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22/01/2019 | FRANCE | N°16/11507

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 22 janvier 2019, 16/11507


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 22 Janvier 2019

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/11507 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZSU4



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Juillet 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY section RG n° F13/02005





APPELANT

M. Abdallah X...

[...]

représenté par M. Fodé Moussa Y... (D

élégué syndical ouvrier)





INTIMÉE

SASU MEDIAPOST

ZAC de la Butte aux Bergers - [...]

représentée par Me Carine Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : A0918







COMPOSITI...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 22 Janvier 2019

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/11507 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZSU4

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Juillet 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY section RG n° F13/02005

APPELANT

M. Abdallah X...

[...]

représenté par M. Fodé Moussa Y... (Délégué syndical ouvrier)

INTIMÉE

SASU MEDIAPOST

ZAC de la Butte aux Bergers - [...]

représentée par Me Carine Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : A0918

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 janvier 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Nadège BOSSARD, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine BEZIO, président

Madame Nadège BOSSARD, conseiller

Monsieur Benoît DEVIGNOT, conseiller

Greffier : Géraldine BERENGUER, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé pour le Président empêché par Madame Nadège BOSSARD, Conseiller et par Madame Anna TCHADJA ADJE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

M. X... Abdallah a été engagé par la société MEDIAPOST à compter du 1er janvier 2006 en qualité de Distributeur Grand Porteur, classification employé, niveau 1.2 selon une durée hebdomadaire de travail de 39 heures, avec une reprise d'ancienneté au 2 juin 1994 acquise auprès de son précédent employeur, la société INTRA MUROS.

Le 12 février 2009, le médecin du travail a émis à l'égard de M. X... une restriction de charges de 30% sur une base de 10 heures.

Par avenant en date du 1er janvier 2011, M. X... est devenu Distributeur Grand Porteur Tuteur, classification employé, niveau 1.2.

La convention collective applicable est celle des entreprises de la distribution directe en date du 9 février 2004.

La société comprend plus de onze salariés.

Le 27 février 2012, M. X... a été victime d'un accident de trajet.

A l'issue de son arrêt de travail, le 24 septembre 2012, il a été déclaré 'apte avec restrictions de charges de 30% sur une base de 10 heures et /ou avec une activité de contrôle de 50% sans limitation de charges pour le complément'.

Le 31 octobre 2012, le médecin du travail a confirmé, après étude de poste, la restriction définitive de 30% de dégradation de cadences et a déclaré M. X... apte à une activité de contrôle.

Le 15 novembre 2012, une restriction de cadence de 30% a été préconisée par le médecin du travail laquelle a été confirmée le 14 février 2013.

M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny le 7 mai 2013 aux fins d'affectation au poste de contrôleur, de rappel de salaires et de dommages-intérêts.

Par jugement en date du 21 juillet 2016, le conseil de prud'hommes a débouté M. X... de ses demandes.

Il a interjeté appel le 14 septembre 2016.

Vu ses conclusions tendant à voir infirmer le jugement entrepris, et à voir prononcer son affectation définitive au poste de contrôleur, et se voir allouer un rappel de salaire d'octobre 2010 à mai 2013 d'un montant de 2400 euros et 240 euros de congés payés, des dommages-intérêts d'un montant de 5800 euros, des dommages-intérêts de 50 000 euros pour 'discrimination ordinaire', se voir allouer un rappel de salaire de 7651,74 euros et 765,17 euros de congés payés y afférents et 9589,26 euros des dommages-intérêts pour travail dissimulé,

Vu les conclusions de la SA MEDIAPOST tendant à voir prononcer l'incompétence de la cour pour statuer sur une demande de dommages-intérêts formée au motif d'un délit d'entrave et à voir confirmer le jugement entrepris;

Vu l'audience de plaidoirie du 26 janvier 2018,

Vu l'ordonnance de désignation d'un médiateur en date du 23 mars 2018,

Vu le rappel à l'audience du 28 juin 2018 puis du 25 octobre 2018,

MOTIFS :

Sur la demande d'incompétence :

M. X... ayant modifié ses demandes, il ne formule plus de demande de dommages-intérêts au titre d'un délit d'entrave. La demande tendant à voir déclarer la cour incompétence pour statuer est donc sans objet.

Sur la demande d'affectation au poste de contrôleur :

M. X... soutient qu'il exerçait les fonctions de contrôleur depuis 2010 et que lors de sa reprise de travail après un accident de trajet, il a été affecté aux fonctions de distributeur en contradiction avec les restrictions du médecin du travail et la demande de l'inspection du travail et en violation des règles régissant la modification des conditions de travail d'un salarié protégé lesquelles requièrent son accord. Il sollicite sa ré-affectation dans les fonctions de contrôleur.

La société MEDIAPOST conteste que M. X... ait exercé les fonctions de contrôleur au sens de la convention collective et fait valoir que son emploi de distributeur grand porteur permettait qu'il exerce ponctuellement les fonctions de contrôleur en sus de celle de distributeur et de tuteur sans pour autant lui conférer la qualification et le poste de contrôleur.

M. X... verse aux débats les feuilles de journées du 17 janvier 2011 au 19 décembre 2011 lesquelles mentionnent une activité de contrôle, à raison de huit heures par jour, du 17 janvier 2011 au 15 février 2011 puis les 21, 28 février, 1er, 7, 10, 11, 14, 15 mars 2011 et du 21 mars au 27 juin 2011 à l'exception de quelques jours sur cette dernière période, puis du 30 août 2011 au 8 septembre 2011, les 21 septembre, 17 octobre et 19 décembre 2011. Il produit également des relevés de contrôle pour les journées des 10 janvier 2012, 14 février 2012 et du 20 au 24 février 2012 .

Il résulte de ces documents que M. X... a exercé une activité de contrôle à temps complet du 17 janvier au 15 février 2011, à plus de 70% de son temps de travail du 21 mars au 27 juin 2011 et ensuite de façon ponctuelle.

La convention collective définit les fonctions de distributeur comme celles du 'salarié dont la distribution constitue l'essentiel de l'activité. Il a une connaissance professionnelle étendue à la zone habituelle d'activité de son centre de rattachement et effectue régulièrement des tâches connexes à la distribution au sein de la filière logistique (chauffeur, livreur, préparateur-manutentionnaire recenseur-étalonneur). Il participe ponctuellement à des opérations de contrôle.'

L'avenant du 1er janvier 2011 stipulait par ailleurs que 'en sa qualité de distributeur grand porteur Tuteur de niveau 1.2, M. X... Abdallah assurera des activités de tutorat et sous le contrôle de sa hiérarchie des missions de contrôle de la qualité de distribution sur tous les secteurs qui lui seront confiés.'

Son activité de contrôle, qui représentait plus de 50% de son temps de travail, s'agissant des périodes antérieures des 17 janvier au 15 février 2011 et du 21 mars au 27 juin 2011, s'inscrivait dans ce cadre ainsi que les activités ponctuelles de contrôle réalisées par M. X... à compter d'août 2011.

Au surplus, au regard du caractère temporaire de son activité de contrôleur dont la durée maximale a été de trois mois, celle-ci s'inscrivait bien dans le cadre de l'avenant sus énoncé et non dans le cadre de fonctions de contrôleur au sens de la convention collective lesquelles se définissent comme celles du 'salarié assurant, sous le contrôle de sa hiérarchie, les fonctions de contrôle de la qualité de distribution sur tous les secteurs de distribution qui lui ont été confiés.'

M. X... ne peut donc prétendre être affecté à un poste de contrôleur alors qu'il n'a pas exercé ces fonctions telles que définies par la convention collective mais celles de Distributeur Grand Porteur Tuteur.

Le jugement entrepris est donc confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande d'affectation au poste de contrôleur.

Sur la demande de rappel de salaire de contrôleur :

La demande d'affectation aux fonctions de contrôleur étant rejetée, la demande de rappel de salaire y afférente devient sans objet.

Sur la demande de rappel de salaire au titre des temps de trajet :

M. X... sollicite un rappel de salaire au titre de ses temps de trajet sur la période de juin 2013 à juin 2015 à raison de 80 minutes par jour.

La société MEDIAPOST s'y oppose considérant que les sommes dues ont été payées.

Au soutien de sa demande, M. X... produit les courriers de réclamation adressés à son employeur les 10 juin 2015 et 4 mai 2016 dans lesquels il expose que son temps de trajet entre l'établissement de la société et son lieu d'intervention est de 90 minutes par jour. Mais il ne verse aux débats aucune pièce de nature à le caractériser alors que le calcul du temps de trajet réalisé à compter de juin 2015 par le système DISTRIO mentionne une durée comprise entre 12 minutes au minimum et 31 minutes au maximum soit beaucoup moins que les 90 minutes revendiquées et non caractérisées.

En outre, X... ne conteste pas avoir été payé à concurrence de 2,33 euros pour les temps de trajet de 14 minutes et 1,83 euros pour les temps de trajet de 11 minutes.

Faute d'établir que les temps de trajet effectués sur la période considérée excédaient le temps de trajet payé, la demande de rappel de salaires est rejetée.

Sur la demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé :

Cette demande étant liée à celle de rappel de paiement de temps de trajet, le rejet du rappel de salaire rend la demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé sans objet.

Sur la demande de dommages-intérêts pour 'toute cause' :

M. X... n'explicite pas la ou les cause(s) de préjudice dont il sollicite réparation à hauteur de 5800 euros.

Or, il incombe à celui qui sollicite des dommages-intérêts de démontrer l'existence dudit préjudice et la cause de celui-ci.

Faute d'y procéder, M. X... est débouté de sa demande.

Sur la demande de dommages-intérêts pour ' discrimination ordinaire' et violation du principe d'égalité de traitement:

M. X... soutient avoir subi une discrimination qu'il qualifie d'ordinaire, au motif d'une part, du non respect par la société MEDIAPOST des restrictions médicales émises par le médecin du travail, d'autre part, de l'attribution du poste de chef de groupe avant l'information du personnel quant à la vacance de ce poste, enfin de l'absence de promotion. Il invoque également avoir subi une inégalité de traitement.

La société MEDIAPOST conteste toute discrimination et soutient que M. X... a été promu distributeur grand porteur le 1er janvier 2011, que d'autres salariés ayant une ancienneté comparable à la sienne occupent le même poste et que contrairement à ce qu'il soutient il n'a nullement formé de chef d'équipe ou de pilote d'équipe mais des distributeurs.

S'agissant des restrictions médicales émises par le médecin du travail, celles-ci consistaient en une restriction de cadence de 30% et /ou avec une activité de contrôle, et ont été émises à compter de 12 février 2009 et confirmées le 30 octobre 2012.

Le relevé d'activité de M. X... à compter de sa reprise du travail le 8 octobre 2012 révèle qu'il a eu une activité principale de distribution, notamment en binôme avec M. A..., et une activité accessoire de tutorat.

Les éléments ainsi produits ne font pas présumer de discrimination à raison de l'état de santé, les prescriptions du médecin du travail ayant au surplus été respectées.

Concernant l'absence de promotion invoquée par M. X..., il établit avoir postulé à un poste de chef de groupe le 9 avril 2014 et avoir réitéré sa candidature le 6 juin 2014. Le fait de ne pas avoir été retenu et ce alors que la personne promue à savoir Mme B... ne s'était pas portée candidate, comme elle en atteste, ne suffit pas à faire présumer une différence de traitement en l'absence de démonstration d'un niveau de compétence et de qualification équivalent pour le poste en cause.

En outre, le fait que le poste ait été attribué avant que le personnel du site ait été informé de sa vacance relève du pouvoir de direction de l'employeur qui est libre de pourvoir un poste d'encadrement par le recours à un recrutement interne ou externe et peut proposer le poste à un salarié identifié par lui comme ayant les qualités requises par le poste sans procéder à un appel à candidature.

Enfin, l'attribution d'un autre poste de chef de groupe à M. C..., initialement engagé en qualité de distributeur le 20 juillet 2010, sur la plate-forme de la Courneuve caractérise certes pour ce salarié une évolution de carrière plus favorable que celle de M. X... et celle des 48 autres distributeurs ayant une ancienneté équivalente ou supérieure à celle de M. X..., et qui sont demeurés distributeurs. Toutefois, la promotion d'un salarié dont les compétences ne sont pas contestées ne saurait faire présumer une discrimination ni un traitement inégal en l'absence d'éléments en ce sens.

La demande de dommages-intérêts de ce chef ne peut donc prospérer.

Sur les dépens :

M. X..., succombant en son appel, est condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

Rejette la demande de rappel de salaire au titre des temps de trajet,

Rejette la demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé,

Condamne M. X... Abdallah aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE CONSEILLER

P/ LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 16/11507
Date de la décision : 22/01/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°16/11507 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-22;16.11507 ?
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