Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 12 FÉVRIER 2019
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/21718 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4Q4Y
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Novembre 2017 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2017000526
APPELANTE
SAS LUDENDO COMMERCE FRANCE agissant poursuites et diligences de son Président y domicilié en cette qualité.
[Adresse 1]
[Localité 1]
Immatriculée au registre du commerce de PARIS sous le numéro : 414 138 842
Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
INTIMÉE
GIE DES COMMERÇANTS DU CENTRE COMMERCIAL ARCADES pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Immatriculée au registre du commerce de BOBIGNY sous le numéro : 313 63 1 2 699
Représentée par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044
Assistée de Me Déborah FOURNET du Cabinet GOWLING, avocat plaidant, avocat au barreau de PARIS, toque : P0127
PARTIES INTERVENANTES
SCP BTSG Es qualités de Mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SAS LUDENDO COMMERCE FRANCE, désigné par jugement du Tribunal de Commerce de Paris en date du 13 mars 2018;
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Société SELAFA MJA en la personne de Me [U] [P] Es qualités de Mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SAS LUDENDO COMMERCE FRANCE, désigné par jugement du Tribunal de Commerce de Paris en date du 13 mars 2018;
[Adresse 4]
[Adresse 4]
SCP THEVENOT PARTNERS en la personne de Me [T] [E], pris en sa qualité d'Administrateur judiciaire de la SAS LUDENDO COMMERCE FRANCE, désignée par jugement du TC de Paris en date du 13 mars 2018.
[Adresse 5]
[Localité 1]
SELARL 2M ET ASSOCIES en la personne de Me [R] [Y], pris en sa qualité d'Administrateur judiciaire de la SAS LUDENDO COMMERCE FRANCE, désignée par jugement du TC de Paris en date du 13 mars 2018.
[Adresse 6]
[Localité 1]
Représentées par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Assistées de Me Mbaye DIAGNE, de la SCP HP & ASSOCIES, avocat plaidant, toque : P497, substituant Me Gilles HITTINGER-ROUX, de la SCP HP & ASSOCIES, toque : P497
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 Janvier 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre
Mme Anne-Sophie TEXIER, Conseillère
Mme Florence DUBOIS-STEVANT, Conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame DUBOIS-STEVANT dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Laure POUPET
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre et par Laure POUPET, greffière présente lors du prononcé.
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Exposé du litige :
La Sas Ludendo commerce France ('la société Ludendo') exerce une activité de commerce de détail de jeux et jouets sous l'enseigne La Grande Récré. Depuis le 2 mars 2009, elle est titulaire d'un bail portant sur la location d'un local situé dans l'enceinte du centre commercial [Établissement 1] situé à [Adresse 7] (93), bail par lequel elle s'est notamment engagée à participer financièrement, comme les autres commerçants du centre, aux opérations de promotion et d'animation conduites par le GIE des commerçants du centre commercial Les Arcades.
La société Ludendo a cessé de régler ses cotisations au GIE en 2014 au motif qu'elle ne souhaitait plus adhérer à ce groupement.
Contestant la possibilité pour la société de démissionner du GIE, ce dernier a exigé le règlement des sommes dues depuis le 1er janvier 2014 puis assigné la société Ludendo devant le tribunal de commerce de Paris. La société Ludendo a soulevé l'incompétence de ce tribunal en estimant que le tribunal de grande instance de Bobigny était compétent pour connaître du litige. Par jugement en date du 2 décembre 2015, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de sauvegarde financière accélérée à l'égard de la société Ludendo.
Par jugement en date du 16 novembre 2017, le tribunal de commerce de Paris a dit la société Ludendo recevable mais mal fondée en son exception d'incompétence et l'en a déboutée, s'est déclaré compétent, a renvoyé la cause à l'audience du 29 novembre 2017, a enjoint aux parties de conclure au fond au plus tard à cette date et a condamné la société Ludendo à payer au GIE la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
La société Ludendo a relevé appel de ce jugement le 29 novembre 2017.
Par jugement du 13 mars 2018, le tribunal de commerce de Paris a constaté la résolution du plan de sauvegarde accélérée et ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Ludendo, la Scp BTSG étant désignée en qualité de mandataire judiciaire.
Par arrêt du 15 mai 2018, la cour a constaté l'interruption de l'instance, invité le GIE à régulariser la procédure à l'égard des organes de la procédure collective et renvoyé l'affaire à la mise en état.
Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 13 décembre 2018, la société Ludendo, la Scp BTSG et la Selafa MJA, mandataires judiciaires, la Scp Thevenot partners et la Selarl 2M et associés, administrateurs judiciaires, demandent à la cour :
- à titre principal, de juger le jugement entrepris nul et de nul effet,
- à titre subsidiaire, d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il retient la compétence du tribunal de commerce de Paris,
- en tout état de cause, de juger le tribunal de commerce de Paris incompétent au profit du tribunal de grande instance de Bobigny, de débouter le GIE de toutes ses demandes, d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Ludendo à 2.000 € au titre des frais irrépétibles et aux dépens et de condamner le GIE à verser à la société Ludendo la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles et aux dépens.
Ils soutiennent que le jugement est nul pour défaut de motivation aux motifs qu'il dénature les prétentions de la société Ludendo et qu'il n'y répond pas en limitant le litige au paiement de factures de cotisations opposant deux commerçants alors qu'elle soulevait le caractère illicite de l'obligation d'adhésion au GIE au regard de l'article L. 145-15 du code de commerce.
Invoquant les articles R. 145-23 du code de commerce et R. 211-4 11° du code de l'organisation judiciaire, ils prétendent que le tribunal de grande instance est compétent dès lors que le GIE fonde ses demandes sur le bail commercial qui fait de l'adhésion au GIE une condition essentielle pour bénéficier du bail et que la validité de l'obligation d'adhésion au GIE est contestée à l'aune des articles L. 145-15 et L. 145-16 du code de commerce.
Ils estiment que la cour devra débouter le GIE de sa demande de fixation de créance dès lors que le tribunal ne s'est pas prononcé au fond et que le GIE ne justifie pas d'une déclaration de créance.
Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 17 décembre 2018, le GIE demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, de fixer sa créance à la somme de 121.758,06 € à titre de créance chirographaire et de condamner la société Ludendo à lui payer la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Il soutient que le tribunal a parfaitement répondu à l'argument soulevé par la société Ludendo sans encourir le reproche d'un défaut de motivation.
Le GIE prétend que, s'agissant d'une action en paiement opposant deux commerçants et la défenderesse étant domiciliée à [Localité 1], le tribunal de commerce de Paris est compétent et que la compétence d'attribution du tribunal de grande instance en matière de baux commerciaux ne peut pas être invoquée car sa demande n'est pas fondée sur le statut des baux commerciaux mais sur le lien d'obligation existant entre lui et la société Ludendo, lien indépendant du bail commercial.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux dernières conclusions notifiées.
SUR CE,
Sur la nullité du jugement :
Devant le tribunal, la société Ludendo a soulevé l'incompétence du tribunal de commerce en invoquant le fait que le GIE fondait essentiellement ses demandes sur le bail commercial et en mettant en cause la validité de l'adhésion obligatoire au GIE imposée au bailleur comme étant contraire à l'article L. 145-15 du code de commerce.
Pour rejeter l'exception d'incompétence, le tribunal a retenu que l'objet du litige avait trait à l'obligation de paiement existant entre le GIE et la société Ludendo et non au bail souscrit par celle-ci et son bailleur et que le litige était étranger au statut des baux commerciaux. Le tribunal, qui n'avait pas à statuer sur la validité de la clause litigieuse, a ainsi répondu au moyen soulevé par la société Ludendo en l'écartant et a suffisamment motivé sa décision.
La demande de nullité du jugement est donc rejetée.
Sur la compétence :
Selon l'article R.211-4 du code de l'organisation judiciaire, le tribunal de grande instance a compétence exclusive en matière de baux commerciaux, à l'exception des contestations relatives à la fixation du bail révisé ou renouvelé, des baux professionnels et conventions d'occupation précaire en matière commerciale. Toutefois, lorsque le litige porte sur une demande en paiement du bailleur contre le locataire et non sur l'application des dispositions relatives au statut des baux commerciaux, le tribunal de commerce est également compétent.
En l'espèce, le lien d'obligation dont se prévaut le GIE résulte du bail commercial liant la société Ludendo à son bailleur et plus exactement de l'article 12 qui prévoit que le preneur s'engage à prendre en charge sa quote-part des dépenses impliquées par la mise en oeuvre des moyens collectifs en vue d'assurer, de coordonner et de favoriser la promotion, le développement, l'animation et la publicité du centre commercial, que cet engagement irrévocable s'exécute sous la forme de l'adhésion du preneur à l'organisme constitué pour répondre de cet objet ou, dans l'hypothèse de l'absence de constitution de cet organisme, de règlement des appels de fonds qui seront émis pour répondre de ce même objet et que cet engagement est déterminant de la convention.
Or, pour s'opposer à la demande en paiement du GIE, la société Ludendo soutient que cette obligation d'adhésion au GIE doit être réputée non écrite au regard des articles L. 145-15 et L. 145-16 du code de commerce en ce qu'elle constitue une atteinte à la propriété commerciale et une restriction à la liberté de cession de son fonds de commerce.
Il s'ensuit que le litige requiert une appréciation du respect du statut protecteur des baux commerciaux de sorte qu'en application de l'article R. 211-4 du code de l'organisation judiciaire, il relève de la compétence exclusive du tribunal de grande instance.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a retenu la compétence du tribunal de commerce et l'affaire renvoyée au tribunal de grande instance de Bobigny.
Sur la demande de fixation de créance :
Le jugement dont appel a statué exclusivement sur la compétence et il n'y a pas lieu d'évoquer le fond de sorte que la demande de fixation de sa créance formée par le GIE sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire mis à la disposition au greffe,
Déboute la société Ludendo commerce France de sa demande de nullité du jugement ;
Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
Dit que le tribunal de commerce de Paris est incompétent au profit du tribunal de grande instance de Bobigny ;
Dit n'y avoir lieu d'évoquer l'affaire ;
Renvoie l'affaire au tribunal de grande instance de Bobigny ;
Condamne le GIE des commerçants du centre commercial Les Arcades aux dépens de première instance et d'appel ;
Déboute les parties de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, La Présidente,
Laure POUPET Marie-Christine HEBERT-PAGEOT