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28/02/2020 | FRANCE | N°18/00592

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 6, 28 février 2020, 18/00592


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 6



ARRÊT DU 28 FÉVRIER 2020



(n° /2020 , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/00592 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6FGB



Décision déférée à la Cour : Décision du 20 Juillet 2018 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS - RG n° 220/305598





Demandeur au recours n° RG 18/00592 / Défendeur au recours n° RG 18/0060

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SELAS ANTOINE GITTON AVOCATS

[Adresse 5]

[Localité 4]



En présence de Me Antoine GITTON, avocat, assisté de Me Francis TEITGEN, avocat au barreau de PARIS...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 6

ARRÊT DU 28 FÉVRIER 2020

(n° /2020 , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/00592 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6FGB

Décision déférée à la Cour : Décision du 20 Juillet 2018 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS - RG n° 220/305598

Demandeur au recours n° RG 18/00592 / Défendeur au recours n° RG 18/00603

SELAS ANTOINE GITTON AVOCATS

[Adresse 5]

[Localité 4]

En présence de Me Antoine GITTON, avocat, assisté de Me Francis TEITGEN, avocat au barreau de PARIS, toque : R011

Défenderesses au recours n° RG 18/00592 / Demanderesses au recours n° RG 18/00603

1) Madame [M] [S]

Es-qualités d'ayant droit de M. [D] [S]

[Adresse 3]

[Localité 1] (SERBIE)

2) Madame [B] [S]

Es-qualités d'ayant droit de M. [D] [S]

[U] [L] 2A

[Localité 1] (SERBIE)

Toutes deux représentées par Me Laurent MEILLET, avocat au barreau de PARIS, toque: A0428

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 novembre 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre

Mme Nathalie BRET, Conseillère

M. Jacques BICHARD, Magistrat Honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par M. BICHARD, Magistrat Honoraire dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière lors des débats : Mme Sarah-Lisa GILBERT

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre et par Mme Sarah-Lisa GILBERT, greffière présente lors de la mise à disposition.

*******

Vu les recours formés auprès du Premier Président de cette cour, d'une part par la Selas Antoine Gitton, avocats, par lettre recommandée avec accusé de réception, en date du 3 août 2018, et d'autre part par Mme [B] [S] et Mme [M] [S] par lettre recommandé avec accusé de réception du 8 août 2018 à l'encontre de la décision rendue le 20 juillet 2018 par le délégataire du bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau de Paris qui a :

- fixé à la somme de 177 450 euros HT le montant total des honoraires dus par Mme [B] [S] et Mme [M] [S] à la Selas Antoine Gitton, avocats,

- dit en conséquence que Mme [B] [S] et Mme [M] [S] devront verser à la Selas Antoine Gitton, avocats, la somme de 177 450 euros HT avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du bâtonnier, soit le 21 mars 2018 , ainsi que les frais d'huissier de justice, en cas de signification de la présente décision,

- dit que Mme [B] [S] et Mme [M] [S] devront s'acquitter de la somme de 63 815 euros au titre des frais avancés pour leur compte par la Selas [Y] [K].

Entendues à l'audience du 28 novembre 2019 les parties en leurs observations en tous points conformes à leurs écritures :

- Mme [B] [S] et Mme [M] [S] qui demandent à la cour de :

* déclarer la Selas [Y] [K] irrecevable en ses demandes,

* se déclarer matériellement incompétente au profit du juge du fond,

* à titre subsidiaire :

. déclarer nul et non avenu comme inexistant le mandat donné d'engager de nouvelles procédures,

. déclarer caduques les conventions d'honoraires des 14 juin 2006, 28 septembre 2010, 3 et 18 septembre 2015,

. débouter la Selas [Y] [K], avocats de ses demandes,

. déclarer éteinte la créance successorale,

. annuler la convention d'honoraires du 28 septembre 2010,

. annuler la facture du 19 juin 2019, la déclarer nulle et à défaut inopposable,

* à titre reconventionnel :

. condamner la Selas [Y] [K] à leur restituer à elles és qualités d'ayants droit de [D] [S], la somme de 887 308, 08 euros,

. condamner la Selas [Y] [K] à leur restituer les sommes de 7 000 euros et de 1 000 euros versées postérieurement à la convention du 3 septembre 2015,

. condamner la Selas [Y] [K] à leur verser la somme de 20 000 euros en réparation de leur préjudice moral,

* à titre subsidiaire :

. fixer à la somme de 20 000 euros le montant des honoraires dus depuis l'origine,

. ordonner en conséquence la compensation judiciaire des sommes respectivement dues par les parties

. condamner la Selas [Y] [K] à leur verser la somme de 596 166, 38 euros à titre de solde d'honoraires,

* en toute hypothèse :

. condamner la Selas [Y] [K] à leur verser la somme de 2 913 519 euros correspondant à leur préjudice financier et subsidiairement à toute somme correspondant aux honoraires fixés et ceci à titre de dommages intérêts,

. débouter la Selas [Y] [K] de sa demande en remboursement des frais exposés inutilement ou sans lien avec sa mission,

. condamner la Selas [Y] [K] à leur verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

-la Selas [Y] [K] qui demande à la cour de :

* juger irrecevables comme étant nouvelles les demandes présentées Mme [B] [S] et Mme [M] [S] et subsidiairement les dires prescrites pour celles concernant les prestations effectuées avant le 28 septembre 2014,

* débouter Mme [B] [S] et Mme [M] [S], ès qualités, de leurs moyens d'irrecevabilité, de leur exception d'incompétence et de l'ensemble de leurs demandes,

* la recevoir en son recours,

* infirmer la décision déférée,

* fixer l'honoraire dus par Mme [B] [S] et Mme [M] [S], ès qualités, à la somme de 2 849 704 euros,

* condamner Mme [B] [S] et Mme [M] [S] à lui payer la somme de 2 913 519 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de lafacture du 19 juin 2019 avec intérêts au taux légal majoré de cinq points,

* à titre subsidiaire, condamner Mme [B] [S] et Mme [M] [S] à lui payer la somme de 208 800 euros avec intérêts au taux légal à compter de la rupture des conventions d'honoraires, ainsi qu'à lui payer l'honoraire de résultat initial de 150 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt rendu le 4 novembre 2015 par la cour de Cassation,

* en tout état de cause confirmer la décision déférée concernant les frais avec intérêts au taux légal à compter de l'autorisation de prélèvement du 30 mars 2018,

* condamner Mme [B] [S] et Mme [M] [S] à lui payer la somme de 100 000 euros à titre de dommages intérêts pour faute lourde et dolosive, outre une indemnité de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR QUOI LA COUR

A compter de l'année 2006 la Selas [Y] [K] est intervenue au soutien des intérêts de [D] [S] à l'occasion d'une procédure en révocation des donations consenties par celui-ci à sa première épouse.

Le 28 septembre 2010 [D] [S] a signé une convention prévoyant la rémunération de la société d'avocats sous la forme d'un honoraire de diligences calculé sur la base d'un taux horaire de 300 euros et d'un honoraire de résultat d'un montant de 150 000 euros.

La procédure engagée a donné lieu à un jugement rendu en sa faveur le 14 septembre 2009 par le tribunal de grande instance de Draguignan, infirmé par l'arrêt rendu le 22 septembre 2011 par la cour d'appel d'Aix en Provence, lui même cassé partiellement par un arrêt rendu le 10 juillet 2013 par la cour de Cassation qui a renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Montpellier.

[D] [S] est décédé le [Date décès 2] 2014.

Mme [B] [S], sa veuve, et Mme [M] [S], sa fille, ont repris l'instance en leur qualité d'ayants droit, étant rappelé que le défunt a laissé deux autres enfants nés de son premier mariage.

Toutes deux ont signé, respectivement les 18 et 3 septembre 2015, une convention d'honoraires prévoyant le versement ' pour solde de tout compte pour ses prestations relatives à la révocation des donations, un honoraire de 8% sur le montant de toute somme perçue en exécution de la révocation des donations'.

Par arrêt du 7 janvier 2015, la cour d'appel de Montpellier a jugé que l'action en révocation des donations était strictement personnelle à [D] [S] et qu'elle ne pouvait être reprise par Mme [B] [S] et Mme [M] [S] qu'elle a déclarées irrecevables.

Cette décision a été cassée et annulée sans renvoi par la cour de Cassation dans son arrêt du 4 novembre 2015 de sorte que le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan est devenu irrévocable.

Les relations professionnelles entre Mme [B] [S] et Mme [M] [S] et la Selas [Y] [K] se sont poursuivies à l'occasion de procédures d'exécution jusqu'à ce que refusant de financer les frais liés à celles-ci, la société d'avocats les menace en janvier 2018 de faire taxer ses honoraires, ce qu'elle fit le 15 mars 2018 en saisissant à cette fin le bâtonnier, Mme [B] [S] et Mme [M] [S] faisant à leur tour savoir le 24 avril 2018 à la Selas [Y] [K] qu'elles la dessaisissait.

Dans sa lettre de saisine du bâtonnier en date du 15 mars 2018 la Selas [Y] [K] a demandé la fixation de ses frais et honoraires dus par Mme [B] [S] et Mme [M] [S] à la somme de 514 266 euros au titre des prestations réalisées entre le 1er janvier 2015 et le 10 mars 2018, se décomposant ainsi :

- frais avancés : 63 815 euros,

- frais financiers et de gestion : 140 000 euros,

- honoraire de résultat : 310 451 euros au 10 mars 2018.

Par ailleurs il ne résulte nullement des termes de la décision déférée que les parties, au cours des débats, ont soumis au bâtonnier des demandes portant sur des périodes autres que celles visées dans l'acte de saisine.

Pour leur part Mme [B] [S] et Mme [M] [S] n'ont, dans leur lettre du 6 mars 2018, saisi le bâtonnier que d'un problème d'ordre déontologique portant sur le supposé refus de la Selas [Y] [K] de continuer à les représenter dans le cadre de la procédure de révocation des donations alors en cours, demande à laquelle le bâtonnier a répondu le 16 avril 2018 en indiquant que la société d'avocats n'avait commis aucune faute de nature déontologique dans la gestion du dossier.

Il se déduit de ces constatations que les demandes en fixation d'honoraires présentées à titre reconventionnel par Mme [B] [S] et Mme [M] [S] portant sur des périodes autres, notamment antérieures puisque remontant à l'année 2006, que celle expressément concernée par l'acte de saisine du 15 mars 2018, ainsi que les demandes en restitution de provisions supposées avoir été versées qui en sont la conséquence directe, sont irrecevables ainsi que le soutient la Selas [Y] [K].

Et il en est de même en ce qui concerne les demandes présentées par cette société d'avocats qui excèdent la période considérée alors même que Mme [B] [S] et Mme [M] [S] ont fait valoir (page 21 in fine de leurs écritures) en réponse au caractère nouveau de leur demande reconventionnelle dénoncé par leur contradicteur que celui-ci en réclamant la somme de 2 913 519 euros présentait à son tour une demande nouvelle.

Mme [B] [S] et Mme [M] [S] qui y avaient un intérêt personnel ont poursuivi l'action en révocation des donations consenties à la première épouse de leur père en leur qualité d'ayants droit de [D] [S] et il importe peu que les deux autres ayants droit de celui-ci n'aient pas été appelés à la présente procédure en fixation d'honoraires, indépendante de la procédure au fond et qui présente un caractère particulier.

En revanche dans le cadre de leurs relations avec la société d'avocats Mme [A] et Mme [M] [S] se sont personnellement engagées.

En effet il doit être considéré que l'intervention de la société d'avocats, postérieurement au décès de [D] [S] et jusqu'à la signature des conventions d'honoraires de septembre 2015, s'est inscrite dans le cadre d'un mandat de représentation tacite qui est devenu express avec la signature des deux conventions litigieuses qui comportent in fine un engagement manuscrit particulier pris par Mme [B] [S] et Mme [M] [S] ainsi libellé:

' bon pour reconnaissance de dette d'honoraire à hauteur de huit pour cent (8 %) sur toute somme que je percevrai en exécution de la révocation des donations conformément au jugement du 14 septembre 2010 ".

En conséquence en raison de la nature personnelle de leurs engagements il est indifférent que la société d'avocat ne se soit pas soumise aux dispositions de l'article 792 du code civil relatives aux déclarations devant être faites par les créanciers de la succession.

De même le problème d'ordre déontologique évoqué par Mme [B] [S] et Mme [M] [S] sur le supposé conflit d'intérêt qu'il y aurait eu pour la Selas [Y] [K] de poursuivre une action contre certains des ayants droit de [D] [S] qui sont les continuateurs de sa personnalité juridique est étrangère à la présente demande de taxation d'honoraires.

Par ailleurs contrairement à ce que soutient la Selas [Y] [K] le mandat donné par [D] [S] s'est éteint avec son décès et alors qu'aucun élément du dossier ne permet de retenir que Mme [B] [S] et Mme [M] [S] auraient donné leur accord pour que l'intervention de la société d'avocats se poursuive dans les termes et conditions de la convention d'honoraires du 28 septembre 2010, il s'avère en conséquence d'une part que celle-ci ne peut prétendre au paiement de l'honoraire de résultat d'un montant de 150 000 euros qu'elle sollicite à titre subsidiaire et d'autre part que les honoraires de diligences susceptibles de lui être accordés doivent être fixés selon les critères de l'article 10 alinéa 2 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée.

A cette fin, la Selas [Y] [K] produit aux débats un état des diligences qu'elle a accomplies au cours de la période allant du 1er janvier 2015 au 31 mai 2018, pour une durée de 521 heures et 55 minutes (pièce n° 43) dans lequel les prestations réalisées du 1er janvier 2015 au mois de septembre 2015 correspondent à 62 heures de travail.

La Selas [Y] [K] a ainsi fourni un travail important et utile correspondant à des analyses des décisions rendues et des écritures et mémoires déposés par les parties adverses, la rédaction de plusieurs requêtes et jeux de conclusions, la présence à différentes audiences, des entretiens téléphoniques, qui justifie les soixante deux heures retenues dans son listing.

Eu égard à la notoriété de la société d'avocats il convient fixer les honoraires sur la base d'un taux horaire, raisonnable, de 350 euros HT, soit un honoraire d'un montant de 21 700 euros HT, cette somme produisant intérêts au taux légal à compter du prononcé de cette décision.

Pour leur part les deux conventions de septembre 2015 sont totalement distinctes et indépendantes de celle passée par [D] [S] le 28 septembre 2010 qui a cessé de produire ses effets avec la fin du mandat résultant du décès du mandant alors que l'arrêt de cassation qui a permis le triomphe de l'action en révocation des donations a été rendu le 4 novembre 2015 de sorte que la société d'avocats s'est trouvée dessaisie avant qu'une décision judiciaire devenue irrévocable ait été rendue.

Cette convention qui, au demeurant ne prévoit aucune clause de dessaisissement, est donc devenue caduque privant ainsi la société d'avocats de la possibilité de percevoir l'honoraire de résultat de 150 000 euros.

Par ailleurs, contrairement à ce que soutiennent Mme [B] [S] et Mme [M] [S] sur le fait qu'elles n'auraient mandaté l'avocat que pour achever les procédures en cours et non pas pour en engager de nouvelles, la question posée est en réalité non pas celle de l'existence d'un mandat confié à la société d'avocats que cette cour ne pourrait trancher faute d'en avoir la compétence, mais celle de l'étendue de ce mandat qui est de la compétence du bâtonnier saisi en matière de contestation d'honoraires et en cas de recours, du délégué du 1er président ou de la cour.

Mais il demeure que dés lors qu'elles ne prévoient qu'un honoraire de résultat les deux conventions d'honoraires en cause, quoique prétendent les parties, encourent à ce titre la nullité ainsi que l'a justement décidé le bâtonnier.

Il en résulte que la Selas [Y] [K] ne peut obtenir le paiement d'aucun honoraire de résultat.

En revanche la société d'avocats est fondée en dépit de ce que soutiennent Mme [B] [S] et Mme [M] [S] dans sa demande en paiement des honoraires relatifs aux diligences qu'elle a accomplies au titre de la période considérée et qui doivent être fixés selon les critères de l'article 10 alinéa 2 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée.

Ainsi que la cour l'a déjà relevé, la Selas [Y] [K] produit aux débats un état des diligences effectuées durant la période allant du 1er janvier 2015 au 31 mai 2018, pour une durée de 521 heures et 55 minutes (pièce n° 43).

Cependant en l'état de la saisine du bâtonnier seule peut être prise en compte la période du 1er janvier 2015 au 10 mars 2018 , de sorte que doivent être exclues les prestations réalisées les 12, 13 et 21 mars 2018, 16 mai, 17 et 28 mai 2018 pour une durée totale de 21 heures et 50 minutes.

Doivent être également décomptées celles qui se rapportent à la période allant du premier janvier au mois de septembre 2015 et dont l'honoraire correspondant vient d'être fixé.

Le caractère effectif des prestations revendiquées par la société d'avocats n'est pas sérieusement remis en cause par Mme [B] [S] et Mme [M] [S].

Elles concernent essentiellement les différentes procédure en exécution conduites par la Selas [Y] [K] dans l'intérêt direct de ses clientes puisqu'il est avéré que l'arrêt de cassation du 4 novembre 2015 n'a pas mis un terme au contentieux qui opposait celles-ci à la première épouse de [D] [S] qui refusait d'exécuter les causes du jugement du tribunal de grande instance de Draguignan bien qu'il fût devenu irrévocable à la suite de l'arrêt rendu le 4 novembre 2015 par la cour de Cassation.

Au demeurant Mme [B] [S] et Mme [M] [S] qui désormais font valoir que la Selas [Y] [K] aurait dépassé son mandat ne se sont jamais opposées à l'engagement et la poursuite de ses procédures, ni ne les ont formellement dénoncées avant la dégradation de leurs relations avec la société d'avocats.

En revanche dans des mails, Mme [M] [S] donnait le 24 mars 2017 son accord à un projet d'assignation afin de saisir le JEX et Mme [B] [S] exprimait le 23 janvier 2018 sa satisfaction concernant une mesure d'exécution relative à un appartement dépendant de la succession de son défunt mari.

Ces prestations ont consisté en la rédaction de conclusions nombreuses, des correspondances et des échanges multiples, la présence de l'avocat aux diverses audiences, le suivi de la procédure, toutes diligences dont l'utilité ne peut sérieusement être contestée.

Néanmoins il apparaît que le temps retenu facturé s'avère excessif concernant particulièrement celles relatives aux échanges et suivi, ce qui justifie de ne retenir que 400 heures de travail.

Ainsi, alors que la publication sur son site Internet du taux horaire pratiqué est insuffisante pour satisfaire au devoir d'information dont est tenu tout avocat envers ses clients, particulièrement en ce qui concerne les conditions financières de son intervention, il convient d'appliquer le taux horaire de 350 euros HT, déjà précédemment retenu et qui apparaît tout à fait en adéquation avec les compétences de la Selas [Y] [K],

Le montant de l'honoraire revenant à la société d'avocats s'élève ainsi à la somme de 140 000 euros HT, laquelle produira intérêts au taux légal à compter du prononcé de cette décision.

Les frais d'un montant de 63 815 euros sollicités par la société d'avocats ont été acceptés à hauteur de 63 000 euros aux termes d'un document signé le 30 mars 2018 par les deux clientes qui ont autorisé le prélèvement de cette somme sur le produit de la vente d'un appartement.

Il convient en conséquence d'accueillir cette demande, la somme dont s'agit produisant intérêts au taux légal à compter du prononcé de cette décision.

En revanche concernant les frais financiers c'est à juste titre que le bâtonnier a décidé qu'ils ne relevaient pas de la compétence du juge chargé de la fixation des honoraires revenant à un avocat.

Des sommes de 161 700 euros et 63 000 euros seront déduites les provisions réglées à la société d'avocats laquelle reconnaît avoir perçu entre le 1er avril 2015 et le 31 mars 2016 la somme de 124 944 euros frais et débours compris.

Il est à cet effet observé que Mme [B] [S] et Mme [M] [S] soutiennent qu'ont été payées à titre provisionnel des sommes considérables dont elles sollicitent la restitution.

Mais cette demande que la cour vient de déclarer irrecevable pour sa partie extérieure à la saisine du bâtonnier se fonde par ailleurs sur des documents dépourvus de toute force probante puisqu'il s'agit d'un décompte manuscrit, qualifié ' d' approximatif ' et de relevés d'opérations de compte mentionnant de supposés versements sans qu'il soit certain que la société d'avocats ait été effectivement le destinataire des sommes mentionnées dont la plupart au demeurant ne concernent pas la période de temps considérée.

Il convient de rejeter les demandes en paiement de dommages intérêts, particulièrement la réparation du préjudice moral, présentées par les parties qui ne relèvent du pouvoir d'attribution de cette cour.

En l'état de la décision l'équité ne commande pas d'accueillir les demandes formées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en dernier ressort, publiquement, contradictoirement et par mise à disposition de la décision au greffe,

Ordonne la jonction des procédures 18/00592 et 18/00603,

Rejette l'exception d'incompétence soulevée par Mme [B] [S] et Mme [M] [S],

Déclare irrecevables les demandes présentées par les parties en fixation d'honoraires ainsi que les demandes formées par Mme [B] [S] et Mme [M] [S] en restitution de provisions extérieures à la période du 1er janvier 2015 au 10 mars 2018 qui constitue la saisine du bâtonnier,

Infirme la décision déférée,

Statuant à nouveau,

Fixe les honoraires de diligences pour la période du 1er janvier 2015 au 10 mars 2018 dus à titre personnel par Mme [B] [S] et Mme [M] [S] à la Selas [Y] [K] à la somme de 161 700 euros HT avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Fixe les frais dus par Mme [B] [S] et Mme [M] [S] à la Selas [Y] [K] à la somme de 63 000 euros pour la période du 1er janvier 2015 au 10 mars 2018, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Condamne en tant que de besoin Mme [B] [S] et Mme [M] [S] à payer à la Selas [Y] [K] les sommes de 161 700 euros HT et 63 000 euros sous déduction de la provision de 124 944 euros,

Rejette toute autre demande,

Laisse les dépens à la charge de Mme [B] [S] et Mme [M] [S].

Dit qu'en application de l'article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, l'arrêt sera notifié aux parties par le Greffe de la Cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 18/00592
Date de la décision : 28/02/2020

Références :

Cour d'appel de Paris C6, arrêt n°18/00592 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-02-28;18.00592 ?
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