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27/05/2020 | FRANCE | N°19/03702

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 7, 27 mai 2020, 19/03702


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 7



ARRET DU 27 MAI 2020



(n° 18/2020, 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/03702 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7KVR



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Janvier 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/12319





APPELANTS



Madame [W] [Z]

[Adresse 5]

[Localité 7]

née le [Date naissance 2] 1

937



Représentée par Maître Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998, avocat postulant

Assistée de Maître GOUTMANN Norbert, avocat au barreau de CRETEIL, avocat plaidant



Monsieur...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 7

ARRET DU 27 MAI 2020

(n° 18/2020, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/03702 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7KVR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Janvier 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/12319

APPELANTS

Madame [W] [Z]

[Adresse 5]

[Localité 7]

née le [Date naissance 2] 1937

Représentée par Maître Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998, avocat postulant

Assistée de Maître GOUTMANN Norbert, avocat au barreau de CRETEIL, avocat plaidant

Monsieur [F] [T]

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représenté par Maître Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998, avocat postulant

Assisté de Maître GOUTMANN Norbert, avocat au barreau de CRETEIL, avocat plaidant

INTIME

Monsieur [Y] [I]

[Adresse 4]

[Localité 6]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 10]

Représenté par Maître Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090, avocat postulant

Assisté de Maître Jacques DESGARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1283, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 février 2020, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme Anne-Marie SAUTERAUD, Présidente

M. Jean-Michel AUBAC, Assesseur

Mme Bérengère DOLBEAU, Assesseur

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme DOLBEAU dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Margaux MORA

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour prorogé au 27 mai 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Anne-Marie SAUTERAUD, Présidente, et par Margaux MORA, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu l'assignation délivrée le 5 juillet 2017 à la requête de [W] [Z], à [Y] [I], demandant au tribunal de grande instance de Paris, au visa de l'article 14 du code de déontologie des architectes et l'article 9 du code civil, de :

- condamner le défendeur à retirer de son site internet tous les éléments d'information concernant la villa lui appartenant désignée comme 'Villa [Z]', sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter de la signification du jugement ;

- le condamner à lui payer la somme de 15 000 € à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice moral ;

- le condamner au versement de la somme de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- le condamner aux entiers dépens de l'instance, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire.

Vu les conclusions d'intervention volontaire à titre principal d'[F] [T], notifiées le 6 novembre 2018 ;

Vu le jugement contradictoire rendu le 30 janvier 2019 par la 17ème chambre civile du tribunal de grande instance de Paris, qui a :

- déclaré l'action prescrite ;

- déclaré [F] [T] irrecevable en son intervention volontaire ;

- condamné [W] [Z] à verser à [Y] [I] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné [F] [T] à verser à [Y] [I] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

- condamné [W] [Z] aux dépens.

Vu l'appel interjeté par [W] [Z] et [F] [T] le 16 février 2019,

Vu les dernières conclusions signifiées le 15 janvier 2020 par voie électronique par [W] [Z] et [F] [T], qui demandent à la cour :

- d'infirmer le jugement rendu ;

- de condamner [Y] [I] à retirer ou faire retirer de tout site internet tous les éléments d'information concernant la villa appartenant à [W] [Z] désignée sur les sites comme 'Villa [Z]' et notamment toutes les photos de la villa ainsi que la mention fallacieuse de [Y] [I] comme architecte, et ce sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt ;

- de condamner [Y] [I] à payer à [F] [T] la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts du fait des actes de contrefaçon consécutifs à la violation de son droit moral d'auteur imprescriptible ;

- de le condamner à payer à [F] [T] la somme de 8 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ;

- confirmer la recevabilité à agir d'[W] [Z] ;

- infirmer le jugement pour le surplus ;

- de condamner [Y] [I] à payer à [W] [Z] la somme de 15 000 € à titre de dommages-intérêts pour atteinte à sa vie privée ;

- de le condamner à payer à [W] [Z] la somme de 8 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Ils indiquent qu'[W] [Z] est propriétaire d'une villa en Grèce, à [Localité 11], dont la maîtrise d'oeuvre a été confiée à titre exclusif à son gendre, [F] [T] ; qu'elle a constaté que [Y] [I] mentionnait sur des sites internet spécialisés qu'il avait réalisé la maîtrise d'oeuvre de cette villa, des photos de celle-ci accompagnant sa description ; qu'une mise en demeure lui a été adressée le 11 avril 2017, lui enjoignant de retirer ces propos, qui a été laissée sans réponse.

Ils indiquent que l'article L.121-1 du code de la propriété intellectuelle prévoit que le droit d'auteur est imprescriptible ; qu'[F] [T] justifie qu'il est l'unique architecte de cette villa par la production des plans portant son cachet, et par la reconnaissance de cette qualité par la propriétaire elle-même ; que [Y] [I] ne justifie d'aucune pièce l'accréditant comme co-architecte de cette villa.

Ils contestent la prescription, qui ne court qu'à compter du jour où la demanderesse a eu connaissance des photographies litigieuses, à savoir en mars 2017, et non à compter de leur mise en ligne.

Vu les conclusions d'intimé signifiées par RPVA le 28 janvier 2020, aux termes desquelles [Y] [I] sollicite de la cour qu'elle :

- confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- condamne [W] [Z] et [F] [T] à lui payer chacun la somme de 5 000 euros, conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- fasse application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître FLAURAUD.

[Y] [I] expose qu'il a collaboré plusieurs années avec [F] [T] dans un cabinet d'architecte appelé 'AR' ; qu'il a participé à la conception et l'édification d'une villa appartenant à la famille d'[F] [T].

Il soutient que le point de départ de la prescription pour les actions en atteinte à la vie privée est la date de première publication ; qu'il a été assigné près de dix années après la mise en ligne de ces informations ; que la mise en ligne est antérieure au 12 novembre 2008, et que l'action est donc prescrite.

Sur la demande d'[F] [T], il indique qu'il a bien conçu le projet architectural de la villa avec celui-ci, notamment la forme en proue de bateau, ainsi qu'il résulte de l'attestation produite et de la photographie le montrant sur le chantier.

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu l'ordonnance de clôture du 29 janvier 2020.

MOTIFS

Sur la prescription de l'action engagée par [W] [Z]

Les actions civiles sanctionnant une atteinte à un droit de la personnalité sur le fondement de l'article 9 du code civil se prescrivent selon le droit commun, à savoir la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil, qui dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité civile extracontractuelle engagée à raison de la diffusion sur le réseau Internet d'un message, court à compter de sa première mise en ligne, date de la manifestation du dommage allégué, la jurisprudence sur les infractions « clandestines » pour lesquelles le point de départ de la prescription est retardé au jour où elles sont découvertes n'étant pas ici applicable.

Toutefois, le point de départ de la prescription ne remonte pas seulement au jour de la première publication mais au jour de chacune des publications nouvelles.

[W] [Z] indique qu'elle a constaté la publication des photographies litigieuses sur internet dans le courant du mois de mars 2017.

Les photographies litigieuses de la villa [Z] ont été publiées de façon identique sur les deux sites internet suivants : www.architectespourtous.fr et www.archiliste.fr.

Pour justifier de la date de première publication de ces photographies litigieuses, [Y] [I] verse aux débats des extraits du site de la BNF (archivesinternet.bnf.fr) indiquant que les pages relatives au book de photographies de la villa [Z] ont été archivées pour la première fois à la date du 12 novembre 2008, et une copie du site web.archive.org qui indique que cette page a été archivée le 2 juin 2009.

[W] [Z] conteste la valeur probante de ces dates, mais les copies d'écran qu'elle verse elle-même aux débats justifient que la date du 2 juin 2009 apparaît bien dans le chemin du bandeau de recherche à savoir : https://web.archive.org/web/20090602115654/http://www.[09].fr

Il résulte donc de ces sites d'archivage que la publication sur internet des photographies litigieuses a été effectuée antérieurement au 2 juin 2009 au plus tard, et que l'action engagée par [W] [Z] le 5 juillet 2017 est prescrite pour avoir été introduite plus de cinq années après les différentes publications de ces photographies.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté que l'action engagée par [W] [Z] à l'encontre de [Y] [I] était prescrite.

Sur la recevabilité de l'intervention volontaire d'[F] [T]

L'article 329 du code de procédure civile dispose que l'intervention est principale lorsqu'elle élève une prétention au profit de celui qui la forme. Elle n'est recevable que si son auteur a le droit d'agir relativement à cette prétention.

En l'espèce, [F] [T], gendre d'[W] [Z], est intervenu volontairement le 6 novembre 2018 à la présente procédure afin d'obtenir le retrait des photographies mises en ligne par [Y] [I] et des dommages-intérêts en raison de la violation de son droit d'auteur, au motif qu'il serait l'unique architecte de la villa [Z] à [Localité 11].

[F] [T] doit donc justifier qu'il est l'unique architecte de la villa [Z] pour que son intervention volontaire soit déclarée recevable.

Il verse aux débats pour justifier de cette qualité deux plans présentés comme étant ceux de la villa [Z], comportant le cachet en relief de '[F] [T], architecte'. Toutefois, ces plans, qui n'indiquent ni le nom du maître d'ouvrage, ni la date et l'indice de révision du plan, ne peuvent suffire à établir la qualité d'unique architecte de la villa dite [Z], alors qu'aucune facture, contrat ou échange de courriers n'est produit pour en justifier.

En outre, il ressort des pièces versées aux débats par [Y] [I] qu'à la période de construction de la villa [Z], soit les années 1994 et 1995, il était associé avec [F] [T] dans le cabinet d'architectes AR. Il n'est en outre pas contesté que le book litigieux mis en ligne présente les architectes de la villa [Z] comme étant '[Y][I] & [F] [T]'.

Aussi, ainsi que l'ont justement retenu les premiers juges, [F] [T], qui ne démontre pas être l'unique architecte de cette villa, sera déclaré irrecevable en son intervention volontaire.

Le jugement sera donc confirmé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera également confirmé sur les montants alloués en application de ce texte. En outre, il y a lieu de condamner [W] [Z] et [F] [T] à verser chacun la somme de 1 500 € à [Y] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Les appelants seront condamnés aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Pascale FLAURAUD, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 30 janvier 2019 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne [W] [Z] et [F] [T] à verser à [Y] [I] la somme de 1 500 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne in solidum [W] [Z] et [F] [T] aux entiers dépens en cause d'appel, dont distraction au profit de Maître Pascale FLAURAUD en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE PRÉSIDENT LE GREFFIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 19/03702
Date de la décision : 27/05/2020

Références :

Cour d'appel de Paris C7, arrêt n°19/03702 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-05-27;19.03702 ?
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