RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 11
L. 552-10 du Code de l'entrée et du séjour
des étrangers et du droit d'asile
ORDONNANCE DU 13 SEPTEMBRE 2019
(4571 1 pages)
Numéro d'inscription au numéro général : B N° RG 19/04551 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAQTH
Décision déférée : ordonnance rendue le 11 septembre 2019, à 12h16, par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Evry
Nous, Marie-Christine Zind, président de chambre, à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Sébastien Sabathé, greffier aux débats et au prononcé de l'ordonnance,
APPELANT :
1°)LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE PRÈS LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'EVRY,
2°) LE PRÉFET de l'ESSONNE,
représenté par Me Me Moustapha Ndiaye du cabinet Mathieu, avocat au barreau de Paris
MINISTÈRE PUBLIC, en la personne de M. Michel Lernout, avocat général,
INTIMÉ :
M. [R] [M]
né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 4], de nationalité algérienne
demeurant
RETENU au centre de rétention de [Localité 5]
assisté de Me Patrick Berdugo, avocat au barreau de Paris
ORDONNANCE :
- contradictoire,
- prononcée en audience publique,
- Vu l'ordonnance du 11 septembre 2019, à 12h16, du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d'Evry ordonnant la jonction de la procédure introduite par Monsieur le préfet de l'Essonne enregistrée sous le numéro RG 19/853 et celle introduite par M. [R] [M] enregistrée sous le numéro RG 19/856, déclarant la requête en prolongation de la rétention administrative de Monsieur le préfet de l'Essonne recevable, faisant droit au moyen de nullité soulevé, déclarant la procédure irrégulière, rejetant la requête en prolongation de la rétention administrative de Monsieur le préfet de l'Essonne, disant n'y avoir lieu à prolongation du maintien en rétention de M. [R] [M] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire et rappelant que l'intéressé a l'obligation de quitter le territoire français en application de l'article L. 554-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 11 septembre 2019 à 16h43 par le procureur de la République du TGI d'[Localité 2], avec demande d'effet suspensif ;
- Vu l'appel de ladite ordonnance, interjeté le 11 septembre 2019 à 19h55, réitéré à 19h57, par le préfet de l'Essonne ;
- Vu l'ordonnance du 12 septembre 2019 conférant un caractère suspensif au recours du procureur de la République ;
- Vu la décision de jonction, par mention au dossier, des deux appels ;
- Vu les observations :
- de l'avocat général tendant à l'infirmation de l'ordonnance ;
- du conseil de la préfecture lequel, s'associant à l'argumentation développée par le ministère public, nous demande d'infirmer l'ordonnance et de prolonger la rétention pour une durée de 28 jours ;
- de M. [R] [M], assisté de son conseil qui demande la confirmation de l'ordonnance ;
- Vu les conclusions transmises par le conseil de M. [R] [M] par télécopie le 12 septembre 2019 à 18h19 ;
SUR QUOI,
La cour considère que c'est à tort que le premier juge a estimé que M. [R] [M] avait été retenu entre la levée d'écrou et son placement en rétention sans aucun titre privatif de liberté et sans qu'il ne soit mentionné qu'il pouvait partir à tout moment pendant la lecture de l' arrêté de placement , ce qui affecte la régularité de la procédure dans son ensemble, alors qu'il résulte de la procédure que la notification de l'arrêté de rétention est intervenue le 9 septembre 2019 à 11h après la levée d'écrou à 10h42, soit dans un délai n'excédant pas le temps nécessaire à l'accomplissement des formalités requises aboutissant à la signature de l' arrêté de placement en rétention administrative après lecture faite à l'intéressé par l'agent notifiant, formalité qui a pris un certain temps afin d'être régulièrement accomplie; et, qu'en l'espèce, un délai de 18 minutes entre la levée d'écrou et la notification du placement en rétention ne peut être considéré comme excessif, compte tenu des diligences devant être effectuées par les services de police; qu'il y a lieu de rejeter ce moyen et d'infirmer de ce chef l'ordonnance querellée; sur le moyen tiré du caractère excessif du délai de notification du placement en rétention administrative intervenue 4h auparavant, l'intéressé étant pendant ce délai sous un régime de privation de liberté plus coercitif, qu'il résulte de la procédure que la levée d'écrou est intervenue le 9 septembre 2019 à 10h42, que dès lors jusqu'à ce moment là l'intéressé était régulièrement privé de liberté au titre de la détention, et que l'avis à parquet antérieur à l'effectivité de la mesure de rétention administrative est sans effet quant à la régularité de la procédure , la mesure de placement en rétention ne prenant effet qu'à compter de sa notification, le moyen est rejeté; sur le moyen tiré de l'impossibilité d'exercer un contrôle sur la procédure et le doute sur la sincérité de celle-ci, le délai entre la fin de la notification de l' arrêté de placement en rétention administrative au sein de la maison d'arrêt de [Localité 3] à 11h15 et l'arrivée au centre de [Localité 5] à 11h30 rendant impossible un transfert dans ce laps de temps, ce moyen n'est démontré par aucun élément de la procédure, il sera rejeté;
Sur les moyens au titre de la contestation de l' arrêté de placement en rétention administrative, sur l'absence de contradictoire, qu' il résulte d'une combinaison des articles L121-1, L211-2 2et L121-2 3° du code des relations entre le public et l'administration et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile , que les dispositions des articles précités ne trouvent à s'appliquer que dans le cadre fixé par l'article L313-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile , ce qui n'est pas le cas en l'espèce, qu'il y a lieu de rejeter ce moyen; sur le moyen tiré du défaut d'examen de la vulnérabilité, que s'il n'est pas contesté que l' arrêté de placement en rétention administrative pris à l'encontre de M. [R] [M] le 9 septembre 2019 par le préfet de l'Essonne ne comporte aucune mention relative à l'examen d'un éventuel état de vulnérabilité de l'intéressé , la pathologie justifiée à l'audience ,en l'espèce l'hépatite C, pour autant la non prise en compte d 'un élément par le préfet n'a de conséquence juridique que si sa prise en compte aurait entraîné une solution juridique différente, or la prise en charge médicale de cette pathologie peut se faire normalement en Algérie suivant les avis des médecins de l'OFII émis régulièrement dans ce type de procédure; qu'il y a lieu de rejeter ce moyen, étant au surplus, rappelé à l'intéressé que, par application de l'article R552-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile , il a le droit de demander, pendant sa rétention, à l'autorité administrative que son état de vulnérabilité fasse l'objet d'une évaluation par des agents de l'OFII, et tant que besoin, par un médecin; qu'il y a lieu de rejeter ce moyen; sur les moyens tirés de l'absence d'examen complet et personnalisé du dossier du retenu et sur l'erreur de fait, et sur l'absence de proportionnalité de la mesure de placement en rétention, la cour rappelle que le préfet n est pas tenu de faire état dans sa décision de tous les éléments de la situation personnelle de l'intéressé dès lors que les motifs positifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention ; qu'i1 y a lieu de constater que l'arrêté de placement en rétention en date du 9 septembre 2019, est motivé par le fait que M. [R] [M], de nationalité algérienne, fait l'objet d'un arrêté ministériel d'expulsion du préfet de l'Essonne du 18 février 1999 notifié le même jour ; qu'il ne présente pas de garanties suffisantes à prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement prononcée, faute de ne justifier d'aucun document d'identité ou de voyage en cours de validité, et d 'avoir dissimulé son identité par l'utilisation d'alias, qu'il a fait l'objet de 64 signalements et de 2 condamnations pour des faits de trouble à l'ordre public; que dès lors ,il s'en déduit que ledit arrêté est régulièrement motivé et correspond en outre à la situation de M. [R] [M] telle que justifiée ou déclarée avant prise de l'arrêté, l'absence de remise de passeport le rendant inéligible à une mesure d'assignation à résidence et justifiait son placement en rétention; le moyen sera rejeté; et, sur la violation des articles 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et 3 de la Convention internationale des droits de l'enfant, que compte tenu de la courte durée initiale du placement en rétention, aucune atteinte n'est caractérisée, ce moyen sera rejeté;
Sur le moyen tiré de l'absence de diligences utiles en vue de l'éloignement de l'intéressé pendant le temps de sa détention, au surplus le rendez-vous consulaire étant reporté du fait de sa comparution devant le juge des libertés et de la détention, que l'administration justifie avoir accompli les diligences lui incombant en saisissant le consul d'Algérie le 10 septembre 2019, soit le lendemain du placement en rétention de l'intéressé, celle-ci n'étant tenue à aucune obligation de faire des diligences pendant la période de détention; qu'il y a lieu de rejeté ce moyen; qu'en conséquence, il y a lieu de rejeter la requête en contestation de la décision de placement en rétention, d'infirmer l'ordonnance querellée et de faire droit à la requête en prolongation.
PAR CES MOTIFS
INFIRMONS l'ordonnance,
STATUANT A NOUVEAU,
REJETONS les moyens de nullité,
DECLARONS recevable la requête en contestation de la décision de placement en rétention, la rejetons,
DÉCLARONS la requête du préfet de l'Essonne recevable,
ORDONNONS la prolongation de la rétention de M. [R] [M] dans les locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de 28 jours.
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.
Fait à [Localité 6] le 13 septembre 2019 à
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :
Pour information :
L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentantL'intéressé
L'avocat de l'intéresséL'avocat général