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28/03/2019 | FRANCE | N°17/13041

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 2, 28 mars 2019, 17/13041


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 2



ARRÊT DU 28 MARS 2019



(n°2019 - 112, 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/13041 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3UMI



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Juin 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/08900





APPELANTE



La société VEOLIA EAU - COMPAGNIE GE

NERALE DES EAUX, agissant en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Adresse 1]





Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Assistée...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 28 MARS 2019

(n°2019 - 112, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/13041 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3UMI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Juin 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/08900

APPELANTE

La société VEOLIA EAU - COMPAGNIE GENERALE DES EAUX, agissant en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Assistée à l'audience de Me Jean-Philippe PIN de l'AARPI CABINET PIN-BONNETON, avocat au barreau de PARIS, toque : C1908

INTIMES

Monsieur [S] [Y]

Né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

ET

Monsieur [E] [Y]

Né LE [Date naissance 2] 1948 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentés par Me Olivier LAERI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1927

Assistés à l'audience de Me Cyril CROIX, avocat au barreau de PARIS, toque : C0561

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Février 2019, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre

Madame Patricia LEFEVRE, conseillère

Madame Marie-José BOU, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Patricia LEFEVRE, conseillère dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Fatima-Zohra AMARA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre et par Madame Fatima-Zohra AMARA, greffière présente lors du prononcé.

**************

M. [F] [Y], décédé le [Date décès 1] 2014, était propriétaire d'un immeuble situé [Adresse 2].

La Compagnie des eaux de Paris a été délégataire du service public de la distribution de l'eau potable sur la rive droite de [Localité 2], jusqu'au 31 décembre 2009, date à laquelle ses actifs et son passif ont été dévolus à la société Véolia Eau-CGE, en exécution d'une décision de son assemblée générale du 30 décembre 2010.

Par requête en date du 2 août 2010, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] et M.[F] [Y] ont saisi le tribunal administratif de Paris afin d'obtenir la désignation d'un expert judiciaire. M. [P], expert désigné par ordonnance du 4 octobre 2010, a mené ses opérations au contradictoire de la Ville de [Localité 2], de l'association diocésaine de [Localité 2], de la compagnie d'assurance Axeria-April immobilier et de la société Veolia Eau-CGE à laquelle les opérations d'expertises ont été étendues par ordonnance du 30 janvier 2012.

Le 27 juin 2013, M. [P] a déposé son rapport aux termes duquel, après avoir constaté l'existence d'une fuite d'eau relevée au niveau du compteur d'eau courant 2003, dont la Compagnie des eaux de Paris avait admis dans un courrier du 13 novembre 2003 qu'elle engageait sa responsabilité, il estime que la société Veolia-Eau-CGE est 'techniquement responsable du facteur déclenchant mais la cause principale des désordres (est) l'insuffisance des fondations de l'immeuble de M. [Y], l'immeuble étant depuis sa construction (il y a 140 ans) en limite d'équilibre.

Saisi initialement d'une demande provisionnelle par un acte extra-judiciaire en date du 30 décembre 2011 et après radiation de l'affaire par une ordonnance du 17 septembre 2014 et de sa réinscription le 12 juin 2015 à la demande de MM. [S] et [E] [Y], héritiers de M. [F] [Y], le tribunal de grande instance de Paris a, par jugement en date du 22 juin 2017, condamné la société Veolia Eau-CGE à payer à M. [S] [Y] et M. [E] [Y] la somme de 346 906,91 euros hors taxes correspondant au coût des travaux de reprise et celle de 38 311,32 euros hors taxes correspondant aux frais de stabilisation des sols au droit de la fuite, avec intérêts au taux légal à compter du jugement et leur capitalisation, outre une indemnité de procédure de 4 000 euros et les dépens. Le tribunal a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires et a ordonné son exécution provisoire à hauteur de la moitié des sommes allouées au titre des désordres.

La société Véolia Eau-CGE a relevé appel le 28 juin 2017 et aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, le 1er février 2019, elle demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1147 du code civil dans leur version antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 et du règlement du service des eaux, sous divers dire et juger et constater reprenant ses moyens, d'infirmer le jugement déféré et de débouter MM. [Y] de leurs demandes et de les condamner solidairement, à titre reconventionnel, au paiement de la somme de 16 376 euros hors taxes représentant le coût des sondages complémentaires, outre une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique, le 9 janvier 2019, MM. [Y] demandent à la cour, au visa des articles 1146 et suivant du code civil et plus particulièrement de l'article 1149 (ancien) du code civil, de dire que les fondations de l'immeuble ne sont nullement sous-dimensionnées et que la fuite d'eau est l'unique cause des dommages et, en conséquence, de condamner la société Véolia Eau-CGE au paiement des sommes de 346 906,91 euros hors taxes et de 38 311,32 euros hors taxes avec intérêts cumulés à compter du 21 octobre 2003, date de révélation du sinistre et réévaluées au jour de la condamnation, de confirmer purement et simplement le jugement entrepris et de condamner l'appelante au paiement d'une indemnité de procédure de 10 000 euros et aux dépens, y compris les frais d'expertise, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture est intervenue le 6 février 2019.

SUR CE, LA COUR,

Considérant qu'en premier lieu, la société Véolia Eau-CGE analyse le rapport d'expertise et fait le constat d'une insuffisance des fondations, les études de sols démontrant qu'il est en limite d'équilibre ; qu'elle retient l'incertitude, à la lecture du rapport d'expertise, de l'imputabilité des désordres constatés en 2011 à une fuite qui date de 2003, en l'absence de tout élément permettant de déterminer leur date d'apparition ; qu'elle évoque l'état de catastrophe naturelle reconnu pour la période de juin à septembre 2003, sur le territoire de la commune de [Localité 2] et l'existence sous l'immeuble des intimés de sols d'assise sensibles à la déshydratation, ainsi que les approximations de l'expert sur l'évaluation de la fuite d'eau ; qu'elle en déduit, qu'il n'est nullement prouvé que la fuite d'eau de 2003 aurait été l'élément révélateur de l'insuffisance des fondations ; qu'en second lieu, elle discute de l'emplacement du compteur en 2003, disant qu'il était sur le domaine privé et retient la faute de M. [F] [Y] qui n'a pas entretenu et surveillé cette installation ; que les intimés soutiennent, s'appuyant sur l'avis de l'expert judiciaire, la responsabilité de la société Véolia Eau-CGE, du fait de la fuite d'eau de 2003 qui aurait affouillé les fondations et l'absence de désordres depuis la construction de l'immeuble pour dénier toute pertinence à l'argumentation de l'appelante ; qu'ils contestent le positionnement du compteur sur le domaine privé et nient toute faute de leur auteur ;

Considérant que M. [P] avait, notamment, pour mission de procéder à la constatation et au relevé des désordres de l'immeuble du [Adresse 2] en indiquant leur date d'apparition ; qu'en réponse au dernier dire de la société Véolia Eau-CGE, il écrit déplorer l'indétermination de la date d'apparition des désordres dénoncée par celle-ci, en l'absence d'éléments fournis par M. [F] [Y] ; qu'il ajoute qu'il est impossible en 2011 d'estimer si des fissures apparues probablement après les importantes fuites de 2003 pouvaient être antérieures (page 5 de son rapport) ; que par ailleurs, il admet (page 10 §2 de son rapport) que le lien de cause à effet ne peut être scientifiquement prouvé, ajoutant, il n'empêche que la concomitance des faits est troublante ;

Considérant qu'il ressort de ce qui précède, que l'avis de l'expert, lorsqu'il retient un facteur révélant l'insuffisance des fondations constitué par la circulation d'eau dans le sol d'assise au droit du compteur d'eau, repose uniquement sur la simultanéité supposée des dommages et de la fuite, à l'exclusion de tout élément technique quantifié et, ce bien, que la date d'apparition des désordres soit incertaine ;

Considérant que M. [P] admet une probabilité s'agissant de l'imputabilité des désordres et n'exclut nullement que les fissures constatées soient antérieures à la fuite de 2003, alors qu'il est certain et non contesté, que l'immeuble était en 'limite d'équilibre' dès sa construction le taux de travail du sol sous les fondations étant de 5 bars en façade et de 6,5 sous le refend principal alors que la valeur admissible en l'état limite de service est de 2 bars et la limite de rupture à 5,6 bars, valeurs, certes proposées par un technicien missionné à la demande de la société Véolia Eau-CGE, mais que l'expert ne remet pas en cause ;

Qu'il convient de rappeler que le dépassement de la valeur de l'état limite de service est de nature à entraîner des dommages à la structure de l'immeuble et de relever, qu'en l'espèce, cette valeur était largement dépassée sous les fondations en façade et que sous le refend, la limite de rupture était atteinte, ce dont il s'évince que l'immeuble était particulièrement sensible aux sollicitations extérieures ;

Considérant que dès lors, la date d'apparition des désordres devient un élément primordial de la détermination de leur causalité, les intimés supportant la charge de la preuve que du caractère déterminant ou déclenchant de la fuite survenue au troisième trimestre 2003 ;

Or, il n'a jamais été justifié devant l'expert et il n'est pas justifié devant la cour de constats des désordres ni de démarches (notamment auprès de l'assureur de l'immeuble) contemporaines de la fuite ou de l'apparition des fissures décrites par l'expert, visibles en façade et qui dateraient, selon M. [F] [Y], de 2004/2005 ; qu'il n'est pas plus produit de réclamation des occupants de l'immeuble alors qu'il est dit que les fissures sont pour certaines, tranversantes et le seraient depuis 2008/2009 (page 9 du rapport) ;

Qu'en l'absence de justification de la date d'apparition des désordres et d'éléments techniques quantifiés démontrant que la circulation d'eau provenant de la fuite sur la conduite d'alimentation d'eau potable serait à l'origine des désordres, MM. [Y] seront déboutés de leur demande tendant à voir pris en charge tant des travaux de remise en état de l'immeuble que le rechargement du sous-sol au droit de la fuite, à hauteur de 38 311,32 euros, l'expert ayant de surcroît jugé ces travaux inutiles (sa note aux parties n°14), la décision déférée devant être infirmée dans toutes ses dispositions ;

Considérant que, faute de produire la facture relative aux frais de sondages complémentaires réalisés au cours de l'expertise dont elle demande le remboursement, la société Véolia sera déboutée de ce chef de demande ;

Considérant que les intimés seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel et à rembourser les frais irrépétibles de l'appelante ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe,

Infirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 22 juin 2017 ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute MM. [S] [Y] et [E] [Y] de leurs demandes ;

Déboute la société Véolia Eau-CGE de sa demande reconventionnelle ;

Condamne in solidum MM. [S] [Y] et [E] [Y] à payer à la société Véolia Eau-CGE la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 17/13041
Date de la décision : 28/03/2019

Références :

Cour d'appel de Paris C2, arrêt n°17/13041 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-28;17.13041 ?
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