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24/09/2020 | FRANCE | N°19/09057

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 24 septembre 2020, 19/09057


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 8



ARRÊT DU 24 SEPTEMBRE 2020



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/09057 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B727N



Décision déférée à la cour : jugement du 11 avril 2019 -juge de l'exécution de Bobigny - RG n° 18/12832





APPELANTE

Société d'Economie Mixte SEMISO

siret n°662 044

155 00031

[Adresse 6]

[Localité 8]



Représentée par Me Maxime Tondi de la selarl Tondi Maxime, avocat au barreau du Val-de-Marne, toque : PC 145







INTIMÉS

M. [L] [K]

né le [Date n...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8

ARRÊT DU 24 SEPTEMBRE 2020

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/09057 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B727N

Décision déférée à la cour : jugement du 11 avril 2019 -juge de l'exécution de Bobigny - RG n° 18/12832

APPELANTE

Société d'Economie Mixte SEMISO

siret n°662 044 155 00031

[Adresse 6]

[Localité 8]

Représentée par Me Maxime Tondi de la selarl Tondi Maxime, avocat au barreau du Val-de-Marne, toque : PC 145

INTIMÉS

M. [L] [K]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 10] (Sénégal)

Chez Monsieur et Madame [B] [Adresse 4]

[Localité 7]

Représenté et assisté par Me Michèle Arnold, avocat au barreau de Paris, toque : E0155

Mme [U] [K]

née le [Date naissance 3] 1972 à [Localité 11] (Sénégal)

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentée par Me Michèle Arnold, avocat au barreau de Paris, toque : E0155

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 septembre 2020, en audience publique, devant la cour composée de :

Emmanuelle Lebée, conseillère faisant fonction de présidente de chambre

Gilles Malfre, conseiller, chargé du rapport

Bertrand Gouarin, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Juliette Jarry

Arrêt :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Emmanuelle Lebée, conseillère faisant fonction de présidente de chambre et par Juliette Jarry, greffière, présente lors de la mise à disposition.

Par acte sous-seing privé du 10 février 2010, la société d'économie mixte de construction et de rénovation de la ville de Saint-Ouen (la Semiso) a consenti à M. et Mme [K] un bail d'habitation portant sur un appartement situé [Adresse 5].

Par ordonnance de référé du 27 février 2015 signifiée le 21 mai 2015, le tribunal d'instance de Saint-Ouen a constaté l'acquisition de la clause résolutoire du bail mais en a suspendu les effets,'sous réserve du respect d'un échéancier consistant à s'acquitter de la dette locative d'un montant de 4 257,60 euros au 24 décembre 2014, par 24 mensualités d'au moins 100 euros en sus du loyer courant, le premier versement étant exigible à l'échéance contractuelle suivant la signification de la décision.

La Semiso a dénoncé aux époux [K] une déchéance du terme, par exploit du 28 décembre 2015 et en exécution de l'ordonnance de référé, a délivré le même jour un commandement de quitter les lieux. L'expulsion de M.'et Mme [K] est intervenue le 24 octobre 2018.

Par jugement du 11 avril 2019, le juge de l'exécution du tribunal d'instance de Bobigny a annulé le commandement de quitter les lieux, a ordonné la réintégration des époux [K] dans les lieux et a condamné la Semiso à payer la somme de 10 000 euros de dommages-intérêts, outre celle de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.

La Semiso a interjeté appel de ce jugement, selon déclaration du 24 avril 2019.

Par ordonnance du 3 juillet 2019, le premier président de la cour d'appel de Paris a rejeté la demande de sursis à exécution présentée par la Semiso et l'a condamnée à payer la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions du 5 juillet 2019, l'appelante sollicite, à titre principal, l'infirmation du jugement et demande à la cour, statuant à nouveau, de déclarer irrecevable l'action engagée par les époux [K]. Subsidiairement, au fond, elle conclut au débouté des demandes des intimés et entend qu'ils soient condamnés solidairement à payer la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive, outre celle de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions d'incident du 25 juin 2020, la Semiso entend que les dernières conclusions des intimés et leurs nouvelles pièces soient écartées des débats.

Par conclusions du 23 juin 2020, M. et Mme [K] poursuivent la confirmation du jugement et, y ajoutant, demandent à la cour de condamner la Semiso à payer la somme de 100'000 euros de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice découlant de leur expulsion abusive,'entendent qu'il soit dit et jugé qu'ils ont intérêt à agir et, en tout état de cause, sollicitent la condamnation de l'appelante à payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions d'incident du 25 juin 2020, les intimés entendent que leurs dernières écritures et pièces soient reçues.

SUR CE

Sur les dernières conclusions et les nouvelles pièces produites par les intimés :

L'appelante fait valoir qu'alors que les intimés n'avaient pas conclu pendant plusieurs mois,'ils ont pris de nouvelles écritures la veille de la date à laquelle l'affaire devait être clôturée, en produisant de nouvelles pièces.

Cependant, les intimés soulignent à juste titre que leurs nouvelles écritures, qui avaient pour objet d'actualiser leur situation personnelle, notamment leur relogement proposé par la Semiso le 6 mai 2020, mentionnent en marge les rajouts à leurs précédentes conclusions, dans les paragraphes concernés, uniquement aux pages 12 à 14 et 22 à 24.

Il est par ailleurs relevé que les pièces supplémentaires produites, n° 56 à 73, n'ont que peu de liens avec le débat principal devant la cour, à savoir le respect des délais de paiement accordés par le tribunal d'instance de Saint-Ouen.

Il sera ajouté que la cour a reporté la clôture de l'affaire au 2 juillet 2020, mettant l'appelante en mesure de répliquer aux ajouts mentionnés dans les nouvelles conclusions.

Il sera par conséquent statué au vu des dernières conclusions et pièces des intimés.

Sur l'irrecevabilité des demandes de M. et Mme [K]':

C'est à tort que la Semiso soulève cette irrecevabilité, en ce que le premier juge n'a été saisi par assignation du 16 novembre 2018 que d'une demande de délais pour quitter les lieux, demande devenue sans objet du fait de l'expulsion effectuée le 24 octobre 2018, alors que le juge de l'exécution a également été saisi par décision d'incompétence du 13 décembre 2018 du tribunal d'instance de Saint-Ouen rendu à la suite de l'autre instance introduite sur assignation du 16 novembre 2018 par M. et Mme [K], aux fins de nullité du commandement de quitter les lieux.

Sur la régularité du commandement de quitter les lieux du 28 décembre 2015 :

Il résulte des termes de l'ordonnance de référé du 27 février 2015 signifiée le 21 mai 2015 que les époux [K] devaient régler le loyer courant ainsi qu'une somme complémentaire mensuelle de 100 euros, dans les conditions contractuelles du bail. Il convient donc de vérifier si ces sommes ont été payées en intégralité et à bonne date, chaque mois.

Il importe peu que le ou les incidents de paiement sur lesquels la Semiso s'est fondée ne sont pas mentionnés dans l'acte de déchéance du terme délivré le même jour que le commandement de payer. En effet, cette déchéance du terme n'était pas prévue par le dispositif de la décision exécutée et était dés lors superfétatoire. Dans tous les cas, il ne saurait être exigé que cet acte comporte la mention de ces impayés, alors qu'une telle mention n'est pas prévue pour le commandement de quitter les lieux, ainsi qu'il est dit à l'article R. 411-1 du code des procédures civiles d'exécution, seul acte devant être délivré en vue de l'expulsion.

Le bail stipule que le loyer est payable mensuellement, à terme échu, le dernier jour de chaque mois, au domicile élu du bailleur. L'ordonnance ayant été signifiée le 21 mai 2015, la première échéance contractuelle échue postérieure à la signification était donc celle de mai 2015. Par conséquent, le loyer courant et la somme supplémentaire de 100 euros devaient être payés pour la première fois en mai 2015, soit avant le 31 mai 2015.

Il résulte de l'examen du décompte que le terme (loyer + 100 euros) du mois de mai 2015 a été prélevé le 10 juin 2015, tout comme ceux de juin et juillet 2015 outre un virement supplémentaire de 100 euros pour ces deux derniers mois. Le terme d'août 2015 a été prélevé le 10 septembre 2015, outre un virement supplémentaire de 200 euros le 28 septembre 2015. Le terme de septembre 2015 a été prélevé le 10 octobre 2015, outre un virement supplémentaire de 1 000 euros le 27 octobre 2015, mais la plus grande partie du prélèvement du 10 octobre 2015 a été rejetée le 14 octobre 2015 (873,58 euros sur 959,62 euros) puis finalement réglée par virement le 15 octobre 2015. Le terme d'octobre 2015 a été prélevé le 10 novembre 2015 mais ce prélèvement de 767,84 euros a été rejeté les 16 et 17 novembre 2015. Le terme novembre 2015 a été prélevé le 10 décembre 2015.

Si, conformément au bail, la Semiso fait valoir que le loyer est payable le dernier jour de chaque mois, les avis d'échéance versés aux débats, adressés entre le 18 et le 20 de chaque mois,'mentionnent une exigibilité du loyer le dernier jour du mois ou le 1er du mois suivant. Pour autant, la bailleresse ne se prévaut pas du fait que, pour la période considérée, les loyers ainsi que la somme complémentaire de 100 euros n'ont été versés que le 10 du mois suivant,'entérinant par conséquent ce paiement avec retard.

L'échéance de septembre 2015 a été payée avec retard, le 15 octobre 2015, postérieurement au 10 octobre 2015, étant souligné que les sommes supplémentaires précédemment versées en juin, juillet et août 2015 (400 euros) ne permettent pas de régulariser ce retard. La bailleresse ne se prévaut cependant pas de ce retard dans ses conclusions.

Le terme d'octobre 2015 a été prélevé le 10 novembre 2015 mais ce prélèvement de 767,84 euros a été rejeté les 16 et 17 novembre 2015. M. et Mme [K] soutiennent que cette échéance d'octobre 2015 a été réglée par anticipation, par le virement de 1 000 euros effectué le 27 octobre 2015, comme retenu par le premier juge.

L'article 1256 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, précise que lorsque la quittance ne porte aucune imputation, le paiement doit être imputé sur la dette que le débiteur avait pour lors le plus d'intérêt d'acquitter entre celles qui sont pareillement échues; sinon, sur la dette échue, quoique moins onéreuse que celles qui ne le sont point. Si les dettes sont d'égale nature, l'imputation se fait sur la plus ancienne ; toutes choses égales, elle se fait proportionnellement.

Ainsi que le souligne justement l'appelante, alors que les intimés ne justifient pas avoir précisé une imputation à leur virement de 1 000 euros, ce versement, en ce qu'il est intervenu le 27 octobre 2015, ne pouvait pas s'imputer sur le terme d'octobre 2015 qui n'était pas encore échu. Ce paiement s'est donc imputé sur le solde de l'arriéré locatif mais non sur le loyer courant du mois d'octobre 2015 qui n'a donc pas été payé dans les délais.

Il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a annulé le commandement de quitter les lieux et en ce qu'il a ordonné la réintégration de M. et Mme [K].

Sur les autres demandes :

Il n'y a pas lieu de statuer sur la supposée renonciation de la Semiso à se prévaloir du commandement de quitter les lieux, alors que M. et Mme [K] ne formulent, au dispositif de leurs conclusions, aucune demande en résultant et relative à leur expulsion. Dans tous les cas, il n'est attesté d'aucun acte de renonciation de la Semiso à se prévaloir de cet acte.

La solution donnée au litige conduit à débouter les intimés de leur demande de dommages-intérêts, le jugement étant infirmé de ce chef.

La Semiso sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, n'alléguant aucun préjudice.

L'équité commande de ne pas prononcer de condamnation au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Déboute la société d'économie mixte de construction et de rénovation de la ville de Saint-Ouen de sa demande de rejet des derniers écritures et pièces de M. [L] [K] et de Mme [U] [K] ;

Dit M. [L] [K] et de Mme [U] [K] recevables en leurs demandes ;

Infirme le jugement';

Statuant à nouveau ;

Dit régulier le commandement de quitter les lieux du 28 décembre 2015 ;

Rejette toute autre demande ;

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne in solidum M. [L] [K] et Mme [U] [K] aux dépens de première instance et d'appel.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 19/09057
Date de la décision : 24/09/2020

Références :

Cour d'appel de Paris G8, arrêt n°19/09057 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-09-24;19.09057 ?
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