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05/10/2020 | FRANCE | N°18/00231H

France | France, Cour d'appel de Paris, C6, 05 octobre 2020, 18/00231H


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 6

ORDONNANCE DU 05 OCTOBRE 2020
Contestations d'Honoraires d'Avocat
(No /2020, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 18/00231 - No Portalis 35L7-V-B7C-B5KJX

NOUS, Agnès TAPIN, Présidente de chambre à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Karolyn MOUSTIN, Greffière lors des débats et de Vanessa ALCINDOR, Greffièr

e lors de la mise à disposition de l'ordonnance.

Vu le recours formé par :

Madame G... E...
[...]
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 6

ORDONNANCE DU 05 OCTOBRE 2020
Contestations d'Honoraires d'Avocat
(No /2020, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 18/00231 - No Portalis 35L7-V-B7C-B5KJX

NOUS, Agnès TAPIN, Présidente de chambre à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Karolyn MOUSTIN, Greffière lors des débats et de Vanessa ALCINDOR, Greffière lors de la mise à disposition de l'ordonnance.

Vu le recours formé par :

Madame G... E...
[...]
[...]
Comparante en personne,

Demanderesse au recours,

contre une décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS dans un litige l'opposant à :

Maître K... M...
[...]
[...]
Comparant en personne,

Défendeur au recours,

Par décision contradictoire, statuant publiquement, et après avoir entendu les parties présentes à notre audience du 17 Juin 2020 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,

L'affaire a été mise en délibéré au 28 Septembre 2020 puis prorogée au 05 octobre 2020 :

Vu les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;

Le cabinet RMV Gestion, mandataire de Madame G... E..., a demandé à Maître K... M... en juin 2014 d'engager une procédure d'expulsion contre la locataire de celle-ci qui ne payait pas ses loyers.
Aucune convention d'honoraires n'a été signée par les parties.
Madame E... a mis fin à la mission de Maître M... le 17 mai 2017 après qu'il ait obtenu un jugement du tribunal d'instance de Nogent sur Marne au profit de celle-ci.

Madame E... a contesté avoir donné mandat à Maître M... puisque, selon elle, c'est l'agence RMV Gestion à qui elle a confié la gestion de son appartement, qui a signé le mandat avec l'avocat, et a dans ces conditions refusé de payer les honoraires de ce dernier.

Par lettre du 20 février 2017, Maître M... a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats de Paris d'une demande de fixation et de recouvrement des honoraires dus par Madame E... d'un montant de 3.100 € HT, sur lesquels aucune provision n'a été payée.

Par décision contradictoire du 20 février 2018, la déléguée du bâtonnier a :
- débouté Madame E... de sa demande tendant à voir déclarer le bâtonnier incompétent au profit du tribunal de grande instance,
- fixé à la somme de 3.100 € HT le montant total des honoraires dus à Maître M... par Madame E...,
- constaté qu'aucun règlement n'est intervenu,
- dit, en conséquence, que Madame E... devra verser à Maître M... la somme de 3.100 € HT avec intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2017, date de la saisine du bâtonnier, outre la TVA au taux de 20 % ainsi que les frais d'huissier de justice en cas de signification de la décision,
- débouté les parties de toutes autres demandes.

Par lettre RAR du 22 mars 2018, le cachet de la Poste faisant foi, Madame E... a exercé un recours contre la décision.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 17 juin 2020 par lettres RAR du 30 janvier 2020 dont Maître M... a signé l'AR le 1er février 2020, et Madame E... le 5 février 2020.

A l'audience, Madame E... a demandé oralement, conformément à ses écritures, de dire qu'elle ne doit payer aucune somme à Maître M... parce qu'elle n'a jamais signé de convention avec lui, que les factures d'honoraires ne sont pas à son nom, et qu'elle « n'a plus voulu que Maître M... travaille pour son dossier ».

Elle explique n'avoir eu de contacts qu'avec le cabinet RMV et son gérant Monsieur P..., n'avoir jamais rencontré Maître M..., ne s'être jamais entretenue avec lui, n'avoir jamais été informée des honoraires, n'avoir jamais reçu aucune demande de provision de la part de Maître M..., ni même de la société RMV, et n'avoir jamais reçu de conclusions avant l'audience.
Elle ajoute que l'agence RMV a cessé d'avoir recours à cet avocat qui ne s'est pas présenté à une réunion d'expertise.

Maître M... a demandé oralement, et conformément à ses écritures, de :
- condamner Madame E... au paiement de la somme de 3.100 € HT + TVA en règlement des notes d'honoraires F14/4154 du 7 juillet 2014, F15/4742 du 23 novembre 2015 et F16/4982 du 7 juin 2016 avec intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2017, date de la saisine du bâtonnier ainsi que les frais d'huissier,
- condamner Madame E... au paiement d'une somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Maître M... soutient :
- qu'il n'est ni contesté ni contestable qu'une procédure d'expulsion a été diligentée par lui dans l'intérêt de Madame E... et que les locataires de celle-ci ont bien été expulsés de son appartement alors que le logement avait été déclaré partiellement insalubre par l'expert judiciaire ;
- qu'il n'est pas contesté que le cabinet RMV Gestion était le gestionnaire de Madame E... à qui elle avait donné mandat le 15 février 2013 de gérer son bien immobilier, que d'ailleurs ce mandat ne stipule pas que les honoraires et frais d'expulsion devront être supportés par le gestionnaire RMV ;
- que Madame E... a confirmé à deux reprises son mandat à Maître M... par mail du 6 février 2017 et par courrier du 17 mai 2017 dans lequel elle se reconnaît débitrice des honoraires et frais ;
- et qu'il a facturé 15 h 30 de travail, tout à fait raisonnables, au taux horaire de 200 € HT, expliquant justifier de toutes ses diligences.

Postérieurement à l'audience, soit le 19 juin 2020, le cachet de la Poste faisant foi, Madame E... a adressé à un courrier à la cour d'appel, chambre 2.6, ainsi que de nouvelles pièces.
Madame E... n'ayant pas été autorisée le jour de l'audience à nous adresser de nouvelles pièces après l'audience, celles-ci ainsi que le courrier RAR du 19 juin 2020 sont écartés des débats.

SUR CE

1 - Le recours de Madame E... qui a été effectué dans le délai d'un mois prévu par l'article 176 du décret no 91-1197 du 27 novembre 1991 modifié, est recevable.

2 - Comme l'a fait le bâtonnier, il convient de statuer tout d'abord sur le mandat confié à Maître M....

Suivant l'article 1984 du code civil, « Le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom.
Le contrat ne se forme que par l'acceptation du mandataire. »

Il ressort des pièces des parties et de leurs explications que deux mandats consécutifs existent dans ce dossier :
- Madame E... a donné un « mandat de gestion » à la sarl RMV Gestion le 15 février 2013, d'un an renouvelable par tacite reconduction,
- et Maître M... a engagé une procédure judiciaire pour le compte de Madame E... à la demande de la sarl RMV, sans qu'une convention d'honoraires n'ait été signée.

Le « mandat de gestion » confié par Madame E... à la sarl RMV consiste pour cette dernière (cf pièce 33 de Maître M...) à « Gérer les biens [appartenant à la première situé, [...] et qui est un appartement deux pièces principales avec box et cave] les louer aux prix, charges, durée et conditions précédemment déterminées [ c'est à dire : loyer d'habitation mensuel de 800 €, loyer garage mensuel de 60€, provisions charges mensuelles de 20 €, assurance GRL de 2,60 % TTC] signer tous baux et locations, les renouveler, les résilier, donner et accepter tous congés, faire dresser tous états des lieux
» ;
Il est également indiqué dans la partie « Etendue des pouvoirs » de la sarl RMV que :
«
A défaut de paiement par les débiteurs et en cas de difficultés quelconque, [ la sarl pourra ] exercer toutes poursuites judiciaires, toutes actions résolutoires ou autres, faire tous commandements, sommations, assignations et citations devant tous tribunaux et commissions administratives, se concilier, transiger ou requérir jugements, les faire exécuter, former toutes oppositions, prendre part à toutes assemblées de créanciers ... »

Il résulte de ce « mandat de gestion » que la sarl RMV pouvait confier la défense des intérêts de Madame E... à un avocat que la sarl RMV choisissait, mais que le paiement des honoraires de l'avocat devait être effectué par Madame E... et non par la sarl RMV, aucune disposition du mandat précité du 15 février 2013 n'indiquant que cette dernière devait le payer.

C'est donc à bon droit, et au vu du contrat de mandat du 15 février 2013, que le bâtonnier a dit que le paiement des honoraires de Maître M... incombe à Madame E..., précisant justement que la teneur des propos de cette dernière dans son courrier du 17 mai 2017 adressé à Maître M... est parfaitement claire et contredit l'argumentation de Madame E... dès lors qu'elle lui a écrit :
« Je souhaite ne plus poursuivre notre collaboration et je vous prie de bien vouloir me restituer l'intégralité de mon dossier contenant toutes les pièces relatives à l'affaire en cours, et ceci, conformément à l'article 14 du décret no 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d'avocat. Veuillez m'informer sur le montant des honoraires restant dus. »

Madame E..., dans ce courrier du 17 mai 2017, n'a fait que réitérer cette reconnaissance de l'existence du mandat qu'il existe entre elle et Maître M..., et qu'elle doit lui payer ses honoraires, qu'elle avait déjà faite dans un mail du 6 février 2017 dans lequel elle lui avait écrit :
« Objet : Arrêt du suivi de l'affaire T.../E...
Maître M..., je vous demande de ne plus continuer à suivre ce dossier car je ne suis plus en mesure d'avoir recours à vos services ... »

La décision du bâtonnier est donc confirmée de ce chef.

3 - Il y a lieu ensuite de rappeler que les griefs de Madame E... sur la qualité du travail réalisé par Maître M..., qui renvoient à la responsabilité de l'avocat dans l'accomplissement de sa mission, ne relèvent pas de l'appréciation du bâtonnier, ni du Premier président statuant dans le cadre des articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991, mais de la compétence exclusive du juge de droit commun. En effet, la procédure de contestation des honoraires d'un avocat prévue par ces articles présente un caractère spécifique et n'a vocation qu'à fixer les honoraires éventuellement dus par un client à son avocat en exécution de la mission qu'il lui a confiée à l'exclusion de tout autre contentieux.

4 - Enfin, en l'absence d'application de la convention d'honoraires signée par les parties, et dès lors que le début du mandat confié à Maître M... date de début juillet 2014, il convient de faire application de l'article 10 de la loi no 71-1130 du 31 décembre 1971 modifié par l'article 4 de la loi no 2011-331 du 28 mars 2011, pour fixer ses honoraires et frais, et qui dit notamment :
« La tarification de la postulation et des actes de procédure est régie par les dispositions sur la procédure civile. Les honoraires de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.
A défaut de convention entre l'avocat et son client, l'honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci ... »

Trois factures ont été émises par Maître M... (cf pièce 1 de Madame E...) :
- la facture noF14/4154 du 7 juillet 2014 ayant pour référence « TMV GESTION E.../T... » d'un montant de 800 € HT, soit 960 € TTC pour les diligences suivantes : « analyse du dossier, assignation, placement » ;
- la facture noF15/4742 du 23 novembre 2015 ayant les mêmes références que la facture précédente, d'un montant de 1.250 € HT, soit 1.500 € TTC pour les diligences suivantes : « Suivi de la procédure
conclusions
communication de pièces – dossier de plaidoirie – audience du 24 novembre 2015 » ;
- la facture noF16/4982 du 7 juin 2016 ayant les mêmes références que les factures précédentes, d'un montant de 1.050 € HT, soit 1.260 € TTC pour les diligences suivantes : « Suivi de la procédure – conclusions – audience du 7 juin 2016 ».

Aucune des trois factures n'a été payée par Madame E....

Par des motifs dont les débats devant la cour n'ont pas altérés la pertinence et qu'il convient d'adopter, le bâtonnier a fait une juste application des règles de droit, comme une exacte appréciation des faits et documents de l'espèce, en retenant :
- que sur la base du taux horaire de 200 € sollicité par Maître M..., au vu des très nombreuses diligences accomplies, il apparaît que la somme sollicitée est d'un montant tout à fait raisonnable ;
- qu'il convient de relever que les diligences facturées par Maître M... sont justifiées (cf pièces 1, 4 à 12 de Maître M...) ; qu'il a en effet procédé à la rédaction d'une assignation et à la délivrance de cette dernière, puis a communiqué de nombreuses pièces, a établi des conclusions en réponse et à plaidé le dossier devant le tribunal d'instance de Nogent ; qu'il a dû établir de nouvelles écritures et plaider une seconde fois le dossier dans le cadre de la procédure d'expertise ;
- qu'en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, et au regard des éléments sus énoncés, des faits constatés ainsi que des diligences accomplies et vérifiées, il convient de fixer à la somme de 3.100 € HT le montant des honoraires dus à Maître M... par Madame E... et ce avec intérêt au taux légal à compter du 6 septembre 2017, date de la saisine du bâtonnier.

Les moyens invoqués par Madame E... au soutien de son recours ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile, ceux dont le bâtonnier a connus et auxquels il a répondu par des motifs exacts et pertinents que nous adoptons, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation.

L'ordonnance sera donc confirmée sur le montant des honoraires fixés et alloués à Maître M....

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de Maître M... les frais irrépétibles exposés dans la présente instance. Madame E... est condamnée à lui payer la somme de 1.000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Enfin, Madame E... qui succombe, est condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par ordonnance CONTRADICTOIRE, en dernier ressort, après débats publics et par mise à disposition de la présente décision,

Rejetons des débats, comme produits tardivement, le courrier et les pièces jointes adressés le 19 juin 2020, soit postérieurement à l'audience du 17 juin 2020, le cachet de la Poste faisant foi,

Confirmons la décision rendue le 20 février 2018 par le bâtonnier de l'ordre des avocats de Paris

Condamnons Madame G... E... aux dépens,

Condamnons Madame G... E... à payer à Maître K... M... la somme de 1.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejetons toutes les autres demandes.

Disons qu'en application de l'article 177 du décret no 91-1197 du 27 novembre 1991, l'arrêt sera notifié aux parties par le Greffe de la Cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : C6
Numéro d'arrêt : 18/00231H
Date de la décision : 05/10/2020
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2020-10-05;18.00231h ?
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