Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 20 NOVEMBRE 2019
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/15305 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5376
Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Janvier 2009 - Tribunal de Grande Instance de MEAUX - RG n° 06/04255
APPELANT
MONSIEUR LE DIRECTEUR DE LA DNID
[Adresse 20]
[Localité 15]
non représenté, régulièrement convoqué par LRAR du 28.02.2019 réceptionnée le 01.03.2019
INTIMES
Monsieur [A] [E] [B] [M], ès qualités de légataire universel de [W] [K], régulièrement assigné en reprise d'instance par acte d'huissier du 30.05.2018 remis à étude
né le [Date naissance 6] 1954 à [Localité 26] (10)
[Adresse 22]
[Localité 4]
comparant
Madame [S] [C] [Y] [T] épouse [L], ès qualités d'ayant-droit de [W] [K], régulièrement assignée en reprise d'instance par acte d'huissier du 01.06.2018 remis à étude
née le [Date naissance 5] 1973 à [Localité 24]
[Adresse 8]
[Localité 11]
non comparante, non représentée, convoquée par LRAR du 28.02.2019 réceptionnée le 01.03.2019
Monsieur [X] [F] [U] [T], ès qualités d'ayant-droit de [W] [K], régulièrement assigné en reprise d'instance par acte d'huissier du 31.05.2018 remis à étude
né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 25]
[Adresse 2]
[Localité 14]
non comparant, non représenté, convoqué par LRAR du 28.02.2019 retournée avec la mention 'pli avisé et non réclamé'
CAISSE RÉGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL BRIE PICARDIE, RCS AMIENS 487 625 436, ayant son siège social
[Adresse 9]
[Localité 13]
représenté par Me François MEURIN de la SCP TOURAUT & ASSOCIES, avocat au barreau de MEAUX
ayant pour avocat plaidant Me Bertrand DURIEUX de la SCP TOURAUT & ASSOCIES, avocat au barreau de MEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 01 Octobre 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Dorothée DARD, Président
Mme Madeleine HUBERTY, Conseiller
Mme Catherine GONZALEZ, Conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme [P] [O] dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.
Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON
MINISTÈRE PUBLIC : L'affaire a été transmise au Parquet qui a rendu un avis le 22.02.2019
ARRÊT :
- rendu par défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Dorothée DARD, Président et par Mme Emilie POMPON, Greffier.
***
[V] [D] et Madame [W] [K] se sont mariés le [Date mariage 10] 1984, sous le régime de la séparation de biens par contrat de mariage reçu par Maître [H] le 17 janvier 1984.
Le [Date décès 7] 1991, [V] [D] est décédé.
Par acte notarié du 14 avril 1986, [V] [D] et Mme [W] [K] ont acquis, chacun pour moitié indivise, un bien immobilier sis [Adresse 12], figurant au cadastre section [Cadastre 17] pour une contenance de un are et 52 centiares, lieudit '[Adresse 12]' et [Cadastre 16] pour une contenance de 2 ares 2 centiares, lieudit '[Adresse 21]', avec droit à la cour commune, dite '[Adresse 21]' cadastrée section [Cadastre 23] pour 10 ares 2 centiares, lieudit'Le Village', moyennant le prix de 570.000 francs payé à hauteur de 420.000 francs par un prêt consenti par la Société Nanceienne de Crédit Industriel et Varin-Bernier, et d'un plan épargne logement de 80.600 francs.
Par déclaration au secrétariat-greffe du tribunal de grande instance de Meaux, respectivement en date des 22 juin 1995 et 29 septembre 1995, Mme [W] [K] et Mme [N] [D], fille du défunt, ont renoncé purement et simplement à la succession de ce dernier.
Sur requête du procureur de la République du tribunal de grande instance de Meaux en date du 1er octobre 1996, le président de ce tribunal a, par ordonnance du 13 novembre 1996, nommé le Directeur Régional des Impôts chargé de la Direction Nationale d'Interventions Domaniales (ci-après 'la DNID') en qualité d'administrateur provisoire de la succession de [V] [D] avec mission de faire procéder à la levée des scellés, ou récolement ; faire dresser sur le procès-verbal du greffier en chef au tribunal d'instance un état descriptif des meubles, effets et valeurs mobilières, sans qu'il ait à recourir, sauf nécessité dûment justifiée, à un inventaire notarié ; à défaut, faire établir l'état descriptif de ces biens par un agent des Domaines, dûment assermenté, conformément aux dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 2 novembre 1971 ; donnant, en outre, mission de rechercher les héritiers et si ceux-ci ne peuvent être retrouvés ou qu'ils s'abstiennent de prendre parti, ledit administrateur aura les pouvoirs ordinaires des administrateurs provisoires de successions afin de gérer et administrer la succession tant activement que passivement, à charge d'en référer en cas de difficultés ; qu'à cet effet, il pourra, notamment procéder à l'Hôtel des ventes mobilières, ou sur place, à la vente aux enchères publiques des biens immeubles dépendant de ladite succession, toucher le montant de toutes ventes et toutes autres sommes à quelque titre que se soit, régler tous comptes, faire vendre les titres et valeurs mobilières par l'établissement gestionnaire ou la Caisse des dépôts et Consignations, et faire tous actes d'administration nécessaires à la sauvegarde des droits de la succession.
Par jugement rendu le 14 juin 2001 dans une instance opposant la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Brie (ci-après 'la CRCAM de la Brie') à la DNID, en sa qualité d'administrateur provisoire de la succession de [V] [D], le tribunal de grande instance de Meaux a condamné avec exécution provisoire la DNID, es qualités, à payer à la CRCAM de la Brie, dans la limite de l'actif successoral, la somme de 114.517,16 francs, soit 17.458, 03 euros avec intérêts au taux de 17,9% l'an à compter du 9 juin 1994, ainsi que la somme de 9.161,37 francs, soit 1.396,64 euros au titre de l'indemnité de remboursement avec intérêts au taux légal à compter de la même date.
En vertu de ce jugement, la CRCAM de la Brie a fait inscrire le 10 octobre 2001 une hypothèque judiciaire définitive pour un montant de 277.140,39 francs sauf mémoire, soit de 42.249,78 euros sauf mémoire, contre la succession de [V] [D] et sur les parts et portions lui revenant dans les immeubles sis à [Localité 18] (Seine-et-Marne), cadastrés lieudit '[Adresse 21]' section [Cadastre 17] pour 1 are et 52 centiares, lieudit '[Adresse 21]' section [Cadastre 16] pour 2 ares et 2 centiares, et lieudit '[Adresse 21]' section [Cadastre 23].
Par courrier du 28 janvier 2002, Mme [W] [K] a confirmé à la DNID son accord pour racheter les 50% du bien précité appartenant au de cujus au prix de 350.000 francs, soit 53.357,16 euros.
Par jugement rendu le 28 février 2002 sur requête du procureur de la République, le tribunal de grande instance de Meaux a dit qu'il sera procédé à la vente amiable du bien héréditaire, dépendant de la succession de [V] [D], pour moitié au profit de [W] [K], co-indivisaire, suivant acte rédigé par le service des actes de la DNID, au prix de 53.357,16 euros.
Se prévalant d'une situation de blocage créée par Mme [W] [K], qui n'a pas acquis la part de l'immeuble dépendant de la succession, la DNID a assigné celle-ci le 1er août 2006 devant le tribunal de grande instance de Meaux pour voir :
- ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'immeuble indivis,
- préalablement, ordonner la vente sur licitation du bien immobilier sur la mise à prix de 259.000 euros,
- dire que la part du produit de la vente revenant à la succession sera reversée à la recette spécialisée des curatelles.
Parallèlement, le 4 octobre 2006, la DNID a assigné la CRCAM de la Brie en sa qualité de créancier hypothécaire pour s'entendre dire que le jugement lui soit déclaré commun.
Les deux procédures ont été jointes le 19 janvier 2007.
Par jugement du 22 janvier 2009, le tribunal de grande instance de Meaux a :
- déclaré recevable et fondée la demande en partage du bien immobilier indivis sis [Adresse 12],
- désigné le président de la chambre des notaires de Seine-et-Marne ou son délégataire pour procéder aux opérations de compte, liquidation, partage de ce bien immobilier,
- débouté Madame [W] [K] de sa demande d'attribution préférentielle et de ses plus amples demandes,
- préalablement aux opérations de partage, ordonné la vente sur licitation à la barre du tribunal de grande instance de Meaux (sauf meilleur accord des parties pour une licitation devant notaire) du bien immobilier sis [Adresse 12] cadastré section [Cadastre 17] pour une contenance de 1a 2ca et numéro [Cadastre 16] pour une contenance de 2a 2ca, ainsi que le droit à la cour commune cadastrée section [Cadastre 23] pour 10a 2ca, appartenant indivisément à la succession de Monsieur [V] [D] et à Madame [W] [K],
- fixé la mise à prix au montant de 200.000 euros,
- déclaré le jugement commun à la CRCAM Brie Picardie,
- constaté que la CRCAM Brie Picardie est créancière de la succession de Monsieur [D], en vertu d'un jugement du 14 juin 2001 et a fait inscrire une hypothèque judiciaire sur la part de l'immeuble revenant à la succession de Monsieur [D],
- dit que le produit de la vente revenant à la succession de Monsieur [D] sera affecté au paiement de la créance susvisée de la CRCAM Brie Picardie et que le reliquat de la part revenant à la succession sera versé au comptable spécialisé du domaine,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- dit que les dépens et frais seront réglés en frais privilégiés de partage,
- autorisé la SCP Touraut et associés à recouvrer directement les dépens dont elle aurait fait l'avance, sans recevoir de provision suffisante,
- débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 2 mars 2009, [W] [K] a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions déposées le 2 juin 2009, [W] [K] a demandé à la cour de :
Vu les articles 815 et suivants du code civil,
Vu l'article 832 du code civil,
Vu l'article 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile,
- la recevoir en son appel, y faire droit,
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 22 janvier 2009,
Statuant à nouveau sur la décision entreprise,
- ordonner l'attribution préférentielle du bien sis [Adresse 12] à son profit dans les conditions fixées par le jugement du tribunal de grande instance de Meaux du 28 février 2002,
- commettre Maître [R] [G], notaire à [Localité 19], afin de procéder à la vente amiable du bien litigieux à son profit, et afin également de purger l'hypothèque qui grève la quote-part indivise de M. [D],
- condamner la Direction des Services Fiscaux d'Intervention en tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés, pour ces derniers, par Maître Bruno Nut, avoué à la cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- le (sic) condamner au paiement d'une somme de 2.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 6 septembre 2009, [W] [K] est décédée.
Par testament olographe en date du 24 août 2009, Mme [W] [K] aurait légué à M. [A] [M] la quotité disponible de sa succession, soit un tiers, sous réserve des droits de ses deux enfants, qu'elle aurait complété par écrit du 28 août 2009 en attribuant à titre préférentiel à M. [A] [M] la part de sa maison à Bussy-Saint-Georges, ainsi que les parts sociales du GFR Beauregard, la SCEA la Dauge, la SCI du Grand Arbre et la société Go Buro.
La DNID n'a pas obtenu l'original du testament olographe des 24 et 28 août 2009, ni la confirmation de M. [A] [M] de son dépôt chez le notaire conformément à l'article 1007 du code civil.
Par ordonnance du 8 juin 2010 du juge de la mise en état, l'affaire a fait l'objet d'une interruption d'instance avant d'être radiée par ordonnance du 12 octobre 2010 faute de reprise de l'instance dans le délai de 4 mois.
La DNID a fait établir, aux frais avancés par la succession de [V] [D], la dévolution successorale de [W] [K] par la société de généalogie [J] sise [Adresse 3], laquelle a identifié, selon sa lettre du 20 décembre 2016, comme héritiers de [W] [K] ses deux enfants, issus d'un premier mariage avec M. [Z] [T], en la personne de M. [X] [T] et Mme [S] [T] épouse [L].
Par acte des 31 mai 2018 et 1er juin 2018, la DNID a assigné en reprise d'instance, d'une part, les héritiers de [W] [K], en la personne de M. [X] [T] et de Mme [S] [T] épouse [L], en leur qualité d'ayants droit, ainsi que M. [A] [M], par acte du 30 mai 2018, en sa qualité de légataire universel, et, d'autre part, la CRCAM par acte du 28 mai 2018 et ce, pour voir statuer sur l'appel interjeté par [W] [K] contre le jugement rendu le 22 janvier 2009 par le tribunal de grande instance de Meaux.
Par ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 26 octobre 2018, qu'elle a développées oralement à l'audience, la CRAM Brie Picardie demande à la cour de :
- donner acte au Crédit agricole de son acceptation de la demande formulée par la DNID tendant à la réalisation de la vente sur licitation du bien litigieux,
- constater que le Crédit agricole est créancier de la succession de [V] [D], copropriétaire indivis par moitié du bien litigieux,
- dire et juger que le produit de la vente à intervenir sera affecté ;
* par priorité, au Crédit agricole, à due concurrence de sa créance résultant du jugement du 14 juin 2001, en vertu des droits lui étant conférés par sa garantie hypothécaire,
* pour le surplus, au comptable spécialisé du Domaine,
- condamner tout succombant à payer à la CRCAM Brie Picardie, la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- condamner tout succombant aux dépens.
Par écrits distincts du 14 février 2019, Mme [S] [L] et M. [X] [T] concluent qu'ils ne peuvent être tenus pour responsables des dettes liées à la succession de leur mère dans la mesure où ils ont renoncé à cette succession, à l'actif comme au passif, et qu'ils ne peuvent être davantage tenus pour responsable du manquement du notaire, Maître [I], qui n'a pas déposé leur demande de renonciation à cette succession.
Par avis écrit du 22 février 2019, le Ministère public indique qu'il y a lieu de :
- faire droit à la demande de reprise d'instance de l'affaire sollicitée par la DNID,
- de dire la DNID recevable en ses demandes,
- de confirmer la première décision entreprise sauf en ce qu'elle dit que le bien indivis sera vendu sur licitation à la barre du tribunal de grande instance de Meaux 'sauf meilleur accord des parties pour une licitation devant notaire' et en portant la mise à prix du bien immobilier litigieux à 147.000 euros.
A l'audience du 26 février 2019, l'affaire a été renvoyée à la présente audience, à la demande de M. [A] [M] afin de lui permettre de prendre contact avec un avocat et d'assurer sa défense, celui-ci reprenant à son compte les écritures de [W] [K], ce qu'il a maintenu lors des débats et ajoutant fonder la demande d'attribution préférentielle sur l'article 815-14 du code civil.
SUR CE, LA COUR :
1°) Sur la demande d'attribution préférentielle :
M. [A] [M] reprend à son compte les écritures de [W] [K] demandant à la cour, sur le fondement de l'article 832 ancien du code civil, l'attribution préférentielle du bien en cause dans les termes du jugement rendu le 28 février 2002. Il invoque également sa qualité de co-indivisaire et un droit de préemption sur la quote-part indivise de [V] [D] sur le fondement de l'article 815-14 du code civil.
En réponse, la DNID soutient que [W] [K] étant décédée, cette demande n'a plus de raison d'être, et qu'aucun des intimés n'a son domicile dans le bien indivis.
La CRCAM ne répond pas sur ce point.
Aux termes des dispositions de l'article 832 ancien du code civil, devenu l'article 831-2 1°, le conjoint survivant ou tout héritier copropriétaire peut également demander l'attribution préférentielle de la propriété ou du droit au bail du local qui lui sert effectivement d'habitation, s'il y avait sa résidence à l'époque du décès, et du mobilier le garnissant.
Dans son jugement du 22 janvier 2009, le tribunal de grande instance de Meaux a considéré que [W] [K], bien qu'ayant la qualité de conjoint survivant de [V] [D], ne remplissait pas les conditions légales pour prétendre de plein droit à l'attribution préférentielle de l'immeuble indivis au motif qu'elle n'habitait plus le bien indivis au moment du décès de [V] [D] et que l'abandon de ce domicile conjugal, antérieurement au décès de son conjoint, était établi.
Le 6 septembre 2009, [W] [K] est décédée et il n'est pas établi que ses héritiers habitent le bien litigieux, aucun d'eux n'y étant d'ailleurs domicilié.
Les dispositions de l'article 815-14 du code civil qui s'appliquent en cas de cession par un indivisaire à une personne étrangère à l'indivision de droits dans un bien indivis, sont sans rapport ni incidence sur la demande d'attribution préférentielle.
En conséquence, le jugement entrepris qui a débouté [W] [K] de sa demande d'attribution préférentielle sera confirmé.
2°) Sur la demande de licitation :
a) Sur l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu le 28 février 2002:
M. [A] [M] reprend à son compte les écritures de [W] [K] soulevant l'autorité de la chose jugée du jugement du 28 février 2002 en qu'il a ordonné la vente amiable du bien à son profit moyennant le prix de 53.357,16 euros, s'opposant ainsi à la licitation du bien indivis.
En réponse, la DNID soutient qu'en application de l'article 480 du code de procédure civile c'est à juste titre que les premiers juges ont pu considérer que le jugement du 28 février 2002, qui ne fait qu'entériner un accord, n'a pas l'autorité de la chose jugée.
Aux termes de l'alinéa 1 de l'article 480 du code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.
L'autorité de la chose jugée ne s'attache donc qu'aux décisions contentieuses tranchant un litige entre les parties.
Or, le jugement du 28 février 2002 a été rendu en matière gracieuse sur requête présentée par le procureur de la République à la demande de la DNID.
Selon, l'article 25 du code de procédure civile, le juge statue en matière gracieuse lorsqu'en l'absence de litige il est saisi d'une demande dont la loi exige, en raison de la nature de l'affaire ou de la qualité du requérant, qu'elle soit soumise à son contrôle.
Aucun différend n'existait en effet entre la DNID et [W] [K] qui avait par ailleurs accepté le prix de la cession de la part dépendant de la succession. Selon les termes de la requête, entérinée par le jugement du 28 février 2002, ce n'est d'ailleurs que pour répondre aux exigences de l'article 4 de l'arrêté ministériel du 2 novembre 1971 concernant l'administration provisoire des successions qu'une autorisation judiciaire a été nécessaire pour procéder à la vente amiable de l'immeuble.
Il s'ensuit que c'est à juste titre que le jugement entrepris a dit que le jugement du 28 février 2002 qui ne fait qu'entériner un accord, n'a pas l'autorité de la chose jugée.
b) Sur le bien fondé :
Reprenant à son compte les écritures de [W] [K], M. [A] [M] soutient en se fondant sur les articles L.57 et L.74 du code du domaine de l'Etat (abrogés et recodifiés selon eux par ordonnance n°2006-460 du 21 avril 2006, art. 3211-4 et 3211-9, 3211-20) que la quote-part du bien appartenant à [V] [D] dépend d'une succession en déshérence qui tombe automatiquement dans le patrimoine de l'Etat, et que le bien indivis ne peut pas faire l'objet d'une licitation sans son accord de propriétaire indivis. Il ajoute que n'entendant pas donner cet accord, il sollicite la vente amiable du bien devant notaire.
En réponse, la DNID soutient que l'échec de la vente amiable ne peut la contraindre à rester dans l'indivision. Elle estime que la succession de [V] [D] n'entre pas dans le cadre des successions en déshérence, s'agissant simplement d'une succession administrée par l'administration domaniale, et que le bien litigieux est en indivision entre la succession de celui-ci, représentée par la DNID, et les héritiers de [W] [K]. C'est donc, selon elle, à bon droit que les premiers juges ont considéré que les dispositions de l'article L.57 ne trouvent pas à s'appliquer. Elle ajoute qu'il n'y a plus à rechercher un éventuel accord des parties quant aux modalités de vente et que l'urgence commande la licitation. Elle estime qu'il convient de fixer la mise à prix à 70% de la valeur vénale actuelle du bien (210.000 euros selon évaluation domaniale du 22 mars 2018 sans visite intérieure pièce 27), soit à 147.000 euros.
La CRCAM conteste l'application de l'article L.57 précité à la présente procédure, ce texte concernant les ventes volontaires alors que c'est parce de [W] [K] a refusé de donner son accord à un projet de vente amiable que la DNID a été amenée à engager la présente procédure pour sortir de l'indivision par le biais d'une vente forcée. Elle précise disposer d'une créance contre la DNID, es qualités de représentant de la succession de [V] [D], résultant de l'ouverture en compte courant de nature professionnelle accordée en 1990 au de cujus, pour laquelle la DNID a été condamnée le 14 juin 2001, et qui est garantie par l'inscription d'une hypothèque judiciaire définitive qui ne concerne pas la part indivise appartenant à [W] [K]. Elle ajoute ne pas s'opposer, et ne pas avoir à s'opposer, à la vente de cette part indivise, que celle-ci intervienne amiablement ou non et au profit de [W] [K] ou de tout autre personne. Elle estime en tout état de cause nécessaire que soit rapidement débloquée la situation en l'état de laquelle sa créance ne fait que croître.
Selon les dispositions de l'article L.57 du code du domaine de l'Etat, abrogé par ordonnance n°2006-460 du 21 avril 2006 et recodifié à compter du 1er juillet 2006 à l'article L.3211-4 du code général de la propriété des personnes publiques créé par la même ordonnance précitée, dans leur version applicable au litige, 'peuvent être également vendus selon les modalités mentionnées à l'article L.3211-3, avec l'accord des propriétaires intéressés, les immeubles appartenant divisément à l'Etat et à des personnes physiques ou morales, lorsque la part de chaque propriétaire ne peut être commodément isolée'.
Aux termes des dispositions de l'article L.74 du même code, abrogé par l'ordonnance précitée et recodifié partiellement à compter du 1er juillet 2006 aux articles L.3211-9 et L.3211-20 du code général de la propriété des personnes publiques créé par la même ordonnance précitée, 'le service des domaine est autorisé à aliéner, dans la forme ordinaire des ventes des biens de l'Etat, tous les biens et valeurs provenant des successions en déshérence, immédiatement après l'envoi en possession prononcé par le tribunal de grande instance. Les inscriptions de rentes de l'Etat, comme toutes les autres valeurs cotées dépendant de ces successions, sont négociées à la Bourse. Le produit de ces aliénations est encaissé sous le titre 'Successions en déshérence' '.
Aux termes des dispositions de l'article L.3211-3 du même code, 'les immeubles de toute nature dont l'Etat est propriétaire en indivision avec d'autres personnes physiques ou morales, et qui sont insusceptibles de partage, sont vendus en totalité dans les formes et conditions fixées pour ceux qui lui appartiennent sans part d'autrui. Les indivisaires reçoivent leur part dans le prix, à la date du ou des paiements'.
Ces dispositions ne sont donc pas applicables en l'espèce, le bien indivis n'appartenant pas pour moitié à l'Etat, puisqu'il fait partie de la succession de [V] [D] et que cette succession est administrée provisoirement par la DNID, sans que l'Etat l'ait revendiquée.
En l'absence dès lors d'indivision entre l'Etat et [W] [K], aucun accord des indivisaires n'est exigé.
Comme le relevait le jugement entrepris, il n'est pas contesté que le bien indivis n'est pas partageable en nature, ordonnant dès lors à juste titre la vente sur licitation de ce bien.
Ce même jugement ordonnait la mise à prix de cette vente à 200.000 euros, relevant notamment que [W] [K] s'en tenait à une estimation de 53.357,16 euros (moitié indivise) retenue en 2002, et que la DNID produisait trois estimations (établies par les services spécialisés des domaines en date des 15 février 2002, après visite, 25 novembre 2004, sans visite intérieure, et 10 mai 2006), et que le bien constitué d'une maison ancienne, datant de 1800 et édifiée sur un terrain de 354 m², d'une surface habitable de 120 m², exigeait des travaux de remise en état de nature à minorer le prix de vente comme cela avait été pris en compte dans les estimations précitées et qu'il convenait également de tenir compte du marché immobilier.
La mise à prix doit cependant être fixée en fonction de la valeur et de l'état du bien à la date la plus proche possible de la licitation.
A ce titre, la DNID fait valoir que, compte tenu du délai écoulé depuis la fixation par les premiers juges de la mise à prix à la somme de 200.000 euros, le bien s'est nettement dévalorisé depuis les dernières estimations, et précise qu'il ne fait plus l'objet d'aucuns travaux d'entretien depuis près d'une trentaine d'années.
Selon l'évaluation actualisée en date du 22 mars 2018 qu'elle produit, sans visite intérieure, le bien est estimé eu égard à ses caractéristiques et à l'évolution du marché, à une valeur vénale, suivant la méthode de comparaison directe avec les cessions de biens similaires, à 210.000 euros, libre d'occupation (pièce 27 de la DNID).
Aucune autre évaluation n'est produite par M. [A] [M] qui s'en tient à l'évaluation de 53.357,16 euros précitée.
Dans ces conditions, et afin de susciter les enchères, il convient de fixer la mise à prix à 147.000 euros, avec faculté de baisse du quart, puis du tiers en cas d'absence d'enchères, le jugement entrepris étant réformé en ce sens.
Il y a lieu également de faire droit à la demande de la DNID d'ajouter au jugement entrepris, afin de prévenir toutes difficultés d'exécution de la décision et d'éviter tout retard éventuel de ce fait, que la licitation se fera à la barre du tribunal de grande instance de Meaux par le ministère et sur le cahier des charges dressés par la SCP Rivry-Leseur-Hubert, avocats au Barreau de Meaux.
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a :
- fixé la mise à prix au montant de 200.000 euros,
Statuant à nouveau de ce chef, et y ajoutant,
Fixe la mise à prix à 147.000 euros, avec faculté de baisse du quart, puis du tiers en cas d'absence d'enchères ;
Dit que la licitation se fera à la barre du tribunal de grande instance de Meaux, par le ministère et sur le cahier des charges dressés par la SCP Rivry-Leseur-Hubert, avocats au Barreau de Meaux ;
Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de M. [A] [M] et de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Brie Picardie ;
Dit que les dépens et frais, en ce compris la somme de 1.920 euros exposés par la Direction Nationale d'Interventions Domaniales auprès du cabinet de généalogie [J], seront employés en frais privilégiés de partage.
Le Greffier, Le Président,