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19/11/2019 | FRANCE | N°17/11768

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 19 novembre 2019, 17/11768


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 4



ARRÊT DU 19 NOVEMBRE 2019



(n°265 , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/11768 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3QRR



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Décembre 2016 -Tribunal d'Instance de Paris 14ème - RG n° 11-15-00514







APPELANTE



SA BPIFRANCE FINANCEMENT

[Adresse 1]

[Localité 1]




Représentée par Me Thierry MEILLAT du PARTNERSHIPS HOGAN LOVELLS (PARIS) LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : J033

Ayant pour avocat plaidant Me Hélène de NAZELLE, de HOGAN LOVELLS LLP, substituant Me Thi...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4

ARRÊT DU 19 NOVEMBRE 2019

(n°265 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/11768 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3QRR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Décembre 2016 -Tribunal d'Instance de Paris 14ème - RG n° 11-15-00514

APPELANTE

SA BPIFRANCE FINANCEMENT

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Thierry MEILLAT du PARTNERSHIPS HOGAN LOVELLS (PARIS) LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : J033

Ayant pour avocat plaidant Me Hélène de NAZELLE, de HOGAN LOVELLS LLP, substituant Me Thierry MEILLAT, avocat au barreau de PARIS, toque : J033

INTIMEE

Madame [S] [T]

née le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 2] (Italie)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée et Assistée par Me Aude BOURUET AUBERTOT de l'AARPI BGBA, avocat au barreau de PARIS, toque : B0026

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Octobre 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Christian PAUL-LOUBIERE, Président

Mme Marie MONGIN, Conseillère

M. François BOUYX, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par M. François BOUYX, dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Denise FINSAC

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Christian PAUL-LOUBIERE, Président et par Denise FINSAC, Greffière présente lors de la mise à disposition.

******

FAITS ET PROCÉDURE

Madame [S] [T] a été embauchée par contrat de travail du 21 septembre 1962, par la Caisse Centrale de Crédit hôtelier, commercial et industriel, aux droits de laquelle vient la société Bpifrance Financement.

La Caisse Centrale de Crédit hôtelier, commercial et industriel était propriétaire d'un appartement, sis [Adresse 2].

Le 13 janvier 1975, la Caisse Centrale de Crédit hôtelier, commercial et industriel a donné cet appartement à bail à Mme [T] moyennant le paiement d'un loyer mensuel.

Mme [T] est partie à la retraite le 31 juillet 2004.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 25 juillet 2014, la société Bpifrance

Financement a indiqué à Mme [T] qu'elle était tenue de libérer l'appartement pour le 31 juillet 2015, date ultérieurement repoussée au 17 septembre 2015.

La locataire s'étant maintenue dans les lieux, la société Bpifrance Financement l'a fait assigner devant le tribunal d'instance de Paris 14ème arrondissement par acte d'huissier du 24 septembre 2015 afin de :

- obtenir son expulsion ainsi que celle de tous occupants de son chef dudit appartement, et ce, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et si besoin avec l'assistance de la force publique,

- fixer le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 641,92 €,

- dire que l'ensemble de ces sommes produira intérêt au taux légal à compter du 31 juillet 2015,

- la condamner à lui payer la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens dont le coût du commandement de payer.

Par jugement du 13 décembre 2016, cette juridiction :

- Dit l'action de la société Bpifrance Financement SA prescrite et donc irrecevable ;

- Condamne la société Bpifrance Financement SA à payer à Madame [S] [T] une

somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la société Bpifrance Financement SA aux dépens ;

- Déboute les parties de leurs autres demandes ;

- Ordonne l'exécution provisoire.

Le 13 juin 2017, la société Bpifrance Financement a interjeté appel de cette décision par déclaration reçue au greffe par la voie électronique.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 17 novembre 2017, elle demande à la cour de :

- Infirmer le jugement du Tribunal d'Instance du 14èmearrondissement de Paris du 13 décembre 2016 en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau :

- Constater que l'action intentée par Bpifrance Financement n'est pas prescrite.

En conséquence :

- Déclarer que l'action intentée par Bpifrance Financement est recevable,

- Constater que l'appartement occupé par Madame [T] est un accessoire de son

contrat de travail,

- Constater que le contrat de travail de Madame [T] a pris fin le 31 juillet 2004,

- Constater le refus de Madame [T] de quitter l'appartement sis [Adresse 2]

[Adresse 2],

- Constater que Madame [T] est donc occupant sans droit ni titre.

En conséquence,

- Ordonner l'expulsion de Madame [T], et tous occupants de son chef, occupant(s)

sans droit ni titre de l'appartement sis [Adresse 2], et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et si besoin avec l'assistance de la force publique ;

- Fixer le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 411,92 euros ;

- Dire que l'ensemble de ces sommes produira intérêt au taux légal à compter du17 septembre 2015 ;

- Condamner Madame [T] à verser à la société Bpifrance Financement une somme de

500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens

de l'instance, en ce compris les frais du commandement de payer,

- Rejeter l'ensemble des demandes reconventionnelles de Madame [T].

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 19 août 2017, Mme [T] demande à la cour de :

A titre principal

- Déclarer irrecevable comme prescrite l'action de la société BPI France Financement tendant à voir dire que l'appartement occupé par elle et un accessoire à son contrat de travail et à voir ordonner son expulsion.

- Confirmer sur ce point le jugement rendu le 13 décembre 2016 par le Tribunal d'Instance du 14 ème arrondissement de Paris.

- Déclarer en conséquence mal fondée la société BPI France Financement en son appel et

l'en débouter.

A titre subsidiaire,

- Dire et juger que le bail consenti par la société BPI France Financement relève de la législation sur les baux d'habitation.

- Déclarer mal fondée la société BPI France Financement en l'ensemble de ses demandes

et l'en débouter.

- Déclarer nul et de nul effet le congé délivré le 25 juillet 2014 par la société BPI France Financement.

A titre plus subsidiaire

- Accorder à Madame [T] trois ans de délai pour quitter les lieux.

En tout état de cause

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts et, statuant à nouveau :

- Condamner la société BPI France Financement à lui payer la somme de 20.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive.

- La condamner également à lui payer la somme de 3.500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- La condamner enfin en tous les dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 juillet 2019.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la prescription de l'action

La société BPI France Financement estime que l'action du propriétaire pour obtenir l'expulsion d'un occupant sans droit ni titre est imprescriptible au visa de l'article 2227 du code de procédure civile de sorte qu'elle doit être jugée recevable.

Mme [T] réplique qu'il ne s'agit pas d'une action réelle immobilière, le droit de propriété n'étant pas en cause, mais d'une action personnelle mobilière atteinte par la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil tel qu'il a été modifié par la loi du 19 juin 2008.

La prescription civile de droit commun, depuis la réforme issue de la loi du 17 juin 2008, est de cinq ans selon l'article 2224 du code civil.

Par exception au principe, le droit de propriété est imprescriptible en vertu de l'article 2227 du même code et les actions réelles immobilières se prescrivent par 30 ans.

En l'espèce, l'action de la société Bpifrance Financement, telle qu'elle est qualifiée par l'appelante, tend à l'expulsion de l'occupante d'un logement de fonction constituant l'accessoire d'un contrat de travail qui a pris fin, le terme de la convention interdisant à l'ancienne salariée de se maintenir dans les lieux.

Il ne s'agit donc pas d'une action de nature réelle immobilière mais d'une action dérivant d'un contrat de sorte qu'elle est soumise à la prescription quinquennale de droit commun.

Son point de départ doit être fixé à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, conformément à l'article 2224 du code civil, c'est à dire, en l'espèce, au 31 juillet 2004, date à laquelle le contrat de travail a pris fin selon les propres déclarations de l'appelante.

Le délai trentenaire de l'article 2262 ancien du code civil qui était alors applicable a donc couru depuis ce jour et n'était pas expiré lorsque la réforme de la prescription civile est entrée en vigueur le 19 juin 2008.

En conséquence, les dispositions transitoires de l'article 26 II de cette loi, selon lesquelles 'les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure', s'appliquent à l'espèce de sorte que l'action de la société Bpifrance Financement devait être intentée avant le 19 juin 2013.

En effet, le nouveau délai de cinq ans a couru à compter du 19 juin 2008 alors que le cumul du temps écoulé sous l'empire de la loi ancienne au jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle et celui de la loi nouvelle n'excède pas la durée prévue par la loi antérieure.

Ayant été introduite par la société Bpifrance Financement le 24 septembre 2015, l'action est atteinte par la prescription si bien que les demandes de l'appelante sont irrecevables.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

C'est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par Mme [T], cette dernière ne rapportant pas la preuve

d'une intention de nuire ou d'une légèreté blâmable imputable à l'appelante faisant dégénérer en abus le droit reconnu à cette dernière de saisir une juridiction en vue d'obtenir l'expulsion de sa locataire.

Il est équitable d'allouer à Mme [T] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la société BPI France Financement, qui succombe en son appel, sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant :

Condamne la société BPI France Financement à verser à Mme [T] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires,

Condamne la société BPI France Financement aux dépens d'appel.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 17/11768
Date de la décision : 19/11/2019

Références :

Cour d'appel de Paris G4, arrêt n°17/11768 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-19;17.11768 ?
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