La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/12/2019 | FRANCE | N°19/189387

France | France, Cour d'appel de Paris, J3, 18 décembre 2019, 19/189387


Grosses délivrées aux parties le :RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 15

ORDONNANCE DU 18 DECEMBRE 2019

(no 84 , 19 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 19/18938 - No Portalis 35L7-V-B7D-CAZBS

Décision déférée : Décision no219C1942 rendue le 14 octobre 2019 par l'Autorité des marchés financiers

Nature de la décision : Contradictoire

Nous, Elisabeth IENNE-BERTHELOT , Conseillère à la Cour d'appel de PARIS, délégué par le Premier Président de ladite Cour pou

r exercer les attributions résultant de l'article R 621-46 du code Monétaire et Financier ;

assistée de Véronique C...

Grosses délivrées aux parties le :RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 15

ORDONNANCE DU 18 DECEMBRE 2019

(no 84 , 19 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 19/18938 - No Portalis 35L7-V-B7D-CAZBS

Décision déférée : Décision no219C1942 rendue le 14 octobre 2019 par l'Autorité des marchés financiers

Nature de la décision : Contradictoire

Nous, Elisabeth IENNE-BERTHELOT , Conseillère à la Cour d'appel de PARIS, délégué par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article R 621-46 du code Monétaire et Financier ;

assistée de Véronique COUVET, greffier lors des débats et de la mise à disposition ;

MINISTERE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au parquet général représenté lors des débats par Madame Madeleine GUIDONI, avocat général

Après avoir appelé à l'audience publique du 04 décembre 2019 :

L'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DES ACTIONNAIRES MINORITAIRES (ADAM) actionnaire de la SA ALTRAN TECHNOLOGIES
prise en la personne de sa Présidente
ayant son siège [...]
[...]

Élisant domicile au cabinet de Me Laure GENITEAU
[...]
[...]

Représentée par Madame Colette NEUVILLE, présidente
Ayant pour avocat constitué Me Laure GENITEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : R210
Assistée de Me Alain GENITEAU, avocat au barreau de BREST

REQUERANTE

et

LA SOCIETE ALTRAN TECHNOLOGIES S.A.
Prise en la personne de son Président du Conseil d'administration
inscrite au RCS de Nanterre sous le noB 702 012 956
ayant son siège [...]
[...]

Elisant domicile au cabinet de la SELARL 2H AVOCATS
[...]
[...]

Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H AVOCATS à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056
Assistée de Me Clément DUPOIRIER du [...], avocat au barreau de PARIS, toque : J025

LA SOCIÉTÉ CAPGEMINI, société européenne
prise en la personne de son Président Directeur Général
inscrite au RCS de Paris sous le no330 703 844
ayant son siège [...]
[...]

Élisant domicile au cabinet de la SCP REGNIER BEQUET MOISAN, avocats
[...]
[...]

Représentée par Me Benjamin MOISAN de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050
Assistée de Me Emmanuel BROCHIER de l'[...], avocat au barreau de PARIS, toque : R170
Assistée de Me Jean-Yves GARAUD du [...], avocat au barreau de PARIS, toque : J021

DEFENDERESSES A LA REQUETE

EN PRESENCE DE :

L'AUTORITE DES MARCHES FINANCIERS
prise en la personne de son Président
[...]
[...]

représentée par Madame E... S..., dûment mandatée

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 04 décembre 2019, l'avocat de la requérante, les conseils des défenderesses et le représentant de l'Autorité des marchés financiers ;

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 04 décembre 2019, Madame Madeleine GUIDONI, avocat général, en son avis ;

Les débats ayant été clôturés avec l'indication que l'affaire était mise en délibéré au 18 Décembre 2019 pour mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Avons rendu l'ordonnance ci-après :

Par requête déposée au greffe de la Cour d'appel de PARIS le 24 octobre 2019, l'Association pour la Défense des Actionnaires Minoritaires (ci-après ADAM), en sa qualité d'actionnaire de la SA ALTRAN TECHNOLOGIES, a demandé à ce qu'il soit sursis à l'exécution de la décision no [...] de l'Autorité des marchés financiers (ci-après AMF) en date du 14 octobre 2019 déclarant conforme le projet d'offre publique d'achat visant les actions de la société ALTRAN TECHNLOGIES déposé par la société CAPGEMINI et emportant visa de la note d'information de l'initiateur de l'offre, la société CAPGEMINI, au motif qu'elle serait susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives au sens de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier.

Le même jour, l'ADAM a formé deux recours en annulation de ladite décision devant la Cour d'appel de PARIS sur le fondement des articles L. 621-30 et R. 621-46 du code monétaire et financier.

Le 5 novembre 2019, la société ALTRAN TECHNOLOGIES a présenté un acte de constitution devant la Cour d'Appel de Paris.

Le 5 novembre 2019, la société CAPGEMINI a présenté un acte de constitution devant la Cour d'Appel de Paris.

L'affaire a été audiencée pour être plaidée le 4 décembre 2019 et mise en délibérée pour être rendue le 18 décembre 2019.

FAITS ET PROCEDURE

Il ressort des éléments du dossier que CAPGEMINI, société cotée sur le marché réglementé Euronext à Paris, leader mondial du conseil, des services informatiques et de la transformation numérique et ALTRAN TECHNOLOGIES , également cotée sur le marché Euronext a Paris, leader mondial du conseil en innovation et ingénierie avancée notamment dans les secteurs de l'aérospatia1, l'automobile, la défense,l'énergie, le ferroviaire, la finance, les sciences de la vie, les télécoms, ont annoncé le 24 juin 2019, la signature d'un accord de négociations exclusives en vue de leur rapprochement sous la forme d'une offre publique d'achat amicale, cette offre publique d'achat de CAPGEMINI visant l'ensemble des actions Altran au prix de 14 euros par action et l'acquisition par CAPGEMINI d'un bloc de 11% du capital d'Altran auprès
d'actionnaires regroupés autour d'Apax Partners au même prix. Selon les sociétés, ce
rapprochement a pour objectif de donner naissance à un groupe de 17 milliards d'euros de chiffre d'affaires comptant plus de 265 000 collaborateurs, réalisant ainsi un projet d'envergure dans des domaines complémentaires de la technologie qui tendent à converger avec l'avènement du digital et la diffusion des nouvelles technologies dans l'ensemble des secteurs d'activité, celui des technologies des opérations pour Altran et celui des technologies de l'information pour CAPGEMINI. Le 12 août 2019, suite a la conclusion des procédures d'information et consultation des instances représentatives du personnel des deux sociétés, CAPGEMINI et Altran ont annoncé avoir signé la veille un accord de rapprochement relatif à l'Offre .
L'ADAM a exercé un recours contre l'offre et a adressé des courriers à l'AMF pour critiquer l'offre et son prix, l'AMF a étudié l'ensemble de ces critiques.

Dans sa séance du 8 octobre 2019, l'AMF a examiné le projet d'offre publique d'achat visant les actions de la société ALTRAN TECHNOLOGIES. Dans le cadre de l'examen de la conformité du projet d'offre, l'AMF a pris connaissance notamment du projet de note d'information de Capgemni, du projet de note en réponse de la société ALTRAN TECHNOLOGIES , de l'avis du conseil d'administration et du rapport de l'expert indépendant qui conclut au caractère équitable des conditions financières de l'offre pour les actionnaires de la société ALTRAN TECHNOLOGIES l'AMF a aussi pris connaissance des arguments présentés par des actionnaires minoritaires de la société ALTRAN TECHNOLOGIES et a apporté une réponse.

Sur ces bases au vu des conditions dans lesquelles l'initiateur a acquis sa participation actuelle au capital de la société visée, connaissance prise des objectifs et intentions de l'initiateur,
l' AMF a déclaré conforme le 14 octobre 2019, le projet d'offre publique d'achat de la société CAPGEMINI visant les actions ALTRAN TECHNOLOGIES , en application de l'article 231-23 du règlement général, cette décision emportant visa du projet de note d'information de l'intitiateur en date du 14 octobre 2019.

Par requête déposée au greffe de la Cour d'appel de PARIS le 24 octobre 2019, l'Association pour la Défense des Actionnaires Minoritaires (ADAM) fait valoir:

1 – Au titre de cette offre publique d'achat, l'initiateur s'engage irrévocablement à acquérir la totalité des actions ALTRAN TECHNLOGIES émises ou susceptibles d'être émises, non détenues par lui, au prix de 14 € par action ALTRAN TECHNLOGIES
Il est indiqué qu'en application de l'article 231-9 II du règlement général de l'AMF, l'initiateur – la société CAPGEMINI – a stipulé dans son offre une condition d'obtention d'un certain nombre de titres, en deçà duquel l'offre n'aura pas de suite positive.
Ainsi, l'offre est soumise à une condition de seuil de réussite fixée à 50,10 % au moins du capital et des droits de vote de la société, sur une base totalement diluée, en tenant compte de la perte des droits de vote double pour les actions apportées à l'offre.
En outre, en application de l'article 231-11 du règlement général de l'AMF (ci-après RGAMF), l'offre est conditionnée à l'autorisation au titre du contrôle des concentrations de la Commission européenne, laquelle a été saisie d'une pré-notification le 19 juillet 2019 et d'une notification le 18 septembre 2019.
En application des articles 232-4 et 237-1 et suivants du RGAMF, l'initiateur a l'intention de demander, dans un délai de 10 jours de négociation, à compter de la publication du résultat de l'offre ou, le cas échéant, dans un délai de trois mois à l'issue de la clôture de l'offre rouverte et si les conditions requises sont remplies, la mise en œuvre d'un retrait obligatoire visant les actions ALTRAN TECHNOLOGIES non présentées à l'offre.

2 – Le sursis à exécution d'une décision de l'AMF s'impose notamment si cette décision risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives et tel est le cas dans la présente espèce
Au cas présent, le déroulement de l'offre publique initiée par CAPGEMINI et en particulier sa clôture aurait des conséquences néfastes pour les actionnaires d'ALTRAN TECHNOLOGIES, lesquels seraient contraints de décider d'apporter ou non leurs titres à l'offre, alors même que la Cour d'appel ne se sera pas encore prononcé sur le recours en annulation de la décision de l'AMF ayant déclaré cette offre conforme.

3 – En cas d'annulation de la décision de conformité, la restitution des actions ALTRAN TECHNOLOGIES apportées à l'offre publique déposée par CAPGEMINI postérieurement à sa clôture ne réparerait nullement le préjudice subi par ses actionnaires du fait de l'indisponibilité de leurs titres pour la période allant de la clôture de l'offre jusqu'à la restitution des titres en cause
Il est argué que le préjudice résulterait d'une immobilisation qui pourrait représenter des sommes considérables, notamment pour les investisseurs institutionnels et professionnels.
A titre d'exemple, les actionnaires seront dans l'impossibilité de prêter leurs titres contre rémunération ou de céder leurs titres dans le marché à un cours de bourse qui serait supérieure au prix de l'offre.
De surcroît, il y aura une clôture de l'offre, et peut être même de l'offre réouverte, avant le 31 décembre 2019 et donc probablement avant que la Cour d'appel ne statue.
Il est fait valoir que ceux qui auront apporté leurs titres subiront les conséquences comptables et fiscales et les contributions sociales d'une cession faite en 2019.
Dès lors, si l'offre est ensuite annulée, il faudra rétablir les comptes dans l'exercice suivant et récupérer les taxes et contributions acquittées à tort, ce qui entraînera des coûts et n'apparaît pas envisageable.

4 – ALTRAN TECHNOLOGIES par ailleurs subirait les conséquences d'une prise de contrôle et notamment de l'intégration qui fait partie des intentions annoncées par CAPGEMINI
Il est soutenu que l'absence de suspension de la décision contestée aurait pour conséquence de rendre irréversibles certaines situations.
En effet, conformément aux intentions déclarées, CAPGEMINI assurerait la gestion de la société visée entre la clôture de l'offre et l'annulation possible de la décision, ce qui rendrait impossible une remise en l'état de la situation antérieure, et retirerait la société de la cote, ce qui conduirait à exproprier les actionnaires.
De même, CAPGEMINI pourrait jouir indûment des droits attachés aux titres des actionnaires ayant apporté à l'offre, en ce compris le droit aux dividendes et le droit de vote.

5 – Le report de la clôture de l'offre jusqu'au prononcé de l'arrêt à intervenir ne saurait en revanche nuire aux intérêts de l'initiateur
Il est souligné que la société CAPGEMINI n'a pas montré un grand empressement dans la réalisation de l'opération car elle a attendu jusqu'au 23 septembre 2019 pour déposer son offre, soit trois mois après son annonce.

6 – En l'absence de sursis à exécution et en cas d'annulation de la décision, les anciens actionnaires ayant apporté leurs titres à l'offre devraient pouvoir reprendre leurs titres contre remboursement du prix de l'offre en cas d'annulation (pour autant que cela soit possible techniquement)
Il est soutenu que l'hypothèse suivant laquelle les anciens actionnaires subiraient le risque
d 'insolvabilité de l'initiateur entre la date d'apport et la date d'annulation permettant la reprise, ne peut être écartée, compte tenu de l'état actuel de fragilité des marchés financiers.
Par ailleurs, en fonction du taux de reprise suite à l'annulation, l'initiateur pourrait se retrouver comme ayant pris le contrôle, alors que la décision de conformité a été annulée, ou dans une position de contrôle qui n'est pas claire, ce qui est contraire à l'insertion du seuil de caducité de 50% dans le droit des offres publiques.
Il est argué qu'entre 30% et 50%, l'initiateur se trouverait même dans un cas d'offre obligatoire et dans l'obligation de déposer un nouveau projet d'offre.
En conclusion, il est demandé d'ordonner qu'il soit sursis à exécution de la décision de l'AMF no [...], publiée le 14 octobre 2019, jusqu'à ce que la Cour ait statué sur le recours en annulation déposé par la requérante le 24 octobre 2019.

ADAM produit notamment une attestation de détention de titres datée du 23 octobre 2019 (1' action [...] ALTRAN TECH) ( pièce No 2).

Par observations complémentaires du 3 décembre 2019, l'ADAM soutient que :
la présente procédure , initiée par l'ADAM, a pour objet le sursis à exécution d'une décision de l'AMF, et contrairement à ce que prétend CAPGEMINI, le fonds " Elliot" n' y est pas partie, qu'elle agit en conformité avec ses statuts et en qualité d'actionnaire de ALTRAN TECHNOLOGIES, que son droit à recourir au juge a toujours été confirmé par la jurisprudence, qu'elle dément participer à une "entreprise de destabilisation" ou de présenter des recours sur le fond " dilatoires ou dénués de sérieux".
L'ADAM se réjouit des engagements de CAPGEMINI de ne pas prendre le contrôle d'Altran en cas de succès de l'offre mais que ces avancées ont des limites et que les engagements sont insuffisants, une incertitude demeure sur la capacité de CAPGEMINI à restituer les actions ALTRAN, en cas d'absence de sursis, et sur sa volonté de respecter ses engagements.
Selon l'ADAM, l'absence de sursis de la décision litigieuse est "susceptible d'entrainer des conséquences manifestement excessives" comme il est dit à l'article L 621 -30 du CMF, étant précisé que "des conséquences doivent être considérées comme excessives quand, comme en l'espèce, elles conduisent à une disproportion des risques par rapport à l'enjeu".

En conclusion, il est demandé de :
- Ordonner qu'il soit sursis à exécution de la décision de l'AMF no [...], publiée le 14 octobre 2019, jusqu'à ce que la Cour ait statué sur le recours en annulation déposé par la requérante le 24 octobre 2019.
- Dire que l'Autorité des marchés financiers ne pourra fixer la clôture de l'offre publique en cours qu'à une date postérieure à l'arrêt à intervenir.

Par conclusions déposées au greffe de la Cour d'appel de PARIS le 2 décembre 2019, la société CAPGEMINI fait valoir:

I FAITS :

CAPGEMINI, société cotée sur le marché réglementé Euronext à Paris, est un leader mondial du conseil, des services informatiques et de la transformation numérique. CAPGEMINI a été créé il y a plus de 50 ans et compte aujourd'hui plus de 200 000 collaborateurs présents dans plus de 40 pays. En 2018, CAPGEMINI a réalisé un chiffre d'affaires de 13,2 milliards d'euros. CAPGEMINI propose des services de conseil, des services applicatifs, qui comprennent la conception, le développement, la mise en oeuvre et la maintenance des applications IT, des services de technologie et d'ingénierie et d'autres services d'infogérance, qui regroupent notamment l'intégration, la gestion et le développement de tout ou partie des systémes d'infrastructure IT de ses clients. En 2019, CAPGEMINI a été reconnu, pour la septième année consécutive, comme l'une des entreprises les plus éthiques au monde par Ethisphere Institute, un organisme indépendant qui se consacre à la promotion des meilleures pratiques en matière d'éthique des affaires et de gouvernance. Altran, également cotée sur le marché Euronext a Paris, est un leader mondial du conseil en innovation et ingénierie avancée notamment dans les secteurs de l'aérospatia1, l'automobile, la défense,l'énergie, le ferroviaire, la finance, les sciences de la vie, les télécoms. Le groupe a été créé il y a plus de 30 ans. En 2018, le groupe Altran a réalisé un chiffre d'affaires de 2,9 milliards d'euros. Il compte désormais plus de 47 000 collaborateurs dans plus de 30 pays.

Concernant le déroulement de l'Offre, le 24 juin 2019, CAPGEMINI et Altran ont annoncé la signature d'un accord de négociations exclusives en vue de leur rapprochement sous la forme d'une offre publique d'achat amicale de CAPGEMINI visant l'ensemble des actions Altran au prix de 14 euros par action et l'acquisition par CAPGEMINI d'un bloc de 11% du capital d'Altran auprès
d'actionnaires regroupés autour d'Apax Partners au même prix.
Le rapprochement des deux sociétés a pour objectif de donner naissance à un groupe de
17 milliards d'euros de chiffre d'affaires comptant plus de 265 000 collaborateurs. Union
de deux leaders sur des secteurs prometteurs, ce projet est le premier rapprochement d'envergure dans des domaines complémentaires de la technologie qui tendent à converger avec l'avènement du digital et la diffusion des nouvelles technologies dans l'ensemble des secteurs d'activité (notamment le cloud, l'internet des objets, l'Edge computing, l'intelligence artificielle, la 5G) : celui des technologies des operations pour Altran et celui des technologies de l'information pour CAPGEMINI. Le 12 août 2019, suite a la conclusion des procédures d'information et consultation des instances représentatives du personnel des deux sociétés, CAPGEMINI et Altran ont annoncé avoir signé la veille un accord de rapprochement relatif à l'Offre .
Le 22 septembre 2019, le rapport de l'expert indépendant Finexsi désigné par le conseil d'administration d'Altran a conclu au caractere équitable du prix de 14 euros par action pour les actionnaires d'Altran et le conseil d'administration d'Altran a rendu un avis motivé favorable sur l'Offre recommandant aux actionnaires d'y apporter leurs actions en considérant que l'Offre était conforme aux intéréts d'Altran, de ses actionnaires et de ses salariés. Le 23 septembre 2019, CAPGEMINI a déposé son offre publique d'achat amicale sur Altran aupres de l'AMF. L'Offre porte sur la totalité des actions Altran non détenues par CAPGEMINI, a savoir 227 642 786 actions déja émises a la date du dépot de l'Offre et un maximum de 2 405 239 actions susceptibles d'étre émises avant la cloture de l'Offre.
Le 14 octobre 2019, l'AMF a déclaré l'Offre conforme et a apposé son visa sur la documentation d'Offre. Le 16 octobre l'Offre a été ouverte conformément à l'avis de calendrier publié la veille par l' AMF.

L'ADAM a exercé un recours contre l'offre, cette association accueille parmi ses membres des actionnaires individuels mais aussi des organismes de placement collectifs français et étrangers ou des hedge funds et a en principe pour objet de défendre les intérêts collectifs de investisseurs en valeurs mobilières. Au cas présent, l'ADAM est principalement mandaté par le fonds activiste Elliott Capital Advisors LP , qui est un fonds d'investissement américain basé à New York, qui se concentre aujourd'hui sur des stratégies d'activisme actionnarial au sein de sociétés cotées et adopte une démarche active propre aux fonds activistes. Initialement non révélée, cette information a été rendue publique très tardivement dans une lettre de l'ADAM du 5 septembre 2019 relayée par cette dernière via le journal l'AGEFI ( pièce No 8). L'ADAM habituellement présentée comme défenseur des petits porteurs s'attache par ce recours à défendre les intérêts d'un fond activiste qui s'est récemment illustré dans plusieurs offres publiques en adoptant des stratégies de déstabilisation et d'entrave dans un but spéculatif ( obtenir un relèvement du prix de l'offre annoncée afin de réaliser une forte plus-value dans un court laps de temps).
Il est fait état de de plusiers cas où Elliott spécule sur la hausse du titre, il critique l'Offre et tente de la discéditer en espérant obtenir un réhaussement du prix proposé pour réaliser d'importants profits à court terme. l'ADAM a adressé des courriers à l'AMF pour critiquer l'Offre et son prix, l'AMF a étudié l'ensemble des critiques et les écartées de manière non équivoque en déclarant l'Offre conforme à la réglementation applicable par sa décision de conformité du 14 octobre 2019.

L'ADAM a déposé deux recours en annulation visant la décision de conformité et l'apposition du visa sur la note d'information, et une requête en sursis à l'exécution de la décision de conformité, de l'AMF, or ce sursis est infondé en droit comme en fait.

II DISCUSSION :

Il est exposé les engagements pris par CAPGEMINI devant le premier président et devant l'AMF en cas d'annulation de la décision de conformité par la Cour d'Appel de Paris, il est argué que l'ADAM ne rapporte pas la preuve de l'existence de conséquences manifestement excessives. Au contraire, l'octroi du sursis- à l'instar de la prorogation de l'Offre que pourrait décider l'AMF- aurait des conséquences négatives pour CAPGEMINI et ALTRAN.

A – Les engagements pris par CAPGEMINI

A titre liminaire, il est rappelé qu'une offre publique consiste juridiquement en une offre d'achat faite par un initiateur à chacun des actionnaires d'une cible qui peuvent l'accepter ou pas et qu'en cas d'annulation de la décision de conformité, la remise en état passe par l'annulation de la seule opération juridique en cause. Cette annulation se caractérise par la restitution, par l'initiateur de l'offre, des actions apportées à chaque actionnaire de la cible les ayant apportées et par la restitution corrélative, par ces derniers, du montant du prix perçu.
D'un point de vue juridique, l'obligation de restitution est donc la seule requise.
Au cas présent, CAPGEMINI prend devant le Premier président de la Cour d'appel et l'AMF des engagements, non nécessaires sur le plan juridique, afin d'assurer au marché qu'elle ne prendra pas le contrôle d'ALTRAN sans passer par une offre publique d'acquisition déclarée conforme. Ainsi, en cas de succès de l'offre et jusqu'à l'arrêt de la cour d'appel sur le recours au fond (le 24 mars 2020 au plus tard), CAPGEMINI s'engage à maintenir les titres apportées sur un compte distinct et à ne pas prendre le contrôle d'ALTRAN et à cet effet à ne pas modifier la composition du conseil d'administration (sous réserve de la possibilité pour CAPGEMINI de demander à ALTRAN la cooptation de deux administrateurs en remplacement de ceux liés à APAX, dont la démission est prévue au titre du contrat de cession de bloc APAX) ou les statuts d'ALTRAN lors d'une assemblée générale ni faire acquérir ou céder à ALTRAN des actifs excédant 10% de son patrimoine ni à utiliser en assemblée générale les droits de vote correspondant aux actions apportées à l'offre et non-restituées, sauf pour s'opposer à des résolutions qui auraient un impact négatif sur la valeur des titres (fusion, apport, scission...) qu'il détient ou qui conduirait à une modification de la composition du conseil d'administration et CAPGEMINI s'engage à ne pas mettre en œuvre de retrait obligatoire.

En cas d'arrêt de la cour d'appel de PARIS faisant droit au recours, CAPGEMINI prend acte du fait qu'elle devra restituer les actions apportées à l'offre aux actionnaires qui en feraient la demande dans un délai expirant au moins cinq jours de négociation après l'obtention de la décision de conformité sur l'offre redéposée (cf. a ci-dessous) et s'engage par ailleurs à redéposer l'offre actuelle visant les titres ALTRAN purgée des irrégularités constatées par la cour d'appel; et à ne pas prendre le contrôle (selon l'engagement visé ci-dessus) tant que l'AMF n'aura pas décidé la conformité de ladite offre.
En cas d'arrêt de la cour d'appel confirmant la décision de conformité de l'AMF, CAPGEMINI s'engage à rouvrir l'offre aux mêmes conditions financières pour une période complémentaire de 10 jours de bourse à l'issue de laquelle il pourra, le cas échéant, mettre en œuvre le retrait obligatoire. Il est soutenu que c'est notamment à l'aune de ces engagements, qui assureront l'efficacité d'une éventuelle annulation de la décision de conformité nonobstant l'absence de sursis à exécution, qu'il pourra être constaté que l'exécution de cette décision n'emporterait pas des conséquences manifestement excessives.

B – Le caractère non suspensif des recours formés contre les décisions de conformité d'offres publiques et l'exception restrictive en cas de conséquences manifestement excessives

Il est rappelé que le principe posé par l'article L. 621-30 du code monétaire et financier est celui de l'absence d'effet suspensif des recours formés contre les décisions individuelles de l'AMF, ce qui se justifie, s'agissant des décisions de conformité d'offres publiques d'acquisition, en raison des risques que crée, pour l'entreprise visée, le fait de prolonger au-delà des délais prévus par la réglementation boursière la situation d'instabilité inhérente à toute période d'offre publique, spécialement lorsqu'est en cause un changement de contrôle.
Ce n'est donc qu'à titre exceptionnel que le Premier président de la cour d'appel peut ordonner un sursis, si les circonstances de l'espèce établissent que l'exécution de la décision de conformité est susceptible d'entraîner, au cas particulier, des conséquences manifestement excessives pour le requérant, étant précisé que la charge de la preuve pèse sur ce dernier.
Il est souligné que d'après la doctrine, la notion de « conséquences manifestement excessives » est étroite, seulement les conséquences irréversibles et dont le caractère excessif est évident pouvant être considérées comme telles.
Au cas présent, aucun préjudice irréversible et manifeste n'est à craindre.

C – La requérante ne rapporte pas la preuve de conséquences manifestement excessives en l'espèce
1 – Sur l'absence de conséquences manifestement excessives pour l'ADAM

Il est rappelé que la jurisprudence a eu l'occasion de préciser, à plusieurs reprises, que l'existence de conséquences manifestement excessives s'apprécie non de manière générale et abstraite mais en la personne du seul requérant.
En l'espèce, la seule requérante est l'ADAM qui ne détient qu'une seule action ALTRAN. C'est donc à son égard exclusivement que doit s'apprécier l'existence de conséquences manifestement excessives.
Il est argué que bien que l'ensemble des arguments soulevés dans sa requête semblent l'être au nom de la collectivité des actionnaires, il n'en reste pas moins que l'exécution de la décision de conformité n'aura pour l'ADAM aucune conséquence manifestement excessive, dès lors qu'en cas d'annulation, elle pourra obtenir la restitution de l'action si elle décidait de l'apporter à l'offre, conformément aux engagements pris par CAPGEMINI.
En conséquence, sa demande de sursis à exécution doit être rejetée.

2 – Le choix d'apporter ou non ses titres n'emporte aucune conséquence manifestement excessive

Il est soutenu que le fait que des actionnaires aient le choix d'apporter ou non leurs actions ne saurait à soi seul constituer une conséquence néfaste, ni même un préjudice, ni a fortiori des conséquences manifestement excessives, contrairement aux allégations de l'ADAM.
En l'absence de sursis, les actionnaires d'ALTRAN souhaitant le succès de l'offre pourront apporter leurs titres immédiatement.
En outre, dès lors que CAPGEMINI a pris l'engagement de rouvrir l'offre aux mêmes conditions financières pour une période de 10 jours, il n'existe aucune « contrainte » pour les actionnaires d'ALTRAN qui souhaiteraient attendre l'issue du recours pour le faire.
Les conséquences néfastes évoquées par l'ADAM ne sont donc nullement caractérisées.

3 – La restitution des titres apportés ne laisserait subsister aucune conséquence manifestement excessive

a – L'indisponibilité des titres entre la clôture de l'offre et la restitution des titres n'emporterait aucune conséquence manifestement excessive
Il est fait valoir que l'argument de l'ADAM suivant lequel les actionnaires ayant décidé d'apporter subiraient un préjudice « du fait de l'indisponibilité de leurs titres pour la période allant de la clôture de l'offre jusqu'à la restitution des titres en cause », est d'abord rendu inopérant par le simple fait que les actionnaires sont libres de ne pas apporter à l'offre, s'ils souhaitent garder l'entière disponibilité de leurs titres – d'autant plus s'agissant des investisseurs institutionnels et professionnels invoqués. Le fait d'exécuter la décision de conformité ne cause donc à cet égard aucun préjudice.
Ensuite, l'ADAM omet de préciser que les actionnaires choisissant d'apporter leurs titres à l'offre recevraient, dès le règlement-livraison, le prix offert par l'initiateur, dont ils auraient alors la libre disposition et qu'ils seraient alors libres d'investir comme ils le souhaitent, puisqu'il ne leur sera fait aucune obligation de le rembourser s'ils ont affecté le prix à un autre emploi.
Enfin, cet argument est totalement hypothétique et ne repose sur aucun élément concret.
Selon une jurisprudence constante, un risque théorique ne peut à lui seul constituer une conséquence manifestement excessive.

b – L'absence de conséquences comptables et fiscales irréversibles
Il est d'abord argué que le risque d'un changement de fiscalité des cessions entre 2019 et 2020, évoqué par la requérante, ne saurait constituer une conséquence manifestement excessive pour l'ADAM puisqu'elle ne détient qu'une action et qu'elle ne peut plaider pour l'ensemble de la collectivité des actionnaires.
Ensuite, le risque évoqué est parfaitement théorique et en réalité inexistant.
Par ailleurs, au regard du calendrier actuel des procédures en cours et notamment de la procédure relative au sursis de l'offre, le règlement-livraison (moment du transfert de la propriété) n'interviendra pas avant janvier 2020.
Par conséquent, la cession et son éventuelle annulation interviendraient au cours du même exercice fiscal.
En tout état de cause, cet argument n'est pas susceptible de justifier un sursis, dès lors que tout éventuel effet fiscal au titre de l'année 2019 serait compensé au cours de l'exercice 2020 par un effet fiscal inverse dû à la restitution des titres.

c – L'absence de risques liés à l'éventuelle restitution
Il est fait valoir que si la décision de conformité devait être annulée, CAPGEMINI serait sans doute en mesure de restituer les titres aux actionnaires d'ALTRAN qui les auraient apportés et qui en feraient la demande, notamment en procédant sous l'égide de l'AMF aux mesures d'information nécessaires à l'égard des intéressés et des intermédiaires teneurs de comptes.
En l'espèce, cette restitution serait facilitée par les engagements pris par CAPGEMINI, en particulier par celui d'affecter les titres apportés à un compte spécifique distinct jusqu'à l'arrêt à intervenir sur le recours en annulation.
En définitive, dès lors que la restitution des actions apportées serait possible, aucune conséquence irréversible ne serait à craindre en cas d'annulation de la décision de conformité ni pour les actionnaires ayant décidé de conserver leurs titres, une éventuelle annulation de la décision de conformité ne faisant que les conforter dans leur choix, ni pour les actionnaires ayant choisi d'apporter leurs titres à l'offre, la faculté de restitution contre remboursement du prix reçu qui leur sera proposée sous l'égide de l'AMF excluant tout préjudice pour eux et leur offrant même l'avantage de pouvoir soit profiter d'une éventuelle appréciation du cours au-delà du prix de l'offre, soit être protégés contre le risque de baisse du cours.

4 – L'absence de conséquences manifestement excessives liées à l'accroissement de la participation de CAPGEMINI

S'agissant d'abord de la période intermédiaire entre la clôture de l'offre et la décision sur le recours en annulation, les engagements pris par CAPGEMINI garantissent une absence de prise de contrôle d'ALTRAN et une absence d'interférence dans sa gestion de sorte qu'il n'existe aucun risque, ni a fortiori aucune conséquence manifestement excessive qui justifierait le prononcé du sursis à cet égard.
En ce qui concerne ensuite le retrait obligatoire, CAPGEMINI s'est engagée à maintenir les titres apportées à l'offre sur un compte spécifique jusqu'à la décision de la Cour d'appel et à ne pas mettre en œuvre une telle procédure.
Enfin, s'agissant de l'éventualité où CAPGEMINI resterait détentrice de plus de 30% du capital ou des droits de vote à l'issue des demandes de restitution, aucune conséquence manifestement excessive n'est caractérisée, cette dernière s'étant engagée à redéposer l'offre actuelle visant les titres ALTRAN, purgée des irrégularités constatées par la Cour d'appel et à ne pas prendre le contrôle d'ALTRAN selon les engagements pris tant que la nouvelle offre n'aura pas été déclarée conforme par l'AMF.

5 – L'absence de conséquences irréversibles s'agissant de l'éventuel changement de contrôle

Il est encore fait valoir que CAPGEMINI a pris l'engagement de ne pas prendre le contrôle d'ALTRAN jusqu'à la décision de rejet de la Cour d'appel de PARIS sur le recours en annulation ou, en cas d'annulation, jusqu'au dépôt d'une nouvelle offre purgée des éventuelles irrégularités.
Par ailleurs, s'agissant du financement, aucune conséquence excessive n'est identifiée par l'ADAM dès lors que CAPGEMINI s'est engagée dans l'Accord de Rapprochement à mettre à disposition d'ALTRAN les fonds nécessaires en cas de remboursement anticipé du financement consenti au titre du Senior Facilities Agreement.
Concernant les partenaires commerciaux (clients et fournisseurs), l'engagement de CAPGEMINI de ne pas interférer dans la direction et la gestion d'ALTRAN pendant la période intermédiaire garantit que les relations contractuelles entretenues par ALTRAN avec ses différents partenaires demeureront parfaitement inchangées.
De surcroît, le processus de pré-notification a déjà été lancé par ALTRAN et à ce jour, à la connaissance de CAPGEMINI, aucun partenaire ne s'est manifesté pour indiquer son intention de résilier ses accords en raison du changement de contrôle.
Enfin, s'agissant de l'argument selon lequel CAPGEMINI n'a « pas montré un grand empressement à voir l'opération se réaliser », l'affirmation est non seulement inexacte mais aussi insusceptible d'avoir une quelconque pertinence pour l'examen de la demande de sursis.

D – L'octroi du sursis sollicité emporterait des conséquences graves

Il est soutenu qu'en réalité, le sursis sollicité par la requérante irait à l'encontre des principes généraux des offres publiques visées à l'article 231-3 du Règlement général de l'AMF, notamment le principe du « déroulement ordonné des opérations au mieux des intérêts des investisseurs et du marché » et les principes « de transparence et d'intégrité du marché et de loyauté dans les transactions et la compétition ». Il en irait de même d'une prorogation de l'offre décidée par l'AMF.
Il est fait valoir qu'accorder le sursis, comme décider d'une prorogation du calendrier de l'offre, serait faire le jeu des fonds activistes qui s'immiscent dans les opérations boursières à la recherche exclusive d'un gain spéculatif personnel.

E – Sur l'absence de circonstances justifiant le report de la date de clôture de l'offre

Il est argué que pour les motifs exposés supra, il n'existe aucune raison pouvant justifier une décision de l'AMF de report de la date de clôture de l'offre.

En conclusion, il est demandé de :
- Prendre acte des engagements pris par la société CAPGEMINI devant Monsieur de Premier président, tels qu'exprimés au II .A des présentes conclusions;
- Rejeter la demande formée par l'ADAM de sursis à exécution de la décision de conformité de l'offre publique d'achat de la société CAPGEMINI visant les actions de ALTRAN TECHNOLOGIES, publiée par l'AMF le 14 octobre 2019 sous le numéro [...];

En conséquence, afin d'assurer l'effet utile de cette décision,
- Dire et juger qu'il n'y a lieu pour l'AMF à reporter la date de clôture de l'offre ;
- Statuer ce que de droit sur les dépens.

Par conclusion en réponse déposées au greffe de la Cour d'appel de PARIS le 3 décembre 2019, la société ALTRAN TECHNOLOGIES fait valoir:

1 – A titre principal, sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de l'ADAM

Il est soutenu qu'aux termes de l'article 31 du code de procédure civile, il appartient à tout demandeur de rapporter la preuve de son intérêt à agir et que s'agissant plus précisément des recours contre les décisions rendues par l'AMF, cette exigence est reprise à l'article R. 621-44 du code monétaire et financier, qui réserve le droit de recours aux seules « personnes intéressées ».
Selon une jurisprudence constante, seuls les actionnaires détenteurs d'actions à la date de la décision de l'AMF attaquée ont intérêt à agir.
Au cas présent, il appartenait donc à l'ADAM de démontrer qu'elle était actionnaire d'ALTRAN au jours où l'AMF a rendu sa décision de conformité, à savoir le 14 octobre 2019.
Or, l'« attestation de détention de titres » établie par la société Financière Meeschaert faisant état de la détention par l'ADAM d'une action ALTRAN est datée du 23 octobre 2019.
L'ADAM ne rapportant pas la preuve de son intérêt à agir, elle sera déclarée irrecevable.

2 – A titre subsidiaire, la requête à fin de sursis est mal fondée
– En droit: le sursis à exécution est enfermé dans des limites très strictes

Il est rappelé que ce n'est qu'à titre exceptionnel que le sursis à exécution peut être ordonné. Pour cela, le demandeur, qui supporte la charge de la preuve, doit établir que l'exécution immédiate de la décision litigieuse serait « susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives ».
D'après la jurisprudence, seules les conséquences à caractère irréversible et irrémédiable peuvent être considérées comme telles, un simple risque théorique ne saurait être suffisant pour obtenir le sursis à exécution, le caractère excessif des conséquences entraînées doit se concrétiser dans une situation manifeste, qui saute aux yeux; en vertu de l'adage « nul ne plaide par procureur », le requérant doit démontrer que les conséquences entraînées seraient pour lui irrémédiables et irréversibles, le simple doute sur l'issue d'un recours contre une décision de conformité au moment où l'actionnaire doit faire le choix d'apporter ou non ses actions à une offre publique ne caractérise pas, en soi, l'existence d'une conséquence manifestement excessive.

– En fait: la requête à fin de sursis ne peut qu'être rejetée

2.2.1 – L'ADAM plaide pour autrui et ne démontre aucune conséquence manifestement excessive pour elle-même

ALTRAN TECHNOLOGIES cite des extraits des écritures de l'ADAM afin de prouver que l'ADAM ne plaide pas pour elle-même mais pour autrui. La requérante est défaillante à rapporter la preuve qui lui incombe au titre de l'article L 621-30 du CMF.

2.2.2 – L'incertitude sur l'issue que réservera au fond la Cour au recours de l'ADAM n'est pas de nature à constituer une conséquence manifestement excessive

Il est argué que l'ADAM, comme tous les autres actionnaires d'ALTRAN, est libre d'apporter ou non à l'offre sachant qu'un recours est pendant. Conformément à une jurisprudence établie, celui qui apporte dans ces conditions, le fait en toute connaissance de cause et ne saurait subir de conséquences manifestement excessives.Par ailleurs, le caractère réversible des apports en cas d'annulation de la décision de conformité est garanti par la traçabilité inhérente à chaque opération d'apport, ce qui ôte toute matérialité à l'argument de l'ADAM.

2.2.3 – La prétendue indisponibilité des titres apportés n'est pas une conséquence manifestement excessive

Il est fait valoir que l'ADAM ne compte pas parmi les investisseurs institutionnels et professionnels pour lesquels elle exprime des craintes dans ses écritures. Il est d'ailleurs difficile à comprendre comment un actionnaire qui prendrait, sans contrainte, la décision d'apporter ses titres à l'offre et en percevrait le prix pourrait subir le moindre préjudice au titre d'une prétendue immobilisation du titre vendu alors que celui-ci aura été remplacé dans son patrimoine par une somme d'argent dont il aurait la libre disposition.

2.2.4 – Les prétendues conséquences comptables et fiscales ne sont pas une conséquence manifestement excessive

Il est soutenu que l'argument selon lequel les actionnaires ayant apporté « subir[aient] les conséquences comptables et fiscales et contributions sociales d'une cession faite en 2019 », si bien que si l'offre était ensuite annulée, il faudrait procéder à des corrections fiscales et comptables en 2020, est un argument purement hypothétique, non susceptible, en tant que tel, de satisfaire aux conditions prévues à l'article L. 621-30 du code monétaire et financier.
En effet, au regard du calendrier de l'offre, en cas de rejet de la requête à fin de sursis, le règlement-livraison n'interviendrait vraisemblablement pas avant janvier 2020, ce qui écarte tout risque de frottement fiscal et comptable.
Par ailleurs, l'ADAM ne prend même pas la peine de justifier quelle modification de la réglementation fiscale serait susceptible de pénaliser les actionnaires ayant apporté leur titres à l'offre en 2019 et se les verraient restituer en 2020.

2.2.5 – Sur la prise de contrôle temporaire de CAPGEMINI en cas d'annulation de la décision de conformité

Il est argué que le risque de voir CAPGEMINI « jouir indument des droits attachés aux titres des actionnaires ayant apporté à l'offre, en ce compris le droit aux dividendes et le droit de vote » est écarté à raison du calendrier de l'offre.
En effet, ALTRAN clôture son exercice comptable au 31 décembre et ses assemblées générales d'actionnaires appelées à se prononcer sur les comptes sociaux ont historiquement lieu entre les mois d'avril et juin.
S'agissant du risque de voir CAPGEMINI mettre en œuvre un retrait obligatoire pour le cas où, à l'issue de l'offre, elle serait amenée à détenir 90% du capital d'ALTRAN, ce risque est inexistant.
En effet, postérieurement à l'annonce du projet de rapprochement, le fonds d'investissement ELLIOTT, via différents véhicules d'investissement, est entré au capital d'ALTRAN à hauteur de 100 actions et a acquis progressivement des instruments financiers lui permettant de détenir, à son seul choix, environ 12% du capital d'ALTRAN à ce jour.

2.2.6 – La restitution des titres en cas d'annulation de la décision de conformité n'est pas en risque

Il est fait valoir que la traçabilité des apports, prévue aux articles 232-2 et 232-3 du RGAMF, ne laisse aucun doute quant à la réversibilité desdits apports d'un point de vue technique. La jurisprudence estime d'ailleurs que la centralisation permet une réversibilité des apports suffisamment protectrice pour les actionnaires ayant apporté à une offre publique annulée.
Quant au risque « d'insolvabilité de l'initiateur », évoqué par l'ADAM, il s'agit d'une hypothèse parmi les plus extravagantes.
Enfin, s'agissant de l'argument sur l'éventualité que CAPGEMINI se retrouve avec plus de 30% du capital ou des droits de vote suite aux demandes de restitution après une annulation de la décision de conformité, il est inopérant tant en droit, eu égard à la jurisprudence de la Cour d'appel de PARIS du 11 juin 2017, qu'en fait, l'ADAM ne rapportant pas la preuve du caractère manifestement excessif d'une telle éventualité. D'ailleurs, CAPGEMINI est déjà actionnaire d'ALTRAN.

2.2.7 – Les clauses de changement de contrôle ne représentent pas un risque de conséquence manifestement excessive
Il est soutenu que l'argument manque en droit comme en fait.
En droit, la notion de conséquence manifestement excessive s'apprécie par rapport au requérant. Or, selon l'ADAM elle-même, le risque en question serait irréversible « pour la société ». Il ne saurait donc être pertinent dans le cadre de la présente instance.
En fait, le risque invoqué est purement théorique: rien ne laisse penser que les prêteurs d'ALTRAN exigeraient le remboursement anticipé de leurs créances au titre d'un contrat intitulé « Senior Facilities Agreement », en cas de succès de l'offre.
En tout état de cause, même à le supposé établi, ce risque serait totalement couvert par l'engagement de CAPGEMINI, qui s'est engagée à mettre à disposition d'ALTRAN les financements nécessaires dans un tel scénario.
S'agissant des clauses de changement de contrôle figurant dans certains des contrats d'ALTRAN avec ses propres clients, le risque est également hypothétique dans la mesure où, depuis que le projet de rapprochement a été rendu public le 24 juin 2019, aucun des clients d'ALTRAN ne lui a fait savoir qu'il entendait mettre un terme à sa relation contractuelle en cas de contrôle par CAPGEMINI.
Au contraire, eu égard au projet industriel et à la complémentarité des deux groupes, c'est une consolidation des liens avec les partenaires qui est attendue.

3 – Sur le risque de conséquences manifestement excessives pour ALTRAN
ALTRAN souligne les effets délétères que les recours contre l'offre (au fond et à fin de sursis) ont eu pour elle tant au niveau de ses salariés que de son activité et son développement.
S'agissant de ses collaborateurs, les incertitudes créées par le contexte actuel de l'offre intensifient le risque de démission de nombreux d'entre eux. Quant aux clients et fournisseurs du groupe, le risque tient à l'allongement des délais de réalisation du projet de rapprochement et à la couverture médiatique de ce dernier. Dans ces conditions, il est essentiel pour ALTRAN qu'il soit mis un terme, dans les délais les plus brefs, à la situation d'attentisme créée par les recours engagés.

En conclusion, il est demandé de :

A titre principal,
- Juger que l'ADAM ne rapporte pas la preuve de sa qualité d'actionnaire de la société ALTRAN TECHNOLOGIES SA à la date du 14 octobre 2019 ;
En conséquence,
- Juger la requête à fin de sursis à exécution formée par l'ADAM contre la décision de l'AMF no [...] du 14 octobre 2019 irrecevable ;

A titre subsidiaire,

- Rejeter la requête à fin de sursis à exécution de l'ADAM contre la décision de l'AMF no [...] du 14 octobre 2019;
- Juger qu'il n'y a pas lieu pour l'AMF de reporter la date de clôture de l'offre publique de CAPGEMINI sur les actions d'ALTRAN TECHNOLOGIES;
-Statuer ce que de droit sur les dépens.

Par observations déposées au greffe de la Cour d'appel de PARIS le 29 novembre 2019, l'AMF fait d'abord observer que l'offre initiée par la société CAPGEMINI et visant les actions ALTRAN, à l'encontre de laquelle l'ADAM demande le sursis à exécution, relève de la procédure normale au sens de l'article 232-1 du règlement général de l'AMF, applicable « lorsque l'initiateur agissant seul et de concert détient moins de la moitié du capital ou des droits de vote de la société visée ».
Il est rappelé qu'au dépôt de son offre, la société CAPGEMINI détenait 11,43% du capital et 11,40% des droits de vote de la société ALTRAN TECHNOLOGIES.
L'AMF indique que cette offre est aussi assortie d'un seuil de caducité en application de l'article 231-9 I du règlement général de l'AMF et d'un seuil de renonciation en application de l'article 231-9 II du même règlement. Cela signifie qu'elle sera caduque si, à sa clôture, la société CAPGEMINI ne détient pas plus de 50% du capital ou des droits de vote de la société ALTRAN TECHNOLOGIES. Elle ne connaîtra, par ailleurs, pas de suite positive si, à sa clôture, CAPGEMINI ne détient pas au moins 50,10% du capital et des droits de vote de la société visée, seuil calculé sur une base totalement diluée, en tenant compte de la perte des droits de vote double attachés aux actions apportés à l'offre.
Si elle connaît, en revanche, une suite positive, l'offre sera rouverte dans les dix jours de négociation suivant la publication des résultats définitifs, et pendant une durée d'au moins dix jours de négociation, au sens de l'article 232-3 du règlement général de l'AMF.
Il est argué qu'en termes d'exécution des ordres apportées à l'offre, l'ensemble de ces conditions emporte nécessairement la centralisation de ces ordres pendant la durée de l'offre, soit la période comprise entre sa date d'ouverture et sa date de clôture, soit le jour du règlement-livraison.
Or, du fait de cette centralisation des ordres, la traçabilité des actionnaires ayant apporté à l'offre est assurée via l'entreprise de marché Euronext Paris, auprès de laquelle sont déposés les ordres d'apport à l'offre par les intermédiaires habilités.
Il est également fait observer que la société CAPGEMINI s'est engagé à immobiliser les titres apportés à l'offre sur un compte dédié et distinct de celui sur lequel sont inscrites les actions ALTRAN qu'elle détient par ailleurs.
Ainsi, dans l'hypothèse où la cour annulerait la décision de conformité, il serait tout à fait possible techniquement pour CAPGEMINI de rendre les titres aux actionnaires qui en feraient la demande contre remboursement du prix qui leur a été payé.
Il est argué que l'initiateur d'une offre ne saurait, dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel statuant sur le fond, exercer le contrôle de la société dont il a acquis les actions, alors que son offre est susceptible d'être annulée.
Or, si son offre a une suite positive, la société CAPGEMINI détiendra, à la clôture de l'offre, par définition, plus de la moitié du capital et des droits de vote de la société ALTRAN et donc son contrôle au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce lui donnant le pouvoir de convoquer une assemblée générale de la société ALTRAN afin d'asseoir sa prise de contrôle en application de l'article L. 225-103, 4o du code de commerce, sans que, pour autant, la cour ait statué sur la légalité de son offre.
Il en va de même, a fortiori, en cas d'annulation par la cour d'appel de la décision de conformité de l'AMF.
Il est rappelé les engagements de la société CAPGEMINI.

En conclusion, l'AMF considère que les conditions du sursis à exécution de sa décision de conformité de l'offre publique d'achat visant les actions ALTRAN ne sont pas réunies, compte tenu des engagements spécifiques pris par la société CAPGEMINI et demande qu'à défaut, il soit donné acte de son engagement de proroger la durée de son offre, de sorte que sa clôture intervienne au moins dix jours de négociation après le prononcé de l'arrêt au fond de la Cour.

En conséquence, il est demandé le rejet de la demande de sursis à exécution.

Par avis en date du 3 décembre 2019, le Ministère public rappelle le texte de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier et précise que c'est à bon droit que l'AMF souligne qu'une offre dont la légalité est contestée a en principe vocation à se dérouler selon le calendrier fixé par elle, nonobstant l'existence d'un recours au fond à l'encontre de la décision de conformité, sous réserve que celle-ci ne soit pas susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives.
Selon une jurisprudence constante, il appartient au requérant de rapporter la preuve du caractère manifestement excessif des conséquences entraînées.

Le Ministère public invite donc la Cour à appliquer la jurisprudence habituelle, notamment ses décisions du 3 juillet 2012 no 12/08323 et du 13 mai 2015 no 15/07279, et à :

- donner acte à l'AMF de son engagement de proroger la durée de l'offre en cause de sorte que sa clôture intervienne au moins dix jours de négociation après le prononcé de l'arrêt au fond.
- déclarer, dès lors, sans objet la demande de sursis à exécution de la décision no219C1942 du 14 octobre 2019 et à la rejeter.

A l'audience du 4 décembre 2019, il est constaté que l'ADAM produit une attestation de détention de titres, depuis le 16 octobre 2002, datée du 3 décembre 2019 (1action [...] ALTRAN TECH) (pièce No 5), ainsi qu'une copie de ses statuts.

La société ALTRAN TECHNOLOGIES renonce à soulever l'irrecevabilité du fait du défaut d'intérêt à agir de l'ADAM .

Colette NEUVILLE, présidente de l'ADAM, confirme à l'audience vouloir défendre les petits porteurs depuis 28 ans, que des actionnaires peuvent demander à l'ADAM d'agir, qu'elle n‘est pas autorisée à divulguer l'identité des membres, ni des fonds d'investissements étrangers qui la mandatent.

SUR CE

Sur la demande de l'ADAM qu'il soit :

- ordonné qu'il soit sursis à exécution de la décision de l'AMF no [...], publiée le 14 octobre 2019, jusqu'à ce que la Cour ait statué sur le recours en annulation déposé par la requérante le 24 octobre 2019.

Il convient d'abord de rappeler que l'article L. 621-30 du Code monétaire et financier prévoit que "l'examen des recours formés contre les décisions individuelles de l' Autorité des marchés financiers autres que celles, y compris les sanctions prononcées à leur encontre, relatives aux personnes et entités mentionnées au II de l'article L 621-9 est de la compétence du juge judiciaire. Ces recours n'ont pas d'effet suspensif sauf si la juridiction en décide autrement . Dans ce cas la juridiction saisie peut ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de la décision contestée si celle-ci est susceptible d'entrainer des conséquences manifestement excessives [...] "
Il appartient au demandeur au sursis à exécution de rapporter la preuve de telles conséquences.

Sur les circonstances manifestement excessives :

L' ADAM a présenté une requête à fin de sursis à exécution en date du 24 octobre 2019, "en sa qualité d'actionnaire de la SA ALTRAN TECHNOLOGIES" de la décision de conformité de l'AMF du 14 octobre 2019, l'ADAM a produit une attestation de détention de titres, depuis le 16 octobre 2002, datée du 3 décembre 2019 , attestant de sa qualité d'actionnaire de la SA ALTRAN TECHNOLOGIES, elle prétend selon ses statuts défendre les intérêts collectifs des actionnaires minoritaires sans pour autant produire de mandat de la part d'actionnaires minoritaires de SA Altran, pour agir dans le cadre de cette instance, il convient pour ADAM de démontrer que l'exécution de la décision contestée serait susceptibles d'entraîner des conséquences manifestement excessives pour elle - même, agissant en tant qu'actionnaire de la SA ALTRAN TECHNOLOGIES ne détenant qu'une action.

Il résulte de la décision de l'AMF du 14 octobre 2019 que, dans le cadre de l'examen de la conformité du projet d'offre, il a été conclu au caractère équitable des conditions financières de l'offre pour les actionnaires de la société ALTRAN TECHNOLOGIES, qu'elle a pris en compte les arguments présentés par des actionnaires minoritaires de la société ALTRAN TECHNOLOGIES et a répondu, que dans ses observations du 29 novembre 2019 l'AMF rappelle que l'offre initiée par la société CAPGEMINI relève de la procédure normale au sens de l'aritcle 232-1 du règlement général de l'AMF, applicable "lorsque l'initiateur agissant seul et de concert détient moins de la moitié du capital ou des droits de vote de la société visée", ce qui est le cas, que si elle connait une suite positive, l'offre sera rouverte dans les 10 jours de négociation suivant la publication des résultats définitifs et pendant une durée d'au moins 10 jours de négociation au sens de l'article 232-3 du règlement général de l'AMF, qu' en terme d'exécution des ordres d'apport de l'offre, l'ensemble de ces conditions emportent nécessairement la centratlisation de ces ordres pendant la durée de l'offre, que du fait de cette centralisation des ordres la traçabilité des actionanires ayant apporté à l'offre est assurée, que l'AMF rappelle que la société CAPGEMINI s'est engagé à immobiliser les titres apportés à l'offre sur un compte dédié et distinct de celui sur lequel sont inscrites les actions Altran qu'elle détient par ailleurs, que si la Cour d'appel annulait la décision de conformité, il serait tout a fait possible techniquement à CAPGEMINI de rendre les titres aux actionnaires qui en feraient la demande contre remboursement du prix qui leur a été payé, qu'ainsi l'AMF considère que les conditions du sursis à exécution de sa décision de conformité de l'offre publique d'achat visant les actions ALTRAN ne sont pas réunies, compte tenu des engagements spécifiques pris par la société CAPGEMINI , engagements confirmés dans ses écritures et à l'audience par CAPGEMINI.

Il en résulte que les conséquences à caractère irréversible et irrémédiable qui découleraient de l'application de la décision de l'AMF invoquées par la requérante ne sont pas démontrées, qu'elle apparaissent comme un simple risque théorique, le simple doute sur l'issue d'un recours contre une décision de conformité au moment où l'actionnaire doit faire le choix d'apporter ou non ses actions à une offre publique ne caractérise pas, en soi, l'existence d'une conséquence manifestement excessive, que l'exécution de la décision de conformité n'aura pour l'ADAM, détentrice d'une seule action, aucune conséquence manifestement excessive, dès lors qu'en cas d'annulation, elle pourra obtenir la restitution de l'action si elle décidait de l'apporter à l'offre, conformément aux engagements pris par CAPGEMINI.

Ainsi, l'exécution de la décision contestée n'est pas susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives pour l'ADAM, en tant qu'actionnaire de la SA ALTRAN TECHNOLOGIES qui au surplus ne détient qu'une action.

Dès lors les conditions exigées pour l'octroi d'un sursis à exécution n'étant pas réunies, il y a lieu de rejeter la demande de sursis à exécution de la décision de l'Autorité des marchés financiers rendue le 14 octobre 2019 formée par l'ADAM.

Sur la demande de l'ADAM qu'il soit :
- dit que l'Autorité des marchés financiers ne pourra fixer la clôture de l'offre publique en cours qu'à une date postérieure à l'arrêt à intervenir.

Il n'appartient pas au Premier Président de la cour d'appel, saisi dans le cadre de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier, de se prononcer sur cette demande.
Dès lors il y a lieu de rejeter cette demande

Sur les demandes de donner acte à l'AMF de sa proposition de proroger la durée de l'offre en cause de sorte que sa cloture intervienne après le prononcé de l'arrêt au fond , dès lors que la preuve de conséquences manifestement excessives n'a pas été rapportée par l'ADAM, et que cette proposition est jugée non appropriée par les autres parties (CAPGEMINI et Altran), il n' y a pas lieu de donner acte à l'AMF de sa proposition.
Dès lors il y a lieu de rejeter cette demande.

Sur la demande de la société CAPGEMINI de prendre acte de ses engagements tels qu'exprimés au II A des présentes conclusions, dès lors que la preuve de conséquences manifestement excessives n'a pas été rapportée par l'ADAM, cette proposition ne s'impose pas.

Dès lors il y a lieu de rejeter cette demande.

Sur les frais et dépens :

Il y a lieu de condamner l'ADAM, partie perdante, aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement

- Rejetons la demande de sursis à exécution de la décision de l'Autorité des marchés financiers no [...], rendue le 14 octobre 2019, formée par l'Association pour la Défense des Actionnaires Minoritaires en sa qualité d'actionnaire, jusqu'à ce que la cour d'appel statue sur le bien-fondé du recours formé contre cette décision,

- Rejetons la demande de l'ADAM de dire que l'Autorité des marchés financiers ne pourra fixer la clôture de l'offre publique en cours qu'à une date postérieure à l'arrêt à intervenir,

- Disons n'y a voir lieu à à donner acte à l'Autorité des marchés financiers de sa proposition évoquée dans les motifs de la présente ordonnance,

- Rejetons toute autre demande,

- Condamnons la requérante (ADAM) aux dépens,

- Disons que conformement aux dispositions de l'article R 621-46 VIII du code monétaire et financier, la présente décision sera notifiée par le greffe par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

LE GREFFIER

Véronique COUVET LE DÉLÉGUÉ DU PREMIER PRESIDENT

Elisabeth IENNE-BERTHELOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : J3
Numéro d'arrêt : 19/189387
Date de la décision : 18/12/2019
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2019-12-18;19.189387 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award