître [H] dans le cadre d'une procédure de divorce particulièrement conflictuelle ; que cette dernière a succédé à trois précédents avocats et a été saisie le 4 février 2014, après délivrance de l'assignation en divorce intervenue le 30 décembre 2013, étant rappelé qu'un arrêt de la cour d'appel de Versailles statuant sur appel de l'ordonnance de non conciliation du 17 novembre 2011, avait été rendu le 25 octobre 2012, que le rapport d'expertise confiée au docteur [F] et le rapport du notaire désigné sur le fondement de l'article 255 9° et 10° du code civil avaient été déposés et que parallèlement à la procédure de divorce, le juge des enfants avait été saisi et instauré une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert, mesure renouvelée jusqu'au 30 novembre 2014 par décision du 20 novembre 2013.

Il n'est pas contesté que la mission de Maître [H] a pris fin en juin 2014 et que durant les cinq mois de sa mission, elle a dû assurer la défense des intérêts de sa cliente dans le cadre d'un incident de mise en état engagé par son époux le 17 février 2014, laquelle nécessitait qu'elle prenne connaissance de l'entier dossier d'autant qu'il n'est pas établi que la mission de cet avocat saisi avant l'introduction de l'incident, devait se limiter à celui-ci.

Il ressort des termes de l'ordonnance de mise en état du 8 juillet 2014 que dans le cadre de cet incident M. [O] a sollicité la suppression de la contribution à l'entretien et l'éducation d'un des enfants à la suite du transfert de sa résidence à son domicile et que reconventionnellement, Mme [O] a sollicité notamment, la jouissance à titre gratuit du domicile conjugal depuis l'ordonnance de non conciliation, l'augmentation du montant de la pension alimentaire au titre du devoir de secours et des contributions à l'entretien et l'éducation des deux autres enfants et une mesure d'expertise financière aux fins de vérifier la situation patrimoniale de son époux ainsi que ses revenus, demandes dont elle a été déboutée.

Maître [H] a émis le 4 février 2014, une première facture de provision sur honoraires, d'un montant de 30.000 euros HT, soit 36.000 euros TTC, puis, le 27 mars 2014, une seconde facture de provision sur honoraires d'un montant de 12.000 euros HT soit 14.400 euros TTC et, enfin, le 16 juin 2014, une troisième facture d'un montant HT de 8.092,50 euros, soit 9.711 euros TTC.

Il est constant que Mme [O] a réglé la somme de 45.400 euros TTC.

Pour contester le montant des honoraires réglés, Mme [O] fait état du caractère excessif de ceux-ci, non conformes aux diligences effectuées, de l'absence de prise en compte par Maître [H] d'une part, de son état de fragilité, précisant à cet égard que maniant difficilement la langue française et ayant été hospitalisée en cours du mois de janvier 2014 pour une myélite, son discernement se trouvait amoindri et, d'autre part, de sa situation de fortune, indiquant ne pas travailler, ne disposer d'aucun revenu et avoir trois enfants à charge. Elle fait en outre valoir que le nombre élevé d'heures facturées n'était pas justifié pour un incident portant essentiellement sur le remboursement d'une pension alimentaire, sans aucun élément nouveau, alors que Maître [H] est un avocat spécialisé en droit de la famille.

Il ressort des relevés de diligences communiqués à Mme [O] et versés aux débats que Maître [H] a facturé 124 heures 15 minutes, dont 120,30 heures selon un tarif horaire de 400 euros HT et 3 heures 45 minutes selon un tarif horaire de 300 euros HT, tarif collaborateur, pour un montant d'honoraires global de 56.511 euros TTC.

Selon ces relevés, les diligences de Maître [H] ont consisté, notamment, en l'étude et l'analyse des pièces de procédure antérieures à sa saisine, le classement de ces pièces et l'étude des pièces communiquées tant par Mme [O] que par la partie adverse ainsi que l'étude des pièces d'expertise, la rédaction d'un jeu de conclusions y compris leurs modifications après observations de la cliente, les réponses aux appels téléphoniques de celle-ci, deux rendez-vous de deux heures chacun, la rédaction de courriers et mails, les pièces produites établissant l'envoi de nombreux mails volumineux par Mme [O].

Il est constant que Maître [H], avocat spécialisé en droit de la famille et ayant une notoriété certaine en ce domaine, est intervenue dans une procédure de divorce complexe ayant donné lieu à deux décisions judiciaires et à deux mesures d'expertise dont une portant sur un projet de liquidation des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux. Il se déduit de ces éléments que la prise de connaissance de l'entier dossier dont le volume de pièces était conséquent et la détermination d'une stratégie alors qu'elle succédait à plusieurs confrères, nécessitaient d'y consacrer un nombre d'heures très important.

Ainsi que l'a relevé le bâtonnier, il ne peut sérieusement être prétendu que Mme [O] ignorait le taux horaire pratiqué par Maître [H] ainsi que son mode de facturation, comparables à ceux des avocats qu'elle avait préalablement consultés. Il sera en outre relevé que sur la facture du 4 février 2014 portant sur une provision de 36.000 euros TTC, établie au début de la relation contractuelle entre les parties, il a été indiqué un taux horaire de 450 euros HT pour Maître [H] et de 350 euros HT pour sa collaboratrice, étant observé que le taux horaire a ultérieurement été réduit de 50 euros.

Ainsi, même s'il s'agissait d'une provision, Mme [O] ne pouvait ignorer, dès le début de la relation, que les honoraires de Maître [H] serait élevé.

Au surplus, Mme [O] ne démontre pas que son état de santé a pu entraver son discernement ni n'établit que ses facultés financières ne lui permettaient pas de s'acquitter des honoraires, alors qu'elle a pu verser en l'espace de quelques mois la somme de 45.400 euros.

Néanmoins, il apparaît ainsi que l'a exactement retenu le bâtonnier, que le temps passé pour la rédaction des conclusions et de leurs modifications, facturé à hauteur de 26 heures 40, apparaît particulièrement excessif pour un avocat compétent en droit de la famille alors que celles-ci ne portaient que sur un incident de mise en état dont la portée est, par principe, plus limité que s'il s'était agi de conclure sur l'entier divorce et ses mesures accessoires.

Au regard de ces éléments, il apparaît donc que c'est par une exacte appréciation des faits qui lui ont été soumis que le bâtonnier a fixé les honoraires dus à Maître [H] à la somme de 45.400 euros TTC correspondant à la somme de 37.833,33 euros HT.

Il y a donc lieu de confirmer la décision entreprise sauf à rectifier le montant des honoraires HT figurant dans son dispositif.

Succombant en ses prétentions, Mme [O] supportera les dépens exposés dans le cadre de cette procédure.

Au regard des éléments de la cause, il ne convient pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au présent litige.

PAR CES MOTIFS

Statuant en dernier ressort, publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

Déclarons recevable le recours exercé par Mme [O] à l'encontre de la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris rendue le 17 avril 2015 ;

Rectifions l'erreur matérielle contenue dans le dispositif de la décision entreprise s'agissant du montant des honoraires HT dus à Maître [H] qui s'élèvent à la somme de 37.833,33 euros HT au lieu de celle de 35.833,33 euros HT ;

Confirmons la décision entreprise ;

Disons n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons Mme [O] aux dépens exposés dans le cadre de cette procédure.

Disons qu'en application de l'article 177 du décret n 91-1197 du 27 novembre 1991, la présente ordonnance sera notifiée aux parties par le Greffe de la Cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception.

ORDONNANCE rendue par mise à disposition au greffe de la Cour le VINGT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT par Patricia DUFOUR, Conseiller, qui en a signé la minute avec Sarah-Lisa GILBERT, Greffière, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues dans l'article 450 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 15/00386
Date de la décision : 20/11/2020

Références :

Cour d'appel de Paris C6, arrêt n°15/00386 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-20;15.00386 ?
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