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20/06/2019 | FRANCE | N°17/08510

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 2, 20 juin 2019, 17/08510


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 2



ARRÊT DU 20 JUIN 2019



(n° 2019 - 204, 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/08510 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3F57



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mars 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/13509





APPELANT



Monsieur [U] [K]

Né le [Date n

aissance 1] 1948 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté et assisté à l'audience de Me Laure CAPORICCIO de la SELASU CABINET CAPORICCIO AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 20 JUIN 2019

(n° 2019 - 204, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/08510 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3F57

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mars 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/13509

APPELANT

Monsieur [U] [K]

Né le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté et assisté à l'audience de Me Laure CAPORICCIO de la SELASU CABINET CAPORICCIO AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1983

INTIMÉ

L'INSTITUT LOUIS DE BROGLIE association loi de 1901, pris en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté et assisté à l'audience de Me Olga OBERSON, avocat au barreau de PARIS, toque : B0348

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mai 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre et Madame Patricia LEFEVRE, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre

Madame Patricia LEFEVRE, conseillère

Madame Marie-José BOU, conseillère

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Madame Fatima-Zohra AMARA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre et par Madame Fatima-Zohra AMARA, greffière présent lors du prononcé.

***********

La Fondation Louis de Broglie a pour objet de susciter et de favoriser les recherches fondamentales en microphysique et d'être un lieu de rencontre et de discussion à la pointe de la science pour tous les physiciens ou chercheurs désireux d'exposer et confronter leurs

résultats et points de vue. Elle n'a pas la personnalité morale et est une fondation dite sous l'égide de la Fondation de France. Elle est présidée par un scientifique, M. [W] et est administrée par l'association de gestion de la Fondation dirigée par M. [R], association de gestion qui emploie à temps partiel une secrétaire de direction et une comptable.

L'Institut Louis de Broglie, association régie par la loi du 1er juillet 1901 et déclarée en 1993, a pour objet le rayonnement de la pensée scientifique dans un esprit d'ouverture à tous, c'est-à-dire non seulement à ses membres sociétaires mais à tout participant qui le souhaite, chercheur ou béotien. Il est présidé par M. [P], physicien ; son vice-président est M. [R] et son secrétaire général M. [T].

L'Institut Louis de Broglie est domicilié à l'Académie des sciences, dans des locaux qu'il partage avec la Fondation Louis de Broglie et sa structure de gestion.

M. [U] [K], qui s'est présenté comme un ancien chercheur de l'INSERM, est intervenu dans les travaux de la Fondation et auprès de M. [W] de 2006 à février 2011.

A plusieurs reprises, dès 2007, M. [K] a fait part de ses difficultés financières, ne percevant que le RSA. L'Institut aurait indiqué, le 17 avril 2007, ne pas être en mesure de lui proposer de situation mais pouvoir, sous réserve de précisions et références, appuyer son curriculum vitae auprès d'organismes tiers, proposition à laquelle M. [K] n'aurait pas donné suite.

Il a ensuite été envisagé la possibilité de solliciter une subvention en vue d'un contrat emploi tremplin. Malgré des démarches menées, cette subvention n'a pas pu être obtenue par l'association de gestion de la Fondation, qui le 5 octobre 2009, a accordé à M. [K] une bourse de recherche d'un montant mensuel de 500 euros, pendant une année jusqu'en septembre 2010. Le 20 novembre 2010, l'Institut Louis de Broglie a accordé à M. [K] une indemnité forfaitaire de 1 000 euros, pour couvrir les frais exposés à l'occasion de l'organisation du colloque projeté à l'UNESCO.

Suite à un courriel du 28 janvier 2011 dans lequel M. [K] estimait entre 18 000 et 30 000 euros les honoraires dus pour trois années de préparation du colloque, il lui a été notifié, par courrier électronique du 17 février 2011, la fin à toute collaboration en raison de prétentions et d'exigences excessives et d'attitudes agressives inquiétantes.

C'est dans ce contexte que le 9 mai 2011, M. [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris qui, par jugement en date du 14 novembre 2013 confirmé par un arrêt de la cour d'appel de ce siège du 11 septembre 2014, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Paris, la cour ayant jugé que M. [K] et l'Institut Louis de Broglie n'étaient pas liés par un contrat de travail.

La procédure s'est poursuivie devant le tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement en date du 28 mars 2017 a jugé M. [K] mal fondé en ses demandes, l'en déboutant, rejetant toutes autres demandes et lui laissant la charge des dépens.

Le 24 avril 2017, M. [K] a relevé appel et aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, le 21 juillet 2017, il demande à la cour, au visa des articles 1134 et

1779 du code civil de qualifier la relation en contrat d'entreprise, de fixer à 600 euros hors taxes le taux journalier applicable à ses prestations, de constater le caractère abusif et brutal de la rupture et, en conséquence, de condamner l'Institut Louis de Broglie au paiement des sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision :

- 193 800 euros HT soit 232 560 euros TTC pour les prestations accomplies du 2 janvier 2006 au 17 février 2011 ;

- 100 000 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive ;

- 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, le 12 septembre 2018, l'Institut Louis de Broglie soutient la confirmation du jugement déféré et demande à la cour de débouter M. [K] de ses demandes et de le condamner au paiement de la somme 10 000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive, d'une indemnité de procédure de 10 000 euros et aux entiers dépens.

La clôture est intervenue le 3 avril 2019.

SUR CE, LA COUR,

Considérant que M. [K] soutient l'existence d'un contrat d'entreprise, rappelant que la détermination de sa rémunération n'est pas une condition de la formation du contrat ; qu'il prétend caractériser cette relation entre lui-même et l'Institut et avance que M. [W], président de la fondation et vice-président de l'institut, l'a convoqué à maintes reprises au cours de l'année 2005, pour lui proposer un contrat de chargé de mission au sein de l'Institut, et ce, en raison de ses compétences et de son expérience professionnelle, et qu'à compter du 2 janvier 2006, il a effectué pour le compte de l'institut des prestations de chargé de mission de communication animation dont le contenu était précisé dans une fiche de poste ; qu'il affirme justifier de la réalité et de l'ampleur de celles-ci par les multiples pièces qu'il produit, ainsi que l'ont constaté le conseil de prud'hommes et la cour d'appel de Paris dans son arrêt du 11 septembre 2014 ; qu'il demande à la cour de fixer la contre-partie de ses prestations au regard de ses diplômes, de ses compétences, des brevets qu'il a déposés et des travaux qu'il a publiés et précise, pour chacune de ses prestations, le temps qu'il y a consacré ;

qu'enfin, il qualifie de brutale et d'injustifiée, la rupture de la relation contractuelle, fondée uniquement sur sa demande d'une juste rémunération, alors que l'institut a exploité sa dépendance financière et abusé de sa vulnérabilité ;

Que l'Institut Louis de Broglie relève que M. [K] se prévaut d'une convention dont il ne rapporte pas la preuve littérale et qu'il ne démontre aucunement l'échange de consentements, faisant valoir qu'il est intervenu dans le cadre du bénévolat et du volontariat qui ont toujours été les seuls modes de fonctionnement de la Fondation Louis de Broglie et de l'Institut ainsi qu'en attestent, dans les formes légales, ses participants ; qu'il met en avant le courrier du 17 avril 2007, dont l'envoi et la réception n'ont été contestés que dans des conclusions du 6 avril 2016 ; qu'il conteste le caractère probant de la plupart des documents produits liés à l'emploi tremplin, établis par M. [K] et la prétendue fiche de poste, ajoutant qu'à supposer qu'il y ait eu consentement, celui-ci aurait été vicié par les mensonges de M. [K] sur son parcours professionnel et ses compétences, contestant ensuite, chaque prestation, les montants sollicités et le caractère abusif de la prétendue rupture ;

Considérant qu'en application de l'article 1315 (ancien) du code civil, il appartient à M. [K] qui se prétend titulaire d'un contrat d'entreprise de prouver l'existence de la convention revendiquée et, en conséquence, dans le contexte particulier d'une association à but non lucratif et donc d'une collaboration de ses membres ou de tout participant sur la base du bénévolat, d'une commune intention des parties de s'attacher ses services en contrepartie d'une rémunération ; qu'en effet, si la détermination de celle-ci n'est pas une condition de validité du contrat d'entreprise, celui qui se prévaut d'une telle convention n'est nullement dispensé de prouver l'accord des parties sur le caractère onéreux des prestations ;

Que M. [K] procède essentiellement par affirmation, aucune pièce ne venant conforter ses allégations d'une relation initiée en 2005 par M. [W], qui n'exerçait et n'exerce, au vu des pièces produites aux débats, aucune fonction de direction ou d'administration au sein de l'Institut Louis de Broglie ; que, s'il est évoqué, dans un courriel de M. [W] du 14 septembre 2009, son intervention comme chargé de mission, celui-ci précise que les travaux ont été menés pour le compte de la Fondation, il écarte toute rémunération de M. [K] par cette structure qu'il préside, mais sollicite un financement extérieur dans le cadre d'un emploi contrat solidarité emploi (pièce 7 de l'appelant) ; que le compte-rendu d'activité communiqué en pièce 8 et également contresigné de M. [W] en sa qualité de président de la Fondation, ne décrit que les activités de M. [K] au sein de cet organisme et n'apporte aucun élément sur la nature de la convention des parties ; que cette pièce comme les pièces 9 à 14 et 32 - en notamment le curriculum vitae et la fiche de poste - apparaissent d'ailleurs avoir été établies dans la perspective d'une recherche de subvention, en 2007 puis en 2010, dans le cadre d'un contrat emploi-tremplin par la Fondation ; que le dernier courrier adressé au Conseil Régional (pièce 32) vient d'ailleurs démentir l'existence d'une relation marchande entre la Fondation et l'appelant, M. [W] concluant que la subvention sollicitée lui permettrait d'offrir à M. [K] un poste de chargé de mission ;

Qu'il convient, au surplus, de noter que contrairement aux allégations de M. [K], les démarches entreprises l'ont été par M. [W], en tant que président de la Fondation pour le compte de celle-ci et non par l'Institut Louis de Broglie ;

Que la recherche d'un financement par la Fondation, dans le cadre de subvention et de contrat aidé, ne permet pas de caractériser la volonté de l'Institut Louis de Broglie de contracter un contrat d'entreprise avec M. [K], celui-ci ne pouvant pas plus arguer de l'attribution d'une bourse d'études par la Fondation comme d'ailleurs d'une indemnité mensuelle de 1 000 euros dès lors que celle-ci constituait la prise en charge de frais exposés à l'occasion d'un colloque à l'UNESCO et non la contrepartie de prestations ;

Qu'il convient, au surplus, de noter que contrairement aux allégations de M. [K], les démarches entreprises l'ont été par M. [W], en tant que président de la Fondation pour le compte de celle-ci et non par l'Institut Louis de Broglie et qu'il n'existait dans l'esprit de M. [W] aucune ambiguïté quant à la nature bénévole de la participation de M. [K] aux travaux de la Fondation, ainsi qu'il ressort de son courriel du 26 janvier 2011 (pièce 33), dans lequel il sollicite, en raison des services rendus, une aide pour ce dernier en raison des difficultés financières qu'il rencontre ;

Que dès lors et ainsi que l'a retenu le tribunal, si M. [K] n'a collaboré aux travaux de la Fondation que dans l'espoir d'obtenir un concours financier, il n'apporte pas la preuve de la volonté de l'Institut Louis de Broglie (ni même de la Fondation) de s'engager au-delà des sommes allouées à titre d'aides, dans le cadre d'une bourse d'études ou de défraiement ; que cette absence de contrat d'entreprise est d'ailleurs confortée par le comportement de M. [K] durant toute la période concernée, celui-ci n'ayant jamais adressé de factures ou de demande de règlement avant son courriel du 28 janvier 2011 dans lequel il évalue le coût d'intervention d'un consultant pour la seule prestation à l'UNESCO ;

Que la décision déférée sera, en conséquence, confirmée tant sur le rejet de la demande en paiement que sur la demande de dommages et intérêts pour rupture abusive des relations, l'Institut Louis de Broglie étant fondé à rompre immédiatement une coopération que M. [K] entendait voir inscrite dans un nouveau cadre juridique ;

Considérant que l'appel incident de l'Institut Louis de Broglie n'est pas fondé en l'absence de démonstration et même d'allégation d'un préjudice en lien avec l'abus de droit dénoncé ; que la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle rejette la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Considérant que M. [K], partie perdante, sera condamné aux dépens d'appel et devra rembourser les frais irrépétibles de son adversaire dans la limite de 5 000 euros, les dispositions du jugement déféré sur la charge de ces frais et des dépens étant confirmées ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe,

Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 28 mars 2017 ;

Y ajoutant,

Condamne M. [U] [K] à payer à l'Institut Louis de Broglie la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 17/08510
Date de la décision : 20/06/2019

Références :

Cour d'appel de Paris C2, arrêt n°17/08510 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-20;17.08510 ?
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