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13/11/2020 | FRANCE | N°19/023837

France | France, Cour d'appel de Paris, G1, 13 novembre 2020, 19/023837


Copies exécutoires délivrées aux parties le RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Cour d'appel de Paris

Pôle 4 - chambre 1

Arrêt du 13 novembre 2020

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : RG 19/02383-Portalis 35L7-V-B7D-B7GJF

Décision déférée à la cour : jugement du 19 décembre 2018 -tribunal de grande instance de Créteil

APPELANTE

SCI [...]
[...]
[...]

Représentée par Me Philippe LOUIS, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : 38

INTIMES

Monsieur P... E...r>[...]
[...]

Représenté par Me Olivier LIGETI de l'AARPI ALMATIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0560

La compagnie d'assurances MMA IARD ...

Copies exécutoires délivrées aux parties le RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Cour d'appel de Paris

Pôle 4 - chambre 1

Arrêt du 13 novembre 2020

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : RG 19/02383-Portalis 35L7-V-B7D-B7GJF

Décision déférée à la cour : jugement du 19 décembre 2018 -tribunal de grande instance de Créteil

APPELANTE

SCI [...]
[...]
[...]

Représentée par Me Philippe LOUIS, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : 38

INTIMES

Monsieur P... E...
[...]
[...]

Représenté par Me Olivier LIGETI de l'AARPI ALMATIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0560

La compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
Société Civile, immatriculée au RCS de LE MANS sous le no 775 652 126, dont le siège
social est [...] ,
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en
cette qualité audit siège, es qualité d'assureur responsabilité civile
professionnelle de Maître V..., notaire décédé

La compagnie M.M.A IARD S.A au capital de 537 052 368,00 €
au RCS de LE MANS sous le no 440 048 882, dont le siège social est 14
[...] , agissant
poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette
qualité audit siège, es-qualités

Représentées par Me Thomas RONZEAU de la SCP RONZEAU et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499 substitué par Me Audrey MILHAMONT du même cabinet

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 octobre 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Claude Creton, président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Claude Creton, président,
Monique Chaulet, conseillère,
Christine Barberot, conseillère.

Greffier, lors des débats : M. Grégoire Grospellier

Arrêt :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Claude Creton, président, et par Grégoire Grospellier, greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

Par acte du 9 mars 2005, reçu par R... V..., notaire, aujourd'hui décédé, M. E... a vendu à la société civile immobilière [...] (la SCI [...] ) un bien immobilier à usage d'habitation et de commerce situé à [...] comprenant deux studios en rez-de-jardin et, au rez-de-chaussée, un appartement et un local commercial. Il était précisé dans l'acte qu'étaient loués l'un des studios en rez-de-jardin ainsi que l'appartement du rez-de-chaussée. Après la vente, les studios du rez-de-jardin ont été loués à M. G... et à Mme C....

Le 12 décembre 2014, un arrêté préfectoral a été notifié à la SCI [...] l'informant que le studio loué à M. G... qu'il occupe avec Mme U... et leurs deux enfants est impropre à l'habitation au motif que le local semi enterré était aménagé en sous-sol et que la hauteur sous plafond était inférieure à 2,20 mètres. Il était également indiqué que ce studio était insalubre en raison de la présence d'humidité avec moisissures, d'une ventilation insuffisante, de revêtements muraux dégradés, d'un éclairage naturel insuffisant dans la pièce à usage de salon, du faux-plafond de la pièce à usage de chambre en mauvais état, de la vétusté de la porte d'entrée laissant passer l'air, de la vétusté de l'installation électrique et d'une sur-occupation.

Le 7 février 2015, un nouvel arrêté préfectoral a été notifié à la SCI [...] lui indiquant que l'appartement loué à Mme C... était lui aussi impropre à l'habitation au motif qu'il est aménagé en sous-sol, que la hauteur sous plafond est inférieure à 2,20 mètres, que l'éclairage naturel est insuffisant et en raison de l'absence d'ouvrant à l'exception de la porte d'entrée. Il était également signalé que le local était insalubre en raison de la présence d'humidité avec développement de moisissures, d'une ventilation insuffisante, de revêtements de murs dégradés et d'une sur-occupation.

La SCI [...] a assigné M. E... sur le fondement de la garantie des vices cachés et d'un manquement à son obligation de délivrance ainsi que M. V..., pour manquement à ses obligations, et l'assureur de ce dernier, la société MMA. Elle a sollicité la condamnation solidaire de M. E... et du notaire à lui payer la somme de 150 000 euros au titre de la réduction du prix ainsi que diverses sommes à titre de dommages-intérêts et la condamnation de la société MMA à garantir M. V... des condamnations prononcées à son encontre.

Par jugement du 19 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Créteil a débouté la SCI [...] de sa demande et l'a condamnée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à payer à M. E... la somme de 3 000 euros et aux sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles la somme de 2 000 euros.

Pour écarter l'action estimatoire fondée sur la garantie des vices cachés, le tribunal a retenu que l'objet de la SCI [...] ("l'acquisition d'un immeuble à [...], l'administration et l'exploitation par bail, location ou autrement dudit immeuble et de tous autres immeubles bâtis dont elle pourrait devenir propriétaire") révèle sa qualité de professionnel. Il a ajouté que les vices allégués étaient visibles lors des visites du bien effectuées par le gérant de la SCI [...] , que le vendeur, qui n'est pas un professionnel, avait donné en location les appartements sans rencontrer de difficultés et que leur état d'insalubrité n'a fait l'objet d'un arrêté que plusieurs années après la vente en raison d'un état de fait qui devait être connu de l'acquéreur.

Sur la demande fondée sur un manquement à l'obligation de délivrance conforme, le tribunal a constaté qu'aucune disposition du contrat ne porte sur la possibilité de donner en location les appartements.

Enfin, pour écarter la responsabilité du notaire, le tribunal a indiqué que celui-ci, qui n'était pas tenu de visiter les lieux, n'avait pas l'obligation de vérifier l'état de l'immeuble et de s'assurer que les studios pouvaient être loués en l'absence d'information sur ce point des documents d'urbanisme, alors qu'en outre ces studios avaient été précédemment loués.

La SCI [...] a interjeté appel de ce jugement.

Elle fonde son action à titre principal sur la garantie des vices cachés en raison de l'impropriété de l'immeuble à sa destination et, à titre subsidiaire, sur un défaut de délivrance conforme. Elle réclame en conséquence la condamnation de M. E... et de R... V... à lui payer la somme de 150 000 euros au titre de la réduction du prix ou à titre de dommages-intérêts, ainsi que, à titre de dommages-intérêts complémentaires, la somme de 81 200 euros en réparation de la perte de revenus et la somme de 16 000 euros correspondant au montant des charges locatives qu'elle n'a pu récupérer et aux frais de relogement des locataires.

Elle fait valoir que le contrat de vente désigne le bien comme étant à usage d'habitation et précise que trois contrats de location à cet usage étaient en cours. Elle indique que M. E... avait procédé, peu de temps avant la vente, à des travaux d'excavation permettant de créer des ouvertures et de transformer le sous-sol en rez-de-jardin afin de pouvoir donner les locaux en location. Elle précise que lors des visites du bien, elle n'a pu constater que ces travaux allaient, avec le temps, générer un état d'insalubrité entraînant des sanctions administratives. Elle en conclut que les studios ne pouvant être donnés en location alors qu'elle avait acquis le bien dans ce seul but, celui-ci est impropre à l'usage auquel il était destiné et qu'en outre il n'est pas conforme aux stipulations du contrat.

La SCI [...] ajoute que M. E..., qui a réalisé ces travaux sans avoir fait une demande de permis de construire, est de mauvaise foi et ne peut se prévaloir de la clause de non-garantie.

Sur la responsabilité du notaire, elle fait valoir que celui-ci a manqué à ses obligations pour avoir désigné le bien en indiquant que "la dénomination « sous-sol » du titre est erronée et qu'il s'agit d'un rez-de-jardin" sans l'informer, en raison de la réglementation en vigueur, des risques d'une mise en location des studios situés au sous-sol. Elle ajoute que le notaire a encore manqué à ses obligations, alors que M. E... avait déclaré dans l'acte avoir fait des aménagements justifiant une modification de la désignation du bien vendu par la transformation des studios en sous-sol en studios en rez-de-jardin, pour ne pas s'être assuré de la régularité de ces aménagements et de la modification qu'ils ont entraînée compte tenu de la réglementation régissant les normes d'habitabilité dans le cas de l'aménagement d'appartements en sous-sol.

Elle réclame enfin une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société MMA IARD et la société MMA IARD assurances mutuelles font valoir qu'au moment de la signature de l'acte de vente, le notaire n'avait aucun moyen de savoir que les logements vendus ne remplissaient pas les critères de décence exigés pour leur mise en location et qu'il appartenait à la SCI [...] , compte tenu de son objet social, de s'assurer que les logements répondaient à ces exigences. Elles ajoutent qu'il n'est pas contesté que les studios se trouvent en rez-de-jardin, qu'il n'a pas été mentionné dans l'acte que ces locaux pouvaient faire l'objet d'une location et que s'ils ne respectaient pas les critères de décence pour pouvoir être loués, ils pouvaient être affectés à un autre usage. Elles contestent en outre l'existence d'un préjudice. Elles concluent en conséquence à la confirmation du jugement et à la condamnation de la SCI [...] , ou de toute partie succombante, à leur payer la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE,

1 - Sur les actions contre M. E...

- Sur la garantie des vices cachés

Attendu que l'inaptitude des studios du rez-de-jardin à la location à usage d'habitation en raison de leur non-conformité aux normes légales ne constitue pas un vice caché de la chose mais relève de l'obligation de délivrance due par le vendeur ; que la SCI du [...] n'est pas fondée à exercer l'action en garantie des vices cachés ;

- Sur l'obligation de délivrance conforme

Attendu que la conformité de la chose vendue s'apprécie par rapport aux stipulations du contrat ; qu'elle doit en outre présenter les caractéristiques qui, bien que n'ayant pas été expressément convenues, sont nécessaires à un usage normal ;

Attendu que l'immeuble vendu à la SCI du [...] est désigné dans l'acte comme étant à usage commercial et d'habitation ; que s'il était en outre indiqué que l'un des studios du rez-de-jardin et l'appartement du rez-de-chaussée étaient loués, il n'a pas été stipulé que l'acquéreur destinait la chose à la location à usage d'habitation et que son aptitude à cet usage constituait une qualité convenue ; qu'il appartenait à la SCI [...] , qui destinait les appartements du rez-de-jardin à la location et dont l'objet social révèle sa qualité de professionnel, de s'assurer que ces appartements présentaient les caractéristiques conformes à cet usage au regard, notamment, des normes légales de décence ; qu'en conséquence, M. E... n'est pas responsable de l'inaptitude de la chose à l'usage auquel la destinait la SCI du [...] ; qu'il convient de confirmer le jugement qui la déboute de sa demande contre M. E... ;

2 - Sur les actions contre le notaire et la société MMA

Attendu qu'il convient d'abord de constater que la SCI [...] n'a pas interjeté appel à l'encontre des héritiers de R... V... ;

Attendu que la SCI du [...] n'ayant pas fait stipuler dans l'acte qu'elle acquérait le bien litigieux en vue de sa location, il ne peut être reproché au notaire de ne pas s'être assuré de l'aptitude du bien à cet usage ; qu'en tout état de cause, le notaire n'étant pas tenu de visiter le bien, aucun élément ne lui permettait de constater que les appartements situés en rez-de-jardin ne présentaient pas les caractéristiques exigées pour leur location à usage d'habitation ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il rejette les demandes formées contre la société MMA IARD et la société MMA IARD assurances mutuelles ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société civile immobilière du [...] et la condamne à payer la somme de 1 500 euros à M. E... et la somme de 1 500 euros à la société MMA IARD assurances mutuelles et à la société MMAI ARD ;

La condamne aux dépens qui pourront être recouvrés directement, pour ceux dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision, par Maître Ronzeau conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : G1
Numéro d'arrêt : 19/023837
Date de la décision : 13/11/2020
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2020-11-13;19.023837 ?
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