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14/10/2020 | FRANCE | N°20/06484

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 14 octobre 2020, 20/06484


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 8



ARRET DU 14 OCTOBRE 2020



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/06484 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCONF



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Juillet 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/00711







APPELANTE



Madame [Y] [V] [D]

[Adresse 4]

[Localité 7]



Ass

istée par Me Johanna BISOR BENICHOU, avocat au barreau de PARIS, toque : A0504







INTIMÉS



Madame [H] [L] épouse [A], agissant en sa qualité d'ayant droit de Monsieur [K] [N], décédé le [Date décès 3]...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRET DU 14 OCTOBRE 2020

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/06484 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCONF

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Juillet 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/00711

APPELANTE

Madame [Y] [V] [D]

[Adresse 4]

[Localité 7]

Assistée par Me Johanna BISOR BENICHOU, avocat au barreau de PARIS, toque : A0504

INTIMÉS

Madame [H] [L] épouse [A], agissant en sa qualité d'ayant droit de Monsieur [K] [N], décédé le [Date décès 3] 2016

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentée par Me Sébastien WEDRYCHOWSKI, avocat au barreau de PARIS

Madame [L] épouse [X], agissant en sa qualité d'ayant droit de Monsieur [K] [N], décédé le [Date décès 3] 2016

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Me Sébastien WEDRYCHOWSKI, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [U] [L], agissant en sa qualité d'ayant droit de Monsieur [K] [N], décédé le [Date décès 3] 2016

[Adresse 9]

[Adresse 1] (VD) - SUISSE

Représenté par Me Sébastien WEDRYCHOWSKI, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Septembre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, Présidente de chambre

Monsieur Benoît DEVIGNOT, Conseiller

Madame Corinne JACQUEMIN LAGACHE, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile

- signé par Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [Y] [D] a été embauchée verbalement par Madame [S] [N], à compter du 1er juillet 1993, en qualité d'aide ménagère puis d'employée de maison à compter du 1er janvier 2002. Le contrat de travail a été repris à compter du 1er septembre 2005 par M. [K] [N] au décès de son épouse.

Par écrit du 1er septembre 2013, M. [N] a indiqué que Mme [Y] [D] était engagée en qualité de dame de compagnie pour 52 heures par semaine au taux horaire de 20 euros.

Mme [D] travaillait dans le cadre du service de chèques emplois services à la personne ( CESU ).

En son dernier état, le salaire brut versé à Mme [D] s'élevait à 5 838.19 euros.

La convention collective des salariées du particulier employeur était applicable à la relation de travail.

Par courriers des 8 février et 10 mars 2015, Mme [D] a sollicité le paiement de ses salaires de décembre 2014, janvier et février 2015.

Par courrier recommandé du 24 avril 2015, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 4 mai suivant puis licenciée le 16 mai 2015.

Elle a saisi le conseil de prud'hommes de Paris en sa formation de référé qui a, par ordonnance du 21 septembre 2015, condamné M. [N] à lui verser la somme provisionnelle de 12 000 euros à titre de rappel de salaire.

Par acte du 17 juillet 2015, Mme [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris au fond pour faire valoir ses droit . Elle sollicitait le paiement d'un rappel de salaire pour la période du 1er décembre 2014 au 15 avril 2015, d'une indemnité de licenciement légale et des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Monsieur [K] [N] est décédé le [Date décès 3] 2016 après avoir été hospitalisé le 31 octobre 2014 et admis en maison de retraite médicalisée le 2 avril 2015.

Par ordonnance du 24 janvier 2018, le président du tribunal de grande instance de Paris a désigné Me [E] [B] en qualité de mandataire judiciaire pour administrer la succession.

Par jugement en date du 24 juillet 2018, notifié le 27 août suivant, la section activités diverses du conseil de prud'hommes de Paris a fixé au profit de Mme [D], au passif de la succession de M. [K] [N], les sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation :

- 8.000,00 euros à titre de rappel de salaires pour la période de décembre 2014 à avril 2015,

- 2.000,00 euros à titre d'indemnité de préavis,

- 200 euros à titre de congés payés afférents,

- 1.800,00 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le conseil a également :

- fixé le salaire moyen à la somme de 2 587,38 euros.

- ordonné la remise de documents sociaux conformes au jugement.

Par acte du 18 septembre 2018, l'avocat de Mme [D] a interjeté appel dudit jugement.

Par arrêt du 12 juin 2019, la Cour d'appel de Paris, statuant sur la succession de M. [N] a confirmé le jugement qui avait débouté Mme [D] et M. [O] de leur demande de nullité d'un testament du 13 décembre 2014 établi au profit les consorts [L] et infirmé le jugement concernant le legs particulier d'un montant de 60.000 euros, net de tous frais et droits au profit de Mme [D].

Par cette décision il a ainsi été mis fin à la mission de Maître [E] [B].

Les successibles de M. [N], Mme [H] [L] épouse [A], Mme [T] [L] épouse [X] et M. [U] [L], (consorts [L]) sont intervenus à l'instance et ont formé appel incident.

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 18 février 2020, Mme [D] requiert de la cour l'infirmation du jugement déféré et en statuant à nouveau de :

Fixer son salaire brut mensuel à la somme de 5 447,75 euros ;

Fixer ses créances au passif de la succession de Monsieur [N] comme suit :

- 23 619,65 euros à titre de salaires de la période du 1er décembre 2014 au 2 avril 2015 (dont 12 000 euros à déduire au titre de l'exécution de l'ordonnance de référé du 22/09/2015),

- 2 361,96 euros à titre de congés payés afférents,

- 3 881,07 euros à titre de rappel de salaires du 2 avril 2015 au 16 mai 2015,

- 388,11 euros à titre de congés payés afférents,

- 10 895,50 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1 089,55 euros à titre de congés payés afférents,

- 7 807,59 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 50 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- 3 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'intérêt légal avec le bénéfice de l'anatocisme,

- les dépens.

Elle sollicite également le débouté de l'ensemble des demandes présentées par Me [E] [B] es qualité.

Dans leurs dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 23 juin 2020, les consorts [L] demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a fixé le salaire de l'appelante à la somme de 2.587,38 euros, et l'a déboutée de la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Les intimés sollicitent, sur les autres dispositions, l'infirmation du jugement et forment appel incident. Ils requièrent de la cour de :

- débouter, à titre principal, Mme [D] de sa demande de rappel de salaire ou à titre subsidiaire, fixer l'éventuelle créance au passif de la succession de M. [K] [N] à la somme de 14.316,84 euros à ce titre.

- fixer la créance au passif de la succession de M. [N] aux sommes de :

* 5.174,76 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 3.208,91 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- la débouter de sa demande de congés payés sur le rappel de salaire et sur l'indemnité de préavis,

- déduire des éventuelles condamnations prononcées la provision de 12.000 euros qui a été versée à la salariée en exécution de l'ordonnance de référé.

- condamner Mme [D] à leur payer la somme de 48.742,15 euros au titre de la répétition de l'indu sur salaire concernant la période de septembre 2013 à novembre 2014.

- la condamner à leur payer la somme de 3500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure et aux conclusions susvisées pour l'exposé des moyens des parties devant la cour.

Par ordonnance de clôture du 23 juin 2020, le conseiller de la mise en état a prononcé la fin de l'instruction et a renvoyé l'affaire à l'audience le 3 septembre 2020.

SUR QUOI

Le conseil de prud'hommes a statué par deux jugements sur deux litiges concernant deux salariés différents et deux appels ont été interjetés.

En application de l'article 367 du code de procédure civile, il convient, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'ordonner la disjonction de l'instance inscrite au répertoire général du greffe sous le numéro RG 18/10417 en deux instances qui seront inscrites sous les numéros RG 18/10417 et 20/06484, et ce afin qu'il soit statué par deux arrêts distincts.

Sur l'exécution du contrat de travail

Concernant la fixation du salaire mensuel et le rappel de salaire

Mme [D] fait valoir qu'elle n'a reçu, ni bulletins de salaire, ni règlement de son salaire à partir du mois de novembre 2014, et ce, malgré la réclamation faite auprès de son employeur.

Elle fait grief au conseil des prud'hommes d'avoir retenu pour le calcul du rappel de salaire une rémunération mensuelle de base de 2587,38 euros alors que son salaire moyen sur 12 mois s'élevait à la somme de 5 447,75 euros brut ; elle estime ainsi sa créance sur la succession de M. [N] à la somme totale de 27'500,72 euros .

Les consorts [L] font valoir que la salariée n'est pas fondée à solliciter pareille somme, calculée sur la base de 225 heures par mois au taux horaire de 26,2 euros brut, alors qu'elle n'indique pas les jours et horaires de travail effectifs et que d'ailleurs elle n'a plus travaillé à partir du 31 octobre 2014, date d'hospitalisation de M. [N].

Ils ajoutent que Mme [D] n'avait aucune qualification professionnelle et qu'elle a ainsi abusé de la position de faiblesse de l'employeur pour obtenir en septembre 2013 une augmentation salariale alors que le salaire moyen d'une dame de compagnie est fixé dans la convention collective à la somme de 1 734.78 euros brut.

En application de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

De plus, les dispositions de l'article L7221-2 du code du travail énoncent que ne sont pas applicables aux salariés employés de maison les dispositions légales relatives à la durée du travail.

Il résulte du contrat de travail écrit conclu le 1er septembre 2013, que M. [N], après de nombreuses années ( 20ans ) passées sous contrat de travail verbal, a reconnu la qualité de « dame de compagnie » de Mme [D] et le fait qu'elle exerçait ses fonctions auprès de lui à raison de 52 heures par semaine pour une rémunération de 20 euros de l'heure. (pièce 276 du dossier de l'appelante).

De plus, cet écrit dont l'authenticité n'est pas contestée, est corroboré par les déclarations effectuées au centre'CESU entre le 1er septembre 2013 et le 31 novembre 2014, soit un salaire net payé de 4500 euros correspondant à 5 838.19 euros brut

Il ressort d'ailleurs de ces déclarations que la salariée a perçu sur les 12 derniers mois la somme totale de 65 373,06 soit : 5 447,75 euros brut en moyenne.

Le jugement qui a retenu un salaire de 2587,38 euros sera en conséquence infirmé sur ce point.

Quant aux man'uvres qui auraient été réalisées par Mme [D] pour obtenir un salaire non justifié de l'employeur, fragilisé par l'âge et la maladie, les intimés n'en justifient pas.

La cour relève également qu'il a été jugé le 23 février 2018 par le tribunal de grande instance de Paris (pièce n°5 du dossier des consorts [L]), statuant sur le litige ayant opposé les parties quant à la succession de M. [N], que celui-ci était parfaitement en situation d'établir un testament olographe le 13 décembre 2014 ; cette décision a par ailleurs était motivée sur la foi du rapport du Dr [Z], médecin neurologue expert désigné, qui a examiné l'intéressé en mai 2015. Donc a fortiori, M. [N] était en capacité d'établir, par écrit, le contrat de travail précité en septembre 2013 qui fait en conséquence la loi des parties.

L'article 3 de la convention collective dispose que les salariés qui occupent un poste d'emploi à caractère familial assumant une responsabilité auprès de personnes âgées ou handicapées, dépendantes ou non (dame ou homme de compagnie assurant une présence auprès de personnes en veillant à leur confort physique et moral), peuvent, dans le cadre de l'horaire défini dans le contrat, effectuer des heures de travail effectif et des heures de présence responsable dont le nombre respectif sera précisé au contrat, les heures de présence responsable étant celles où le salarié peut utiliser son temps pour lui-même tout en restant vigilant pour intervenir, s'il y a lieu, ces heures équivalant à 2/3 d'une heure de travail effectif.

L'article 6 de la convention collective prévoit que la présence de nuit est rémunérée par une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à 1/6 du salaire conventionnel versé pour une même durée de travail effectif.

Les consorts [L], qui souhaitent voir fixer le montant du salaire de Mme [D] en tenant compte des heures de travail effectif, des heures de présence responsable et de présence de nuit de la salariée, ne peuvent se fonder sur les textes précités dès lors que le contrat de travail ne fait aucune distinction quant au travail effectif ou non.

Or, il résulte de ces différents éléments que la rémunération quotidienne de Mme [D] par rapport au nombre d'heures effectuées par semaine peut être calculée à raison de neuf heures de travail effectif de jour sur cinq jours et 7 heures sur le sixième jour. Le repos hebdomadaire est ainsi respecté et ce nombre d'heures journalier ne peut être considéré comme dépassant la limite légale. Par voie de conséquence il n'y a pas lieu de retenir que certaines heures n'étaient que des heures de présence responsable de jour ou des heures de nuit.

En effet, même si la salariée disposait d'une chambre au domicile de l'employeur aucun élément du dossier ne permet d'établir que des heures de nuit étaient effectuées. La charge de la preuve incombant sur ce point, à défaut de mention dans le contrat de travail, à l'employeur et en conséquence en l'espèce à ses ayants-droit.

Dans ces conditions, à défaut de preuve de ce que Mme [D] ne se serait pas tenue à disposition de son employeur pendant la période d'hospitalisation de celui-ci, les salaires sont dus en application des dispositions contractuelles à hauteur de 52 heures par semaine pour les mois de décembre 2014 et janvier à mars 2015 soit, sur la base d'un salaire moyen sur les 12 derniers mois de 5 447,75 euros, tel que mentionné ci-dessus.

Il convient en conséquence de fixer pour cette période la somme de 23'619,65 euros à la succession de M. [N] au profit de Mme [D].

Pour la période du 2 avril 2015 au 16 mai 2015, comme le reconnaît l'appelante, elle ne s'est plus tenue, au-delà de la durée légale prévue à la convention collective, à la disposition de M. [N] qui était entré en maison de retraite ; le salaire dû pour cette période s'élevait mensuellement à 2587,38 euros conformément au salaire de base prévu à la convention collective.

Ainsi, il est dû au titre du rappel de salaire pour le mois d'avril 2015 et jusqu'au 16 mai 2015, date du licenciement, la somme de 3880,07 euros.

Les consorts [L] doivent en conséquence être condamnés, en qualité d'ayants-droit de M. [K] [L], au paiement de la somme totale de 27'499,72 euros à titre de rappel de salaire.

Il convient dès lors d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a limité à la somme de 8.000 euros le rappel de salaire pour la période considérée.

La somme de 12 000 euros qui a d'ores et déjà été versée à Mme [D] le 9 avril 2018 en exécution de l'ordonnance de référé du 21 septembre 2015 sera déduite du montant des sommes dues.

Concernant l'exécution déloyale du contrat de travail

L'article L1222-1 du code du travail énonce que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

Mme [D] reproche à son employeur ou à ses ayants-droit:

- de ne pas lui avoir remis de bulletin de salaire depuis le mois de décembre 2014, ni procédé au versement de ce salaire,

- de ne pas lui avoir délivré l'attestation Pôle-emploi avec pour conséquence que ses droits en ont été retardés,

- de ne pas lui avoir versé, avant le 9 avril 2018, les sommes dues en exécution de l'ordonnance de référé du 21 septembre 2015.

Il ressort des circonstances de l'espèce que M. [N], dont il n'est pas contesté qu'il a pendant de nombreuses années parfaitement exécuté le contrat de travail, a rencontré des problèmes de santé importants qui ont occasionné une hospitalisation le 31 octobre 2014 et une admission en maison de retraite médicalisée en janvier 2015.

Le non-paiement du salaire est en conséquence lié à l'état de santé de l'employeur et non à une quelconque mauvaise foi, qui n'est d'ailleurs pas invoquée par Mme [D].

Il ressort de ces éléments que Mme [D] ne rapporte pas la preuve d'une exécution déloyale du contrat de travail par M. [N].

Enfin, Mme [D] ne peut invoquer comme manquement à l'exécution du contrat de travail des faits postérieurs à la rupture de celui-ci et n'est donc pas fondée en son grief concernant l'exécution tardive de l'ordonnance de référé précitée par les ayants-droit de l'employeur ; il doit être souligné que l'ordonnance de référé a été rendue après le licenciement de la salariée.

En conséquence, Mme [D] est déboutée de ce chef de demande et la décision de première instance confirmée sur ce point.

Concernant la répétition de l'indu

Les légataires de M. [N] sollicitent, à titre reconventionnel, la répétition par Mme [D] au profit de la succession de M. [N] d'une somme de 48.742,15 euros au titre de l'indu perçu sur la base d'un salaire mensuel 5 838.19 euros brut sur la période de septembre 2013 à novembre 2014, alors qu'elle aurait dû percevoir au maximum un salaire d'un montant 2 587,38 euros par mois brut tel que prévu à la convention collective.

Il résulte de la fixation du salaire moyen de la salarié et des salaires versés de 5.838,19 euros brut par mois pour la période considérée ci-dessus, que Mme [D] été payée de son salaire contractuel et il y a lieu en conséquence de débouter les consorts [L] de leur demande.

Sur les indemnités de rupture

La salariée qui ne remet pas en cause le bien-fondé du licenciement, sollicite une indemnité de préavis égale à deux mois de salaire et une indemnité légale de licenciement prenant en compte ses 21 ans et 11 mois et 16 jours d'ancienneté.

Les dispositions de l'article R.1234-2 du code du travail, alors en vigueur, selon lesquelles l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté, s'appliquent à tous les salariés y compris les employés de maison, la liste des textes mentionnées à l'article L.7221-2 du même code n'étant pas limitative.

Le calcul de l'indemnité de licenciement devant tenir compte de la durée du préavis, la salariée sollicite à juste titre un montant calculé sur une ancienneté de 21 ans 11 mois et 16 jours. Il lui sera alloué, sur la base du salaire mensuel brut de 5447,75 euros , la somme de 7807,59 euros.

Le jugement sera infirmé sur le quantum des sommes retenues sur ce point.

Par ailleurs, il est dû au titre de l'indemnité de préavis la somme de 10'995,50 euros, soit deux mois de salaire.

Sur les congés payés

Les attestations d'emploi - valant bulletins de salaire - de Mme [D], établis par le centre national du CESU (pièces 261 à 274 du dossier de l'appelante), incluent, selon les dispositions applicables avant le 1er juin 2015 date d'application du décret du 23 mars 2015, les congés payés dont le montant est égal à un dixième de la rémunération brute, il n'y a donc pas lieu de faire droit à la demande de l'appelante au titre d'un solde de congés payés.

Mme [D] doit en conséquence être déboutée de sa demande de congés payés sur le rappel de salaire ainsi que sur le préavis, le jugement devant être infirmé sur ce point.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les consorts [L] supporteront la charge des dépens de première instance et d'appel.

Ils seront également condamnés à payer la somme de 3000 euros pour les frais irrépétibles exposés par Mme [D] en première instance et cause d'appel, soit un montant total de 3000 euros, chacun pour un tiers conformément à leur part successorale ( au vu de l'attestation de notoriété).

Sur les intérêts légaux

Les sommes dues au salarié porteront intérêt au taux légal à compter de la première convocation de l'employeur devant le conseil de prud'hommes s'agissant de créances salariales, soit le 22 juillet 2015.

Il convient de préciser que les intérêts courront jusqu'au jour de l'exécution de l'ordonnance de référé soit le 9 avril 2018 sur la somme de 27'499,72 euros, puis déduction faite de la provision versée de 12 000 euros sur la somme de 15 499,72 euros jusqu'au parfait paiement.

Ces intérêts seront capitalisés par année entière en application des dispositions de l'article 1343-1 du code civil.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

PRONONCE la disjonction des deux instances inscrites sous le numéro RG 18/10417 et dit que la présente procédure sera suivie sous le numéro RG 20/06484.

DÉCLARE recevable l'intervention de Mme [H] [L] épouse [A], Mme [T] [L] épouse [X] et M. [U] [L], en leur qualité d'ayants-droit de M. [K] [N].

MET hors de cause Me [E] [B].

CONFIRME le jugement en ce qu'il a débouté Mme [Y][D] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

INFIRME pour le surplus.

Statuant à nouveau des chefs infirmés :

FIXE le montant du salaire moyen de [Y] Mme [D] sur 12 mois à la somme de 5 447,75 euros.

FIXE la créance de Mme [Y] [D] au passif de la succession de M. [K] [N] aux sommes suivantes :

- 27'499,72 euros à titre de rappel de salaires,

- 10 895,50 euros à titre d'indemnité de préavis,

- 7 807,59 euros à titre d'indemnité légale de licenciement.

DIT que la somme de 12 000 euros versée à tire provisionnel vient en déduction de la somme de 27'499,72 euros correspondant au rappel de salaires,

DIT que les intérêts au taux légal courront sur la somme de 27'499,72 euros à partir du 22 juillet 2015 jusqu'au 9 avril 2018 puis sur la somme de 15 499,72 euros jusqu'au paiement.

Pour sommes dues à titre d'indemnité de préavis et d'indemnité légale de licenciement, les intérêts courront du 22 juillet 2015 jusqu'au paiement.

DIT que ces intérêts seront capitalisés par année entière en application des dispositions de l'article 1343-1 du code civil.

DÉBOUTE Mme [Y] [D] de sa demande de congés payés.

Y ajoutant

DÉBOUTE Mme [H] [L] épouse [A], Mme [T] [L] épouse [X] et M. [U] [L], en qualité d'ayants-droit de M. [K] [N] de leur demande reconventionnelle.

CONDAMNE Mme [H] [L] épouse [A], Mme [T] [L] épouse [X] et M. [U] [L], à payer à Mme [Y] [D] la somme totale de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel, chacun pour un tiers conformément à sa part successorale.

CONDAMNE Mme [H] [L] épouse [A], Mme [T] [L] épouse [X] et M. [U] [L], aux dépens de première instance, chacun pour un tiers conformément à sa part successorale.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 20/06484
Date de la décision : 14/10/2020

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°20/06484 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-10-14;20.06484 ?
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