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14/12/2018 | FRANCE | N°16/05430

France | France, Cour d'appel de Paris, 14 décembre 2018, 16/05430


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS






COUR D'APPEL DE PARIS


Pôle 4 - Chambre 1


ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 2018


(no , pages)


Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 16/05430 - X... Portalis 35L7-V-B7A-BYIGC


Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Décembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 13/13463




APPELANTE


SDC de l'immeuble situé [...] représenté par son syndic en exercice le cab

inet CRAUNOT S.A.
[...]


Représentée et Assistée par Me Stéphanie O... , avocat au barreau de PARIS, toque : B0188






INTIMEES


SA GECINA
Siège social au [.....

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 2018

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 16/05430 - X... Portalis 35L7-V-B7A-BYIGC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Décembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 13/13463

APPELANTE

SDC de l'immeuble situé [...] représenté par son syndic en exercice le cabinet CRAUNOT S.A.
[...]

Représentée et Assistée par Me Stéphanie O... , avocat au barreau de PARIS, toque : B0188

INTIMEES

SA GECINA
Siège social au [...]
SIRET No: 592 014 476 00150

Représentée par Me Lucas Y... de la SELARL Y... N..., avocat au barreau de PARIS, toque : K0139
Substitué à l'audience par Me Guillaume Z..., avocat au barreau de PARIS, même cabinet et même toque

SAS GRAMONT
Siège social au [...]
SIRET No: 443 133 111 00056

Représentée et Assistée par Me Thierry A... de la SCP A... M... YGOUF ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0479

Mutuelle P... B... L... FRANCAIS, agissant en la personne de son Directeur Général domicilié [...]
[...]
No SIRET : 477 672 646 00015

Représentée par Me Anne-marie K... C..., avocat au barreau de PARIS, toque : B0653

SAS STUDIOS ARCHITECTURE
Siège social au [...]
SIRET No: 389 777 830 00032

Représentée et Assistée par Me Marie-laure Q... de la SELARL SELARL EDOU DE BUHREN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0021

SAS WSP France représentée par son Président domicilié
Immeuble [...]
SIRET No: 349 428 755 00095

Représentée par Me Charles-hubert E... de la SCP LAGOURGUE & E..., avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Novembre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :
Claude CRETON, Président
Christine BARBEROT, Conseillère
Dominique GILLES, Conseiller
qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Nadia TRIKI

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M.Claude CRETON, Président et par Mme Nadia TRIKI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS & PROCÉDURE

Par acte authentique du 31 juillet 2003, la SA Simco, aux droits de laquelle vient la SA Gecina, a vendu à la SAS Gramont un ensemble immobilier à usage d'habitation composé de deux bâtiments sur rue et d'un troisième sur cour, sis [...] , après avoir fait réaliser des travaux de transformation des chambres de service du 6e étage en appartements. Par acte authentique du 23 mars 2004, l'acquéreur a fait établir un état descriptif de division et un règlement de copropriété, puis a vendu le bien par lots. Après une visite du 31 août 2011 du bureau de prévention de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, par lettre du 20 septembre 2011, la préfecture de police a demandé au syndic de : - réaliser des ventilations hautes des escaliers des bâtiments 3 et 5, - réaliser un élément verrier pare-flammes sur les baies des logements donnant sur les courettes de ces bâtiments, - désencombrer les cages d'escalier de ces bâtiments, - réaliser correctement les gaines gaz de ces bâtiments. La préfecture de police a réitéré ces demandes les 20 juillet 2012 et 18 avril 2013, ayant été mis en exergue l'insuffisance des systèmes de désenfumage de deux des escaliers de service. Par acte d'huissier de justice du 16 septembre 2013, le syndicat des copropriétaires a assigné la société Gecina, la société Gramont et la société Mutuelle des architectes de France (MAF), en qualité d'assureur de la société AEM architectes, maître d'oeuvre des travaux de redistribution des combles précités, en indemnisation des préjudices nés du non-respect des normes de sécurité-incendie, sur le fondement des vices cachés. Par acte extra judiciaire du 20 mars 2014, la société Gramont a appelé en garantie la SARL Studios architecture qui avait fait pour elle, avant l'acquisition, des rapports sur l'existant, laquelle a, elle-même, appelé en garantie la société WSP Flack + Kurtz, bureau de contrôle, aux droits de laquelle la SAS WSP France est intervenue volontairement.

C'est dans ces conditions que, par jugement du 14 décembre 2015, le Tribunal de grande instance de Paris a :
- rejeté la demande d'indemnisation du syndicat des copropriétaires à l'encontre des sociétés Gecina et Gramont, sur le fondement des vices cachés,
- dit irrecevable la demande d'indemnisation au titre d'un préjudice propre du syndicat des copropriétaires, formée contre ces mêmes sociétés, sur le fondement d'un défaut de conformité,
- rejeté la demande d'indemnisation du syndicat des copropriétaire, formée à l'encontre des mêmes sociétés, au titre des préjudices de l'ensemble des copropriétaires,
- rejeté la demande d'indemnisation du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la MAF, assureur de la société AEM architectures, au titre de la responsabilité de droit commun,
- rejeté la demande d'indemnisation à hauteur de 40 000 € du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la MAF, ainsi que des sociétés Gecina et Gramont, au titre de leur responsabilité délictuelle,
- dit sans objet la demande de mesure d'expertise formée par le syndicat des copropriétaires,
- dit sans objet les divers appels en garantie,
- ordonné l'exécution provisoire,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné le syndicat des copropriétaires aux dépens.

Par dernières conclusions du 30 octobre 2018, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [...] , représenté par son syndic, appelant, demande à la Cour de :
- vu les articles 55 du décret du 17 mars 1967, 1641 et suivants, 1604 et suivants, 1217, 1240 du Code civil, 809 et 146 du Code de procédure civile,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré ses demandes recevables et non prescrites,
- l'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau :
- à titre principal, nommer un expert ayant pour mission de : - dire si les cages des escaliers de service ont été aménagées dans le respect des prescriptions résultant de la notice technique établie par AEM architecture et des préconisations de la mairie de Paris, annexées au permis de construire initial du 27 avril 2001 et au permis de construire modificatif du 4 février 2002, - dire si les sociétés AEM architecture et Studio architectures ont commis des fautes professionnelles dans l'accomplissement de la mission qui leur a été confiée concernant les travaux de réhabilitation des cages d'escalier litigieuses, - chiffrer la remise aux normes incendie des cages d'escaliers de service, - en cas d'urgence reconnue par l'expert, autoriser l'appelant à faire exécuter à ses frais avancés et pour le compte de qui il appartiendra les travaux estimés indispensables par l'expert, - établir les responsabilités de chacun,
- surseoir à statuer dans l'attente du rapport de l'expert sur toutes ses demandes financières,
- débouter les intimés de leurs demandes,
- réserver les dépens,
- à titre subsidiaire :
- constater l'existence d'un vice caché portant sur les lots de copropriété vendus à compter de 2004,
- à tout le moins, constater l'absence de conformité de la chose vendue au regard des stipulations contractuelles liant les vendeurs aux acheteurs successifs,
- retenir la responsabilité solidaire ou in solidum des sociétés Gecina, Gramont et MAF, ès qualités d'assureur de la société AEM,
- commettre un expert afin de déterminer son préjudice,
- surseoir à statuer dans l'attente du rapport de l'expert sur les condamnations pécuniaires,
- condamner in solidum les sociétés Gecina, Gramont et MAF, ès qualités, à lui payer les sommes de : .40 000 € au titre de son préjudice moral, . 11 995,80 € en remboursement des factures de M. F... et de M. G..., . 15 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouter les intimés de leurs demandes,
- réserver les dépens,
- à titre infiniment subsidiaire :
- condamner in solidum les sociétés Gecina, Gramont et MAF, ès qualités, à lui payer les sommes de : 280 000 € au titre des travaux de remise aux normes incendie des cages d'escalier litigieuses, majorée de la TVA au taux applicable au jour de l'arrêt et de 5% pour actualisation par rapport aux chiffres retenus par M. F... dans son rapport, 11 995,80 € en remboursement des factures de M. F... et de M. G..., 40 000 € au titre de son préjudice moral, 15 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouter les intimés de leurs demandes,
- les condamner aux dépens.

Par dernières conclusions du , la société Gecina prie la Cour de :
- vu les articles 1147, 1315, 1382 et 1641 du Code civil :
- confirmer le jugement entrepris en ce que le syndicat des copropriétaires ne rapportait pas la preuve des vices cachés ou non conformités allégués,
- débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes indemnitaires,
- subsidiairement : condamner la MAF à la garantir de toute condamnation pouvant être prononcée contre elle,
- condamner solidairement le syndicat des copropriétaires et la MAF à lui payer la somme de
2 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par dernières conclusions du 29 juillet 2016, la société Gramont demande à la Cour de :
- vu les articles 1315, 1604 et suivants, 1641, 1382 et suivants, 1147 et suivants du Code civil,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- y ajoutant :
- condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme 8 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus,
- subsidiairement, dire que l'action du syndicat des copropriétaires en défaut de délivrance conforme est prescrite,
- condamner la MAF et la société Studios architectures à la garantir de toute condamnation, outre une somme de 8 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par dernières conclusions du 25 juillet 2016, la MAF prie la Cour de :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit recevable les demandes formées par la copropriété,
- vu les articles L. 124-3 du Code des assurances, 1792-4-1 et suivants, 2241 du Code civil,
- constater que la MAF n'est plus exposée au recours de son assuré,
- dire prescrites les actions formées contre elle par le syndicat des copropriétaires, les sociétés Gecina et Gramont,
- prononcer sa mise hors de cause,
- pour le surplus, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit mal fondé les demandes de la copropriété,
- vu les articles 9 du Code de procédure civile et 1315 du Code civil,
- constater que ni le syndicat des copropriétaires ni aucune autre partie n'établit une faute ou un manquement imputable à l'architecte, ni encore un préjudice que le syndicat des copropriétaires subirait,
- débouter le syndicat des copropriétaires ou toute autre partie de toutes ses demandes contre elle,
- subsidiairement, dire qu'aucune condamnation ne saurait intervenir contre elle qui excéderait les limites contractuelle de la police, notamment s'agissant de la franchise opposable aux tiers,
- très subsidiairement, débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande d'expertise judiciaire,
- à tout le moins, dire qu'elle se déroulera hors sa présence,
- condamner le syndicat des copropriétaires ou toute autre partie à lui verser la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.

Par dernières conclusions du 24 octobre 2018, la société Studios architecture demande à la Cour de :
- vu les articles 1147 et suivants, 1382 et 1315 du Code civil, L. 110-4 du Code de commerce, 146 et 16 du Code de procédure civile,
- à titre principal :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires,
- dire irrecevable la demande d'expertise du syndicat des copropriétaires, rejeter cette demande,
- rejeter ou déclarer irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires,
- en conséquence, débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande d'expertise judiciaire,
- dire sans objet l'appel en garantie de la société Gramont formé contre elle,
- à titre subsidiaire,
- compléter la mission de l'expert judiciaire en lui demandant de dire si les travaux effectués en 2003 étaient conformes à la réglementation incendie applicable à cette date et si les locaux ont subi des modifications depuis les travaux réalisés en 2003,
- dire irrecevable, car prescrite, l'action de la société Gramont formée contre elle,
- dire la société WSP France mal fondée en ses demandes et l'en débouter,
- condamner solidairement ou l'une à défaut de l'autre, la société WSP France, la société Gramont et la société Gecina à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée contre elle,
- en tout état de cause, condamner la société Gramont solidairement avec tout succombant à lui verser la somme de 4 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.

Par dernières conclusions du 13 juillet 2016, la société WSP France prie la Cour de :
- vu les articles 66 à 69 et suivants, 325 et suivants, 9 du Code de procédure civile,
- juger non fondée la mise en cause de la société Flack + Kurtz, aux droits de laquelle elle se trouve,
- débouter la société Studios architecture et tous demandeurs de leurs demandes formée contre elle,
- condamner la société Studios architecture et tout succombant à lui payer la somme de 3 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.

SUR CE, LA COUR
Sur la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la société Gecina, premier vendeur, cette dernière, qui conclut à la confirmation du jugement entrepris, n'invoque pas l'irrecevabilité de la demande. Par suite, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action du syndicat des copropriétaires formée contre elle.

S'agissant de la prescription de l'action collective du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la société Gramont, second vendeur, en ce qu'elle est fondée sur le vice caché, cette action est recevable pour avoir été introduite le 19 septembre 2013, soit dans les deux années de la réception de la lettre du 20 septembre 2011 par laquelle la préfecture de police a demandé au syndic de :

- réaliser des ventilations hautes des escaliers des bâtiments 3 et 5,

- réaliser un élément verrier pare-flammes sur les baies des logements donnant sur les courettes de ces bâtiments,

- désencombrer les cages d'escalier de ces bâtiments,

- réaliser correctement les gaines gaz de ces bâtiments,

portant, ainsi, à la connaissance des copropriétaires une situation diminuant "les conditions de sécurité du bâtiment en apportant un facteur de risque de nature à faciliter la propagation verticale d'un incendie et à compromettre la sécurité des occupants", soit des faits de nature à constituer des vices cachés, à l'exception de ceux relatifs à l'encombrement des cages d'escalier, n'étant pas établi que chacun des sous-acquéreurs de lots fût un professionnel de la construction immobilière.

S'agissant de la prescription de l'action collective du syndicat des copropriétaires fondée sur la responsabilité contractuelle des vendeurs successifs pour non-conformité, cette action, engagée dans les cinq années de la réception de la lettre précitée du 20 septembre 2011, révélant aux copropriétaires les non-conformités qu'ils invoquent, est recevable par application de l'article 2224 du Code civil.

Par suite, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action collective du syndicat des copropriétaires formée contre les vendeurs successifs, les sociétés Gecina et Gramont.

Sur la recevabilité de la demande d'expertise formée par le syndicat des copropriétaires, contestée par la société Studios architecture, l'article 954 du Code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure à celle du décret no 2017-891 du 6 mai 2017 entré en vigueur le 1er septembre 2017, dont l'intimée revendique l'application en la cause, n'interdît pas à l'appelant de modifier ses prétentions et moyens invoqués dans ses conclusions antérieures, ce texte réputant, au contraire, abandonnées les prétentions et moyens antérieurs non repris dans les dernières conclusions.

Au cas d'espèce, le syndicat des copropriétaires, qui avait été débouté de sa demande d'expertise formée devant le Tribunal, a sollicité du conseiller de la mise en état la désignation d'un expert par conclusions d'incident du 4 août 2017. Cette demande a été rejetée par ordonnance du 11 janvier 2018. C'est dans ces conditions que, dans ses dernières écritures, le syndicat des copropriétaires, qui concluait à l'infirmation du jugement de ce chef, a demandé à la Cour l'organisation d'une expertise.

Cette demande est recevable.

S'agissant de la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires contre la MAF, assureur de l'architecte, fondée sur des défauts de conformité ou sur le non-respect des obligations contractuelles. Antérieurement à l'entrée en vigueur de l'article 1792-4-3 du Code civil dans sa rédaction de la loi no 2008-561 du 17 juin 2008, le droit positif enfermait une telle action dans un délai de 10 ans à compter de la réception. L'article précité enfermant les actions en responsabilité contre les constructeurs dans ce même délai, les dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008 ne sont pas applicables, celles de l'article 1792-4-3 précité l'étant directement.

Au cas d'espèce, il n'existe pas de réception formelle. Mais, l'achèvement des travaux a été constaté le 15 août 2002 et les diverses entreprises ont été payées. Par suite, la réception tacite doit être fixée à cette date. En conséquence, l'action engagée par le syndicat des copropriétaires contre l'assureur de l'architecte le 19 septembre 2013, plus de dix années à compter du 15 août 2002, est prescrite et comme telle irrecevable.

Il en est de même et pour les mêmes motifs des actions en garantie des sociétés Gramont et Gecina contre la MAF.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application au profit de la MAF de l'article 700 du Code de procédure civile.

La demande de garantie formée par la société Gramont contre son vendeur, la société Gecina, qui n'invoque aucune irrecevabilité, est recevable.

La société Gramont recherche la responsabilité contractuelle de la société Studios architecture à laquelle elle avait confié un audit technique, notamment sur la ventilation et la sécurité incendie. Cette société a fait appel à la société WSP Flack + Kurtz pour réaliser cette mission. Le rapport a été déposé les 8 et 24 avril 2003.

La prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance. Au cas d'espèce, la société Gramont n'a eu connaissance des non-respects invoqués aux normes de sécurité-incendie que par l'assignation du syndicat des copropriétaires du 16 septembre 2013. Ainsi, l'action en garantie de la société Gramont, par acte du 20 mars 2014, n'est pas prescrite, le délai de 5 ans prévu par l'article L. 110-4 du Code de commerce n'étant pas expiré à cette date, étant observé que les dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2018 ne trouvent pas à s'appliquer dès lors que le point de départ du délai de prescription est postérieur à la date d'entrée en vigueur de cette loi.

En conséquence, l'action de la société Gramont contre la société Studios architecture est recevable.

S'agissant de la mise en cause par la société Studios architecture de la société WSP Flack + Kurtz, la société WSP France, qui vient aux droits de cette dernière société, prétend que celle-ci n'est pas concernée par l'opération en cause qui est antérieure à sa constitution du 1er avril 2003, n'étant pas intervenue sur la copropriété du [...] . Mais, répondant à la demande d'audit de la société Westbrook partners LLC dont la société Gramont est une filiale, la société Studios architecture proposait de s'associer "à Flack & Kurtz, un BET Fluides américain basé à Paris" dont le responsable était Philippe H.... Or, par un courriel du 12 avril 2003, postérieur à l'immatriculation au registre du commerce de la société litigieuse, M. Philippe H... adressait à la société Studios architecture un rapport ayant pour objet : "WestBrook [...] ". De surcroît, le "profil complet" de M. Philippe H... versé aux débats, publié le 10 mars 2015 sur LinkedIn du 10 mars 2015, relate que l'intéressé dirige depuis avril 2003, soit depuis 12 ans, WSP Flack + Kurtz à Paris.

Ainsi, la société Studios architecture établit le lien existant entre l'opération litigieuse et la société WSP Flack + Kurtz, de sorte que la mise en cause de cette dernière société est fondée.

S'agissant de la demande d'expertise, si les normes incendies décrites dans le permis de construire initial du 27 avril 2001, la notice descriptive du maître d'oeuvre et le permis de construire modificatif du 4 février 2002 paraissent avoir été respectés au regard de la réception sans réserve par le maître de l'ouvrage, suivie d'un procès-verbal de récolement et d'un certificat de conformité, cependant, à la suite d'une visite du 31 août 2011 du bureau de prévention de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris révélant des facteurs de risque de propagation verticale d'un incendie mettant en danger la sécurité des occupants, par lettre du 20 septembre 2011, la préfecture de police a demandé au syndic de réaliser les travaux précités. L'Administration a réitéré ces demandes les 20 juillet 2012 et 18 avril 2013, ayant été mis en exergue l'insuffisance des systèmes de désenfumage de deux des escaliers de service.

Il s'en déduit que les allégations du syndicat des copropriétaires sont étayées par des éléments tangibles et précis, de sorte que la Cour, qui ne dispose pas d'éléments suffisants pour trancher le litige, ordonne une expertise dans les conditions indiquées dans le dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris ce qu'il a déclaré recevable l'action collective du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [...] , représenté par son syndic, formée contre la SA Gecina et la SAS Gramont, fondée sur les vices cachés ou la non-conformité ;

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit sans objet la demande de mesure d'expertise formée par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [...] , représenté par son syndic,

- dit sans objet les divers appels en garantie ;

Statuant à nouveau :

Déclare recevable l'action en garantie formée par la SAS Gramont contre la SA Gecina ;

Déclare recevable l'action en responsabilité exercée par la SAS Gramont contre la SARL Studios architecture ;

Déclare fondée la mise dans la cause par la SARL Studios architecture de la SAS WSP France, venant aux droits de la SARL WSP Flack + Kurtz ;

Déclare irrecevables les actions du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [...] , représenté par son syndic, de la SA Gecina et de la SAS Gramont à l'encontre de la société d'assurance mutuelle MAF - Mutuelle des architectes français ;

Rejette les autres demandes de la société d'assurance mutuelle MAF - Mutuelle des architectes français ;

Laisse au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [...] , représenté par son syndic, la charge des dépens de l'appel principal formé contre la société d'assurance mutuelle MAF, la SA Gecina et la SAS Gramont celle de leur appel en garantie contre cette même société, ces dépens pouvant être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Avant dire droit, ordonne une expertise et commet pour y procéder :

M. Vincent I..., , [...] . Tél. [...] . [...]

avec pour mission de :

- se rendre sur les lieux en présence des parties ou celles-ci dûment avisées, les entendre, ainsi que tout sachant, se faire remettre tous documents utiles à sa mission,

- examiner les cages des escaliers de service des bâtiments sur rue de l'ensemble immobilier sis [...] ,

- dire si les travaux réalisés en 2003 étaient conformes à la réglementation incendie applicable à cette date,

- dire si les locaux ont subi des modifications depuis cette date,

- dire si les cages des escaliers de service ont été aménagées dans le respect des prescriptions résultant de la notice technique établie par le maître d'oeuvre, la société AEM architecte, et des préconisations de la mairie de Paris annexées au permis de construire initial du 27 avril 2001 et au permis de construire modificatif du 4 février 2002,

- dire si des fautes ont été commises dans la réhabilitation des cages d'escalier litigieuses,

- donner tous éléments à la Cour pour lui permettre de déterminer les responsabilités,

- évaluer le montant de la mise aux normes-incendie des cages des escaliers de service telle que préconisée par la société AEM architecte et par la préfecture de police de Paris dans les documents annexés au permis de construire modificatif du 4 février 2002, ainsi que le montant de la remise aux normes de ces mêmes cages d'escalier telle que préconisée par la Mairie de Paris dans ces lettres des 20 septembre 2011, 18 avril 2013, 20 février et 20 juin 2015 ;

Dit qu'en cas de difficultés il en sera référé au conseiller de la mise en état chargé du contrôle de l'expertise ;

Dit que le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [...] , représenté par son syndic, devra consigner au greffe de la Cour, dans un délai de deux mois à compter de ce jour, la somme de 3 000 € à valoir sur les honoraires de l'expert ;

Dit que cette somme devra être versée au régisseur d'avances et de recettes de la Cour d'appel de Paris, [...] Paris Louvre SP ;

Dit qu'à défaut de versement de la provision dans le délai imparti, la désignation de l'expert sera caduque ;

Dit que l'expert devra indiquer au conseiller de la mise en état chargé de l'expertise et aux parties le montant prévisible de ses honoraires dans les deux mois de sa saisine ;

Dit que l'expert devra déposer son rapport dans un délai de six mois à compter du jour où il aura été avisé par le greffe de la consignation de la somme à valoir sur ses honoraires,

Sursoit à statuer sur le surplus des demandes jusqu'au dépôt du rapport d'expertise;

Réserve le surplus des dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 16/05430
Date de la décision : 14/12/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-14;16.05430 ?
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