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28/05/2019 | FRANCE | N°18/22191

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 28 mai 2019, 18/22191


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8



ARRÊT DU 28 MAI 2019



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/22191 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6QV4



Décision déférée à la cour : Ordonnance du 25 Septembre 2018 - Conseiller de la mise en état de PARIS - RG n° 17/00258





APPELANTE



SAS PRICEWATERHOUSECOOPERS AUDIT, cabinet d'expertise

comptable, inscrit au Tableau de l'Ordre de Paris-Ile-de-France, et de commissariat aux comptes, représentée par son président, domicilié en cette qualité audit siège,

Immatri...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 28 MAI 2019

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/22191 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6QV4

Décision déférée à la cour : Ordonnance du 25 Septembre 2018 - Conseiller de la mise en état de PARIS - RG n° 17/00258

APPELANTE

SAS PRICEWATERHOUSECOOPERS AUDIT, cabinet d'expertise comptable, inscrit au Tableau de l'Ordre de Paris-Ile-de-France, et de commissariat aux comptes, représentée par son président, domicilié en cette qualité audit siège,

Immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro B 672 006 483

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1],

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Assistée de Me HILLEL Olivier, avocat au barreau de Paris, toque E 257

INTIMÉ

Maître [K] [N] pris en sa qualité d'ancien administrateur judiciaire de la société CARRERE GROUP, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Bobigny sous le numéro 335 323 986, ayant son siège social [Adresse 2]

Immatriculé au RCS de BOBIGNY sous le N°318 730 603

Ayant son siège social [Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Assisté de Me FABRE Jean-Pierre, avocat au barreau de Paris, toque R 44

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 avril 2019, en audience publique, en double-rapporteur, devant Madame Anne-Sophie TEXIER, conseillère, et Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:

Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère faisant fonction de présidente

Madame Anne-Sophie TEXIER, conseillère

Madame Aline DELIÈRE, conseillère,

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Florence DUBOIS-STEVANT dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Liselotte FENOUIL

MINISTÈRE PUBLIC: auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Liselotte FENOUIL, greffière présente lors du prononcé.

*****

FAITS ET PROCÉDURE:

Le 17 janvier 2014, la société PricewaterhouseCoopers Audit (ci-après PWCA) a assigné Maître [N] en responsabilité devant le tribunal de grande instance de Bobigny à raison de fautes commises dans le cadre de ses fonctions d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Carrere group et du préjudice causé par le défaut de paiement de sa créance d'honoraires.

Le 15 janvier 2014, elle a également engagé, devant le tribunal de commerce de Bobigny, une action en paiement de ses honoraires contre le liquidateur judiciaire de la société Carrere group.

Par ordonnance du 29 novembre 2016, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance, faisant droit à la demande de Maître [N], a sursis à statuer sur les demandes de PWCA dans l'attente de la décision du tribunal de commerce de Bobigny dans l'instance introduite par l'assignation délivrée le 15 janvier 2014.

La société PWCA a relevé appel de cette ordonnance le 29 décembre 2016. L'affaire a été enrôlée sous le numéro RG 17/258.

Sur autorisation du délégataire du premier président à interjeter appel immédiat de la décision de sursis à statuer, accordée par ordonnance du 30 janvier 2018, elle a par ailleurs relevé à nouveau appel, le 5 février 2018. Ce second appel a été enrôlé sous le numéro

RG 18/3065.

Saisi de conclusions d'incident de Maître [N] tendant à voir l'appel du 29 décembre 2016 déclarer irrecevable, faute d'autorisation du premier président prévue par l'article 380 du code de procédure civile, et par ordonnance du 25 septembre 2018, le conseiller de la mise en état a déclaré recevable Maître [N] en son incident et irrecevable l'appel relevé le 29 décembre '2017" et rejeté toutes les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le 10 octobre 2018, la société PWCA a déféré cette ordonnance à la cour.

Aux termes de sa requête, déposée au greffe et notifiée par RPVA le 10 octobre 2018 et des conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 15 avril 2019, elle demande à la cour:

- de dire nulle l'ordonnance déférée,

- statuant à nouveau et, en toute hypothèse par infirmation de l'ordonnance déférée :

- de dire Maître [N] irrecevable en son moyen et irrégulière la saisine du magistrat qui a rendu l'ordonnance déférée,

- de dire que l'appel du 29 décembre 2016 est recevable,

- de déclarer recevable l'appel interjeté le '6 février 2017' (sic),

- de condamner Maître [N] à lui payer la somme de 5.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance avec droit de recouvrement direct.

A l'audience, la société PWCA a indiqué renoncer à sa demande de voir déclarer recevable le second appel dans le cadre de cette instance.

Elle soutient que l'ordonnance déférée est nulle car prise par le président de la chambre et non par le conseiller de la mise en état qui, en vertu de l'article 914 du code de procédure civile, est seul compétent pour statuer sur la recevabilité de l'appel.

Elle soulève l'irrecevabilité du moyen tiré par l'intimé de l'irrecevabilité de l'appel au motif que Maître [N] a soumis ses conclusions à la cour et non au conseiller de la mise en état et soutient, pour le même motif, que le juge compétent pour connaître de ce moyen n'a pas été valablement saisi.

Sur le fond, elle prétend que, le sursis à statuer étant une exception de procédure, la décision statuant sur sa demande doit pouvoir, dans tous les cas, être frappé d'appel immédiat et librement et que son appel relevé sans autorisation du premier président est recevable en vertu du 2° du 4ème alinéa de l'article 776 du code de procédure civile qui doit trouver application. Elle fait observer que la décision de sursis à statuer émanant de la formation de jugement se distingue de celle prise par le juge de la mise en état en ce que la première relève de l'incident d'instance, soumis au 3ème alinéa de l'article 776, quand la seconde est une exception de procédure régie par le 4ème alinéa de l'article 776. La société PWCA fait également valoir que la distinction opérée entre les décisions faisant droit à une demande de sursis à statuer et celles statuant sur une demande de sursis à statuer institue un régime discriminatoire de l'appel selon le sens de la décision rendue contraire au principe de l'égalité des armes dès lors qu'une inégalité est créée entre les parties quant à l'accès au juge d'appel.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 28 février 2019,

Maître [N] demande à la cour de dire et juger que l'appel de la société PWCA est irrecevable, de débouter la société PWCA et de la condamner à lui payer la somme 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il soutient que si le sursis à statuer est bien une exception de procédure, il n'en demeure pas moins que l'article 776 du code de procédure civile dans son 3ème alinéa établit une règle spéciale qui vient non seulement déroger au principe posé par le premier alinéa mais également à la règle dérogatoire générale posée par le quatrième aliéna, que le législateur a seulement ouvert une voie spéciale d'appel contre les ordonnances ordonnant un sursis à statuer selon les modalités procédurales applicables en pareille matière,

le 3ème alinéa de l'article 776 du code de procédure civile ne faisant que renvoyer implicitement aux 'modalités' prévues par l'article 380 du code de procédure civile.

Selon lui, la condition posée par le législateur pour interjeter appel d'une décision de sursis à statuer n'est pas constitutive d'un 'déni de justice provisoire" dès lors que celui qui entend interjeter appel d'une décision de sursis à statuer ne se trouve aucunement privé, même provisoirement, de "son droit à obtenir justice" dès lors qu'il lui est possible de saisir le premier président afin d'autorisation d'interjeter appel.

SUR CE,

Sur la nullité de l'ordonnance :

La circonstance que le conseiller de la mise en état soit désigné dans l'ordonnance déférée comme 'président' n'établit pas que la décision a été prise par ce magistrat dans l'exercice de ses fonctions de président de la chambre alors que les parties ont été préalablement convoquées à une audience par 'le magistrat en charge de la mise en état' et que la décision porte comme intitulé 'ordonnance sur incident devant le magistrat chargé de la mise en état'.

L'ordonnance déférée ayant été prise par un magistrat dans l'exercice de ses fonctions de conseiller de la mise en état n'encourt dès lors aucune nullité.

Sur la recevabilité de l'incident :

Comme l'a justement constaté le conseiller de la mise en état, dès l'introduction de l'incident le 29 mai 2017 Maître [N] s'est toujours adressé par voie de conclusions au conseiller de la mise en état de sorte que l'incident est recevable.

Sur le fond de l'incident :

L'article 380 du code de procédure civile dispose que la décision de sursis peut être frappée d'appel sur autorisation du premier président de la cour d'appel s'il est justifié d'un motif grave et légitime. La partie qui veut faire appel saisit le premier président, qui statue dans la forme des référés. L'assignation doit être délivrée dans le mois de la décision.

L'article 776 du code de procédure civile dispose que :

'Les ordonnances du juge de la mise en état ne sont pas susceptibles d'opposition.

Elles ne peuvent être frappées d'appel ou de pourvoi en cassation qu'avec le jugement statuant sur le fond.

Toutefois, elles sont susceptibles d'appel dans les cas et conditions prévus en matière d'expertise ou de sursis à statuer.

Elles le sont également, dans les quinze jours à compter de leur signification, lorsque :

1° Elles statuent sur un incident mettant fin à l'instance, elles ont pour effet de mettre fin à celle-ci ou elles en constatent l'extinction ;

2° Elles statuent sur une exception de procédure ;

3° Elles ont trait aux mesures provisoires ordonnées en matière de divorce ou de séparation de corps ;

4° Dans le cas où le montant de la demande est supérieur au taux de compétence en dernier ressort, elles ont trait aux provisions qui peuvent être accordées au créancier au cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.'

La division au sein du livre Ier du code de procédure civile entre le titre V, traitant notamment des exceptions de procédure, et le titre XI relatif aux incidents d'instance distingue la demande de sursis à statuer de la décision de suspendre l'instance pour les soumettre à deux régimes procéduraux différents, la demande constituant un moyen de défense relevant du régime des exceptions de procédure.

Il s'ensuit que la procédure d'appel des ordonnances du juge de la mise en état obéit à des régimes procéduraux distincts définis par les articles 380 et 776 du code de procédure civile dont il résulte que la décision de sursis à statuer est soumise à autorisation du premier président (article 380 auquel l'article 776, alinéa 3 renvoie) tandis que la décision statuant sur une demande de sursis à statuer en la rejetant est susceptible d'appel immédiat dans les 15 jours de sa signification (article 776, 4ème alinéa, 2°).

L'article 380 du code de procédure civile s'applique au demeurant quel que soit le juge qui prononce le sursis à statuer de sorte qu'il n'y a pas lieu de distinguer selon que la décision de sursis à statuer émane du juge de la mise en état ou d'une formation de jugement.

Dès lors que les parties sont placées dans une situation identique en étant soumises aux mêmes conditions procédurales quel que soit le sens de la décision du juge de la mise en état, ces deux régimes d'appel distincts ne sont pas contraires au principe de l'égalité des armes.

En l'espèce, l'appel interjeté le 29 décembre 2016 par la société PWCA à l'encontre de l'ordonnance du 29 novembre 2016 prononçant un sursis à statuer l'a été sans autorisation préalable du premier président de la cour. Il est dès lors irrecevable.

L'ordonnance du conseiller de la mise en état sera confirmée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant contradictoirement,

Rejette l'exception de nullité de l'ordonnance entreprise soulevée par la société PricewaterhouseCoopers Audit ;

Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

Condamne la société PricewaterhouseCoopers Audit à payer à Maître [N] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société PricewaterhouseCoopers Audit aux dépens du déféré.

La greffière,

Liselotte FENOUIL

La conseillère faisant fonction de présidente,

Florence DUBOIS-STEVANT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 18/22191
Date de la décision : 28/05/2019

Références :

Cour d'appel de Paris I8, arrêt n°18/22191 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-28;18.22191 ?
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