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12/03/2019 | FRANCE | N°14/10061

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 12 mars 2019, 14/10061


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 12 Mars 2019

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 14/10061 - N° Portalis 35L7-V-B66-BUWKZ



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Juin 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F 12/06831





APPELANTE

SAS GROUPE EPICURE

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 453 815 474

re

présentée par Me François TRECOURT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0510 substitué par Me Lola CHUNET, avocat au barreau de PARIS, toque : A0510







INTIMÉE

Madame [J] [I]

[Adre...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 12 Mars 2019

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 14/10061 - N° Portalis 35L7-V-B66-BUWKZ

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Juin 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F 12/06831

APPELANTE

SAS GROUPE EPICURE

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 453 815 474

représentée par Me François TRECOURT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0510 substitué par Me Lola CHUNET, avocat au barreau de PARIS, toque : A0510

INTIMÉE

Madame [J] [I]

[Adresse 2]

[Localité 2]

comparante en personne, assistée de Me Eric COHEN, avocat au barreau de PARIS, toque : C1958

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Avril 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Patricia DUFOUR, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:

Madame Catherine BEZIO, président

Madame Patricia DUFOUR, conseiller

Monsieur Benoît DEVIGNOT, conseiller

Greffier : Mme Anna TCHADJA-ADJE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, prorogé ce jour.

- signé pour le Président empêché par Madame Patricia DUFOUR, Conseiller et par Madame Claudia CHRISTOPHE, Greffier présent lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE :

Suivant contrat à durée indéterminée en date du 26 avril 1993, la SA CARRE DES CHAMPS ELYSEES - Pavillon LEDOYEN a embauché Madame [J] [I] en qualité d'attachée commerciale, statut cadre.

Par avenant du 30 décembre 1996, Madame [I] a été promue directrice commerciale du Pavillon LEDOYEN et par avenant du 1er septembre 2005, le contrat de travail a été repris par la SAS S.C.C.R, devenue ultérieurement SAS GROUPE EPICURE, la salariée ayant la qualité de directeur d'exploitation, statut cadre, niveau V, position 3.

La SAS GROUPE EPICURE forme une Unité Economique et Sociale (UES) avec les sociétés CARRE DES CHAMPS ELYSEES, qui exploite depuis 1988 le pavillon LEDOYEN, et la société GASTRONOMIQUE DE L'ETOILE qui gère le restaurant ETC. Elle exerce notamment une activité haut de gamme tournée vers les grandes sociétés et une clientèle privée aisée, compte plus de 10 salariés et applique la convention collective des Hôtels, Cafés et Restaurants.

Considérant qu'elle subissait des faits de harcèlement moral qui avait dégradé son état de santé, Madame [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 18 juin 2012 d'une demande tendant à le voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur.

Le 22 octobre 2012, le médecin du travail a émis un avis d'inaptitude temporaire avant d'émettre, le 9 janvier 2013, sur le fondement de l'article R.4624-31 du code du travail, un avis d'inaptitude à tous les postes de l'entreprise en adoptant la procédure d'urgence pour danger immédiat.

Alors que Madame [I] était en arrêt de travail depuis le 22 octobre 2012, par courrier en date du 28 janvier 2013, la SAS GROUPE EPICURE l'a convoquée à un entretien péalable à une mesure de licenciement pouvant aller jusqu'à un licenciement pour faute grave fixé au 6 février 2013 et l'a licenciée pour faute grave par lettre notifiée 12 février 2013.

Lors de l'audience du conseil de prud'hommes du 13 mai 2014, Madame [I] a maintenu sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et a demandé, à ce que la SAS GROUPE EPICURE soit condamnée au paiement de dommages et intérêts pour faute de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail, des indemnités afférentes au licenciement sans cause réelle et sérieuse, subsidairement, a demandé que le licenciement pour faute grave soit jugé sans cause réelle et sérieuse et, en tout état de cause, que la défenderesse soit condamnée au paiement d'un rappel de primes annuelles et d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 17 juin 2014, le conseil de prud'hommes a rejeté la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, a jugé le licenciement pour faute grave non fondé sur une cause réelle et sérieuse, a fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 9.208 € et a condamné, avec intérêts au taux légal, la SAS GOUPE EPICURE à payer à Madame [J] les sommes suivantes;

- 27.624 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 2.762 € au titre des congés payés afférents,

- 46.039 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 51.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

ainsi qu' aux dépens et au paiement de la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 22 septembre 2014, la SAS GROUPE EPICURE a relevé appel de cette décision.

Elle demande à la cour:

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame [I] de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail,

- en conséquence, de la débouter de ses demandes,

- d'infirmer le jugement déféré pour le surplus,

- de dire que le licenciement pour faute grave est bien fondé,

- à tout le moins, de dire que le reclassement de Madame [I] était impossible et que le licenciement est régulier,

- de débouter Madame [I] de ses demandes,

- de constater qu'elle ne peut prétendre à aucune prime annuelle sur les exercices 2011et 2012 du fait des résultats déficitaires de l'activité Réception du GROUPE EPICURE et de la débouter de sa demande,

A titre reconventionnel,

- de constater que Madame [I] s'est abstenue de de régler ses notes personnelles de restaurant à partir de juillet 2012 et de la condamner à lui rembourser la somme de 560,05 €,

- de condamner Madame [I] aux dépens et au paiement de la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

Madame [I] demande à la cour:

- d'infirmer le jugemetn déféré en ce qu'il a rejeté ses demandes de résiliation judiciaire du contrat de travail, de rappel de prime annuelle et de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail de la part de l'employeur,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a qualifié le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de confirmer les condamnations au titre des indemnités légales,

Statuant à nouveau,

- de condamner la SAS GROUPE EPICURE au paiement des sommes suivantes :

** 15.000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

** 49.800 € à titre de rappels de prime annuelle 2011 et 2012, outre l'indemnité compensatrice de congés payés y afférente,

- de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En tout état de cause:

- de condamner la SAS GROUPE EPICURE au paiement de la somme de 150.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de la condamner aux dépens et au paiement de la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION :

Sur la résiliation judiciaire:

Il s'avère que seul le salarié dispose de la capacité à solliciter la résiliation judiciaire du contrat de travail et il relève du pouvoir souverain du juge d'apprécier si l'inexécution, par l'employeur, de certaines de ses obligations résultant d'un contrat synallagmatique, présente une gravité suffisante pour en justifier la résiliation.

.

Il résulte de l'application de l'article L. 1231-1 du Code du travail que lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée. C'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.

Il s'avère que la charge de la preuve de l'imputabilité des manquements incombe au demandeur, que les juges peuvent se fonder sur de simples présomptions et que, s'il est fait droit à la demande du salarié et que la résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée, celle-ci produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d'un licenciement nul si la résiliation a pour origine des faits de harcèlement moral.

Au soutien de la demande de résiliation judiciaire, Madame [I] expose que lorsque son contrat de travail a été transféré à la SAS SCCR, devenue SAS GROUPE EPICURE, son poste est demeuré identique mais avec l'appellation différente de Directeur d'exploitation et que la relation de travail s'est dégradée à compter de 2011 lorsque, au regard d'une vaste réoganisation, la société a décidé de modifier ses attributions et responsabilités et que ses objections sont demeurées lettre morte, ajoutant qu'outre cette modification, elle a subi une hostilité de l'employeur manifestement déloyale et un refus de paiement de sa prime annuelle, sans justification ni même explication fournie.

S'agissant de la modification de ses fonctions et responsabilités, Madame [I] affirme que ses fonctions ont été transférées à un nouveau directeur d'exploitation, qu'il lui a été imposé des focntions purement commerciales, qu'elle a perdu une partie de son équipe affectée sur d'autres sites alors que ses fonctions avaient été fixées par un avenant en date du 28 janvier 2002 qui l'a promue aux fonctions de Directeur des Ventes et des Banquets du Pavillon LEDOYEN avec une augmentation de salaire significative et que ce sont les fonctions qu'elle a exercées à compter de cette date qui ont été modifiées sans son accord à compter de 2011.

Il s'avère, toutefois, que contrairement à ce qu'affirme l'intimée, aucun avenant en date du 28 janvier 2012 n'a été signé entre les parties mais que, par courrier en date du 24 janvier 2012, le président de la société CARRE DES CHAMPS ELYSEES - PAVILLON LEDOYEN l'a infomée qu'à compter du 28 janvier 2002, elle occuperait les fonctions de directeur des ventes et des banquets du Pavillon Ledoyen.

Il s'avère que le courrier précité fait mention de nombreuses missions susceptibles d'être exercées sans que certaines d'entre elles aient été spécialement identifiées au titre des principales missions que devait exercer Madame [I] ce qui conduit la cour à considérer que l'intimée avait compétence pour toutes les missions figurant dans le document.

Au surplus, il s'avère que dans l'avenant du 1er septembre 2005 ayant transféré le contrat de travail de Madame [I] à la SAS S.C.C.R., devenue SAS GROUPE EPICURE, ne contient aucune description des missions de la salariée en sa qualité de directeur d'exploitation. Dès lors, il convient de considérer que Madame [I] a continué à exercer les missions telles que décrites dans la lettre adressée par le président de la société CARRE DES CHAMPS ELYSEES - Pavillon LEDOYEN le 28 janvier 2002.

Au surplus, l'intimée justifie d'attestations précises et circonstanciées qui établissent l'exercice effectif des fonctions revendiquées et aucun élément probant ne permet de remettre en cause la teneur des témoignages dont il résulte que:

- Monsieur [E] [O] déclare avoir été embauché le 4 octobre 2010 par Madame [I] au poste de responsable des réceptionsdu Pavillon Ledoyen. Il expose que Monsieur [L] était directeur des réceptions, que lui-même en référait directement à ce dernier qui ne prenait aucune décision sans en parler à la directrice d'exploitation du Groupe Epicure. Le témoin ajoute "qu'en mars 2011, Monsieur [L] a été muté à la société ARCFASTES pour diriger La Grande Verrière, restaurant du Jardin d'Acclimation. Ses fonctions au Pavillon Ledoyen ont été confiées à Monsieu [K] [K], Directeur du restaurant gastronomique.

Monsieur [K] était sous la responsabilité de Monsieur [M] [A] chef des cuisines.

Il a également récupéré l'Assistante personnelle de Madame [I], [I] [B],

en tant qu'Assistante.

A partir de ce moment là, Monsieur [K] a repis le service Réceptions, et il voulait que j'en réfère à lui-même avant tout et non directement à Madame [I]. Il voulait tout contrôler avec Monsieur [A].

Petit à petit, Madame [I] a perdu sa crédibilité envers l'ensemble du personnel. Les salariés ne savaient plus quelle fonction réelle elle occupait.

Elle n'était plus écoutée et sa fonction se limitait à recevoir des clients pour organiser des réceptions. Elle était devenue commerciale aux yeux du personnel;

- Monsieur [F] [W] indique avoir été embauché par Madame [I] et Madame [Z], directrice des ventes du Groupe Epicure, le 4 octobre 2010 en qualité d'attaché commercial du Groue Epicure. Il déclare que Madame [I] avait à cette date autorité sur Monsieur [L], directeur des réceptions du Pavillon Ledoyen le directeur du restaurant gastronomique ETC, la maîtresse de maison du Pavillon Ledoyen, les principaux collaborateurs et les salariés afférents aux différents services.

Le témoin précise: "Monsieur [V] lui demandait également de rechercher des lieux afin d'accroître els entités du Groupe Epicure...

Madame [I] m'a également entièrement formé au poste d'attaché commercial, ayant en grande partie en charge la clientèle de particuliers....

En octobre 2011, Monsieur [V], m'a vivement suggéré une mutation au restaurant La Grande Verrière, restaurant n'appartenant pas au groupe mais dont il était actionnaire avec Monsieur [A], chef des cuisines. Lors de mon départ pour la Grande Verrière, Madame [I] s'est retrouvée seule au service commerciale avec une assistante, [N] [E]. En effet Madame [Z] était partie en congé de maternité....

J'ai toujours gardé contact avec les équipes du Pavillon Ledoyen et du Groupe Epicure.

Par ma fonction, j'ai donc été très souvent en contact avec Madame [I] qui n'avait plus le temps de faire les fonctions qui lui étaient demandés car elle devait gérer l'ensemble des dossiers commerciaux du Groupe Epicure. Elle était épuisée et n'avait plus aucune crédibilité sur les équipes du Pavillon Ledoyen qui ne comprenaient plus quel était son rôle et ses fonctions..." ;

- Madame [C] [F] déclare avoir été embauchée, en décembre 2000, par Madame [I] en qualité d'attachée commerciale. Elle déclare que Madame [I] occupait les fonctions de directrice d'exploitation du Pavillon et Monsieur [M] [A] les fonctions de directeur des cuisines. "C'était donc une direction à deux têtes qui en référait ensuite à la Direction Générale, Monsieur [L] [Q] et Monsieur [V].

Par sa nouvelle fonction, Monsieur [S] [L] était sous l'autorité de Madame [I] et c'est d'ailleurs elle qui contrôlait toutes les réceptions, les achats, les embauches, le personnel extra et les blancs de paye du personnel extra et fixe.

Monsieur [L] ne prenait aucune initiative sans en référer à Madame [I]....

Madame [I] contrôlait également le service commercial, l'accueil, la maintenance;

- Monsieur [T] [M], embauché de janvier 2001 à mars 2007 en tant qu'attaché commercial par Madame [I], décrit dans les mêmes termes que les autres témoins les fonctions qu'exerçait l'intimé durant cette période.

- Madame [O] [P], gérante de la société Mondapart, atteste qu'en 2009 Madame [I], en qualité de directrice d'exploitation du Groupe Epicure, a pris contact avec la société Mondapart afin de mettre en place un partenarait en vue de l'organisation d'expositions artistiques mensuelles au Pavillon Ledoyen, que les opérations ont duré presque deux ans et que toutes les expositions ont été organisées avec le support quotidien de l'intimée.

En outre, Madame [I] produit aux débats des courriers en date des 25 mars 2008 et 3 avril 2008 adressés par le directeur général, Monsieur [V], tant à elle-même qu'à Monsieur [A].

Il résulte des éléments précités que les fonctions décrites précisément par les témoins sont en concordance avec les missions de Madame [I] telles que décrites dans la lettre du Président de la société le 24 janvier 2002, et les deux courriers adressés par le directeur général corroborent l'effectivité du rôle et des responsabilités d'encadrement que l'intimée a effectivement exercées.

La SAS GROUPE EPICURE soutient que les fonctions de Madame [I] n'ont pas été modifiées et qu'il n'y a eu aucune modification substantielle du contrat de travail. Pour ce faire, elle expose que les attributions de Madame [I], en qualité de directrice commerciale, ont été clairement définies dans l' avenant au contrat de travail du 30 décembre 1996 et que l'avenant du 1er septembre 2005 n'a pas modifié ses compétences.

Il s'avère, toutefois, que l'appelante ne prend nullement en compte les fonctions de l'intimée telles que décrites dans la lettre que Monsieur [Q], président, lui a adressé le 24 janvier 2002 et qui a fixé ses fonctions à compter du 28 janvier 2002. En effet, contrairement à ce que soutient l'appelante les attributions commerciales de l'intimée ne se limitaient pas à "une mission commerciale destinée à la promotion des banquets et évènements au sein du Pavillon LEDOYEN" puisque Madame [I] avait, notamment, pour missions " l'élaboration des budgets", "le suivi du budget et tenue des objectifs fixés par la Direction Générale" " le management d'une équipe commerciale", "la proposition d'une nouvelle grille de rémunération du service commercial", "le management du personnel des réceptions et l'adaptation des structures" et "la supervision du recrutement du personnel de salle".

Dès lors, la SAS GROUPE EPICURE n'est pas fondé à soutenir que Madame [I] n'avait aucune compétence dans le domaine des ressources humaines.

Il apparaît, au surplus, que l'appelante produit l'attestation de Monsieur [L], directeur des réceptions au Pavillon Ledoyen, qui indique avoir été en charge, entre autres, du recrutement du personnel intermittent et qu'il recrutait le personnel fixe, en collaboration avec Madame [I].

Il s'avère, toutefois, que le fait de participer au recrutement de certains collaborateurs n'implique pas l'exercice d'un pouvoir hiérarchique sur les personnes et que le fait d'assurer le management d'une équipe commerciale, notamment par le suivi des commerciaux et la motivation d'une équipe ne démontre pas l'effectivité de l'exercice d'un pouvoir hiérarchique en sus.

De même, l'attestation de Monsieur [O] est insuffsante, en l'absence d'autres éléments matériels probants, pour établir que Monsieur [L] était sous le pouvoir hiérarchique de Madame [I], leurs attributions complémentaires nécessitant leur collaboration.

Au surplus, il apparaît que contrairement à ce qu'elle soutient, l'intimée ne justifie pas avoir assuré la gestion des approvisionnements, attribution qui d'ailleurs ne fugurait pas dans les missions attribuées en qualité de directrice des Ventes et des Banquets du Pavillon Ledoyen. En oute, l'attestation de Monsieur [H], gérant de la société CLAP, n'apporte aucun élément pertinent à ce titre.

Quoiqu'il en soit, il apparaît qu'au fil des mois, à compter de l'année 2011, Madame [I] a exercé principalement des fonctions de nature commerciale.

Il convient de constater que pour justifier de l'absence de modification des fonctions de salariée, la SAS GROUPE EPICURE produit aux débats différents procès-verbaux de réunions du comité d'entreprise, auxquelles participait Madame [I] en qualité d'invitée. Il résulte de l'examen de ces documents que:

- le procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 23 février 2012 présidé par

Monsieur [V], directeur général, indique que "Monsieur [K] est le directeur

d'exploitation de la société Carré des Champs Elysées, qui doit rapporter à Mme [I], directeur d'exploitation de la société Groue Epicure;

- le procès-verbal de la réunion du 30 mas 2012 mentionne, s'agissant des résultants de l'entreprise en février 2012 que " Seuls les restaurants " Gastro-LEDOYEN" et "VINCI" présentent des résultats meilleurs par rapport à la même période de l'année précédente. En revanche l'activité des "réceptions" continue de se dégrader et le problème des effectifs au service commercial et au service d'exploitation reste posé et avec un risque de réduction de 4 ou 5 effectifs.

Mais la trésorerie reste positive".

Au surplus, les autres procès-verbaux font mention du choix de développer les activités "restaurant " par rapport à l'activité "évenementielle" dont les difficultés persistent, les réceptions étant de plus en plus petites et avec des prix bas.

En outre, dans le courrier qu'il a adressé à Madame [I] le 15 octobre 2012, le Directeur Général a évoqué les mauvais résultats de l'activité réceptive dont la dégradation ne parvient pas à ête compensée par l'amélioration très significative du restaurant gastronomique Ledoyen dont l'image n'avait jamais été aussi forte. Il précise que la situation a conduit à engager une maîtrise des coûts et donc une réduction notamment des effectifs en charge des activités de réception à tous les niveaux du Groupe".

Il convient de rappeler qu'eu égard à sa présence comme invitée aux réunions du comité d'entreprise, Madame [I] était dûment informée de la baisse des effectifs en charge des activités relatives aux réceptions, ce qui l'a conduite, sans qu'aucune de ses attributions ne lui soient retirées, à voir ses différentes missions se redélpoyer différemment compte-tenu du contexte financier, étant rappelé que parmi les missions de l'intimée un certain nombre d'entre elles présentaient un caractère incontestablement commerciale. Dès lors, aucun manquement ne peut être reproché à la SAS GROUPE EPICURE concernant les attributions de Madame [I].

S'agissant de l'hostilité de la société à son encontre, Madame [I] se plaint, notamment, du refus de communication de l'employeur qui l'a contrainte à saisir la justice et de l'absence de compassion lors du décès de sa mère, il s'avère, toutefois, que les difficultés économiques ne pouvaient que créer une atmosphère plus tendue à l'intérieur de la société. En tout état de cause, l'éventuelle froideur d'un employeur à l'égard d'un salarié ne peut constituer un manquement d'une telle importance qu'il justifie le bien fondé d'une résiliation judiciaire d'un contrat de travail.

Pour ce qui concerne, enfin, l'absence de versement de primes sur les exercices 2011 et 2012, il résulte des termes de l'article 4 du contrat de travail de l'intimée qu' outre son salaire mensuel fixe, elle "percevra une prime annuelle devant refléter non seulement l'amélioration des résultats, mais également l'importance de sa contribution personnelle à ses résultats".

Ainsi que le soutient à juste titre la SAS GROUPE EPICURE, il résulte des termes mêmes de l'article que la prime présente par nature un caractère aléatoire et qu'en tout état de cause, les résultats étant déficitaires pour les années 2011 et 2012 compte-tenude la baisse de l'activité "Réceptions" aucun manquement ne peut être reproché à l'employeur qui, légitimement, n'a pas répondu favorablement à la demande de versement de primes sollicitée par Madame [I].

Il résulte des éléments ci-dessus exposés que les manquements reprochés par Madame [I] à la SAS GROUPE EPICURE ne sont pas fondés et que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur doit être rejetée. Le jugement déféré est confirmé en cette disposition.

Sur le licenciement pour faute grave:

Selon les termes de l'article L. 1232-1 du Code du travail, tout licenciement doit avoir une cause réelle et sérieuse. La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis et qu'elle fait obstacle à la poursuite du contrat.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit la prouver.

Les faits invoqués doivent être matériellement vérifiables. En outre, en application de l'article L. 1332-4 du Code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales. Enfin, un même fait fautif ne peut donner lieu à double sanction.

En application de l'article L. 1232-6 du Code du travail, la motivation de la lettre de licenciement fixe les limites du litige.

Au surplus, selon les dispositions de l'article L. 2135-1 alinéa 5 du code du travail, en cas de licenciement « Si un doute subsiste, il profite au salarié ».

En l'espèce, la SAS GROUPE EPICURE a licencié pour faute grave Madame [I] dans les termes suivants:

" ...Par la présente, et en l'état, nous vous informons que nous sommes contraints de mettre fin à votre contrat de travail pour faute grave et pour les raisons suivantes.

Vous exercez les fonctions de Directeur d'exploitation du GROUPE EPICURE, et à ce titre, vous avez la responsabilité diecte de son service commercial, sous le contrôle du Directeur Général, dans le respect des procédures et des tarifs autorisés par le logiciel des réceptions.

Vos fonctions consistent également à coordonner les opérations de maintenance du PAVILLON LEDOYEN ainsi que l'organisation "décoration et salles" des réceptions qui se déroulent au sein de ce Pavillon et que vous avez commecialisées.

Il semble utile de rappeler que, le samedi 20 octobre 2012, lors de la réception de Madame [X] dont vous aviez la responsabilité, une danseuse extérieure, directement payée par la cliente, est intervenue. Il apparaît qu'elle a prétendu recevoir des individus à l'intérieur de notre établissement.

Concernant cette dansesuse, il n'a pas été justifié des conditions de son intervention, ni du caractère régulier de sa rémunération (ce qui engage la responsabilité de la Direction). Elle a été directement payée par la cliente et a reçu des individus à l'intérieur de notre bâtiment.

Priés de quitter les lieux, ceux-ci ont alors violemment agressé le voiturier de l'établissement en le ruant de coups. Une plainte a été déposée auprès du Commissariat de Police.

Je vous laisse le soin de mesurer la portée de tels débordements en ce qui concerne la réputation de notre établissement.

Vous avez été immédiatement informée de cet incident.

Au regard de vos fonctions, il vous incombait de nous avertir de l'incident et de ce grave dysfonctionnement. Vous n'ena vez rien fait, pensant sans doute manquer à vos propres manquements.

Pourtant, le lundi 22 octobre 2012, alors que nous avions une réunion à 11 heures, vous ne nous avez pas informés de cette altercation.

C'est lors de la réunion du Comité d'entreprise du même jour à 16 heures que nous avons découvert à notre grande stupéfaction que Monsieur [R], également membre du Comité d'entreprise, était couvert d'ecchymoses.

Le même jour, nous avons reçu de de la Médecine du travail une fiche d'inaptitude temporaire vous concernant datée du 22 octobre 2012 à 14heures 14.

Dans le même temps, vous nous avez adressé une copie de notre arrêt de travail pour une période courant du 22 octobre 2012 au 12 novembre 2012.

Le 9 janvier 2013, nous avons reçu de la Médecine du Travail un avis d'inaptitude à tous les postes de l'entreprise avec danger immédiat (une seule visite).

Alors qu'il était question de mettre en oeuvre, en votre absence, les réceptions que vous aviez commercialisées, nous avons découvert de graves anomalies dans les dossiers commerciaux dont vous avez la charge directe.

A notre stupéfaction, nous avons alos découvert que, depuis de nombreux mois:

Vous avez saisi dans notre système informatique de faux devis afin de dissimuler des prestations que vous avez accordées gratuitement à des clients, à notre détriment.

Comme vous le savez pertinemment, toutes nos prestations ont un tairf minimum fixe et sont préformatées dans notre logiciel de gestion commerciale et de facturation ISTORE. Aucune remise significative ne peut être accordée sans l'accord préalable express de la Direction Générale.

Par ailleurs, chaque proposition de prestation doit faire l'objet d'une saisie dans notre système informatique ISTORE, un devis proforma est ensuite en conséquence émis et remis au client. Vous n'êtes pas sans savoir que ce procédé obligatoire permet de contrôler les offres, d'assurer la rentabilité de notre entreprise et de préparer les prestations vendues au client, conformément au devis.

Or, nous avons constaté que vous proposiez aux clients, sans nous consulter, et sans notre accord, des devis ne correspondant pas aux offres saisies dans notre logiciel ISTORE, afin de leur fournir un certain nombre de prestations gratuites que vous organisez ensuite.

De même, il apparaît que certaines réceptions ont été commandées sans que le client ne signe le moindre contrat, ou sur la base de simples proforma sans devis annexé.

De même encore, nous avons constaté que certains clients ont pu réserver une réception sans verser l'acompte minimal obligatoire de 70%.

Nous avons notamment eu la surprise de cosntater que:

** S'agissant de la réception [Y] du 17 novembre 2012: non seulement vous avez établi des devis avec des conditions différentes de celles que vous avez indiquées au client par courriel séparé, mais qu'en outre le proforma budgétaire, signé par le client, ne comporte aucun devis en annexe précisant les prestations vendues.

Le client n'a en outre versé qu'un acompte de 9.000 euros, au lieu des 18.165 euros réclamés.

Enfin, du fait de vos arrangements conclus avec le client hors système ISTORE, nous avons été obligés de fournir pour cette réception, à nos frais, une tente de 28 m² avec éclairage, soit un surcoût de 3.558,77 euros TTC.

** S'agissant de la réception [S] du 23 juin 2013: de nombreuses prestations, qui n'apparaissent pas dans le système informatique, ont été offertes au client, pour un montant de 9.065 euros, sans que nous en ayons été informés ni consultés;

** S'agissant de la réception ABITBOL du 23 mars 2013: le client a également bénéficié de prestations gratuites d'un montant de 4.002 euros TTC, sans que celles-ci apparaissent dans notre système informatique.

** S'agissant de la réception NATAF du 2 juin 2013: des prestations d'un montant très conséquent de 12.269 euros TTC ontété fournies au client sans être facturées, à notre détriment, faute de préalable sur notre système informatique.

** S'agissant de la réception ALGUFROM du 16 juin 2013: des prestations d'un montant de 7.800 euros TTC onté té facturées au client, là encore sans aucune mention de ces prestations dans notre système informatique et sans notre autorisation.

Notamment, le client a pu bénéficier gratuitement de notre salon pour sa cérémonie religieuse, alors que cette location est normalement facturée 3.000 euros HT.

Pour ces cinq clients, les dissimulations que vous avez sciemment organisées, en dehors de notre logiciel de production d'affaires, portent sur plusde 235.000 euros, ce qui constitue de votre part une faute inadmissible.

Ces faits ne sont bien sûr que des exemples et nous sommes amenés à en découvrir d'équivalents chaque jour, au fur et à mesure de la mise en oeuvre des réceptions que vous avez vendues.

En dehors de la perte financière causée à la société, vos agissements nuisent à l'image de l'établissement et place le GROUPE EPICURE en porte à faux par rapport à nos clients.

Par ailleurs, nous avons été consternés de découvrir que, le jour de la signature du proforma de commande par Monsieur [S], vous avez certifié avoir reçu de sa part un acompte de 10.000 euros, 5.000 euros par chèque et 5.000 euros en espèces...

Malgré nos recherches poussées, il nous a été impossible de trouver une trace du versement en espèces de 5.000 euros, aussi bien dans notre système informatique que sur nos comptes.

Comme vous el savez, les remises en pespèces doivent être impérativement enregistrées dans le logiciel de gestion ISTORE, et faire l'objet de plusieurs reçus.

Le 14 janvier 2013, lors d'un rendez-vous avec Monsieur [S], celui-ci nous a assuré vous avoir remis le 27 septembre 2012, outre le chèque figurant au dossier, 5.000 euros en espèces et a invoqué le reçu de votre main.

A cette occasion, Monsieur [S] s'est insurgé du fait que vous aviez été seule pour réceptionner cette somme en espèces, alors qu'une telle remise s'effectue généralement en présence de deux personnes pouré viter toute contestation.

Très curieusement, le 4 février 2013, deux jours avant votre entretien préalable, Monsieur [S] est soudainement revenu sur ses déclarations et nous a annoncé avoir retrouvé dans son agenda 2012 une enveloppe contenant 5.000 euros en espèces.

A cet égard, nous ne pouvons nous empêcher de trouver curieux, voire même suspicieux, cette démarche de Monsieur [S] alors que vous êtes infomée qu'un licenciement pour faute grave pouvait être engagé à votre encontre, et que n'ayons pas pu vous exposer ces motifs en raison de votre absence à l'entretien.

La faute est caractérisée et votre insuffisance est à nos yeux établie quand aux sommes qui vous ont été réellement remises le 27 septembre 2012, elle est inadmissible au regard de vos fonctions et des responsabilités qui y sont liées.

Il s'agit d'un fait d'autant plus grave qu'il laisse présumer que vous avez pu effectuer des détournements d'espèces au détriment des clients, ce qui nuit gravelement à notre image professionnelle et aurait pu engager notre responsabilité pénale si Monsieur [S] avait maintenu ses déclarations qui apparaissent parfaitement justifiées au regard des documents que vous avez personnellement attestés et signés.

Nous vous rappelons qu'en tant que Directeur d'exploitation, vous avez l'obligation de veiller à la bonne application des procédures, notamment pour ce qui concerne les versements d'acomptes sans lesquels les réceptions ne doivent pas se dérouler.

De plus, alors que tout salarié se rendant dans un de nos restaurants doit régler sur place sa facture, nous constatons que votre compte présente un solde débiteur depuis la fin du mois de juillet 2012, et qu'à ce jour, vous ne vous êtes toujours pas acquittée de vos factures d'un montant total de 560,05 euros.

Compte-tenu de l'ensemble de ces faits, nous vous notifions votre licenciement pour faute grave.

En tout état de cause, nous vous précisons que les recherches que nous avions effectuées au sein de notre groupe pour tenter de vous reclasser, avant que nous prenions connaissance de l'ensemble des faits énoncés ci-dessus, n'ont pu aboutir, aucun poste adapté à vos capacités actuelles n'étant disponible au sein des autres sociétés de notre UES.

De ce fait, il nous a été impossible de vous reclasser...."

Ainsi que le soutient à juste titre Madame [I], les faits concernant l'incident du 20 octobre 2012 ont été connus de l'employeur dès le 22 octobre. Dès lors, ils étaient prescrits lorsque la SAS GROUPE EPICURE a engagé la procédure de licenciement le 28 janvier 2013.

S'agissant des autres faits, l'intimée considère qu'ils sont aussi prescrits et affirme que les dossiers clients étaient laissés au sein de l'entreprise, consultables à tout moment, le directeur général pouvant également y accéder sur le logiciel des devis et qu'il est impossible que l'employeur puisse feindre d'avoir découvert des "anomalies" seulement au mois de janvier 2013, juste après l'avis d'inaptitude définitive au moment où il envisageait d'engager une procédure de licenciement pour inaptitude alors que dès son arrêt de maladie du 22 octobre 2012, la durée d'un mois d'absence était connue de l'employeur.

Elle précise que, compte-tenu de son absence, la SAS GROUPE EPICURE devait très rapidement confier à un autre collaborateur le suivi des dossiers dans la mesure où ce type de prestations, implique de nombreux intervenants, des évolutions fréquentes la demande des clients, des réglements échelonnés.

Il s'avère, toutefois, que les affirmations de Madame [I] ne sont étayées par aucun élément matériel probant remettant en cause l'argumentation de la SAS GROUPE EPICURE selon laquelle ce n'était qu'au mois de janvier 2013 que ses dirigeants avaient été alertés sur les irrégularités commises par l'intimée dans les dossiers qu'elle suivait en direct, au motif que ceux-ci n'avaient aucun moyen d'en avoir connaissance plus tôt puisque les réceptions étaient toujours commandées plusieurs mois à l'avance et que lorsque la salarié a été mise en arrêt maladie du 20 octobre au 22 novembre 2012, puis prolongée jusqu'au 9 janvier 2013, ils avaient ouvert les dossiers concernant les réceptions prévues au cours de l'année 2013.

Dès lors, les manquements reprochés au titre de la gestion des dossiers des réceptions sont considérés comme recevables.

Au soutien des griefs, la SAS GROUPE EPICURE communique aux débats:

- le courriel adressé par Madame [B] le 4 janvier 2013 par lequel elle fait part à la direction des problèmes rencontrés dans certains dossiers gérés par Madame [I],

- le compte-rendu établi par Madame [T] le 16 janvier 2013,

- le compte-rendu concernant le dossier de réception de Monsieur [S] et la note transmise par Madame [Z] au directeur général,

- les courriels échangés par Madame [I] et les clients mentionnés dans la lettre de licenciement,

- les dossiers des dits clients.

Au vu des pièces produites, et ainsi que le soutient Madame [I], il résulte des termes mêmes de la lettre du Président de la société en date du 24 janvier 2002, que parmi ses missions, en sa qualité de directrice des Ventes et des Banquets, puis de directrice d'exploitation, elle contrôlait toutes les réceptions et, notamment, le prix de vente, le prix négocié, les résultats... ce qui établit qu'elle avait la possibilité d'effectuer des remises aux clients. Au surplus, il apparaît que la SAS GROUPE EPICURE ne justifie ni d'une note, ni de consignes fixant les règles selon lesquelles des remises pouvaient être accordées, soit directement par Madame [I], soit sur proposition de cette dernière après accord de la direction générale.

Aucun manquement ne peut donc être reproché à l'intimée à ce titre.

En revanche, l'examen des pièces produites à l'appui du dossier concernant la réception du 23 juin 2013 organisée à la demande de Monsieur [S] en particulier, le profoma établit que la prestation est prévue pour un motant TTC de 26.760 € TTC, correspondant à un acompte de 18.732 € mais que manuscritement est mentionné à la date de l'émission du proforma, soit le 26 septembre 2012, le versement d'un premier acompte de 10.000 € ce jour, le reste étant échelonné jusqu'au 1er juin 2013. Il s'avère, toutefois, que le dossier ne contient que la copie d'un chèque de 5.000 € et l'employeur justifie qu'aucun versement en espèces de cette somme n'a été enregistré pour ce client dans le logiciel ISTORE à la date du 27 septembre 2012, en même temps que la somme versée par chèque.

Au surplus, il s'avère qu'à la suite d'un entretien qu'il a eu avec Madame [T], le 16 janvier 2013, Monsieur [S] a déclaré avoir demandé deux factures, une à son nom pour les versements par chèque et une autre au nom d'un ami pour les versements en liquide. Il a déclaré avoir versé non seulement un chèque de 5.000 € mais avoir remis en espèces la somme de 5.000 € à Madame [I] et a constesté le fait que n'ait été enregistré que le versement par chèque.

Madame [I] conteste toute intention frauduleuse à ce titre et expose qu'après leur entretien, Monsieur [S] ne lui a finalement remis qu'un chèque de 5.000 € en lui indiquant que les 5.000 € en espèces lui seraient remis dans la semaine. Elle précise que, même si elle a néanmoins laissé sur le proforma la somme de 10.000 €, elle n' a volontairement pas remis au client le reçu dans l'attente du versement, ajoutant qu'en tout état de cause la SAS GROUPE EPICURE n'a pas déposé plainte au pénal.

Il convient, toutefois, de constater que même si Madame [I] n'a pas remis de reçu du versement de 5.000 € au client, il s'avère que celui-ci était en possession d'une copie du proforma qui portant mention du versement de 10.000 €.

Au surplus, il convient de considérer qu'en mentionnant sur le proforma un versement d'un acompte de 10.000 € alors que seule la moitié de la somme avait été versée le 26 septembre 2012, Madame [I] a commis une faute et ses arguments ne peuvent être retenus pour remettre en cause l'effectivité de cette faute.

Au surplus, si, ainsi que l'intimée le soutient, Monsieur [S] a finalement décidé de ne verser le 26 septembre 2012 que la somme de 5.000 € par chèques et d'effectuer quelques jours plus tard le versement en espèces, l'intimée devait procéder à la rectification de la mention manuscrite figurant sur le proforma, sachant, en outre, que le montant de 10.000 € précu à titre d'acompte était, en tout état de cause, inférieur à l'acompte de 70% que le client était tenu de verser.

Au demeurant, le fait que Monsieur [S] ait effectué au début de l'année 2013 un paiement en espèces de la somme de 5.000 € est sans effet sur l'effectivité de la faute commise par Madame [I].

Par ailleurs, les dossiers des clients tels que produits, démontrent pour le client ABITOL, que la prestation vendue n'était pas conforme à l'offre classique telle que proposée par la société, qu'aucune précision n'est apportée sur les condtions dans lesquelles la somme de 6.000 € doit être remis aux fournisseurs. De même, s'agissant du client NATAF, outre le fait que l'acompte versé est très inférieur aux 70% de la commande tels que fixé par la société, i s'avère que prestation vendue n'est pas conforme à l'Offre Romantique" telle que proposée par la SAS GROUPE EPICURE;

Dès lors, et sans qu'il y ait lieu d'apprécier l'effectivité des autres griefs reprochés, il convient de considérer qu'eu égard à l'ancienneté de Madame [I], sa qualité de directrice d'exploitation, son implication dans la société dont elle détenait des parts, les faits reprochés et établis constituent une violation des obligations résultant de son contrat de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible son maintien dans l'entreprise

même pendant la durée du préavis et faisait obstacle à la poursuite du contrat.

Dès lors, il convient de juger bien fondé le licenciement pour faute grave. Madame [I] est déboutée de sa demande à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement déféré est infirmé en ce qu'il a jugé le licenciement pour faute grave non fondé sur une cause réelle et sérieuse et a condamné la SAS GROUPE EPICURE à payer à Madame [I] les sommes suivantes:

** 27.624 € à titre d'indemnité de préavis,

** 2.762 € au titre des congés payés afférents,

** 46.039 € à titre d'indemnité de licenciement,

** 51.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Reconventionnellement, la SAS GROUPE EPICURE demande la condamnation de Madame [I] au remboursement de la somme de 560,05 € corespondant à des notes personnelles de restaurant restant dues.

Il s'avère, toutefois, que Madame [I] justifie de la remise de chèques le 28 février 2013 lors de la restitution d'objets appartenant à l'entreprise et de la remise par l'employeur des documents de fin de contrat et que la SAS GROUPE EPICURE ne démontre pas que les paiements effectuées étaient insuffisants pour solder les frais de restaurant dus. Elle est déboutée de cette demande.

Madame [I] est condamnée aux dépens de première isntance et d'appel.

Pour faire valoir ses droits, la SAS GROUPE EPICURE a dû engager des frais non compris dans les dépens. Madame [I] est condamnée à payer à la SAS GROUPE EPICURE la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

- infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- déclare fondé sur une faute grave le licenciement de Madame [J] [I] par la SAS GROUPE EPICURE,

- déboute Madame [I] de sa demande à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- déboute la SAS GROUPE EPICURE de sa demande de remboursement de frais de restaurant,

- condamne Madame [J] [I] aux dépens de première instance et d'appel et au paiement à la SAS GROUPE EPICURE de la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

LE GREFFIER LE CONSEILLER

P/ LE PRESIDENT EMPECHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 14/10061
Date de la décision : 12/03/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°14/10061 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-12;14.10061 ?
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