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27/02/2020 | FRANCE | N°19/04429

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 27 février 2020, 19/04429


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8



ARRÊT DU 27 FÉVRIER 2020



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/04429 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7NBX



Décision déférée à la cour : jugement du 04 janvier 2017 -juge de l'exécution de Paris - RG n° 16/83518





APPELANTE



LIGUE DES ETATS ARABES

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représentée par Me Tatiana Abachkina, avocat au barreau de Paris

ayant pour avocat plaidant Me Pierre-François Rousseau de l'aarpi Phi Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0026,



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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8

ARRÊT DU 27 FÉVRIER 2020

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/04429 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7NBX

Décision déférée à la cour : jugement du 04 janvier 2017 -juge de l'exécution de Paris - RG n° 16/83518

APPELANTE

LIGUE DES ETATS ARABES

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Tatiana Abachkina, avocat au barreau de Paris

ayant pour avocat plaidant Me Pierre-François Rousseau de l'aarpi Phi Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0026,

INTIMÉ

Monsieur [V] [O]

né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Sabine Goncalves, avocat au barreau de Paris, toque : D0223,

ayant pour avocat plaidant Me Marie-Sophie Vincent, avocat au barreau de Paris, toque : E1858 substitué par Me Alexandre Abdillahi, avocat au barreau de Paris

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 février 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Emmanuelle Lebée, conseillère faisant fonction de présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Emmanuelle Lebée, conseillère faisant fonction de présidente de chambre

M. Gilles Malfre, conseiller

M. Bertrand Gouarin, conseiller

Greffière, lors des débats : Mme Juliette Jarry

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure Civile.

- Signé Par Emmanuelle Lebée, conseillère faisant fonction de présidente de chambre et par Juliette Jarry, greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu la déclaration d'appel en date du 7 mars 2017 ;

Vu l'ordonnance de radiation en date du 12 juin 2017 ;

Vu les conclusions récapitulatives de l'association Ligue des États Arabes (la Ligue arabe), organisation internationale intergouvernementale de droit public, en date du 11 décembre 2019, tendant à voir la cour rejeter les demandes de caducité et de péremption, infirmer le jugement attaqué, et la cour statuant à nouveau, tendant à voir débouter M. [O] de ses demandes, le condamner à lui rembourser les sommes versées en exécution du jugement infirmé, à savoir celle de 18 300 euros au titre de la liquidation de l'astreinte définitive résultant de l'arrêt confirmatif du 11 février 2016 et celle de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts, le condamner à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu les conclusions récapitulatives de M. [O], en date du 9 décembre 2019, tendant à voir la cour, à titre principal, prononcer la caducité de la déclaration d'appel, la péremption de l'instance, à titre subsidiaire, débouter la Ligue arabe de ses demandes, confirmer le jugement attaqué sauf en ce qu'il a condamné celle-ci à lui payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts, et la cour statuant à nouveau de ce chef, condamner la Ligue arabe à lui payer la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, en tout état de cause, la condamner à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Pour plus ample exposé du litige, il est fait renvoi aux écritures visées.

SUR CE :

Sur la caducité de la déclaration d'appel :

L'intimé soutient que la déclaration d'appel est caduque en ce que l'appelante n'a pas déposé ses conclusions d'appel dans le délai de deux mois prévu par l'avis de fixation du 14 mars 2017 ni dans le délai de deux mois prévu par l'avis de fixation du 5 mars 2019.

Cependant, comme le rappelle à bon droit l'appelante, dans leur rédaction issue du décret n°2009-1524 du 9 décembre 2009, les dispositions de l'article 908 du code de procédure civile prévoyant la caducité de la déclaration d'appel à défaut de conclusions de l'appelant dans un délai de trois mois à compter de celle-ci, n'étaient pas applicables aux procédures fixées, comme en l'espèce, selon les dispositions de l'article 905, de sorte que la sanction de la caducité n'est pas encourue.

Sur la péremption de l'instance :

L'intimé soutient que l'instance d'appel est périmée dès lors que l'appelante n'a accompli aucun acte de procédure interruptif dans le délai de deux ans à compter de la déclaration d'appel du 7 mars 2017, qu'en effet, la demande de réinscription au rôle, en date du 25 février 2019, n'est pas en elle-même un acte interruptif et qu'il n'a pas été destinataire des conclusions qui auraient permis cette réinscription.

Cependant, l'appelante justifie avoir conclu au fond par la voie électronique le 25 février 2019, de sorte qu'elle a accompli, ainsi que le prévoit l'article 386 du code de procédure civile, une diligence interruptive de la péremption dans le délai de deux ans de sa déclaration d'appel du 7 mars 2017.

Au fond :

Par arrêt du 14 novembre 1996, la cour d'appel de Paris, statuant en matière prud'homale, a condamné la Ligue arabe à payer à M. [O] les sommes de 9 674 francs à titre de solde d'indemnité de préavis, outre les intérêts au taux légal calculés sur cette somme depuis le 4 mai 1993, 116 088 francs à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, somme qui produira intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, a enjoint à la Ligue arabe de remettre à M. [O], sous astreinte de 200 francs par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt, une attestation Assedic portant mention d'une rupture imputable à l'employeur au 31 octobre 1991 avec un préavis non effectué de trois mois, un certificat de travail portant mention de la qualification de cadre, de la date d'embauche au 2 mai 1983 et d'une date de fin de contrat au 31 janvier 1992, et les bulletins de salaire afférents à la période durant laquelle M. [O] a été au service de la Ligue arabe, sauf pour les quelques mois de 1988 dont la copie était produite.

L'arrêt a été notifié le 27 novembre 1996.

Par jugement du 14 janvier 2013, signifié le 9 juillet 2013, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris a condamné la Ligue arabe à payer à M. [O] la somme de 5 000 euros représentant la liquidation de l'astreinte pour la période du 27 novembre 1996 au 3 décembre 2012 et a assorti l'injonction faite de transmettre à M. [O] les bulletins de salaire d'une nouvelle astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification de la décision faite à la Ligue arabe et ce pendant une période de 3 mois, se substituant à l'astreinte provisoire prononcée par la cour d'appel de Paris.

Par jugement du 25 novembre 2014, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris a condamné la Ligue arabe à payer à M. [O] la somme de 4 500 euros représentant la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du 14 janvier 2013 pour la période du 9 septembre 2013 au 9 décembre 2013, a assorti l'injonction de transmettre à M. [O] les bulletins de salaire d'une nouvelle astreinte de 150 euros par jour de retard, passé le délai de deux mois à compter de la signification de la décision faite à la Ligue arabe, ce pendant une période de 4 mois, et a débouté M. [O] de sa demande d'astreinte définitive.

Par arrêt du 11 février 2016, signifié le 1er mars 2016, devenu irrévocable, ce jugement a été confirmé sauf en ce qui concerne la nature de la nouvelle astreinte et a cour, statuant à nouveau, a dit que la nouvelle astreinte de 150 par jour de retard, limitée à quatre mois, était une astreinte définitive et qu'elle prendra effet à l'issue du délai d'un mois suivant la signification de l'arrêt.

Le 20 octobre 2016, M. [O] a assigné la Ligue arabe devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris afin de voir, notamment, liquider à la somme de 18 300 euros pour la période du 1er avril au 1er août 2016 l'astreinte résultant des arrêts du 14 novembre 1996 et 11 février 2016 de la cour d'appel de Paris. ll a en outre sollicité la fixation d'une nouvelle astreinte définitive de 500 euros par jour de retard pour une durée de 4 mois et l'allocation d'une indemnité de 30 000 euros pour procédure abusive et d'une indemnité de procédure de 3 000 euros.

Par jugement du 4 janvier 2017, signifié le 22 février 2017, le juge de l'exécution a condamné la Ligue arabe à payer à M. [O] la somme de 18 300 euros représentant la liquidation de l'astreinte définitive résultant de l'arrêt confirmatif du 11 février 2016, fixé une nouvelle astreinte définitive à 200 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement, pendant 4 mois, pour l'exécution de la même obligation résultant de l'arrêt du 14 novembre 1996, condamné la Ligue arabe à payer à M. [O] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts, celle de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Il résulte des motifs de la décision, non discutés sur ce point, que manquaient les bulletins de la 1984 à décembre 1990, sauf huit bulletins de l'année 1988 déjà conformes, les bulletins rectifiés afférents à l' année 1991 et au mois de janvier 1992 ayant été produits le jour de l'audience.

C'est la décision attaquée.

Il ne sera pas fait droit à la demande de «'donner acte'» qui ne constitue pas une prétention au sens de l'article 4 du code de procédure civile.

Sur la liquidation de l'astreinte :

À l'appui de sa demande tendant à l'infirmation du jugement en ce qu'il a liquidé l'astreinte, la Ligue arabe expose qu'elle a adressé les bulletins de salaire manquants le 12 mai 2017, que le conseil de M. [O], malgré plusieurs relances, ne lui a toujours pas confirmé si ces bulletins étaient conformes et que l'intimé ne justifie d'aucun préjudice.

Cependant, alors qu'une exécution tardive ne permet pas d'échapper à la liquidation de l'astreinte et qu'il n'est invoqué aucune cause étrangère à l'origine de cette exécution tardive, l'appelante ne prétend pas avoir, au cours de la période pendant laquelle a couru l'astreinte, exécuté l'obligation assortie de celle-ci et ne critique aucun des motifs par lesquels le premier juge a liquidé l'astreinte.

En conséquence, la cour adopte les motifs du premier juge lequel, pour liquider l'astreinte définitive résultant de l'arrêt du 11 février 2016 à la somme de 18 300 euros, a relevé que les bulletins de paie des années 1987, 1988 et 1990 n'étaient toujours pas conformes à la législation en vigueur ni à l'arrêt du 14 novembre 1996 puisque, comme l'avait déjà relevé le jugement du 25 novembre 2014, M. [O] pouvait prétendre à la qualification de cadre ce qui excluait que les bulletins mentionnent encore 'retrait non-cadre A' pour ces trois années, alors que la rectification avait été faite pour les années 1991 et 1992, que, de plus, les autres bulletins de paie antérieurement communiqués et jugés non conformes n'avaient pas été rectifiés.

La cour ajoute que pour la liquidation de l'astreinte, qui tend à assurer l'exécution d'une décision de justice, le juge n'a pas à prendre en compte l'existence ou non d'un préjudice subi par le créancier.

Sur la fixation, par le jugement, d'une nouvelle astreinte définitive :

À l'appui de sa demande d'infirmation de ce chef du jugement attaqué, la Ligue arabe soutient qu'il n'y avait pas lieu à fixation d'une nouvelle astreinte définitive puisqu'elle a déféré à l'injonction qui lui était faite en remettant à M. [O] le jour de l'audience du 30 novembre 2016 les bulletins rectifiés pour la période de l'année 1991 et de janvier 1992, puis par lettre officielle du 12 mai 2017 l'ensemble des bulletins rectifiés pour les périodes encore manquantes visées par l'arrêt du 14 novembre 1996.

Cependant, dès lors, comme le relève l'intimé, que la Ligue arabe ne s'était pas acquittée de son obligation de délivrer les bulletins de paie dans les délais fixés par l'arrêt du 11 février 2016, le premier juge était fondé à prononcer une nouvelle astreinte définitive.

Sur les dommages-intérêts':

L'intimé sollicite l'infirmation du jugement attaqué en ce qu'il a fixé à la somme de 1 000 euros le montant des dommages-intérêts alloués pour résistance abusive et demande que leur montant soit porté à la somme de 30 000 euros.

Pour s'opposer à cette demande et demander l'infirmation de ce chef du jugement, la Ligue arabe soutient que cette résistance n'est pas caractérisée puisqu'elle avait fourni, lors de l'audience devant le premier juge, une partie des bulletins de salaire rectifiés et que la condamnation à des dommages et intérêts faisait double emploi avec la fixation d'une nouvelle astreinte définitive laquelle a déjà pour objectif de réparer le préjudice résultant du retard dans l'exécution d'une obligation.

Comme rappelé plus haut, il résulte de l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution que le prononcé d'une astreinte n'a pas pour objet de réparer le préjudice résultant de l'inexécution d'une obligation mais d'assurer l'exécution de la décision de justice qui ordonne celle-ci.

En l'espèce, cette décision est exécutoire depuis le 27 novembre 1996. Son inexécution pendant plus de vingt ans, alors que la Ligue arabe ne fait état d'aucune difficulté particulière ni de cause étrangère ayant pu la causer, caractérise une résistance abusive.

Celle-ci a contraint l'intimé à introduire trois procédures devant le juge de l'exécution et à constituer avocat dans deux procédures d'appel. Les peines et soucis afférents au suivi de ces procédures, qui ne sont pas réparés par l'allocation de sommes au titre des frais irrépétibles, ajoutés aux difficultés résultant de cette inexécution pour liquider les droits de l'intimé à la retraite, justifient sur le fondement de l'article L.121-3 du code des procédures civiles d'exécution l'allocation à M. [O] de la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Sur les dépens et les frais irrépétibles':

L'appelante qui succombe doit être condamnée aux dépens, débouté de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à l'intimé, en application de ces dernières dispositions, la somme dont le montant est précisé au dispositif.

PAR CES MOTIFS

Dit que la déclaration d'appel n'est pas caduque et que l'instance n'est pas périmée ;

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a condamné l'association Ligue des États Arabes à payer à M. [O] la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

Statuant à nouveau du chef de la disposition infirmée,

Condamne l'association Ligue des États Arabes à payer à M. [O] la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive celle de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 19/04429
Date de la décision : 27/02/2020

Références :

Cour d'appel de Paris G8, arrêt n°19/04429 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-02-27;19.04429 ?
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