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19/03/2019 | FRANCE | N°18/14471

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 19 mars 2019, 18/14471


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 8



ARRÊT DU 19 MARS 2019



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 18/14471 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5ZKH



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mai 2018 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2017070391





APPELANTE



S.N.C. PARIS CROIX DES PETITS CHAMPS

Ayant son sièg

e social : [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 439 754 730 (PARIS)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège



Représentée par Me Frédérique ETEVE...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 19 MARS 2019

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 18/14471 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5ZKH

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mai 2018 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2017070391

APPELANTE

S.N.C. PARIS CROIX DES PETITS CHAMPS

Ayant son siège social : [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 439 754 730 (PARIS)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque K 0065

Ayant pour avocat plaidant : Me Benoit HOVASSE, avocat au barreau de PARIS, toque A 273

INTIMÉS

- SA VICTOIRES

Ayant son siège social : [Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 342 731 247 (PARIS)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

- SELAS ASCAGNE AJ, prise en la personne de Me [L] [I], ès qualités d'administrateur judiciaire de la SA VICTOIRES, désigné à cette fonction par jugement du Tribunal de commerce de PARIS en date du 25 janvier 2017

Exerçant ses fonctions : [Adresse 3]

[Adresse 3]

- SELAFA M..J.A., prise en la personne de Me [F] [B], ès qualités de mandataire judiciaire de la SA VICTOIRES, désigné à cette fonction par jugement du Tribunal de commerce de PARIS en date du 25 janvier 2017

Exerçant ses fonctions : [Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentées par Me Olivier DE CHAZEAUX, avocat au barreau de PARIS, toque P 0161

AUTRE PARTIE

MINISTÈRE PUBLIC, représenté par Madame la Procureure Générale près la Cour d'Appel de Paris

Exerçant ses fonctions : [Adresse 5]

[Adresse 2]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 novembre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre

Madame Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère

Monsieur Laurent BEDOUET, Conseiller

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

GREFFIÈRE, lors des débats : Madame Carole TREJAUT

MINISTÈRE PUBLIC : l'affaire a été communiquée au ministère public

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre, et par Madame Saoussen HAKIRI greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 25 janvier 2017, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Victoires, ayant pour activité l'édition de magazines, la Selafa MJA, en la personne de Maître [B], et la Selas Ascagne AJ, en la personne de Maître [I], étant respectivement désignées, mandataire judiciaire et administrateur judiciaire avec mission d'assistance.

Une procédure oppose la société Victoires à son bailleur, la SNC Paris Croix des Petits Champs, devant le tribunal de grande instance de Paris relativement à la régularisation des charges, la bailleresse ayant de son côté fait assigner la société Victoires aux fins de constat d'acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement.

Suite aux discussions menées avec le conseil de la société bailleresse, la société Victoires et la Selas Ascagne AJ, ès qualités, ont demandé au juge-commissaire d'autoriser une transaction intervenue, le 29 septembre 2017, avec la société Paris Croix des Petits Champs, considérant que cette dernière ne pouvait valablement se rétracter après l'acceptation de sa proposition.

Par ordonnance du 8 novembre 2017, le juge-commissaire a autorisé la transaction entre la société Victoires et la société Paris Croix des Petits Champs aux fins de résiliation amiable du bail commercial sis [Adresse 6]).

Le 23 novembre 2017, la SNC Paris Croix des Petits Champs a formé un recours contre cette ordonnance.

Par jugement du 29 mai 2018, le tribunal de commerce de Paris a dit le recours recevable mais mal fondé, confirmé l'ordonnance du juge-commissaire en toutes ses dispositions et condamné la société Paris Croix des Petits Champs à payer à la société Victoires 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, le surplus des demandes étant rejeté.

La SNC Paris Croix des Petits Champs a relevé appel de cette décision selon déclaration du 5 juin 2018.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 octobre 2018, la SNC Paris Croix des Petits Champs demande à la cour d'infirmer le jugement, et statuant à nouveau, d'infirmer l'ordonnance du 8 novembre 2017, de rejeter la requête déposée le 30 octobre 2017 par l'administrateur judiciaire, ès qualités, et la société Victoires, sollicitant l'autorisation de signer la transaction avec la bailleresse, de condamner la société Victoires à lui payer 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, avec recouvrement direct au profit de Maître Etevenard, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 13 novembre 2018, le président de la chambre a déclaré irrecevables, comme étant tardives en application de l'article 905-2 du code de procédure civile, les conclusions communes, remises au greffe par voie électronique le 30 août 2018, par la société Victoires, la Selas Ascagne AJ, ès qualités, et la Selafa MJA, ès qualités. Il ne sera par voie de conséquence pas tenu compte des conclusions notifiées le 10 octobre 2018 par ces dernières.

Vu la communication du dossier au ministère public le 20 juin 2018,

SUR CE

Il résulte de l'article L 622-7, II du code du commerce, que le juge-commissaire peut autoriser le débiteur à transiger.

L'administrateur judiciaire, son administrée, et la société bailleresse se sont rapprochés sur les litiges les opposant, dans les circonstances ci-après.

Par courriel du 29 septembre 2017, faisant suite à une rencontre la veille en l'étude de l'administrateur judiciaire, Maître [L], avocat de la SNC Paris Croix des Petits Champs indiquait à Maître [I]:

' Je réitère la proposition de la Société PARIS CROIX DES PETITS CHAMPS, propriétaire des locaux loués à la Société VICTOIRES.

La Société PARIS CROIX DES PETITS CHAMPS serait prête à une résiliation du bail moyennant indemnité à hauteur de 230.000 euros, se décomposant de la façon suivante:

- Indemnité 56.000 euros,

- Remboursement intégral du dépôt de garantie - 70.000 euros

- Abandon du loyer du 3ème trimestre échu - 40.000 euros

- Abandon de deux mois de loyers à échoir -30.000 euros

- Sous-total -200.000 euros

- Abandon de la créance déclarée au passif -30.000 euros

Soit un total de 30.000 euros.

Les locaux seraient libérés par la Société VICTOIRES au plus tard le 30 novembre 2017.

L'indemnité de 56.000 euros et le remboursement du dépôt de garantie intervenant à la remise des clefs.

La Société VICTOIRES se désisterait de toutes instances et actions à l'encontre de la Société PARIS CROIX DES PETITS CHAMPS et renoncerait notamment à toutes réclamations en ce qui concerne un éventuel trop-perçu de charges.

Je vous serais reconnaissant de bien vouloir me confirmer que cette offre sera transmise au Juge-Commissaire.

Je vous serais également reconnaissant de me confirmer que le rendez-vous prévu ce jour pour régularisation d'un contrat de sous-location est annulé, dans l'attente de la décision du Tribunal [....]'

Par courriel du même jour, Maître [I] accusait réception de cette correspondance, et répondait à Maître [L], que la question de l'abandon de créance mériterait d'être précisée, afin de ne pas laisser penser que l'abandon est limité à 30.000 euros sur les 110.000 déclarés, alors que c'est bien cette somme qui est abandonnée en totalité, mais que la valeur de l'abandon est forfaitaisé entre les parties à 30.000 euros. Elle ajoutait, in fine ' Sous le bénéfice de cette précision que je vous remercie de bien vouloir apporter, je demande à mon administrée d'annuler le rendez-vous de signature qui était prévu tout à l'heure et je présenterai une requête aux fins de transaction sur ces bases à Monsieur le Juge Commissaire avec mon avis favorable [....]'.

Par mail concomitant, Maître de Chazeaux, conseil de la société sous procédure collective ajoutait qu'il lui paraissait également utile de mentionner que l'abandon de créance s'entendait hors taxes.

Maître [L] répondait le même jour dans le sens souhaité par Maître [I] et Maître de Chazeaux.

Le 10 octobre 2017, Maître [L] informait Maître [I], ès qualités, que suite au changement de dirigeant décidé lors de l'assemblée générale du 30 septembre 2017, la société Paris Croix des Petits Champs n'entendait pas maintenir l'offre contenue dans son courrier du 29 septembre 2017, lui demandant d'en informer le juge-commissaire dans l'hypothèse où la requête aurait été déposée.

C'est dans ce contexte que la requête aux fins d'être autorisé à transiger a été déposée le 30 octobre 2017, le juge-commissaire étant informé du revirement de la société Paris Croix des Petits Champs.

Pour autoriser la transaction, le juge-commissaire a notamment considéré que la proposition transactionnelle formée le 29 septembre 2017 par le conseil de la SNC Paris Croix des Petits Champs, complétée par un mail du même jour précisant la portée de l'abandon de créances, s'analysait en un engagement unilatéral courant jusqu'à l'ordonnance, que l'exigence d'autorisation préalable qu'édicte l'article L 622-7 du code du commerce ne concernait que la société sous procédure collective et non l'émetteur, que l'administrateur judiciaire avait donné son accord sous la seule réserve de l'autorisation du juge-commissaire, que la société Victoires, à la demande de la bailleresse, avait donné un commencement d'exécution à cette transaction en renonçant à une sous- location.

Le tribunal a confirmé l'ordonnance, aux motifs que la proposition d'accord de la bailleresse avait été acceptée, par retour, par Maître [I] et la société Victoires, que la transaction comporte des concessions réciproques sans condition suspensive, ni mention de délai de rétractation et qu'il n'avait pas à trancher le caractère ou non abusif de la rétractation du 10 octobre 2017.

La recevabilité de l'appel à l'encontre du jugement n'est pas discutée.

Au soutien de son appel, la SNC Paris Croix des Petits Champs fait valoir que la transaction ne pouvant, à peine de nullité, être régularisée avant son autorisation par le juge-commissaire, aucun contrat, par rencontre d'une offre et de son acceptation, n'a pu se former avant une telle autorisation, de sorte qu'il n'existait à la date de rétractation de l'offre aucun contrat formé, ajoutant, qu'en vertu de l'article 1116 du code civil en sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016, une offre peut être rétractée tant qu'elle n'a pas été acceptée, peu important que cette rétractation soit licite et puisse engager la responsabilité de son auteur.

Il ressort des courriels échangés le 29 septembre 2017, que les parties étaient parvenues à s'entendre sur les modalités d'une résiliation amiable du bail et l'apurement des comptes. Toutefois, ni l'administrateur judiciaire, investi d'une mission d'assistance, ni le débiteur, n'ayant, au regard des exigences impératives de l'article L622-7,II du code du commerce, le pouvoir de transiger sans l'autorisation préalable du juge-commissaire, l'accord donné à la proposition de la société Paris Croix des Petits Champs, le 29 septembre 2017, ne vaut pas acceptation formelle de l'offre, et partant formation d'un contrat au sens de l'article 1113 du code civil, en sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

La rétractation de la proposition étant intervenue avant que le juge-commissaire n'autorise l'administrateur judiciaire et le débiteur à accepter l'offre par voie de transaction, le juge-commissaire ne pouvait pas, le 8 novembre 2017, autoriser une transaction inexistante. La cour n'a pas, dans la présente instance, à apprécier si cette rétractation engage ou non responsabilité de la société Paris Croix des Petits Champs.

Il s'ensuit que le jugement doit être infirmé, sauf en ce qu'il a dit le recours recevable. Il y lieu, statuant à nouveau, d'infirmer l'ordonnance du 8 novembre 2017 ayant autorisé le débiteur et l'administrateur judiciaire à transiger avec la société Paris Croix des Petits Champs et de rejeter la requête du 30 octobre 2017.

Aucune considération d'équité ne justifie de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement, sauf en ce qu'il a dit recevable le recours formé par la société Paris Croix des Petits Champs à l'encontre de l'ordonnance du 8 novembre 2017,

Statuant des chefs infirmés du jugement,

INFIRME en toutes ses dispositions l'ordonnance du 8 novembre 2017,

DÉBOUTE la société Victoires et la Selas Ascagne AJ, prise en la personne de Maître [I], ès qualités d'administrateur judiciaire, de sa requête en date du 30 octobre 2017 aux fins d'être autorisées à signer une transaction avec la société Paris Croix des Petits Champs,

Y ajoutant,

DÉBOUTE la société Paris Croix des Petits Champs de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

ORDONNE l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective et dit qu'ils pourront être recouvrés directement par Maître Etevenard, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente

Saoussen HAKIRI Marie-Christine HEBERT-PAGEOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 18/14471
Date de la décision : 19/03/2019

Références :

Cour d'appel de Paris I8, arrêt n°18/14471 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-19;18.14471 ?
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