Copies exécutoires délivrées aux parties le RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1
ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2020
(no /2020, pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 19/05686 - No Portalis 35L7-V-B7D-B7QU7
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Février 2019 -Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE - RG no 17/00842
APPELANTE
Madame [U] [E] épouse [L]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Pascal FERRARIS de la SCP S.C.P. THUAULT-FERRARIS-CORNU, avocat au barreau D'AUXERRE
INTIME
Monsieur [Y] [W]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Patricia NOGARET de la SCP REVEST-LEQUIN-NOGARET-DE METZ-CROCI-RLNDC, avocat au barreau D'AUXERRE
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 juin 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Monique Chaulet, conseiller, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Claude Creton, président
Mme Christine Barberot, conseillère
Mme Monique Chaulet, conseillère
Greffier, lors des débats : M. Grégoire Grospellier
Arrêt :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Claude Creton, Président et par Grégoire Grospellier, greffier lors de la mise à disposition.
***
Mme [U] [E] veuve [L] est propriétaire d'un immeuble d'habitation sis [Adresse 1], lequel est accessible depuis la voie publique par un escalier privatif jouxtant le mur pignon de l'immeuble voisin sis [Adresse 2].
Par acte acte d'huissier du 14 septembre 2017, Mme [E] a fait assigner M. [Y] [W], son voisin, devant le tribunal de grande instance d'Auxerre aux fins de le voir condamné sous astreinte à remplacer la fenêtre murale par un châssis fixe et inamovible et à supprimer la fenêtre de toit.
Par jugement du 4 février 2019, le tribunal de grande instance d'Auxerre a :
. dit que l'installation de la fenêtre murale sur le fonds de [Y] [W], sis [Adresse 2], telle qu'elle ressort du procès-verbal de constat dressé le 4 novembre 2007 par Maître [Z] [F], huissier de justice, caractérise un jour et qu'elle offre des garanties de discrétion suffisantes au bénéfice du fonds de [U] [E] veuve [L], sis [Adresse 2],
. débouté Mme [U] [E] veuve [L] de sa prétention relative au remplacement de la fenêtre murale,
. débouté Mme [U] [E] veuve [L] de sa prétention relative à la suppression de la fenêtre de toit,
. condamné Mme [U] [E] veuve [L] à payer à M. [Y] [W] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
. débouté Mme [U] [E] veuve [L] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
. condamné Mme [U] [E] veuve [L] aux entiers dépens.
Mme [E] veuve [L] a interjeté appel de ce jugement.
Par ses dernières conclusions, elle demande à la cour de :
vu les articles 676 et 677 du code civil,
. infirmer le jugement entrepris,
. condamner M. [Y] [W] sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, d'avoir à procéder à la mise en conformité des caractéristiques des ouvrages litigieux aux dispositions légales à savoir :
- d'une part de la menuiserie du jour de souffrance au rez-de-chaussée ainsi que du vitrage, par le remplacement des ouvrages existants, respectivement par une menuiserie dormante pourvue d'un vitrage opaque, excluant toute possibilité d'ouverture ou de toute autre transformation sans démontage,
- d'autre part de la menuiserie de la fenêtre de toit qui devra être implantée au minimum à une hauteur de 1,90 mètre au-dessus du plancher du premier étage,
. condamner M. [W] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions, M. [W] demande à la cour de :
. confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
. débouter Mme [U] [L] de toutes ses demandes,
. condamner Mme [U] [L] à lui payer la somme de 2 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux dépens d'instance.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 11 juin 2020.
SUR CE,
Sur le jour de souffrance au rez-de-chaussée
Au soutien de son appel, Mme [L] fait valoir que le tribunal ne pouvait considérer comme étant dormant et empêchant la vue un ouvrage pouvant être facilement modifié et ne présentant donc pas les caractéristiques garantissant les droits du propriétaire riverain au regard des dispositions des articles 676 du code civil et conteste que la circonstance que la menuiserie soit dépourvue de poignée et de vantaux fixés par une baguette de bois permette de considérer que le jour de souffrance n'est pas une vue.
L'article 676 du code civil dispose que le propriétaire d'un mur non mitoyen joignant immédiatement l'héritage d'autrui, peut pratiquer dans ce mur des jours ou fenêtres à fer maillé et à verre dormant et que ces fenêtres doivent être garnies d'un treillis de fer, dont les mailles auront un décimètre d'ouverture au plus, et d'un châssis à verre dormant.
L'article 677 visé dispose que "ces fenêtres ou jour ne peuvent être établis qu'à vingt-six décimètres [huit pieds] au-dessus du plancher ou sol de la chambre qu'on veut éclairer, si c'est un rez-de-chaussée, et à dix-neuf décimètres [six pieds] au-dessus du plancher pour les étages supérieurs.".
Mme [L] ne demande pas la suppression de la fenêtre murale pour non-respect de la hauteur.
Le jugement n'est pas contesté en ce qu'il a dit que l'installation de la fenêtre murale sur le fonds de [Y] [W], sis [Adresse 2], telle qu'elle ressort du procès-verbal de constat dressé le 4 novembre 2007 par Maître [Z] [F], huissier de justice, caractérise un jour au sens du code civil.
En application des dispositions de l'article 676 du code civil, ce jour, ou cette fenêtre, doit être notamment composé d'un châssis fixe qui ne peut pas s'ouvrir et comporter un verre dormant, non transparent.
En l'espèce, il est établi par le procès-verbal d'huissier établi par maître [F] le 4 novembre 2017 produit au débat que la fenêtre de M. [W] ne présente pas les caractéristiques légales puisqu'elle est composée d'un châssis à deux vantaux qui ont été immobilisés par la supression de la poignée et la pose d'une baguette mais qui pourraient être aisément remis en service.
En conséquence le châssis de cette fenêtre n'est pas conforme aux dispositions de la loi.
Par ailleurs la vue depuis la fenêtre a été occultée par la pose d'un film plastique, ce dont il résulte qu'elle n'est pas constituée d'un verre dormant non transparent, film qui peut également être aisément retiré.
En conséquence, les caractéristiques de la fenêtre murale ne sont pas conformes aux dispositions du code civil et il convient, infirmant le jugement, de faire droit à la demande de Mme [L] de ce chef et de condamner M. [W] à procéder au remplacement du châssis et du verre existant par une menuiserie dormante pourvue d'un vitrage opaque, excluant toute possibilité d'ouverture ou de toute autre transformation sans démontage.
Eu égard au fait que M. [W] ne s'est pas conformé à la demande du maire, M. [K], en date du 21 octobre 2016, relatif à la pose d'un châssis fixe, prouvant sa réticence à ce titre, cette condamnation sera prononcée sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant un durée de deux mois, astreinte qui commencera à courir au terme d'un délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir.
Sur la fenêtre de toit
Les moyens invoqués par Mme [L] au soutien de son appel ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connu et auxquels il a répondu par des motifs exacts et pertinents que la cour adopte, juge qui a conclu à l'absence de vue droite sur le fonds voisin et, s'agissant des vues obliques, que la distance minimale prévue par les dispositons de l'article 679 du code civil a été respectée.
Il convient en outre de souligner que le relevé situant le bas de la fenêtre à 1,85 m résulte d'un simple constat d'huissier établi par maître [F] le 4 novembre 2017, constat qui ne précise pas la manière dont ce mesurage a été effectué et ne permet donc pas d'établir de manière certaine que la hauteur ne respecte pas les dispositions de l'article 677 du code civil comme le soutient Mme [L], ce que conteste M. [W].
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [L] de sa demande relative au déplacement de la fenêtre de toit.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
L'équité commande d'allouer à Mme [L] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de rejeter la demande de M. [W] de ce chef.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement,
Infirme partiellement le jugement du tribunal de grande instance d'Auxerre en date du 4 février 2019,
Condamne M. [W] à procéder au remplacement du châssis et du verre de la fenêtre murale par une menuiserie dormante pourvue d'un vitrage opaque, excluant toute possibilité d'ouverture ou de toute autre transformation sans démontage,
Prononce cette condamnation sous peine d'astreinte de 50 euros par jour de retard pendant un durée de deux mois, astreinte qui commencera à courir au terme d'un délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,
Confirme le jugement pour le surplus,
Condamne M. [W] à verser à Mme [L] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [W] aux dépens.
Le greffier, Le président,