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12/12/2019 | FRANCE | N°18/05749

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 2, 12 décembre 2019, 18/05749


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 2



ARRÊT DU 12 DÉCEMBRE 2019



(n° 2019 - 355 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05749 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5JTV



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Mars 2016 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 12/04422





APPELANT



Monsieur [T] [U]

[Adresse 1]

[Localité 1]





Re

présenté par Me Olivia AMBAULT-SCHLEICHER de la SCP VELIOT FENET-GARDE AMBAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0222







INTIMÉE



La société ALLO CASSE AUTO, prise en la personne de son représentant légal

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 12 DÉCEMBRE 2019

(n° 2019 - 355 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05749 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5JTV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Mars 2016 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 12/04422

APPELANT

Monsieur [T] [U]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représenté par Me Olivia AMBAULT-SCHLEICHER de la SCP VELIOT FENET-GARDE AMBAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0222

INTIMÉE

La société ALLO CASSE AUTO, prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean-christophe HYEST, avocat au barreau de PARIS, toque : G0672

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Novembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Cathy CESARO-PAUTROT, présidente de chambre, chargée du rapport et Madame Patricia LEFEVRE conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, présidente de chambre

Madame Patricia LEFEVRE, conseillère

Madame Laurence CHAINTRON, conseillère

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Madame Fatima-Zohra AMARA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Cathy CESARO-PAUTROT, présidente et par Madame Fatima-Zohra AMARA, greffière présente lors du prononcé.

***********

Le 4 décembre 2002, M. [T] [U] a aquis aux enchères publiques, au prix de 10 000 euros, un véhicule automobile de marque Volkswagen mis en circulation le 1er juillet 1998 dont le kilométrage affiché était de 77 832 kilomètres.

En 2006, il a confié ce véhicule à plusieurs reprises à la société Allo casse auto : le 8 août 2006, pour procéder à des opérations d'entretien et à un contrôle technique, le 31 octobre 2006 en raison d'un manque de puissance du moteur, puis le 19 décembre 2007 pour ce même défaut et en raison d'émission de fumée. A cette occasion, le garagiste a remplacé le turbo-compresseur, pièce qu'il a, à nouveau, changée, le 8 avril 2008.

Victime d'une panne moteur fin décembre 2008, M. [T] [U] a saisi son assureur protection juridique qui a désigné un technicien. Celui-ci a conclu à un manque de lubrification du moteur et que les dommages sont imputables à l'absence d'obligation de résultat du garage Allo casse auto.

M. [U] a sollicité une mesure d'expertise devant le président du tribunal de grande instance d'Evry. L'expert désigné par une ordonnance du 13 novembre 2009, M. [W], a déposé son rapport le 30 septembre 2010. Il a imputé l'avarie moteur à un manque de lubrification et a retenu qu'une boue pétrolière épaisse a contaminé tout le circuit de lubrification du moteur, que cette pollution est à l'origine des désordres qui imposent le remplacement du moteur, qu'elle a pour cause le non-respect de la périodicité des entretiens préconisés par le constructeur, et qu'à l'exception des travaux de la société Allo casse auto sur la distribution, les prestations de cette entreprise se sont révélées inutiles.

C'est dans ce contexte, qu'après avoir soumis ces conclusions à l'examen critique d'un cabinet d'expertise, que M. [U] a, par acte extra-judiciaire en date du 3 mars 2012, fait assigner la société Allo casse auto devant le tribunal de grande instance d'Evry.

Par jugement en date du 18 mars 2016, le tribunal de grande instance d'Evry a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, débouté M. [U] de toutes ses demandes, débouté la société Allo casse auto de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive et a condamné M. [U] au paiement de la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

M. [U] a interjeté appel le 16 mars 2018, et aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 15 juin 2018, il demande à la cour, au visa de l'article 1147 ancien du code civil et de l'article 1231-1 nouveau du même code, d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes, et statuant à nouveau, de condamner la société Allo casse auto au paiement de la somme de 7 546,07 euros TTC au titre de la remise en état de son véhicule, d'évaluer le préjudice qu'il a subi à octobre 2013 en chiffrant les frais de parking sur la base de la facture Allo casse auto du 26 mai 2009, à hauteur de 51.709,26 euros, frais d'assurance compris, sauf à parfaire et, en conséquence, de condamner l'intimée au paiement de cette somme au titre du préjudice subi depuis le 17 octobre 2013. A titre subsidiaire, il demande à la cour d'ordonner une contre-expertise.

Pour le surplus, il demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Allo casse auto de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et en tout état de cause, il sollicite sa condamnation au paiement de la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, le 25 juillet 2018, la société Allo casse auto soutient, au constat que la panne est consécutive au non-respect par M. [U] des préconisations du constructeur, la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté l'appelant de ses demandes et y ajoutant sa condamnation au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La clôture est intervenue le 9 octobre 2019.

SUR CE, LA COUR,

Considérant que M. [U] critique le jugement déféré qui n'a pas pris la mesure de l'obligation de résultat pesant sur le garagiste et a écarté les conclusions critiques de l'expert, M. [A] ; qu'il reprend ce rapport pour retenir la responsabilité du garagiste, tenu à une obligation de résultat emportant une présomption de responsabilité des pannes survenues après son intervention et dont il ne peut s'exonérer que s'il prouve qu'il n'a pas commis de faute ; que l'intimée réplique que les conclusions du technicien commis par l'assureur de M. [T] [U] et celles de l'expert judiciaire sont concordantes pour imputer le dommage à un défaut d'entretien du véhicule patent entre 2002 et 2006 et au manque de lubrification en résultant ; qu'elle avance qu'elle a parfaitement informé son client du caractère aléatoire du remplacement du turbo-compresseur et de son opportunité ;

Considérant que le garagiste chargé de la réparation d'un véhicule est tenu d'une obligation de résultat à l'égard de son client ; qu'il doit rendre le véhicule en état de marche après son intervention ; que cette obligation emporte à la fois une présomption de faute du garagiste et une présomption de causalité entre la prestation fournie et le dommage invoqué ; qu'en conséquence, le client du garagiste doit uniquement démontrer que l'origine de la panne est due à une défectuosité qui existait déjà au jour de l'intervention du garagiste ou qu'elle est en lien avec celle-ci ; que le garagiste ne peut s'exonérer de cette responsabilité que s'il démontre qu'il n'a pas commis de faute ou que le dommage résulte d'une cause étrangère ;

Considérant que l'expert judiciaire impute les désordres - la réduction de l'étanchéité du haut moteur à l'origine de son manque de puissance et de sa défaillance - à une pollution intérieure du circuit de lubrification provoquée par une dégradation de l'huile moteur qui a été polluée par de l'eau (condensation) en raison des échanges thermiques du moteur qui a entraîné une perte de performance de l'huile aggravée par un espacement anormal des vidanges ; qu'il conclut que la présence de boue est provoquée par un manque d'entretien (vidange de l'huile moteur) et il qualifie d'inutiles les travaux réalisés par la société Allo casse auto à l'exception du remplacement du kit de distribution, le 8 août 2006 ; qu'il explique le caractère apparemment satisfaisant de l'intervention sur le turbo-compresseur par une obstruction seulement partielle du tuyau d'alimentation en huile qui a permis une utilisation du véhicule de l'ordre de 8000 kilomètres ;

Que les techniciens qui ont examiné le véhicule retiennent, pour le premier, que la société Allo casse auto aurait dû procéder à une prise de compression et à la dépose du carter afin de contrôler l'état du circuit de lubrification, et pour le second, que notamment lors de l'intervention sur la distribution (soit en août 2006), elle pouvait s'apercevoir des dépôts d'huile brûlée dans le cache arbre à cames ;

Considérant qu'il est porté sur l'ordre de réparation du 19 décembre 2007 signé par M. [T] [U] que le véhicule est confié à la société Allo casse auto en raison de fumée et bruit quant le moteur se met en route puis à l'accélération ainsi que la mention manuscrite Moteur HS ; or il est constant que malgré ce diagnostic qui imposait, dès cette date, le remplacement du moteur, la société Allo casse auto a limité son intervention au remplacement du turbo-compresseur, prestation qualifiée d'inutile par l'expert judiciaire ;

Que force est de constater que la société Allo casse auto a clairement identifié la cause de la panne et en a informé son client ; qu'en revanche, elle ne justifie pas, en l'absence de toute indication en ce sens à l'ordre de réparation, d'une part d'une commande limitée au remplacement du turbo-compresseur et d'autre part, d'une information et d'un conseil notamment quant à l'opportunité de cette prestation ; qu'elle ne vient d'ailleurs pas expliquer les raisons qui l'ont conduite, alors qu'elle avait constaté que le moteur était hors d'usage, à limiter sa prestation au remplacement du turbo-compresseur ;

Qu'en revanche, l'expert judiciaire retient un blocage des poussoirs hydrauliques des soupapes et donc du moteur consécutif à leur encrassement par la boue pétrolière provoquée par un manque d'entretien ;

Que les observations d'un cabinet d'expertise saisi par M. [T] [U] après l'expertise judiciaire ne sont que partiellement produites (quatre pages sur huit ainsi qu'il ressort de l'indication portée en haut à droite) et ne remettent nullement en cause le constat d'un défaut d'entretien du véhicule depuis son acquisition en 2002 dans la mesure où il en ressort que la première vidange est intervenue le 2 février 2006 et que le véhicule avait alors parcouru, compte tenu du kilométrage mentionné sur la facture au minimum plus de 43 000 kms (120 884 -77 832) depuis sa dernière vidange ; qu'enfin, l'imputation de la pollution du carburant à une intervention de la société Allo casse auto sur le carter réparé sans respecter les règles de l'art ne repose sur aucune démonstration ou pièce ;

Qu'il s'ensuit que le seul préjudice en lien de causalité direct avec les fautes du garagiste est l'engagement par M. [U] de travaux inutiles soit le remplacement du turbo-compresseur ; que le moteur était à la date de cette intervention déjà hors service et devait être remplacé ; qu'il ressort des conclusions de M. [U] (page 8) que sa réclamation à hauteur de 51 709,26 euros inclus la réparation inutile facturée 1232,87 euros ;

Qu'en revanche, les autres dommages (coût du remplacement du moteur, assurance, frais de parking, immobilisation) trouvent leur cause dans la défaillance du moteur dont le remplacement s'imposait dès le 19 décembre 2007, ainsi que la société Allo casse auto l'avait constaté et en avait informé son client ;

Que la société Allo casse auto sera condamnée au paiement de la somme susmentionnée et la décision entreprise sera infirmée en ce qu'elle déboute M. [T] [U] de ses prétentions ;

Considérant que la cour a partiellement fait droit à la demande principale de M. [U] et n'a pas, en conséquence, à examiner sa demande subsidiaire ;

Considérant que le rejet de la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée en première instance par la société Allo casse auto n'est pas critiqué par l'intimée et sera en conséquence, confirmé ;

Considérant que les condamnations prononcées en première instance au titre des dépens et frais irrépétibles seront infirmées ; que la société Allo casse auto sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et à payer une indemnité de 2 000 euros au titre des frais exposés par  M. [U] pour assurer sa défense ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe

Infirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance d'Evry le 18 mars 2016 ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société Allo casse auto à payer à M. [T] [U] :

- la somme de 1 232,87 euros à titre de dommages et intérêts ;

- la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Allo casse auto aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 18/05749
Date de la décision : 12/12/2019

Références :

Cour d'appel de Paris C2, arrêt n°18/05749 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-12;18.05749 ?
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