RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 2
ARRÊT DU 16 JANVIER 2020
(n° 2020 - 16, 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05770 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5JWS
Décision déférée à la Cour : Arrêt du 02 Novembre 2017 -Cour d'Appel de PARIS - RG n° 16/04068
DEMANDERESSE À L'OPPOSITION
La SA ISO SET, agissant en la personne de son représentant légal
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée et assistée à l'audience de Me Ernest SFEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : C2042
DÉFENDERESSE À L'OPPOSITION
Madame [P] [I]
Née le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 2] (LETTONIE)
[Adresse 2]
[Localité 3]
Assistée à l'audience de Me Anna CARTIER, avocat au barreau de PARIS, substituant Me Gueorgui AKOPOV de l'AARPI AK AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0010
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Novembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Cathy CESARO-PAUTROT, présidente de chambre et Madame Laurence CHAINTRON, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Cathy CESARO-PAUTROT, présidente de chambre
Madame Patricia LEFEVRE, conseillère
Madame Laurence CHAINTRON, conseillère
qui en ont délibéré
Greffière, lors des débats : Madame Fatima-Zohra AMARA
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Cathy CESARO-PAUTROT, présidente de chambre et par Madame Fatima-Zohra AMARA, greffière présente lors du prononcé.
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EXPOSE DU LITIGE
Le 31 mai 2010, Mme [P] [I] a conclu un contrat de formation professionnelle avec la société Iso Set, société de droit suisse, pour une formation qui devait se dérouler pendant trois mois, du 31 mai au 31 août 2010.
Le même jour, Mme [I] a également signé avec la société Iso Set une reconnaissance de dette qui portait sur la somme de 10.050 euros au titre de son inscription à la formation.
Mme [I], qui estimait avoir été trompée sur la teneur et la qualité de la formation, ne l'a pas poursuivie avant son terme.
La société Iso Set a fait assigner Mme [I] en référé devant le tribunal d'instance de Versailles qui a condamné celle-ci, par ordonnance du 28 février 2011, au paiement à titre provisionnel de la somme de 9.450 euros.
Par exploit d'huissier du 30 juin 2014, Mme [I] a fait assigner la société Iso Set devant le tribunal de grande instance de Paris afin de voir prononcée la nullité du contrat de formation professionnelle pour manoeuvres dolosives au motif que la présentation qui avait été faite de la formation était trompeuse.
Par jugement réputé contradictoire du 30 octobre 2015, le tribunal de grande instance de Paris l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes et condamnée aux dépens au motif notamment que le vice du consentement s'apprécie au jour de la conclusion du contrat et qu'en l'espèce, Mme [I] ne produisait aucun document permettant d'établir des manoeuvres dolosives de la société Iso Set.
Par déclaration du 15 février 2016, Mme [I] a relevé appel de la totalité des chefs de ce jugement.
La société Iso Set n'a pas constitué avocat.
Par arrêt rendu par défaut le 2 novembre 2017, la cour d'appel de Paris a :
- infirmé le jugement du 30 octobre 2015 du tribunal de grande instance de Paris ;
Statuant à nouveau
- annulé le contrat et la reconnaissance de dette signés le 31 mai 2010 par Mme [I] au profit de la société Iso Set SA ;
- condamné la société Iso Set SA à payer à Mme [I] la somme de 4.000 euros en réparation de son préjudice financier et la somme de 3.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
- rappelé que le présent arrêt vaut titre de restitution pour les sommes versées en exécution de l'ordonnance de référé du président du tribunal d'instance de Versailles du 28 février 2011 ;
- condamné la société Iso Set SA à payer à Mme [I] la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement des dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par Me Akopov.
La société Iso Set a formé opposition à cet arrêt par déclaration du 15 mars 2018.
Par dernières écritures notifiées par voie électronique le 18 novembre 2019, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Iso Set demande, au visa des articles 571 et 700 du code de procédure civile, L. 6353-4 du code du travail et 1376 du code civil, à la cour de :
- recevoir son opposition formée à l'encontre de la décision rendue le 2 novembre 2017 par la cour d'appel de Paris,
- infirmer dans toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 2 novembre 2017 par la cour d'appel de Paris,
- confirmer la validité du contrat de formation professionnelle conclu le 31 mai 2010 entre elle et Mme [I],
- confirmer la validité de la reconnaissance de dette conclue le 31 mai 2010 entre elle et Mme [I],
Par conséquent :
- condamner Mme [I] au paiement de la somme de 8.925,55 euros au titre de la reconnaissance de dette contractée le 31 mai 2010,
- condamner Mme [I] au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Par dernières écritures notifiées par voie électronique le 18 novembre 2019, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, Mme [I] demande à la cour, au visa des articles 1116, 1134, 1147, 1152 et 1315 du code civil, L.6355-1 à L.6355-24 du code du travail et 571 à 578, 699 et 700 du code de procédure civile, de :
In limine litis
- juger irrecevable l'opposition de la société Iso Set à l'arrêt rendu par la cour d'appel le 2 novembre 2017,
- constater la validité de toutes les significations effectuées à la société Iso Set,
En conséquence, débouter la société Iso Set de toutes les demandes, fins et conclusions,
Si l'affaire est jugée en fait et en droit :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 30 octobre 2015 en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Iso Set et l'a condamnée aux dépens,
Jugeant à nouveau :
A titre principal :
- dire que la société Iso Set a usé de man'uvres dolosives ayant engendré une erreur déterminante dans son esprit et sans lesquelles elle n'aurait pas contracté,
En conséquence :
- prononcer la nullité du contrat de formation professionnelle signé entre elle et la société Iso Set SA en date du 31 mai 2010 pour dol,
- prononcer la nullité de la reconnaissance de dette signée entre elle et la société Iso Set SA en date du 31 mai 2010 pour dol,
A titre subsidiaire :
- dire que la société Iso Set a manqué aux dispositions légales instaurées par les articles L.6355-1 à L.6355-24 du code du travail,
En conséquence :
- prononcer la nullité du contrat de formation professionnelle signé entre elle et la société Iso Set SA en date du 31 mai 2010 pour nullité de forme prévue par les dispositions des articles L.6355-1 à L.6355-24 du code du travail,
- prononcer la nullité de la reconnaissance de dette signée entre elle et la société Iso Set SA en date du 31 mai 2010,
A titre infiniment subsidiaire :
- dire que la société Iso Set n'a pas exécuté ses obligations contractuelles en exécution du contrat de formation professionnelle du 31 mai 2010,
En conséquence
- dire qu'elle est bien fondée à opposer une exception d'inexécution en ce qui concerne les obligations financières découlant du contrat de formation,
- dire que la clause pénale doit être annulée pour absence de prestations contractuelles,
A titre très infiniment subsidiaire
- dire que le montant de la clause pénale contenue dans le contrat de formation professionnelle du 31 mai 2010 signé entre elle et la société Iso Set parait manifestement excessif au regard de la prestation fournie par la société Iso Set,
En conséquence,
- dire, en application de l'article 1152 du code civil, que le montant de la clause pénale contenue dans le contrat de formation signé entre entre elle et la société Iso Set sera réduit à la somme de 1.000 euros,
En tout état de cause :
- condamner la société Iso Set à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de dommages et intérêts pour préjudice subi quelqu'en soit le fondement,
- condamner la société Iso Set à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de son préjudice moral,
- ordonner la restitution de la somme de 4.170 euros qu'elle a déjà versée à ce jour entre les mains de l'huissier de justice Me [S] [F] dans le cadre de l'exécution de l'ordonnance de référé, à parfaire au jour de la décision,
- condamner la société Iso Set à lui payer la somme de 7.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Iso Set aux entiers dépens de première et seconde instance, dont distraction au profit de Me Guéorgui Akopov, avocat au barreau de Paris, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 novembre 2019.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'opposition
Mme [I] soulève in limine litis l'irrecevabilité de l'opposition formée par la société Iso Set à l'arrêt de la cour du 2 novembre 2017 pour défaut de motivation au motif que cette dernière ne démontre pas qu'elle n'ait pas été informée de l'existence de la procédure d'appel initiée à son encontre et qu'elle était donc dans l'impossibilité de se constituer. Elle soutient que la société Iso Set a bien été informée, tant de la procédure de première instance, que d'appel, et que tous les actes de procédure lui ont été notifiés conformément aux règles légales à personne habilitée à l'adresse de son siège social. Elle expose que la société Iso Set ne peut lui opposer un transfert de siège social qui n'a été ni publié, ni mentionné au Kbis. Enfin, elle allègue que l'huissier de justice chargé du recouvrement des condamnations mises à sa charge par l'ordonnance de référé du 28 février 2011 a été averti à plusieurs reprises et invité à informer sa cliente dans le but de suspendre les prélèvements.
En réplique, la société Iso Set soutient que son opposition est recevable à l'encontre de l'arrêt de la cour du 2 novembre 2017 qui a été rendu par défaut, alors qu'elle était défaillante. Elle allègue que sa défaillance est due à la mauvaise foi de Mme [I] qui ne lui pas signifié le jugement de première instance et lui a délivré les actes concernant la procédure d'appel à une adresse qui n'était pas celle de son siège social et à une personne qui n'était pas membre de l'entreprise.
Elle allègue que son siège social situé en Suisse à [Adresse 3] a été transféré le 28 janvier 2010 à [Localité 4]. Enfin, elle expose que son opposition a été formée le 15 mars 2018 dans le délai légal
de trois mois à compter de la signification de l'arrêt en date du 22 décembre 2017.
La déclaration d'opposition à l'arrêt de la cour du 2 novembre 2017 est motivée par le fait que cet arrêt a été rendu par défaut, alors que la société Iso Set était défaillante lors de cette procédure.
Toutefois, il est constant qu'en application de l'article 571 du code de procédure civile, l'opposition, qui n'est ouverte qu'au défaillant, tend à faire rétracter un jugement rendu par défaut ; qu'il résulte des articles 473 et 474 du même code, que seul constitue un jugement rendu par défaut celui rendu en dernier ressort, en l'absence de comparution d'un défendeur, auquel la citation n'a pas été délivrée à personne.
En l'espèce, il ressort des extraits K bis de la société Iso Set au 20 janvier 2015, 30 mars 2016 et 16 mai 2018, versés aux débats par Mme [I], que le siège social de cette société, est situé [Adresse 3] en Suisse et qu'elle est immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Genève.
L'assignation de la société Iso Set devant le tribunal de grande instance de Paris, en première instance, lui a été délivrée à l'adresse de son siège social.
La déclaration d'appel du jugement du tribunal de grande instance de Paris du 30 octobre 2015 et les conclusions d'appel lui ont été respectivement signifiées, les 19 mai et 3 juin 2016, conformément à la convention relative à la signification et à la notification à l'étranger des actes judiciaires ou extrajudiciaires en matière civile ou commerciale, signée à la Haye, le 15 novembre 1965, à l'adresse de son siège social à Carouge où ils ont été remis à M. [D] [L]. Le tribunal de première instance de Genève a attesté les 6 et 21 juin 2016 de la régularité de la signification de ces actes 'selon les formes légales'.
L'arrêt du 2 novembre 2017 indique que 'bien que régulièrement assignée à son siège en Suisse à personne habilitée, le 19 mai 2016, la société Iso Set n'a pas constitué avocat' et que les conclusions du 2 juin 2016 ont été notifiées 'de la même manière'.
La déclaration d'opposition à l'arrêt de la cour du 2 novembre 2017 formée par la société Iso Set, le 15 mars 2018, mentionne également comme adresse de son siège social, [Adresse 3].
Il est constant que la signification à l'ancienne adresse du siège social de la personne morale, qui ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle a informé ses adversaires de son changement d'adresse, est valable et que l'huissier de justice n'a pas l'obligation de vérifier l'exactitude de la déclaration de la personne qui s'est déclarée habilitée à recevoir l'acte.
Le transfert du siège social, de la société Iso Set de Carouge à [Localité 4], en 2010, est inopérant à rapporter la preuve de l'irrégularité de la signification des actes de la procédure d'appel et du défaut d'information de la société Iso Set, dès lors qu'ils ont été régulièrement délivrés à l'adresse de son siège social telle qu'indiqué au Kbis français de cette société et qu'il lui appartient d'accomplir les rectifications et formalités de publicité nécessaires afin de rendre opposable aux tiers toute modification.
Par ailleurs, il est constant que M. [L] destinataire des actes et signataire de leurs notifications, a été administrateur de la société Iso Set et que son identité a été vérifiée et attestée par le tribunal de première instance de Genève. Ainsi à supposer, comme le prétend la société Iso Set, que celui-ci n'ait plus été habilité à recevoir les actes n'étant plus administrateur depuis le 31 mai 2012, les notifications effectuées demeurent valables, dès lors que l'huissier de justice n'avait pas à vérifier la validité de son habilitation.
Il s'en déduit que la société Iso Set ne saurait être considérée comme défaillante au sens des dispositions légales précitées de sorte que l'opposition formée à l'encontre de l'arrêt rendu le 2 novembre 2017 sera déclarée irrecevable.
Sur les autres demandes
Mme [I] sollicite, en tout état de cause, l'octroi de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et financier en raison des fautes commises par la société Iso Set dans la conclusion et l'exécution du contrat de formation, ainsi que la restitution de la somme de 4.170 euros versée en exécution de l'ordonnance de référé du tribunal d'instance de Versailles du 28 février 2011.
Ces demandes ont d'ores et déjà été examinées et tranchées par la cour dans son arrêt du 2 novembre 2017.
L'équité commande d'allouer à Mme [I] la somme de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles dans le cadre de la présente instance.
La société Iso Set, partie perdante, sera condamnée aux entiers dépens de l'opposition par application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile qui seront recouvrés dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile par Me Guéorgui Akopov qui en a fait la demande.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition de la décision au greffe,
Déclare irrecevable l'opposition formée par la société Iso Set à l'encontre de l'arrêt rendu le 2 novembre 2017 par la cour ;
Condamne la société Iso Set à payer à Mme [P] [I] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toute autre demande ;
Condamne la société Iso Set aux entiers dépens de l'opposition qui seront recouvrés par Me Guéorgui Akopov en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE