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13/12/2018 | FRANCE | N°16/05550

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 3, 13 décembre 2018, 16/05550


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 3



ARRÊT DU 13 DÉCEMBRE 2018



(n° 345, 1 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/05550 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BYIQP



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Janvier 2016 -Tribunal de Grande Instance de Bobigny - RG n° 14/10079





APPELANTE



Madame [S] [X] épouse [T]

née le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 2]



Représentée et assistée de Me Fayçal MEGHERBI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1815







INTIME



Monsieur [B] [...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 3

ARRÊT DU 13 DÉCEMBRE 2018

(n° 345, 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/05550 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BYIQP

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Janvier 2016 -Tribunal de Grande Instance de Bobigny - RG n° 14/10079

APPELANTE

Madame [S] [X] épouse [T]

née le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentée et assistée de Me Fayçal MEGHERBI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1815

INTIME

Monsieur [B] [Z] [T]

né le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 2]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté et assisté de Me Bienvenu KANGA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1599

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Septembre 2018, en chambre du conseil, devant la Cour composée de :

M. Christian RUDLOFF, Président de chambre

Mme Marie-Caroline CELEYRON-BOUILLOT, Conseillère

Mme Murielle VOLTE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Véronique LAYEMAR

L'affaire a été mise en délibéré au 18 Octobre, prorogée au 13 Décembre 2018.

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme VOLTE, Conseillère, pour le Président empêché et par Madame Véronique LAYEMAR, greffier.

Le mariage de Mme [S] [X] et de M. [B] [T], tous deux de nationalité française, a été célébré le [Date mariage 1] 1989 à [Localité 3] (Massachusetts, États-Unis d'Amérique) et transcrit sur les registres de l'état civil français par l'officier de l'État civil du service central d'État civil du ministère des affaires étrangères à Nantes, le 23 juillet 2002 . Les époux n'ont pas fait précéder leur union d'un contrat de mariage.

Un enfant est issu de cette union, [F], née le [Date naissance 3] 1990 à [Localité 3] (Massachusetts, États-Unis d'Amérique).

M. [T] a déposé une requête en divorce le 30 juillet 2014 et Mme [X] a également déposé une requête en divorce le 29 août 2014 .

Par ordonnance de non-conciliation du 17 mars 2015, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bobigny a ordonné la jonction des procédures et a, essentiellement :

- autorisé les époux à introduire l'instance en divorce ;

- constaté que les époux résident séparément ;

- attribué à Mme [X] la jouissance du domicile conjugal ainsi que du mobilier sis [Adresse 2] ;

- dit que cette jouissance s'exercera à titre gratuit au plus tard jusqu'au divorce entre les époux ;

- dit que l'époux réglera l'impôt sur le revenu, l'assurance, la taxe d'habitation ainsi que foncière relatives à la maison ;

- condamné M. [T] à verser à Mme [X] la somme mensuelle de 500 €, avec indexation, en exécution du devoir de secours ;

- fixé la contribution du père, pour l'entretien et l'éducation de [F] à la somme mensuelle de 300 € avec indexation et, en tant que de besoin, l'a condamné au paiement de ladite pension ;

- dit que cette pension sera versée entre les mains de la mère, Mme [S] [X] ;

- et dit que M. [B] [T] réglera l'intégralité des frais de scolarité de l'enfant.

Par acte d'huissier du 16 juin 2015, M. [T] a assigné son épouse en divorce sur le fondement des articles 242 et suivants du Code Civil.

Par jugement réputé contradictoire du 12 janvier 2016, auquel la cour se réfère pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bobigny a notamment :

- prononcé le divorce des époux aux torts exclusifs de Mme [X] ;

- ordonné les mesures de publicité légale ;

- ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux ;

- condamné M. [T] à payer à Mme [X] une prestation compensatoire sous forme d'un capital de 30.000 € ;

- condamné M. [T] à payer la somme de 300 € par mois au titre de sa contribution à l'entretien et l'éducation de [F], avec indexation, et directement entre les mains de l'enfant majeure, douze mois sur douze ;

- dit que l'enfant majeure devra justifier de sa situation le 1er octobre de chaque année, et sur toute réquisition du débiteur, et qu'à défaut la contribution sera suspendue de plein droit ;

- rejeté la demande de M. [T] au titre des frais irrépétibles ;

- et condamné Mme [S] [X] aux entiers dépens.

Mme [X] a interjeté appel total de ce jugement par déclaration en date du 2 mars 2016.

M. [T] a constitué avocat.

Vu les dernières conclusions de Mme [X], remises par voie électronique le 3 septembre 2018, aux termes desquelles celle-ci prie la cour de :

- infirmer le jugement entrepris ;

- prononcer le divorce aux torts exclusifs de M. [T] ;

- constater les violations aux obligations et devoirs d'époux ;

- constater la violation du devoir d'assistance de M. [T] à son égard ;

- constater la violation du devoir de cohabitation de M. [T] à son égard ;

- constater la violation du devoir de respect de M. [T] à son égard ;

- condamner M. [T] au titre des dommages et intérêts à la somme de 10.000 €, eu égard au préjudice moral qu'elle a subi et sur le fondement de l'article 266 du Code civil ;

- constater la violation des termes de l'ordonnance du 17 mars 2015 concernant le non-paiement du droit de secours ;

- condamner M. [T] à payer la somme de 9 000 € au titre de non-paiement de cette pension alimentaire ;

- constater la clôture du compte commun de la BRED ;

- condamner M. [T] à lui payer la somme de 2 107,33 € qui était sur le compte de la BRED et qui lui appartenait ;

- constater que la pension à l'entretien et à l'éducation de [F] n'a pas été honorée par «'Mme [X]'»;

- condamner M. [T] à verser la somme de 5 400 € au titre du non-paiement de la pension alimentaire de [F] ;

- dire qu'à l'issue du divorce, elle reprendra l'usage de son nom de jeune fille ;

- dire qu'elle est propriétaire par moitié de la maison d'habitation sise [Adresse 1] ;

- dire que l'attribution de la jouissance exclusive de la maison d'habitation lui soit accordée ;

- dire que M. [T] a abandonné le domicile conjugal en novembre 2013 ;

- condamner M. [T] à lui verser la somme de 312 000 € au titre de la prestation compensatoire ;

- condamner M. [T] au paiement des sommes qu'elle a avancées pour ses soins depuis le prononcé de l'ordonnance du 17 mars 2015 ;

- constater le non-paiement des dettes de Mme [X] au profit de VEOLIA et de EDF ;

- condamner M. [T] au paiement des factures de l'EDF du 9 mars 2015 = 898.53 € ainsi que celle de Véolia du 9 février 2015 = 78.23 € ;

- condamner M. [T] au paiement de la somme de 2 400 € TTC au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions de M. [T], remises par voie électronique le 26 juillet 2016, aux termes desquelles celui-ci demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris prononçant le divorce aux torts exclusifs de Mme [X] ;

- ordonner la mention de cette décision en marge de l'acte de mariage des époux célébré le [Date mariage 1] 1989 à [Localité 3] (USA) ainsi qu'en marge de leurs actes de naissance respectifs ;

- ordonner la liquidation du régime matrimonial des époux ;

- dire n'y avoir lieu à fixation d'un droit de visite et d'hébergement pour [F] en raison de sa majorité ;

- confirmer le montant de la contribution fixée à 300 € par mois pour l'entretien et l'éducation de [F] et dire que celle-ci est bien fondée à percevoir directement cette somme compte tenu de sa résidence séparée avec sa mère ;

- constater qu'il prend acte de ce que Mme [X] reprenne l'usage de son nom de jeune fille à la suite du prononcé du divorce ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé à 30.000 € le montant de la prestation compensatoire qu'il devra verser à Mme [X] sous forme de capital ;

- condamner Mme [X] au versement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 4 septembre 2018.

CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR :

Sur l'objet de l'appel :

Considérant que bien que l'appel soit général, les parties ne critiquent le jugement entrepris qu'en ses dispositions relatives au prononcé du divorce et à la prestation compensatoire ;

Que les autres dispositions de cette décision, non contestées, sont confirmées ';

Sur les demandes de constat et de donner acte :

Considérant qu'un constat ou un donner acte ne peut pas constituer un élément de décision susceptible d'acquérir l'autorité de la chose jugée ';

Qu'il convient de débouter les parties de leurs demandes formées de ces chefs ';

Sur le prononcé du divorce :

Considérant qu'en application de l'article 242 code civil, il appartient à chaque époux qui demande le divorce de prouver les faits imputables à l'autre et qui constituent une violation grave ou renouvelée des obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ;

Que conformément à l'article 212 du même code, les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours et assistance ;

Qu'au titre de l'article 215 du même code, les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie ';

Considérant qu'en application de l'article 245 du même code, les fautes de l'époux qui a pris l'initiative du divorce n'empêchent pas d'examiner sa demande ; qu'elles peuvent, cependant, enlever aux faits qu'il reproche à son conjoint le caractère de gravité qui en aurait fait une cause de divorce ; que ces fautes peuvent aussi être invoquées par l'autre époux dans le cadre d'une demande reconventionnelle en divorce ; que si les deux demandes sont accueillies, le divorce est prononcé aux torts partagés ;

Considérant que M. [T] reproche principalement à son épouse d'avoir fait montre à son égard au fil du temps d'une attitude particulièrement agressive, violente et irrespectueuse, allant même jusqu'à l'humilier en public et notamment devant leur fille et à le harceler sur son lieu de travail en téléphonant de façon intempestive, ainsi que de l'avoir agressé physiquement, le 2 août 2014, alors qu'il voulait rendre visite à sa fille au domicile conjugal qu'il avait été contraint de quitter pour échapper aux violences de son épouse, en lui arrachant ses lunettes, en le griffant fortement au visage, au bras et au niveau de l'estomac ;

Considérant que si la plainte pour harcèlement déposée par M. [T] contre Mme [X] le 26 septembre 2014, faisant suite à un courriel du 16 septembre 2014 de l'assistante de direction de son entreprise lui demandant de faire le nécessaire pour que sa femme « cesse immédiatement ses nombreux appels téléphoniques » (14 appels entre le 2 et le 16 septembre) qui importunaient l'équipe, ne revêt pas en elle-même une gravité suffisante permettant de caractériser une violation des obligations du mariage au sens de l'article 242 précité alors que les époux étaient séparés de fait depuis plusieurs mois, en revanche, elle peut être prise en considération en complément des déclarations faites par M. [T] devant les services de police, le 3 août 2014, dans le cadre de la plainte qu'il avait déposée pour dénoncer l'agression dont il avait été victime la veille de la part de son épouse alors qu'il s'était rendu au domicile conjugal, corroborées par un certificat médical initial d'un médecin du service d'accueil des urgences de [Établissement 1] qui l'a examiné le même jour et a constaté des égratignures au niveau de l'arcade sourcilière droite, de l'avant-bras droit et de l'abdomen, ainsi que par le certificat établi le 4 août 2014 par le service de l'UMJ de [Établissement 1] retenant une ITT de 2 jours ;

Considérant que l'absence de poursuites pénales à la suite de ces faits, ainsi qu'il est fréquent lorsque une procédure de divorce est en cours, n'a pas pour effet de faire disparaître la réalité des violences infligées par Mme [X] à son mari, au demeurant non sérieusement contestées par cette dernière qui se borne à qualifier la plainte de M. [T] de « farfelue » sans pour autant apporter le moindre élément susceptible de les remettre en cause ;

Que ces faits imputables à Mme [X], constituent une violation grave des devoirs et obligations du mariage, en ce qu'ils sont la manifestation extrême d'un manquement au devoir de respect que se doivent mutuellement les époux, rendant intolérable le maintien de la vie commune ;

Considérant qu'à l'appui de sa demande reconventionnelle, Mme [X] fait grief à son conjoint d'avoir manqué à son devoir d'assistance lorsqu'elle a été hospitalisée pour un lymphome en 2002 puis pour une leucémie aiguë en novembre 2004, d'avoir mis fin à la communauté de lit dès le mois de novembre 2004 en s'installant dans le grenier du domicile au lieu de la soutenir, de l'avoir fait interner contre son gré en hôpital psychiatrique en novembre 2013, d'avoir à cette même époque quitté le domicile conjugal pour aller s'installer dans un logement situé [Adresse 4], d'avoir manqué à son devoir de respect en remettant en cause à plusieurs reprises son autorité parentale et ce, en présence de leur fille, d'avoir violé les termes de l'ordonnance de non-conciliation en n'honorant pas le paiement des sommes dues au titre du devoir de secours et de la pension pour l'entretien et l'éducation de [F], d'avoir entrepris des démarches pour clôturer le compte bancaire commun des époux sans lui en faire la demande préalable et d'avoir jugé bon d'utiliser le compte commun des époux pour s'acquitter de son obligation au titre du devoir de secours ;

Considérant que Mme [X] procède exclusivement par voie d'affirmations qui ne sont corroborées par aucun élément de preuve, s'agissant des reproches faits à l'époux d'avoir manqué à son devoir d'assistance lorsqu'elle était malade, d'avoir décidé à la même époque de faire chambre séparée, et d'avoir remis en cause son autorité parentale en présence de leur fille, et qui sont formellement contestés par M. [T] ; que, de plus, ce dernier démontre qu'il a été au contraire très présent au côté de son épouse pour lui apporter affection et soutien pendant la période de sa maladie, ainsi qu'il résulte des attestations circonstanciées de sa s'ur Mme [U] [T], médecin praticien à [Localité 4] qui s'est rendue à plusieurs reprises à [Localité 5] durant les hospitalisations de sa belle-s'ur en 2002 et en 2004, et de Mme [Q], infirmière à domicile qui s'est occupée de Mme [X] après son hospitalisation en 2004, puis de [F] en 2012, lesquelles sont unanimes pour décrire l'extrême affection et le soutien dont témoignait M. [T] à l'égard de son épouse, corroborées par le certificat médical du Docteur [S] du 16 novembre 2004 et l'avis d'arrêt de travail de M. [T] du 19 novembre 2004 prescrit pour une durée de 3 semaines, justifié par la nécessité de sa présence constante auprès de son épouse pendant sa période de chimiothérapie ;

Que s'agissant de l'internement psychiatrique dont l'épouse a fait l'objet le 25 novembre 2013, il résulte du compte rendu d'hospitalisation versé à ses propres pièces, qu'elle a été adressée par les urgences de [Localité 5] à l'EPS [Localité 6] le 25 novembre 2013 dans le cadre d'une admission à la demande d'un tiers après un passage de médecin de SOS médecins et, qu'à l'arrivée, elle avait une présentation théâtrale, évoquait un complot entre le médecin des urgences 93 et son mari et qu'elle aurait fait des menaces suicidaires dans le cadre d'un chantage affectif suite à l'annonce du divorce ; qu'en aucun cas, elle n'a pu être internée sans son consentement sans qu'il n'ait été médicalement constaté la présence de troubles mentaux et la nécessité de soins immédiats, ainsi que le requiert la procédure encadrant de manière très stricte les soins psychiatriques sans consentement du patient édictée par les dispositions du code de la santé publique en vigueur à l'époque et qui nécessitait, outre la demande d'admission manuscrite présentée par un tiers, la production de deux certificats médicaux datant de moins de 15 jours, concordants et circonstanciés ; qu'à sa sortie, le 6 décembre 2013, Mme [X] a été transférée à la [Établissement 2] avec un traitement médical antidépresseur conséquent ; que le compte rendu fait également état d'antécédents psychiatriques, à savoir une intoxication médicamenteuse volontaire et trois hospitalisations à la [Établissement 2] ;

Que s'agissant du non-paiement par l'époux de la pension au titre du devoir de secours et de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant majeure, Mme [X] est à nouveau défaillante dans l'administration de la preuve qui lui incombe, en faisant état à l'appui de ses prétentions de plusieurs chèques sans provision qu'elle ne produit pas aux débats et qui ne sont au demeurant pas mentionnés dans son bordereau de communication de pièces, ainsi que d'une plainte pour abandon de famille qu'elle a déposée contre son époux selon procès-verbal du 19 juillet 2016 aux termes duquel elle déclare elle-même que depuis l'ordonnance de non-conciliation M. [T] lui envoyait des chèques à la maison, émis depuis leur compte commun, qu'elle remettait à la banque pour retirer en espèces le montant correspondant, ce qui est en parfaite contradiction avec ses écritures selon lesquelles M. [T] ne lui a jamais versé la moindre somme ;

Qu'il apparaît que cette plainte fait suite à la dénonciation, par lettre recommandée du 5 avril 2016 de M. [T], du compte joint ouvert auprès de la BRED jusqu'alors alimenté par les seules ressources de ce dernier puisque Mme [X] n'a aucun revenu ; que dans sa lettre, M. [T] rappelle à Mme [X] qu'elle a effectué trois retraits en espèces d'un montant total de 1200 € entre le 8 mars et le 4 avril 2016, ce qui est partiellement confirmé par l'épouse dans ses déclarations faites aux services de police ; qu'en toute hypothèse, M. [T] n'a commis aucune faute dès lors que la dénonciation unilatérale d'un compte joint, toujours révocable, peut se faire à tout moment par un cotitulaire ; que Mme [X] ne produit pas les relevés du compte bancaire depuis l'ordonnance de non-conciliation, qui auraient permis de vérifier les non-paiement allégués ; que de son côté, M. [T] verse aux débats des photocopies des formules de chèques tirés sur le compte joint au profit de son épouse depuis l'ordonnance de non-conciliation, outre celles de deux chèques émis en juin et juillet 2016 au profit de Mme [X] tirés sur un compte personnel BNP Paribas ; qu'enfin, s'agissant de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant majeure, il verse aux débats un courrier de [F] du 5 avril 2015 adressé en recommandé à chacun de ses parents dans lequel elle informe son père qu'elle ne réside plus au domicile de sa mère et lui demande, pour l'avenir, de lui régler directement entre ses mains le montant de la pension alimentaire de 300 € par mois prévue par le juge aux affaires familiales ;

Qu'enfin, s'il est avéré que M. [T] a quitté le domicile commun en novembre ou décembre 2013 et pris en location un logement distinct selon bail à effet du 22 février 2014, cet abandon du domicile conjugal, dans les suites de l'hospitalisation de l'épouse dans un établissement psychiatrique car elle menaçait de se suicider à l'annonce par son conjoint de son intention de divorcer, ne saurait être considéré comme fautif, la poursuite de la cohabitation dans de telles conditions étant difficilement envisageable sans crainte de scènes de ménage, voire de la réitération d'une conduite à risque de Mme [X] de mise en danger de soi ; que par ailleurs, M. [T] ne s'est pas soustrait à son obligation de continuer à entretenir sa famille après son départ ;

Considérant qu'en l'absence de preuve de violation grave ou renouvelée de M. [T] aux obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de Mme [X] visant à voir prononcer le divorce aux torts de ce dernier ; qu'il y a lieu en conséquence de prononcer le divorce aux torts de l'épouse ; que la décision dont appel est confirmée de ce chef ;

Sur la prestation compensatoire :

Considérant qu'en application des dispositions des articles 270 et suivants du code civil, le divorce met fin au devoir de secours entre les époux mais'que l'un des conjoints peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage créé dans les conditions de vie respectives ;

Que cette prestation, qui a un caractère forfaitaire, est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ;

Que la fixation de la prestation compensatoire doit prendre en considération notamment la durée du mariage, l'âge et de l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, en ayant estimé, autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée par ces circonstances pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après liquidation du régime matrimonial, leurs droits existants et prévisibles, et leur situation respective en matière de pensions de retraite ;

Considérant que le mariage des époux [J] a duré 29 ans et la vie commune pendant le mariage 24 ans ; qu'il sont âgés tous les deux de 57 ans, pour être nés, le mari, le [Date naissance 2] 1961, et l'épouse, le [Date naissance 1] 1961 ; que de leur union est issue une enfant, [F], qui est âgée de 28 ans à ce jour ; que les problèmes de santé rencontrés par Mme [X] en 2002 et en 2004 ne sont plus d'actualité, du fait de la rémission complète de sa leucémie aiguë, médicalement constatée dès le mois de mai 2006, et n'ont eu aucune incidence directe sur sa situation professionnelle puisqu'elle n'a jamais travaillé ; qu'elle se voit prescrire un traitement médicamenteux dans le cadre de sa dépression reconnue comme affection de longue durée ; que M. [T] évoque un syndrome anxio-dépressif caractérisé, sur la foi d'un unique certificat médical daté du [Date naissance 2] 2014 ; qu'il ne justifie ni d'un traitement ni d'arrêt de travail pour maladie ;

Considérant que M. [T] qui exerce en qualité de consultant senior responsable formation, statut cadre, au sein de la société SERENA SOFTWARE avec une ancienneté remontant au mois d'août 1988, a déclaré, suivant son avis d'impôt sur le revenu 2016, un montant de 66'515 € au titre de l'année 2015, soit un revenu mensuel moyen de 5543 €, et non pas de 4238,58 €, comme il l'indique dans sa déclaration sur l'honneur établie le 19 juillet 2016, qu'il a inexactement calculé sur la base du revenu imposable ;

Qu'il justifie acquitter, en sus des dépenses de la vie courante, un loyer qui était de 1449,62 € par mois en juin 2016, un impôt sur le revenu qui était de 4460 € en 2015, soit 371 € par mois, et de 7921 € en 2016, soit 660 € par mois, et des taxes foncières et d'habitation pour un montant total de 2827 € en 2015, soit environ 236 € par mois ; qu'il évalue l'ensemble de ses charges mensuelles à un montant de 4368 € par mois comprenant les frais de pension et de loyer d'un montant de 1050'€ qu'il expose pour sa fille [F], lesquels n'ont toutefois pas vocation à perdurer, et la pension versée au titre du devoir de secours qui n'a pas lieu d'être prise en considération pour apprécier l'existence de la disparité puisque le divorce met fin au devoir de secours entre époux ;

Considérant que Mme [X] qui ne travaille pas, ne dispose d'aucun salaire, et justifie percevoir le RSA qui était de 481,62 € au mois de juillet 2018 ; qu'elle supporte uniquement les dépenses courantes d'entretien du domicile conjugal, hormis l'assurance et les taxes foncières et d'habitation qui sont réglées par l'époux en application de l'ordonnance de non-conciliation, et devra se reloger ;

Considérant que les époux qui se sont mariés aux États-Unis avant le 1er septembre 1992, date d'entrée en vigueur de la convention de La Haye du 14 mars 1978, sans contrat de mariage préalable, n'ont pas installé leur premier domicile commun en France, l'enfant issue du mariage étant née le [Date naissance 3] 1990 à [Localité 3] (États-Unis), ainsi qu'il résulte des mentions du livret de famille, et l'époux ayant été muté en France le 7 septembre 1992, ainsi qu'il résulte des mentions de ses bulletins de paie ; que les époux ont dès lors été soumis à la loi américaine ; que leur régime matrimonial a dès lors été soumis à la loi de l'Etat américain dans lequel il avaient installé leur première résidence

Considérant que selon l'article 7 de la convention de La Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux, si les époux n'ont pas désigné la loi applicable à leur régime matrimonial, ni fait de contrat de mariage, la loi interne de l'État où ils ont tous deux leur résidence habituelle devient la loi applicable aux lieu et place de celle à laquelle leur régime matrimonial était antérieurement soumis, si la nationalité de cet État est leur nationalité commune, ou dès qu'ils acquièrent cette nationalité ;

Considérant que les époux se sont retrouvés soumis au régime communautaire à compter du 28 juin 2002, date à laquelle M. [T] et Mme [X] ont tous deux acquis la nationalité française, le premier par décret de naturalisation et la seconde par décret de réintégration, ainsi qu'il résulte de la copie de leur acte de mariage ; qu'il doit être souligné que si les époux se sont retrouvés soumis au régime de la communauté légale à partir de juin 2002, l'article 8 de la Convention prévoit que le changement de la loi applicable en vertu de l'article 7, alinéa 2, n'a d'effet que pour l'avenir, et les biens appartenant aux époux antérieurement à ce changement ne sont pas soumis à la loi désormais applicable ;

Que, sous ces particularités qui devront être soumises au juge chargé de la liquidation du régime matrimonial, l'actif de la communauté, qui est essentiellement composé du bien immobilier situé [Adresse 5]), intégralement financé, estimé entre 560'000 et 580'000 € par une agence immobilière en décembre 2013, a vocation à être partagé par moitié entre les époux, de sorte qu'il n'y a pas lieu de tenir compte de la part de communauté devant revenir à chaque époux pour apprécier le droit à prestation compensatoire ; qu'ainsi, l'observation faite par M. [T] selon laquelle Mme [X] ne sera donc pas démunie est inopérante ;

Considérant qu'aux termes de sa déclaration sur l'honneur établie le 19 juillet 2016, M. [T] a indiqué ne posséder aucun patrimoine immobilier ou mobilier propre ou indivis ;

Qu'il justifie totaliser 96 trimestres cotisés à la date du 30 juin 2016 et pouvoir prétendre à une retraite de 2126 € nets par mois en partant à la retraite à l'âge de 62 ans avec 127 trimestres et de 3247 € nets par mois en partant à l'âge de 67 ans au taux plein ;

Considérant que Mme [X] n'a pas versé aux débats la déclaration sur l'honneur prévue à l'article 272 du Code civil ni justifié de ses droits prévisibles à pension de retraite ; que compte tenu de son âge et de l'absence de toute activité professionnelle au cours du mariage, ses perspectives de trouver un emploi sont inexistantes et il est prévisible qu'elle aura droit à l'allocation de solidarité aux personnes âgées quant elle atteindra 65 ans dont le montant est actuellement fixé à 803 € par mois pouvant atteindre 903 € par mois d'ici 2020 ;

Qu'elle n'établit par aucun élément qu'elle n'a jamais travaillé afin de favoriser la carrière de son époux et le suivre dans ses affectations professionnelles, observation étant faite que lorsque son mari a été muté en France en 1992, elle n'était âgée que de 31 ans et pouvait encore envisager d'effectuer une formation professionnelle ; que si elle affirme que M. [T] lui a demandé de rester au foyer et de s'occuper de l'éducation de leur unique enfant, ce dernier affirme pour sa part qu'elle n'a jamais voulu travailler, se contentant de vivre à ses crochets ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments que le divorce crée une disparité dans les conditions de vie respectives des parties au détriment de l'épouse ;

Que faute par Mme [X] d'avoir chiffré la valeur de l'usufruit dont elle sollicite l'attribution et de produire aucun élément donnant à la cour les moyens d'en fixer l'évaluation, elle ne peut qu'être déboutée de sa demande ;

Que M. [T] réitère son offre de versement d'une somme de 30'000 € en capital à titre de prestation compensatoire ;

Qu'il y a lieu de confirmer la décision du premier juge qui a justement retenu la proposition de l'époux comme étant satisfaisante et l'a condamné à payer à Mme [X] une prestation compensatoire sous forme d'un capital de 30'000 € ;

Sur les dommages et intérêts :

Considérant que selon l'article 266 du Code civil, des dommages et intérêts peuvent être accordés à un époux en réparation des conséquences d'une particulière gravité qu'il subit du fait de la dissolution du mariage, lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de son conjoint ou pour altération définitive du lien conjugal à la seule demande de l'autre époux ;

Que le divorce étant prononcé aux torts exclusifs de Mme [X], celle-ci ne peut qu'être déboutée de sa demande de dommages-intérêts sollicités sur le fondement de cet article ;

Sur les demandes en paiement des sommes dues par M. [T] au titre du devoir de secours et de la pension à l'entretien et à l'éducation de l'enfant majeur depuis le prononcé de l'ordonnance de non-conciliation, formées par Mme [X] :

Considérant que Mme [X] réclame le paiement de la somme de 9000 € au titre du devoir de secours et de celle de 5400 € au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant majeur, en alléguant qu'elles n'ont pas été honorées par M. [T] depuis le prononcé de l'ordonnance de non-conciliation ;

Considérant que l'ordonnance de non-conciliation constitue le titre exécutoire ouvrant droit au paiement des pensions alimentaires mises à la charge de M. [T] dont dispose Mme [X] ;

Que, dès lors, les demandes tendant à la condamnation de M. [T] au versement de sommes au titre au titre du non-paiement des pensions alimentaires fixées par l'ordonnance de non-conciliation, formées par Mme [X], sont sans objet ;

Sur la demande de restitution de la moitié des sommes contenues sur le compte joint de la BRED avant sa clôture, formée par Mme [X] :

Considérant que Mme [X] prétend que le compte joint de la BRED contenait jusqu'au mois de février 2015 la somme de 4214,67 € jusqu'au mois de février 2015 et réclame la restitution de la moitié de cette somme, soit la somme de 2107,33 € ;

Considérant qu'il appartiendra à Mme [X] qui se prétend créancière de son époux de faire valoir sa créance selon les règles applicables à la liquidation du régime matrimonial lors de l'établissement des comptes s'y rapportant ;

Que le juge du divorce dont les pouvoirs sont définis à l'article 267 du Code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, n'est pas compétent pour statuer sur les demandes présentées par Mme [X] ;

Sur la demande de remboursement des factures de fourniture d'eau et d'électricité antérieures à l'ordonnance de non-conciliation, formée par Mme [X] :

Considérant que Mme [X] demande la condamnation de M. [T] à lui rembourser la somme de 898,53 € représentant le montant de la facture EDF du 9 mars 2015 ainsi que la somme de 78,23 € représentant le montant de la facture Veolia du 9 février 2015 ;

Considérant que, hors le cas prévu par l'article 267, alinéa 4 du Code civil, le juge aux affaires familiales, et partant la cour, ne peut, lorsqu'il prononce le divorce, statuer sur une demande de contribution aux charges du mariage portant sur la période antérieure à l'ordonnance de non-conciliation ;

Qu'il y a lieu de débouter Mme [X] de sa demande ;

Sur la demande de condamnation de M. [T] au paiement des sommes avancées pour ses soins depuis le prononcé de l'ordonnance de non-conciliation, formée par Mme [X] :

Considérant que Mme [X] réclame le remboursement des frais de soins et de médicaments qu'elle affirme avoir réglés en espèces avec les sommes prêtées par sa s'ur et par sa mère en faisant valoir que depuis le 17 mars 2015, M. [T] a décidé, sans l'en informer, de mettre fin au régime d'affiliation de la mutuelle souscrite par le couple ;

Considérant qu'outre que la demande formée par Mme [X] n'est pas chiffrée, celle-ci n'est fondée ni en fait ni en droit ;

Qu'il convient de débouter Mme [X] de cette demande ;

Sur les frais et dépens :

Considérant que les considérations d'équité justifient qu'il ne soit pas prononcé de condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou de l'autre des parties ;

Considérant que Mme [X], aux torts de laquelle le divorce est prononcé, doit être condamnée aux dépens de l'appel, ceux de première instance étant laissés à sa charge comme dit au jugement ;

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement rendu le 12 janvier 2016 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bobigny en toutes ses dispositions,

Y ajoutant :

Dit que le juge du divorce n'est pas compétent pour statuer sur la demande de restitution d'une somme de 2107,33 € représentant la moitié des sommes figurant sur le compte joint des époux à la BRED avant sa clôture, formée par Mme [X],

Déclare sans objet les demandes en paiement au titre des pensions alimentaires fixées dans l'ordonnance de non-conciliation, formées par Mme [X],

Déboute chacune des parties de ses autres demandes,

Condamne Mme [X] aux dépens de l'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 16/05550
Date de la décision : 13/12/2018

Références :

Cour d'appel de Paris E3, arrêt n°16/05550 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-13;16.05550 ?
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