Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 8
ARRÊT DU 05 DÉCEMBRE 2019
(n° pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/00370 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7BHB
Décision déférée à la cour : jugement du 18 octobre 2018 -juge de l'exécution de Paris - RG n° 18/82295
APPELANT
M. [O] [W]
né le [Date naissance 3] 1961 à [Localité 9]
1 [V] [H]
[Localité 9]
Maroc
Représenté par Me Laurence Taze Bernard, avocat au barreau de Paris, toque : P0241
ayant pour avocat plaidant Me Johann Bioche, avocat au barreau de Paris, toque : C1520
INTIMÉES
SAS LH AVIATION
siret n° 453 705 717
agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 10]
[Localité 6]
SCP [U] [C]
prise en la personne de Maître [U] [C] pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société LH AVIATION agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 7]
[Localité 8]
SAS PEGASE ONE
siret n°525 127 650
société par actions simplifiée à associé unique agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
SAS PEGASE TWO
siret n°528 079 742
agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
SAS PEGASE SEVEN
siret n°753 159 912
agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentées par Me Anne Grappotte-benetreau de la Scp Grappotte Benetreau, avocats associés, avocat au barreau de Paris, toque : K0111
ayant pour avocat plaidant Me Fred-éric Bergheimer, CMD Avocats, avocat au barreau de Paris, toque E193
SELARL AJILINK LABIS [K],
prise en la personne de Maître [L] [K] ès qualité d'administrateur de la Société LH AVIATION
[Adresse 2]
[Localité 5]
défaillant
COMPOSITION DE LA COUR :
l'affaire a été débattue le 14 novembre 2019, en audience publique, devant la cour composée de :
Emmanuelle Lebée, conseillère faisant fonction de présidente de chambre
Gilles Malfre, conseiller
Bertrand Gouarin, conseiller
qui en ont délibéré
Greffière, lors des débats : Juliette Jarry
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Emmanuelle Lebée, conseillère faisant fonction de présidente de chambre et par Juliette Jarry, greffière, présente lors de la mise à disposition.
La société Lh Aviation a été créée afin de concevoir et commercialiser un avion léger biplace, le Lh 10. Le 21 février 2014, cette société et ses associés majoritaires, les sociétés Pégase One, Pégase Two et Pégase Seven, d'une part, et M. [W], d'autre part, ont signé un protocole d'investissement aux fins de constituer une filiale commune de droit marocain, la société Lh Aviation Maroc.
Le tribunal de commerce de Paris, par jugement du 16 février 2018 et sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a enjoint à M. [W] de :
- communiquer à la société Lh Aviation l'acte de ratification du pacte d'associés de la société Lh Aviation joint à l'assignation, paraphé et signé par les soins de ce dernier, dans les 15 jours suivant la signification du jugement, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter du 16ème jour suivant la signification du jugement, au profit des demanderesses, pendant 90 jours ;
- communiquer à la société Lh Aviation le pacte de contrôle joint à l'assignation, paraphé et signé par les soins de ce dernier, dans les 15 jours suivant la signification du jugement, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter du 16ème jour suivant la signification du jugement, au profit des demanderesses, pendant 90 jours ;
- de libérer le montant souscrit au capital de la société Lh Aviation Maroc et d'en justifier auprès la société Lh Aviation, ou de justifier à la société Lh Aviation de la garantie bancaire stipulée à l'article 2.3 du protocole d'investissement, tant qu'il n'aura pas libéré le montant souscrit au capital de cette société, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard au profit de la société LH Aviation, à compter du 15ème jour suivant la signification du jugement, pendant 90 jours ;
- de mettre en place, telle que prévue à l'article 2.6 du protocole du 21 février 2014, la cogérance avec double signature avec un représentant désigné par la société Lh Aviation France, au sein de la société Lh Aviation Maroc, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard au profit de la société Lh Aviation France, à compter du 16ème jour suivant la signification du jugement, pendant 90 jours.
La société Lh Aviation Maroc et M. [W] ont interjeté appel de ce jugement.
Par ordonnance du 7 novembre 2018, il a été constaté le désistement de M. [W] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du 16 février 2018.
Par jugement du 18 octobre 2018, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris a condamné M. [W] à payer :
- aux sociétés Lh Aviation, Pégase One, Pégase Two et Pégase Seven et Ajilink Labis, représentée par M° [K], ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Lh Aviation, la somme de 5 000 euros représentant la liquidation, pour la période du 7 juillet 2018 au 26 juillet 2018, de l'astreinte relative à l'injonction de communiquer à la société Lh Aviation l'acte de ratification du pacte d'associés paraphé et signé ;
- aux mêmes sociétés que précédemment, la même somme, pour la même période, s'agissant de l'astreinte relative à l'injonction de communiquer à la société Lh Aviation le pacte de contrôle paraphé et signé ;
- aux sociétés Lh Aviation et Ajilink Labis, représentée par M° [K], es qualités d'administrateur judiciaire de la société Lh Aviation, la somme de 25 000 euros représentant la liquidation, pour la période du 7 juillet 2018 au 12 septembre 2018, de l'astreinte relative à l'injonction de libérer le montant souscrit au capital de la société Lh Aviation Maroc et d'en justifier sans délai à la société Lh Aviation, ou de justifier à la société Lh Aviation de la garantie bancaire stipulée à l'article 2.3 du protocole d'investissement, ce tant que n'aura pas été libéré le montant souscrit au capital de cette société ;
- aux mêmes sociétés que précédemment la même somme, pour la même période, s'agissant de l'astreinte relative à l'injonction de mettre en place, telle que prévue à l'article 2.6 du protocole, la cogérance avec double signature avec un représentant désigné par Lh Aviation France, au sein de la société Lh Aviation.
Le juge de l'exécution a fixé une nouvelle astreinte provisoire de 2 000 euros par jour de retard passé un délai de 30 jours à compter de la signification de la présente décision et pendant 90 jours, s'agissant de l'injonction de libérer le montant souscrit au capital de la société Lh Aviation Maroc ou de justifier à la société Lh Aviation de la garantie bancaire, tant que n'aura pas été libéré le montant souscrit au capital de cette société. Il a fixé une nouvelle astreinte identique, s'agissant de l'injonction de mettre en place la cogérance. Il a condamné M. [W] à payer aux sociétés Lh Aviation, Pégase One, Pégase Two et Pégase Seven et Ajilink Labis, représentée par M° [K], ès qualités, la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [W] a relevé appel de ce jugement, selon déclaration du 3 janvier 2019.
Par conclusions du 16 octobre 2019, il poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'il a liquidé l'astreinte concernant la constitution d'une garantie bancaire, la mise en place d'une cogérance, la fixation des nouvelles astreintes et les frais irrépétibles, il demande à la cour, statuant à nouveau, de supprimer l'astreinte ou d'en fixer le montant à l'euro symbolique. Il entend par ailleurs que les intimées soient condamnées in solidum à lui payer la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions du 11 avril 2019, les sociétés Lh Aviation, Pégase One, Pégase Two et Pégase Seven et la Scp [U] [C], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Lh Aviation, demandent à la cour de confirmer le jugement, sauf sur les modalités de fixation d'une nouvelle astreinte, sollicitant le prononcé d'une astreinte définitive de 10 000 euros par jour de retard, à compter de l'arrêt à intervenir et pour une durée indéterminée, quant à l'absence de justification de libération du montant souscrit par M. [W] au capital de la société Lh Aviation Maroc et de la garantie bancaire et quant à l'absence de mise en place de la cogérance. Elles sollicitent, en outre, la condamnation de l'appelant au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La Selarl Ajilink Labis [K], ès qualités d'administrateur judiciaire, n'a pas constitué avocat puisque la société Lh Aviation n'est plus en redressement judiciaire, depuis le jugement du 23 septembre 2019 du tribunal de commerce de Melun, qui a désigné la Scp [U] [C] en qualité de liquidateur.
SUR CE
Il n'est plus discuté devant la cour la question de la date de la signification du jugement du 16 février 2018, soit le 21 juin 2018, de sorte que les astreintes ont commencé à courir le 7 juillet 2018, pour une durée de 90 jours.
Sur la liquidation de l'astreinte :
Aux termes des articles L. 131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, la liquidation de l'astreinte tient compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter. Lorsque la décision d'origine a fixé clairement les obligations assorties d'astreinte, le juge de l'exécution ne peut, sans porter atteinte à l'autorité de la chose jugée de cette décision et au titre exécutoire, soit modifier les obligations, soit dire que l'astreinte ne s'applique pas à certaines d'entre elles. Pour ce qui concerne les obligations de faire, il appartient au débiteur, assigné en liquidation, de prouver qu'il a exécuté ladite obligation. La notion de cause étrangère permettant de supprimer l'astreinte en tout ou en partie, plus large que celle de force majeure, s'entend de tous les cas dans lesquels le débiteur s'est trouvé dans l'impossibilité, pour une raison quelconque, de se conformer à l'injonction du juge.
Il n'est pas contesté que M. [W] a déféré aux deux premières injonctions, le 26 juillet 2018, à savoir la communication de l'acte de ratification du pacte d'associés de la société Lh Aviation paraphé et signé de sa main, ainsi que la communication du pacte de contrôle, également paraphé et signé de sa main. L'appelant ne conteste pas la liquidation de l'astreinte concernant ces deux injonctions, à la somme de 5 000 euros pour chacune d'elle, du fait de leur exécution tardive. Les intimés n'ayant pas formé appel incident sur ce point, le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la justification, à la société Lh Aviation, de la garantie bancaire stipulée à à l'article 2.3 du protocole d'investissement, à défaut de libérer le montant souscrit au capital de la société Lh Aviation Maroc :
Le juge de l'exécution a relevé que M. [W] se prévalait d'un document intitulé 'acte de caution' émanant de la société Attijariwafa Bank, daté du 31 juillet 2018, transmis au conseil des intimées le 8 août 2018, alors que l'injonction judiciaire visait une garantie bancaire, laquelle, à la différence de la caution, présente un caractère autonome par rapport à l'obligation garantie.
En vain, l'appelant fait valoir qu'aucune stipulation du protocole du 21 février 2014 ne comporte la mention selon laquelle la garantie bancaire en cause devrait être une garantie bancaire autonome, c'est-à-dire à première demande, de sorte que le premier juge a dénaturé les termes de ce protocole.
En effet, il convient de s'attacher non aux termes du protocole mais à ceux du dispositif du jugement du 16 février 2018, qui impose la fourniture non d'une caution mais d'une garantie bancaire. De plus, alors que cette garantie bancaire doit être effective tant que M. [W] n'a pas libéré le montant souscrit au capital de la société Lh Aviation Maroc, la caution alléguée ne respecte pas ces prescriptions puisqu'elle n'est que d'une durée d'une année et qu'elle est nulle depuis le 31 juillet 2019, sans autre formalité, ainsi que cela résulte des mentions de cet acte.
Sur la mise en place de la cogérance :
Le premier juge a relevé que tous les documents produits par M. [W] étaient antérieurs au jugement du 16 février 2018. Il a souligné, en outre, que malgré les termes d'une lettre officielle du 5 mars 2018 du conseil de M. [W], qui indiquait que pour la mise en place de la cogérance, un conseil d'administration de la société Lh Aviation Maroc allait être convoqué, pour désigner un représentant de la société Lh Aviation France qui aura la signature sur tous les actes de gestion de la société Lh Aviation Maroc, en remplacement de M. [G], il n'est pas justifié d'une telle convocation. Il n'a par ailleurs pas retenu la double signature conférée à l'ancien représentant de la société Lh Aviation France au sein de la société Lh Aviation Maroc, car antérieure au jugement du 16 février 2018.
L'appelant soutient, à tort, que l'attestation du 24 janvier 2018 établissant que M. [P] a démissionné de son poste d'administrateur de Lh Aviation Maroc et accepté les fonctions d'administrateur représentant Lh Aviation, au sein de Lh Aviation Maroc, suite au conseil d'administration du 23 janvier 2018, en remplacement de M. [G], n'aurait pas été prise en compte par le tribunal de commerce, alors qu'il lui appartenait d'en faire état devant le juge du fond, au besoin en sollicitant un renvoi de l'audience de plaidoirie qui s'est tenue le 25 janvier 2018.
En outre, il soutient pour la première fois, en cause d'appel, que cette obligation de mettre en place une cogérance se heurterait à une impossibilité juridique, puisqu'en droit des sociétés marocain, la cogérance n'existerait pas pour les sociétés anonymes, comme la société Lh Aviation Maroc.
De plus, il procède sur ce point par affirmation, ne produisant aux débats aucune pièce sur cette impossibilité juridique, alors qu'il a soutenu devant le premier juge que cette cogérance était effective.
C'est à juste titre que les intimées rappellent que la procédure collective visant le créancier des injonctions sous astreinte n'est pas une cause exonératoire de l'exécution desdites injonctions.
Le jugement sera donc confirmé en qu'il a liquidé les injonctions sous astreinte.
Sur les autres demandes :
C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier a fixé de nouvelles astreintes destinées à assurer l'exécution des deux injonctions susvisées. Il n'y pas lieu de fixer des astreintes définitives, sans limitation de durée, comme sollicité par les intimés.
Au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, l'appelant sera condamné à payer aux intimés somme globale de 5 000 euros.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement ;
Condamne M. [J] [W] à payer à la Sas Lh Aviation, la Sas Pégase One, la Sas Pégase Two, la Sas Pégase Seven et la Scp [U] [C], es qualités de liquidateur judiciaire de la Sas Lh Aviation, la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [J] [W] aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La greffière La présidente