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10/06/2020 | FRANCE | N°19/09995

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 10 juin 2020, 19/09995


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 10 JUIN 2020



(n° , 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/09995 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B75XX



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 11 Avril 2019 - Tribunal de grande instance de PARIS - RG n° 19/52754





APPELANT



Monsieur [K] [N]

né le [Date naissance 1] 1965 à [L

ocalité 13]

[Adresse 4]



représenté et plaidant par Me Nicolas GARBAN de l'AARPI GS ASSOCIES 2, avocat au barreau de PARIS, toque : B0795





INTIMES



Syndicat des copropriétair...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 10 JUIN 2020

(n° , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/09995 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B75XX

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 11 Avril 2019 - Tribunal de grande instance de PARIS - RG n° 19/52754

APPELANT

Monsieur [K] [N]

né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 13]

[Adresse 4]

représenté et plaidant par Me Nicolas GARBAN de l'AARPI GS ASSOCIES 2, avocat au barreau de PARIS, toque : B0795

INTIMES

Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] représenté par son administrateur provisoire en exercice, Maître [Z] [A], administrateur judiciaire, fonctions auxquelles elle a été désignée suivant ordonnance sur requête signée le 20 mars 2018 par le délégataire de Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de PARIS,

[Adresse 7]

représentée et plaidant par Me Philippe THOMAS COURCEL de la SELARL CABINET THOMAS-COURCEL BLONDE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0165

Madame [E] [C], administrateur provisoire, ès qualités de mandataire successoral à la succession de [B] [N]

[Adresse 6]

représentée par Me Jacques RAYNALDY de la SCP LEICK RAYNALDY & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0164

Madame [Y] [N], assignée à sa personne par acte d'huissier du 27.06.2019

[Adresse 10]

Monsieur [W] [N], assigné à étude de l'huissier par acte du 27.06.2019

[Adresse 2]

Madame [J] [N] épouse [X], assignée selon procès-verbal de recherches infructueuses par acte d'huissier du 28.06.2019

[Adresse 8]

Madame [O] [N], assignée à sa personne par acte d'huissier du 27.06.2019

[Adresse 9]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Février 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Madeleine HUBERTY, Conseiller faisant fonction de Président, chargée du rapport, et Mme Catherine GONZALEZ, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Madeleine HUBERTY, Conseiller faisant fonction de Président

Mme Catherine GONZALEZ, Conseiller

Mme Françoise BARUTEL, Conseiller désigné par ordonnance du Premier Président de la Cour d'appel de Paris en vertu de l'article R 312-3 du code de l'organisation judiciaire pour compléter la chambre

Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON

ARRÊT :

- rendu par défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, la date initialement annoncée aux parties ayant dû être reportée en raison de l'état d'urgence sanitaire, ce dont, pour le même motif,  les parties n'ont pu être avisées par le greffe que par un message RPVA du 12 mai 2020.

- signé par Mme Madeleine HUBERTY, Conseiller faisant fonction de Président et par Mme Emilie POMPON, Greffier.

***

PRÉTENTIONS DES PARTIES ET PROCÉDURE

[B] [N] est décédé à [Localité 13] le [Date décès 3] 2012. Il a laissé cinq enfants pour lui succéder :

- Madame [Y] [N],

- Madame [J] [N] épouse [X],

- Madame [O] [N] divorcée [M],

- Monsieur [W] [N],

- et Monsieur [K] [N].

Ce dernier a été institué légataire universel par voie testamentaire.

Le patrimoine successoral comprend les lots 1, 2 ,3, 4, 7, 10, 11, 18, 19, 20, 23, 25, 26, 27, 28, 29, 31, 32, 33, 35, 37 à 44, 46, 48, 49, 52, 53, 55 et 56 dépendant d'un immeuble en copropriété sis [Adresse 5].

La succession est également copropriétaire majoritaire dans deux autres immeubles à [Localité 13] et à [Localité 12].

Les charges de copropriété incombant à la succession n'ont pas été régulièrement payées, ce qui a provoqué des difficultés de gestion au sein de la copropriété.

Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] a donc sollicité la désignation d'un mandataire successoral avec mission d'administrer la succession.

Par ordonnance rendue le 5 avril 2018, en la forme des référés, Maître [E] [C] a été désignée ès qualités de mandataire successoral à la succession de [B] [N] pour une durée d'un an.

Par arrêt en date du 4 juillet 2018, cette ordonnance a été confirmée.

Par arrêt en date du 17 octobre 2019 la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi formé par Monsieur [K] [N].

Parallèlement, Maître [A] a été désignée en qualité d'administrateur provisoire de la copropriété au visa de l'article 29-1 de la loi du 10 juillet 1965. Cette mission a été prorogée jusqu'au 20 mars 2020.

Par acte en date du 2 juillet 2018, Maître [A], ès qualités, a assigné Maître [E] [C] ès qualités de mandataire successoral aux fins de paiement d'un arriéré de charges de copropriété.

Par jugement rendu le 17 mai 2009, Maître [E] [C] ès qualités de mandataire successoral a été condamnée à payer une somme de 122 405,99€ en principal au titre des charges impayées.

Monsieur [K] [N] a interjeté appel de ce jugement.

Par actes en date des 4, 5 et 7 mars 2019, Maître [A], ès qualités, a fait assigner les consorts [N] et Maître [E] [C] ès qualités de mandataire successoral aux fins de prorogation de la mission de cette dernière, pour une durée de 12 mois à compter du 5 avril 2019.

Dans son ordonnance rendue le 11 avril 2019 en la forme des référés, le magistrat agissant par délégation du Président du tribunal de grande instance de PARIS a prorogé pour une durée de douze mois, à compter du 5 avril 2019, la mission de Maître [E] [C] ès qualités de mandataire successoral à la succession de [B] [N], telle que définie à l'ordonnance du 5 avril 2018 et aux décisions subséquentes.

Le magistrat a, d'autre part, ordonné la réouverture des débats et renvoyé à une autre audience pour qu'il soit statué sur les demandes non comprises dans l'assignation délivrée par le syndicat des copropriétaires (extension de mission et autorisation de vendre des biens immobiliers sollicitées par le mandataire successoral) en précisant qu'il serait statué ultérieurement sur les demandes de dommages intérêts, frais irrépétibles et dépens.

Monsieur [K] [N] a régulièrement interjeté appel de cette ordonnance par déclaration en date du 8 mai 2019.

Par ordonnance en date du 4 février 2020, la présidente a déclaré irrecevables les conclusions régularisées par Maître [E] [C] ès qualités de mandataire successoral à la succession de [B] [N], faute d'avoir été signifiées en temps utile aux cohéritiers de Monsieur [K] [N], alors que le litige était indivisible.

**********************

Dans ses conclusions régularisées le 20 février 2020, Monsieur [K] [N] formule les prétentions suivantes :

Au principal,

- Constater l'absence d'indivision en présence d'un légataire universel;

- Constater que le jugement définitif du 22 juin 2018 a déclaré irrecevables les demandes des cohéritiers d'[K] [N] et que en application de l'article 2243 du code civil, cette irrecevabilité n'a aucun effet interruptif de prescription;

- Constater que les héritiers pouvaient exercer des actions en application de l'article 921 du code civil contre [K] [N] dans un délai de 5 ans suivant le décès de [B] [N] (le [Date décès 3] 2012) et que, faute d'action ou d'élément interruptif de prescription, ils sont forclos à toute action contre [K] [N] portant sur le patrimoine de feu [B] [N] dont il est légataire universel;

- Constater que la préservation du patrimoine du légataire universel ne peut pas intéresser et surtout ne peut plus intéresser les autres héritiers du défunt qui ne détenaient tout au plus et en toute hypothèse qu'une créance d'argent à date fixe contre le légataire universel;

- Constater que la fonction du mandataire successoral n'est pas de représenter le défunt mais bien les héritiers en vue d'administrer la succession pour autant qu'il faille encore l'administrer;

- Constater l'absence de motivation suffisante de l'ordonnance du 11 avril 2019 et notamment sur la prétendue qualification d'inertie d'[K] [N] au jour où le juge a statué;

- Constater les règlements de charges de copropriété par [K] [N] avant la nomination de Maître [E] [C], la contestation du bien fondé des charges par [K] [N] et le paiement de divers droits et taxes par ce dernier;

- Constater que le syndicat ne démontre pas que les conditions des articles 813-1 et suivants sont remplies depuis que le jugement du 22 juin 2018 est définitif et en tous cas à la date de sa demande et ne démontre notamment pas les actes constitutifs d'une inertie d'[K] [N] justifiant la prorogation du mandat confié à Maître [E] [C];

- Constater que, dans ces conditions, la demande de prorogation du mandat confié à Maître [E] [C] en qualité de mandataire successoral porte atteinte au droit de propriété d'[K] [N] et plus exactement à l'exercice de son droit de propriété;

En conséquence,

- Infirmer l'ordonnance entreprise;

- Déclarer irrecevables [Y], [J], [W] et [O] [N] en toutes demandes de réduction de leur réserve à l'encontre d'[K] [N],

- Débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et Maître [E] [C] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions;

- Mettre fin au mandat de Maître [E] [C] ès qualités de mandataire successoral et dire et juger que ce mandat est éteint à compter du 5 avril 2019;

Subsidiairement,

- Constater que la dette du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] sur Monsieur [K] [N] est postérieure au décès de [B] [N], que cette dette n'est donc pas une dette de la succession;

En conséquence,

- Débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions;

Plus subsidiairement,

- Constater l'absence de re-location des appartements ou le paiement des charges de copropriété par Maître [E] [C];

- Dessaisir Maître [E] [C] de sa mission de mandataire successoral en raison des manquements caractérisés à l'exécution de sa mission et nommer tel autre administrateur qu'il plaira à la cour de nommer;

- Débouter Maître [E] [C] de sa demande d'extension de mission et d'autorisation de vente;

A titre reconventionnel,

- Dire et juger que la démarche judiciaire du syndicat des copropriétaires, soutenue par Maître [E] [C] a dégénéré en abus alors qu'il disposait de moyens alternatifs pour recouvrer sa créance;

- Constater que la demande constitue une atteinte au droit de propriété d'[K] [N];

En conséquence,

- Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à régler une somme de 15 000€ à titre de dommages intérêts;

En toute hypothèse,

- Débouter le syndicat des copropriétaires et Maître [E] [C] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions;

- Déclarer irrecevables les conclusions et demandes prises par le syndicat des copropriétaires et visant à défendre les actions de Maître [E] [C] en application du principe nul ne plaide par procureur;

- Condamner le syndicat des copropriétaires à régler une somme de 5000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile;

- Dire qu'en application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, Monsieur [N] sera dispensé de toute participation à la dépense commune;

- Condamner le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens avec distraction.

Monsieur [K] [N] fait valoir que :

' le syndicat des copropriétaires n'a pas démontré que les conditions posées par l'article 813-1 du code civil pour la désignation d'un mandataire successoral étaient réunies. Or, une telle désignation ne saurait être justifiée par un seul problème de paiement des charges. En l'espèce, il n'y a pas de succession ni d'indivision car l'appelant est le seul héritier en sa qualité de légataire universel ainsi qu'il résulte du jugement définitif qui a été rendu le 22 juin 2018 par le tribunal de grande instance de PARIS sur le litige opposant les héritiers. La gestion du patrimoine successoral ne regarde que l'appelant et n'a jamais concerné les autres héritiers qui n'ont qu'un éventuel droit de créance pour autant qu'ils agissent en temps utile. Il n'y a donc plus de succession à administrer ni d'intérêt commun à préserver.

' le non respect des dispositions de l'article 6 du décret du 17 mars 1967 ne peut pas lui être reproché et n'a rien à voir avec les formalités de publicité foncière. Le syndicat des copropriétaires est parfaitement informé du transfert de propriété à son profit et c'est d'ailleurs sous son nom que le compte de copropriétaire a été ouvert par Maître [A] ès qualités. En cas de transfert de droits réels immobiliers, aucune formalité de publicité à la conservation des hypothèques ne conditionne l'opposabilité du transfert des droits. L'article 36-5° du décret 55-1350 du 14 octobre 1955 prévoit que la publication du commandement de saisie et celle du jugement ultérieur peut être effectuée même en l'absence de publication d'une attestation notariée dès lors que le document destiné à être conservé au bureau des hypothèques comporte la certification de l'identité du défunt. L'absence de publication de l'attestation de propriété prévue par l'article 29 du décret du 4 janvier 1955 n'a aucune incidence sur les possibilités du syndicat d'agir contre les héritiers pour recouvrer les charges. S'il y avait lieu de procéder à cette formalité, c'est En cas de transfert de droits réels immobiliers, aucune formalité de publicité à la conservation des hypothèques ne conditionne l'opposabilité du transfert des droits. ès qualités de mandataire successoral qui aurait dû y procéder depuis sa désignation en 2018. Dans tous les cas, il devait attendre l'issue de l'instance en liquidation partage engagée par les autres héritiers pour procéder à la formalité de la publicité foncière.

' les sommes réclamées à titre de charges sur la base d'anciens budgets ne peuvent pas plus caractériser une carence de l'appelant. Dès qu'il en a eu la possibilité, il a émis des contestations sur les charges appelées afférentes à des travaux très importants. La contestation des charges n'a aucune incidence sur le règlement de la succession puisque les autres héritiers n'ont qu'un droit de créance éventuel. Au surplus, les charges appelées depuis 2017 auraient dû être réglées par le mandataire successoral.

' la désignation d'un mandataire successoral alors qu'il est seul propriétaire, puis la prorogation de cette mission équivaut à le mettre sous tutelle pour une durée indéterminée.

' le syndicat des copropriétaires n'a pas d'intérêt légitime à agir contre l'ensemble des co-héritiers car toutes les charges impayées sont postérieures au décès, ce qui signifie que le légataire universel est seul concerné par le problème de paiement des charges. Il ne s'agit pas de dettes successorales.

' il doit être mis fin à la mission de Maître [E] [C] en raison de ses carences. Elle ne lui a pas communiqué en temps utile les documents attestant des actions entreprises en exécution de son mandat. Il n'a été informé que tardivement des valeurs mobilières qu'elle a vendues pour 160 000€. Elle a sollicité la désignation d'un administrateur provisoire pour l'autre immeuble où il est copropriétaire majoritaire au lieu de régler les charges qui avaient été appelées pour faire des travaux indispensables. Son action tend en fait à dégrader la situation et à dilapider le patrimoine de l'appelant. Elle n'a rien fait pour récupérer les loyers arriérés de plusieurs locataires et n'a pas fait diligence pour remettre certains appartements en location. Son inertie l'a ainsi conduite à solliciter l'autorisation de vendre certains lots.

' le syndicat des copropriétaires a agi de façon abusive en sollicitant la désignation d'un mandataire successoral et en prenant une hypothèque légale sur l'ensemble des lots [N] représentant 59,01% de la copropriété ce qui est disproportionné par rapport à une créance de 116 000€. Il s'est en réalité agi d'attenter au droit de propriété de l'appelant ce qui justifie l'allocation de dommages intérêts à hauteur de la somme de 15 000€.

********************

Dans ses conclusions régularisées le 21 février 2020, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5], représenté par Maître [Z] [A] ès qualités d'administrateur provisoire formule les prétentions suivantes :

- Confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions;

- Condamner Monsieur [K] [N] à payer une somme de 6500€ par application de l'article 700 du code de procédure civile;

- Condamner solidairement les défendeurs aux dépens de première instance et d'appel.

Le syndicat des copropriétaires fait valoir que :

' il n'ignore aucunement la qualité de légataire universel de Monsieur [K] [N]. Les dispositions des articles 813-1 et suivants du code civil relèvent toutefois du chapitre des successions et non des dispositions spécifiques afférentes aux indivisions. L'absence d'indivision n'interdit donc pas de solliciter la désignation d'un mandataire successoral, notamment en cas d'inertie ou de carence d'un héritier.

' l'article 6 du décret du 17 mars 1967 prévoit que tout transfert de propriété d'un lot doit être notifié sans délai au syndic soit par les parties, soit par le notaire qui a établi l'acte. L'absence de notification rend la mutation intervenue inopposable au syndicat des copropriétaires. En l'absence de publicité foncière du transfert de droits, aucune notification de mutation n'a pu être transmise au syndic et la qualité de propriétaire des lots ne peut être reconnue à Monsieur [K] [N].

Sa carence dans l'administration de la succession qui lui revient est donc évidente. Même s'il était poursuivi en règlement des charges et qu'un jugement était rendu à son encontre il serait impossible de mettre en oeuvre une saisie immobilière puisqu'il n'apparaît pas sur service de la publicité foncière.

' Monsieur [K] [N] est totalement défaillant dans le règlement des charges de copropriété, ce qui a abouti à ce que les trois copropriétés dans lesquelles il est copropriétaire majoritaire ont été placées sous le régime des copropriétés en difficulté. Il importe peu que les charges impayées soient postérieures au décès dès lors que le syndicat des copropriétaires ne peut reconnaître le transfert de droits en l'absence de la notification requise. La prorogation de la mission du mandataire successoral est indispensable pour pallier les carences de l'appelant.

' le mandataire successoral a d'ores et déjà justifié des diligences accomplies et sa mission n'est pas terminée puisqu'elle a été autorisée à vendre un actif immobilier afin d'apurer le passif. Aucun manquement ne peut lui être imputé et il ne peut lui être reproché de ne pas avoir réglé des charges alors qu'elle ne disposait pas de la trésorerie nécessaire. Si le syndicat des copropriétaires souhaite le maintien en fonction du mandataire successoral c'est parce qu'il s'agit du seul moyen de garantir les droits des copropriétaires et de s'assurer de l'exécution des décisions de justice à intervenir.

' il n'y a aucun abus, puisqu'en s'abstenant de faire publier son droit de propriété Monsieur [K] [N] est lui même à l'origine du préjudice qu'il invoque.

Madame [Y] [N], Monsieur [W] [N], Madame [J] [N] épouse [X] et Madame [O] [N] n'ont pas constitué avocat.

Par acte du 26 juillet 2019, délivré à personne, le syndicat des copropriétaires a signifié ses conclusions à Madame [O] [N].

Par acte du 29 juillet 2019, délivré en l'étude, le syndicat des copropriétaires a signifié ses conclusions à Madame [Y] [N].

Par acte du 2 août 2019, délivré à personne, le syndicat des copropriétaires a signifié ses conclusions à Monsieur [W] [N].

Par acte du 9 août 2019, délivré selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, le syndicat des copropriétaires a signifié ses conclusions à Madame [J] [N] épouse [X].

Par ordonnance en date du 4 février 2020, les conclusions d'intimée de Maître [C], ès qualités d'administrateur judiciaire de la succession, ont été déclarées irrecevable faute de signification de ces conclusions à Madame [Y] [N], Monsieur [W] [N], Madame [J] [N] épouse [X] et Madame [O] [N] dans un litige indivisible par son objet.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée le mardi 25 février 2020.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,

Sur la demande énoncée par Monsieur [K] [N] d'irrecevabilité de toutes demandes de Madame [Y] [N], Monsieur [W] [N], Madame [J] [N] épouse [X] et Madame [O] [N] en réduction de leur réserve

Il est constant que, par jugement rendu le 22 juin 2018 par le tribunal de grande instance de PARIS (pièce 10 appelant), Madame [Y] [N], Madame [J] [N] et Monsieur [W] [N] ont été déboutés de leur action en partage de la succession de leur père [B] [N], en raison de la qualité de légataire universel de Monsieur [K] [N] dans cette succession, ce qui lui donnait vocation à recueillir tous les biens en dépendant, à charge d'indemniser ses cohéritiers au titre de leur réserve. La demande en partage était donc sans objet, car il n'y avait pas d'indivision.

Il n'a pas été interjeté appel de ce jugement.

Dans le cadre de la présente instance, Madame [Y] [N], Madame [O] [N], Madame [J] [N] et Monsieur [W] [N] n'ont pas constitué avocat et n'ont donc pas énoncé une quelconque demande d'indemnité de réduction, une telle demande n'entrant d'ailleurs pas dans les compétences du président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés.

Une telle demande d'irrecevabilité doit donc être déclarée irrecevable, faute d'objet.

Sur la demande d'arrêt du mandat de Maître [C] à la date du 5 avril 2019 énoncée par Monsieur [K] [N]

Par application de l'article 813-1 du code civil 'le juge peut désigner toute personne qualifiée, physique ou morale en qualité de mandataire successoral, à l'effet d'administrer provisoirement la succession en raison de l'inertie, de la carence ou de la faute d'un ou de plusieurs héritiers dans cette administration, de leur mésentente, d'une opposition d'intérêts entre eux ou de la complexité de la situation successorale.

La demande est formée par un héritier, un créancier, toute personne qui assurait pour le compte de la personne décédée, l'administration de tout ou partie de son patrimoine de son vivant, toute personne intéressée ou par le ministère public'.

Ainsi qu'il a été rappelé dans l'ordonnance rendue le 5 avril 2018 (pièce 5 syndicat) ayant désigné Maître [C] comme mandataire successoral de la succession de [B] [N], la désignation d'un mandataire successoral n'est pas incompatible avec la qualité de légataire universel de Monsieur [K] [N], puisqu'il existe un patrimoine successoral immobilier à gérer, peu important que ce patrimoine ne soit pas en situation d'indivision. Ce n'est, au demeurant, pas la mésentente entre des héritiers qui a été déterminante de la désignation d'un mandataire successoral à la succession de [B] [N]. La situation de légataire universel de Monsieur [K] [N] a également été considérée comme sans conséquence pour la désignation d'un mandataire successoral dans l'arrêt confirmatif rendu le 4 juillet 2018 (pièce 6 syndicat) et le pourvoi en cassation formé contre cet arrêt, en raison notamment de cette situation, a été rejeté (pièce 20 syndicat).

Cette qualité de légataire universel de Monsieur [K] [N] ne permet pas d'écarter le fait qu'il existe un patrimoine successoral (c'est à dire une succession) à administrer, ce qui est le premier élément requis par l'article 813-1 du code civil pour obtenir la désignation d'un mandataire successoral, indépendamment de l'existence d'une indivision. Le deuxième élément requis pour la désignation d'un mandataire successoral est qu'il existe une difficulté dans la gestion du patrimoine successoral, ou succession, pouvant correspondre, entre autres, à une inertie, une carence ou une faute d'un ou de plusieurs héritiers.

L'existence d'un seul héritier ayant seul vocation à appréhender la totalité de la succession ne signifie pas l'absence de difficulté dans l'administration de la succession qui lui échoit.

En l'occurrence, l'ordonnance dont appel a fait droit à la demande de prorogation de la mission confiée à Maître [C], en retenant qu'il y avait eu inertie et carence de Monsieur [K] [N] dans l'administration de cette succession, ce qui avait abouti à compromettre la gestion de trois immeubles en copropriété relevant de la succession de [B] [N], lesquelles copropriétés se trouvaient désormais sous administration judiciaire.

Il est établi que, par acte en date du 2 juillet 2018 (pièce 12 syndicat), Maître [C], ès qualités de mandataire successoral, a été assignée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] dans le cadre d'une action en recouvrement d'un arriéré de charges s'élevant à la somme de 116 215,15€. Par jugement rendu le 17 mai 2019, le tribunal de grande instance de PARIS a condamné Maître [C], ès qualités, à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 122 405,99€ en principal à titre d'arriéré de charges arrêté au 7 mars 2019, avec exécution provisoire.

Le 11 juillet 2018, le syndicat des copropriétaires, représenté par Maître [Z] [A], ès qualités d'administrateur judiciaire, a pris une hypothèque légale sur l'ensemble des lots de l'immeuble sis [Adresse 5] dépendant de la succession, afin de garantir sa créance (pièce 21 syndicat).

Si Monsieur [K] [N] est fondé à soutenir que les charges impayées ne sont pas des dettes du défunt parce qu'il est établi qu'au moins à la date du 31 mars 2014 (soit 18 mois après le décès), il n'existait pas d'arriéré de charges pour l'immeuble sis [Adresse 5] et s'il peut également prétendre avoir effectué des règlements - notamment en 2013 - avant la désignation du mandataire successoral (pièce 11 syndicat et pièce 4 appelant), il reste que le compte produit aux débats, depuis mars 2014, révèle qu'aucun règlement n'est intervenu au titre des charges pour l'année 2015 (alors qu'il existait déjà un arriéré de plus de 40 000€), qu'il en a été de même pour l'année 2016, et que les règlements intervenus à hauteur de 25 000€ en janvier 2017 n'ont pas permis une stabilisation de l'arriéré.

S'il explique, dans son assignation du 16 juillet 2018 ayant pour objet l'annulation des procès verbaux d'assemblées générales des 15 juillet 2013, 20 janvier 2014, 24 novembre 2014 et 23 novembre 2015 (pièce 8 appelant), qu'il n'a jamais reçu de convocations, ni de procès verbaux d'assemblées générales depuis le décès de son père en septembre 2012, il n'indique pas avoir procédé à des diligences pour qu'il soit remédié rapidement à cette situation.

Or, l'absence de ces diligences a au moins contribué à créer la situation qui est la sienne depuis le décès de son père.

Ainsi qu'il est rappelé par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], l'article 6 du décret du 17 mars 1967 afférent au statut de la copropriété, prévoit que ' tout transfert de propriété d'un lot ou d'une fraction de lot....est notifié sans délai au syndic, soit par les parties, soit par le notaire qui établit l'acte..... Cette notification comporte la désignation du lot ou de la fraction de lot intéressé ainsi que l'indication des nom, prénoms, domicile réel ou élu de l'acquéreur ou du titulaire de droit et le cas échéant du mandataire commun prévu à l'article 23 de la loi du 10 juillet 1965 (en cas d'indivision)....Cette notification doit être faite indépendamment de l'avis de mutation prévu à l'article 20 de la loi du 10 juillet 1965 modifiée'.

Ni dans son assignation du 16 juillet 2018 (pièce 8 appelant), ni dans le bordereau des pièces communiquées, Monsieur [K] [N] ne justifie d'avoir procédé auprès du syndic de la copropriété à la notification prévue par l'article 6 du décret du 17 mars 1967. S'il est exact que le conseil du syndicat des copropriétaires lui a adressé le 13 octobre 2015 une mise en demeure de régler un arriéré de 74 580,89€ (pièce 21 appelant), ce même courrier évoque simultanément sa qualité d'héritier et l'existence d'une indivision qui est redevable de cette somme, ce qui ne peut valoir reconnaissance de la qualité de seul titulaire des droits de propriété résultant de la succession de [B] [N]. Par ailleurs, les états comptables dressés par Maître [Z] [A], es qualités d'administrateur judiciaire, au cours de l'année 2017, d'abord intitulés 'Monsieur [K] [N], à compléter', puis 'indivision [N], Monsieur [K] [N]' (pièces 22-1 et 22-2 appelant) ne peuvent pas plus valoir reconnaissance d'une notification tacite valant notification au sens de l'article 6 ci-dessus visé. Ces états comptables sont d'ailleurs dressés, alors que des difficultés de gestion sont déjà apparues dans la copropriété du [Adresse 5] faute de règlement régulier des charges par la succession de [B] [N], qui dispose de plus de 59% des droits dans cette copropriété.

En réalité, la qualité de légataire universel de Monsieur [K] [N] n'a tout simplement pas vocation à supplanter les règles applicables aux biens immobiliers dépendant de la succession et soumis au statut de la copropriété.

Non seulement il n'est pas justifié de la notification prévue par l'article 6 du décret du 17 mars 1967, mais Monsieur [K] [N] ne justifie pas non plus avoir fait consacrer ses droits réels immobiliers par l'attestation notariée prévue par l'article 29 du décret du 4 janvier 1955, alors même que suite au décès de [B] [N], un acte de notoriété a été dressé le 28 décembre 2012 par Maître [T] [H], notaire à [Localité 13] (pièce 1 syndicat). Si cette attestation notariée n'est effectivement pas une condition d'opposabilité de son droit de propriété, sa publication permet néanmoins de rendre sa situation parfaitement officielle, c'est à dire transparente, ce qui présente un intérêt pour tous les créanciers qu'il s'agisse du Trésor Public ou d'un syndicat des copropriétaires ou d'autres, étant observé que cette formalité n'ayant toujours pas été accomplie, c'est le défunt qui apparaît propriétaire des droits dans l'immeuble du [Adresse 5], lequel tenait lui même ses droits d'une attestation notariée après décès, en date du 5 mai 1976 (pièce 21 syndicat).

Monsieur [K] [N] ne peut prétendre qu'il n'aurait pas procédé à la publication de l'attestation notariée en raison du litige l'ayant opposé à ses cohéritiers, dès lors que ceux-ci ne remettaient pas en cause sa qualité de légataire universel mais uniquement certains des effets attachés à cette qualité en sollicitant un partage.

Ce faisant, Monsieur [K] [N], légataire universel, revendiquant l'exercice de son droit de propriété, élude certaines conséquences de la qualité de propriétaire, qui exposent notamment à un risque de saisie immobilière en cas de non paiement de charges ou dettes, peu important à cet égard qu'il puisse effectivement être poursuivi en recouvrement des charges, l'efficacité de ce recouvrement étant nécessairement atténuée lorsque la mise en oeuvre d'une saisie immobilière est rendue plus aléatoire ou compliquée (notamment lorsque la définition des droits des successibles doit être effectuée postérieurement à l'adjudication) . Ainsi qu'il le souligne lui-même dans ses écritures (page 15), cette absence d'attestation immobilière l'empêche de procéder à une cession, alors qu'une telle cession fait partie des prérogatives normales d'un propriétaire gérant au mieux son patrimoine, en particulier dans l'optique du respect d'un accord de paiement fractionné des droits de succession, mis à mal depuis 2016 (pièce 25 appelant).

Ces éléments (non paiement des charges, absence de notification article 6 du décret, absence d'attestation immobilière) sont étroitement imbriqués en ce qu'ils expliquent, au moins dans une certaine mesure, que Monsieur [K] [N] n'ait pas pu être considéré comme le seul interlocuteur du syndic suite au décès de son père, qu'il en soit résulté des rapports chaotiques mettant en cause le paiement des charges et la gestion des comptes de la copropriété et que les défaillances constatées contribuent encore à compliquer la gestion des copropriétés, ainsi qu'à compromettre l'exercice par Monsieur [K] [N] de ses propres droits.

Ces éléments caractérisent une carence et/ou une inertie de la part de Monsieur [K] [N], au sens de l'article 813-1 du code civil, qui justifie le principe même de la mission du mandataire successoral et, en l'espèce, la prorogation de sa mission, qui n'est clairement pas terminée, en l'absence d'apurement des difficultés de paiement affectant trois biens immobiliers en copropriété.

Il sera, de nouveau, rappelé que l'existence d'un seul héritier ne signifie pas que la succession qui lui est dévolue ne nécessite pas une intervention extérieure, puisque l'existence d'un seul héritier n'implique pas l'absence de difficultés dans l'administration de cette succession, étant souligné que cette intervention extérieure peut être sollicitée par un créancier, ce qui révèle qu'une mauvaise administration par un seul héritier peut compromettre les droits des tiers, ce qui est précisément le cas en l'espèce en raison de la qualité de copropriété majoritaire de l'appelant.

Par ailleurs, le fait que les charges échues et impayées ne soient pas des dettes du défunt ne permet pas de soutenir que la mission du mandataire successoral dépasserait le cadre qui lui est alloué, ou serait sans objet, puisque l'étendue de cette mission ne peut être réduite à la situation prévue par l'article 784 du code civil, dès lors que Monsieur [K] [N] a accepté le legs universel lui bénéficiant et qu'il a été précisé dans l'ordonnance rendue le 5 avril 2018 que la mission du mandataire successoral intégrerait 'tous actes d'administration nécessaires', conformément aux dispositions des articles 813-2 et 812 du code civil. Ces actes d'administration ont donc vocation à s'appliquer sur les biens immobiliers dépendant de la succession, nonobstant le fait que Monsieur [K] [N] soit légataire universel et ait vocation à exercer pleinement son droit de propriété sur les biens dépendant de la succession, dès lors qu'il est établi que l'administration du patrimoine successoral est mise à mal en raison de l'inertie ci-dessus déjà caractérisée.

La comparaison effectuée par Monsieur [K] [N] avec une mesure de tutelle, pour en déduire un détournement des dispositions légales (article 813-1 du code civil), n'est pas pertinente puisque l'objet du mandat successoral ne vise pas à protéger sa personne mais uniquement un patrimoine successoral, dont les modalités d'appréhension par lui-même empêchent de considérer le processus successoral comme un événement définitivement passé et remplacé par un nouveau droit de propriété. Au surplus, les conditions et modalités de mise en oeuvre des mesures de protection sont très différentes, en particulier dans le temps.

Le relevé des opérations effectuées par Maître [C], ès qualités, pour la période du 20 avril 2018 au 7 mars 2019 (pièces 17 et 23 syndicat) démontre que des diligences multiples étaient nécessaires et qu'elles ont été accomplies afin de disposer de la trésorerie permettant de régler partie des arriérés de charges ainsi que des dépenses courantes : ont ainsi été vendues des valeurs mobilières dépendant de la succession, ce qui a permis de procéder à quelques règlements au profit du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] (15/11/2018 et 23/1/2019). Le solde disponible au 7 mars 2019 était, toutefois, insuffisant pour régler la totalité des arriérés de charges, intégrant notamment un arriéré de 228 359€ pour la copropriété située [Adresse 11] (pièce 18 syndicat).

Il sera noté que, dans un courrier en date du 20 juillet 2018 (pièce 13 appelant), soit quelques mois après l'entrée en fonctions de Maître [C], Monsieur [K] [N] a pris le soin, au travers de son conseil, de suggérer la vente des titres dépendant de la succession (de préférence en période haussière) afin de permettre la gestion d'au moins 'le budget courant du trimestre auprès des trois copropriétés'. Il a également évoqué la nécessité de recouvrer 'les loyers non perçus depuis 3 ans' et l'opportunité de mettre en location en meublé d'autres biens pour régler d'autres charges de copropriété. Il a alors expliqué que la mise en vente de biens immobiliers ne lui paraissait pas pertinente car 'cela représente en effet trop de complexités à venir', en faisant référence à la fiscalité sur les plus values.

Force est de constater que le mandataire successoral a effectivement procédé à la vente des titres, en octobre 2018, pour un montant de plus de 150 000€ par rapport à un montant escompté de 120 000€ par Monsieur [K] [N] (pièce 13 appelant). Le recouvrement des loyers et la conclusion de contrats de location supposent évidemment que la situation locative soit établie (date du bail, type de bail, montant des loyers...) et également que les biens puissent être loués dans des conditions décentes ou, tout au moins, n'exposant pas à un risque probable de contentieux.

L'établissement de la situation locative posait problème puisqu'il résulte d'un courrier du conseil de Monsieur [K] [N], en date du 5 septembre 2018 (pièce 14 appelant) que 'l'essentiel des dossiers locatifs était détenu par FONCIA LAPORTE....laquelle société a résilié unilatéralement son mandat sans restituer les clefs ou dossiers dont les baux et autres éléments utiles....'. Dans le même courrier, Monsieur [K] [N] convient que la priorité consiste à faire un état des lieux des locaux et occupations sans droit, ce qui démontre que la tache du mandataire successoral ne pouvait simplement consister à recouvrer des loyers et mettre des biens en location. Au surplus, Monsieur [K] [N] précisait qu'il souhaitait exploiter les lieux en bénéficiant du statut de loueur meublé professionnel par le biais d'une société commerciale ad hoc, situation permettant de bénéficier d'un régime fiscal favorable, sans préciser pour quelle(s) raison(s) cette gestion n'avait pas été mise en place avant la désignation du mandataire, alors que la situation prise en charge tendait plutôt à révéler l'absence de toute gestion. Dans son rapport du 28 février 2019 (pièce 23 syndicat), Maître [C] soulignait que 'les locataires n'ayant plus d'interlocuteur depuis quelques années, ils ont donc cessé de régler les loyers. Nous avons donc demandé à chacun d'entre eux de nous communiquer leur dossier locatif. Depuis cette date, j'encaisse les versements des locataires'.

Si, dans le même courrier du 5 septembre 2018, Monsieur [K] [N] admettait la situation d'insalubrité de l'immeuble sis [Adresse 11], il estimait que cette insalubrité était remédiable moyennant des dépenses limitées, tout en contestant les comptes du syndic, comme les comptes du syndic de l'immeuble de [Localité 12], qui auraient été mal effectués 'depuis 5 ans'.

Il ne peut, par ailleurs, être reproché au mandataire successoral de ne pas avoir informé Monsieur [K] [N] de l'état de sa gestion puisqu'il est établi qu'au moins en juillet 2019 un rendez vous a pu être pris en l'étude de Maître [C] (pièce 28 syndicat).

Ces différents éléments confortent le fait qu'il y avait nécessité de désigner un mandataire successoral et que celui-ci n'est pas resté inactif au regard de la situation qu'il a trouvée. Il ne peut être raisonnablement soutenu que Maître [C] aurait été défaillante, faute de diligences appropriées, et encore moins comme ayant cherché à 'aggraver la situation' tel que cela est suggéré par Monsieur [K] [N].

Celui-ci doit donc être débouté de sa demande de remplacement de Maître [C], l'ordonnance dont appel étant confirmé sur ce point.

La demande du syndicat des copropriétaires visant à obtenir la prorogation du mandat de Maître [C] ne peut pas être déclarée irrecevable au motif que 'nul ne plaide par procureur' dès lors qu'il est évident que pour des raisons de gestion de la copropriété, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] a un intérêt propre à ce que le patrimoine successoral, majoritaire dans la copropriété, soit administré à la fois avec rigueur et diligence pour pallier une situation antérieure d'inertie avérée.

Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'extension de mission et d'autorisation de vente présentée par Maître [C] en première instance, puisque l'ordonnance dont appel n'a pas statué sur ces questions, qui ont donné lieu à une réouverture des débats et une décision distincte.

Sur les prétentions en dommages intérêts énoncées par Monsieur [K] [N]

Monsieur [K] [N] fait valoir que le syndicat des copropriétaires a commis une faute en sollicitant la prorogation de la mission confiée au mandataire successoral, sans aucune justification, ce qui porte atteinte à son droit de propriété.

Outre le fait qu'il a déjà été retenu que le syndicat des copropriétaires avait un intérêt propre à solliciter la prorogation de cette mission compte tenu des difficultés de gestion rencontrées après le décès de [B] [N], la demande de prorogation a été reconnue fondée parce que des diligences restaient manifestement à accomplir pour aboutir à un apurement des comptes dans des conditions et délais raisonnables.

Par ailleurs, il a déjà été expliqué les raisons pour lesquelles la succession existait toujours en tant que telle malgré la qualité de légataire universel de l'appelant.

Celui-ci ne peut donc caractériser un quelconque préjudice qui lui aurait été causé par une faute du syndicat des copropriétaires, puisque cette faute n'est aucunement établie.

L'ordonnance rendue le 11 avril 2019 doit donc être confirmée en ce qu'elle a rejeté cette prétention indemnitaire.

Sur les prétentions accessoires

Il n'y a pas lieu à application de l'article 10-1 du 10 juillet 1965 au profit de Monsieur [K] [N] puisque celui-ci succombe en ses prétentions.

Il est équitable de condamner Monsieur [K] [N], qui succombe dans ses prétentions, à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 5000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

DECLARE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5], représenté par Maître [Z] [A] administrateur judiciaire, recevable en l'ensemble de ses prétentions;

CONFIRME l'ordonnance rendue le 11 avril 2019 en la forme des référés en ce qu'elle a prorogé pour une durée de douze mois depuis le 5 avril 2019 la mission de Maître [C] ès qualités de mandataire successoral à la succession de [B] [N], telle que définie à l'ordonnance du 5 avril 2018 et aux décisions subséquentes;

Y ajoutant;

DIT que la demande de Monsieur [K] [N] portant sur la question de l'extension de la mission dévolue à Maître [C] et l'autorisation de vendre des biens immobiliers est sans objet, l'ordonnance dont appel n'ayant pas statué sur cette question;

DECLARE irrecevable la demande de Monsieur [K] [N] portant sur l'irrecevabilité de demandes de réduction afférente à la réserve de ses soeurs et de son frère comme étrangère à cette instance d'appel;

DEBOUTE Monsieur [K] [N] de ses prétentions en dommages intérêt pour atteinte à son droit de propriété;

CONDAMNE Monsieur [K] [N] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5], représenté par Maître [Z] [A], administrateur judiciaire, une somme de 5000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE Monsieur [K] [N] aux dépens d'appel.

Le Greffier, Le Conseiller faisant fonction de Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 19/09995
Date de la décision : 10/06/2020

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°19/09995 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-10;19.09995 ?
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