La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/12/2018 | FRANCE | N°17/18805

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 04 décembre 2018, 17/18805


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5



ARRET DU 04 DECEMBRE 2018



(n° 2018/ 229 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/18805 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4HG4



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Octobre 2017 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 13/18222



APPELANTE



MACSF ASSURANCES prise en la personne de son représenta

nt légal domicilié [...]

N° SIRET : 775 665 631 01359



Représentée et assistée de Me Xavier FRERING de la SELARL CAUSIDICOR, avocat au barreau de PARIS, toque : J133

...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRET DU 04 DECEMBRE 2018

(n° 2018/ 229 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/18805 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4HG4

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Octobre 2017 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 13/18222

APPELANTE

MACSF ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal domicilié [...]

N° SIRET : 775 665 631 01359

Représentée et assistée de Me Xavier FRERING de la SELARL CAUSIDICOR, avocat au barreau de PARIS, toque : J133

INTIMÉES

La société AXA CORPORATE SOLUTIONS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés [...]

N° SIRET : 399 227 354 00129

Représentée par Me Edmond X..., avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistée de Me Jennifer Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : D0012

La CPAM DE SAONE ET LOIRE, prise en la personne de son représentant légal domicilié [...]

N° SIRET : 778 600 114 00012

Représentée par Me Maher Z... de la SELARL BOSSU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R295

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Octobre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Gilles GUIGUESSON, Président, et Monsieur Christian BYK, Conseiller, chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Gilles GUIGUESSON, Président

Monsieur Christian BYK, Conseiller

Monsieur Julien SENEL, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Catherine BAJAZET

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Monsieur Gilles GUIGUESSON, Président de chambre et par Madame Catherine BAJAZET, Greffier présent lors de la mise à disposition.

'''''

Le 14 juillet 2010, l'avion de tourisme piloté par M. Jean-Pierre A... s'est écrasé au sol sur l'aérodrome de CARPENTRAS deux heures après avoir décollé de l'aérodrome de MACON. Le pilote est décédé et son épouse et leurs filles, passagères, ont été grièvement blessées.

La MACSF ASSURANCES, auprès de laquelle M. Jean-Pierre A... avait souscrit un contrat C... B... D..., a indemnisé les occupantes de leurs préjudices corporels et des préjudices par ricochet du fait du décès de M. A.... En outre, par jugement du Tribunal de grande instance de MACON du 2 juin 2014, la MACSF a été condamnée à payer à sept autres membres de la famille, des indemnités en réparation de leurs préjudices moraux.

Par acte du 5 décembre 2013, la MACSF a assigné la société AXA CORPORATE SOLUTIONS, assureur de responsabilité civile de l'aéroclub du Mâconnais propriétaire de l'aéronef, devant le Tribunal de grande instance de PARIS qui, par jugement du 2 octobre 2017, a déclaré prescrites tant l'action de la MACSF que celle de la CPAM de SAONE ET LOIRE.

Par déclaration du 12 octobre 2017, la MACSF ASSURANCES a interjeté appel et, aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 30 juin 2018, elle sollicite l'infirmation, demandant à la cour de condamner la société AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE à lui rembourser le montant des indemnités versées par elle, aux victimes directes de l'accident et aux ayants-droit, soit :

- sur le fondement du droit commun, la somme totale de 593.003 euros, hors préjudice corporel d'Oriane A...,

- subsidiairement, sur le fondement du code des assurances, la somme de 285.501,50 euros, hors préjudice corporel d'Oriane A.... Elle demande également la somme de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 13 février 2018, la société AXA CORPORATE SOLUTIONS sollicite la confirmation du jugement. Elle demande , à titre liminaire, de déclarer les actions de la MACSF et de la CPAM irrecevables et, à titre principal, de dire que les conditions d'application de la garantie ne sont pas remplies.

Dans tous les cas, elle demande la condamnation des appelantes à lui verser chacune la somme de 6.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 10 janvier 2018, la CPAM de SAONE et LOIRE sollicite l'infirmation du jugement, demandant à la cour de déclarer non prescrite et bien fondée son action et de condamner la société AXA CORPORATE SOLUTIONS à lui verser la somme de 43.999,47 euros, outre intérêts au taux légal. En tout état de cause, elle lui demande également de condamner la société AXA à lui verser une somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

La clôture a été ordonnée le 17 septembre 2018.

CE SUR QUOI, LA COUR

Sur le droit applicable et la prescription :

Considérant qu'AXA soutient que l'accident s'étant produit à l'occasion d'un transport aérien à titre gratuit, les dispositions de l'article L. 322-3 du Code de l'aviation civile, en vigueur à l'époque des faits, s'appliquent, à savoir que :

-'La responsabilité du transporteur de personnes est régie par les dispositions de la

Convention de Varsovie comme prévu aux articles L. 321-3, L. 321-4 et L. 321-5.

Toutefois, la limite de la responsabilité du transporteur relative à chaque passager, prévue par le paragraphe premier de l'article 22 de ladite convention, est fixée à 114.336,76 euros. Si, en raison d'une modification apportée à la Convention de Varsovie, la limite de responsabilité du transporteur aérien se trouve portée à un niveau supérieur au chiffre susvisé, cette nouvelle limite se substitue à celle de 114.336, 76 euros à compter de la mise en vigueur pour la France de la modification de ladite convention. En outre, sauf stipulations conventionnelles contraires, la responsabilité du transporteur effectuant un transport gratuit ne sera engagée, dans la limite prévue ci-dessus, que s'il est établi que le dommage a pour cause une faute imputable au transporteur ou à ses préposés.

La responsabilité du transporteur par air ne peut être recherchée que dans les conditions et limites prévues ci-dessus, quelles que soient les personnes qui la mettent en cause et quel que soit le titre auquel elles prétendent agir' ;

Considérant que l'assureur ajoute qu'en application de cet article, lequel opère un renvoi à certaines dispositions de la Convention de Varsovie amendée, la jurisprudence a établi les principes suivants :

-Toute action en responsabilité contre le transporteur ne peut être recherchée que dans les conditions et limites prévues par la loi aérienne, peu importe la qualité de la personne qui agit (passagers, ayants droit ou tiers subrogés),

-Toute action en responsabilité doit être engagée dans le délai de deux ans à compter de l'évènement,

-En matière de transport à titre gratuit, la responsabilité du transporteur aérien suppose, préalablement, la démonstration, par le demandeur, de la faute du pilote ;

Qu'en tout état de cause, il est précisé que la prescription et les conditions de la responsabilité du transporteur public ou commercial de passager, que le vol soit réalisé à titre gratuit ou onéreux, sont, pour leur part, régies par la convention de Montréal depuis le 28 juin 2004 et que, dans tous les cas, le délai de prescription est de deux ans ;

Qu'au surplus, La MACSF prétend à tort que le point de départ du délai de prescription serait la consolidation des victimes en application de l'article 2226 du Code civil issu de la loi du 17 juin 2008, alors que l'article 321-5 du code de l'aviation civile et l'article 29 de la convention de Varsovie énoncent que le point de départ de la prescription court 'à compter de l'arrivée à destination ou du jour où l'aéronef aurait dû arriver, ou de l'arrêt du transport' ;

Qu'en l'espèce, l'accident est survenu le 14 juillet 2010 et l'aéronef aurait dû arriver à sa destination prévue (FIGARI) ce même jour, qu'il s'en déduit que l'action en responsabilité contre le transporteur aérien aurait dû être intentée avant le 14 juillet 2012 ;

Que, par ailleurs, la garantie souscrite auprès d'AXA par l'Aéroclub du Mâconnais comporte la "CONVENTION SPECIALE «B1'' Assurance Responsabilité "Admise" à l'égard des Passagers" prévoyant "la réparation du préjudice corporel subi par les personnes non responsables de l 'accident se trouvant à bord de l 'aéronef" ;

Qu'en outre, si l'article 3§3 de cette convention prévoit que 'cette garantie ne pourra s'appliquer que pour autant que la victime, et/ou ses ayants droit ou ayants cause, se seront prévalus de leur droit à indemnité dans un délai de deux (2) ans à compter du jour de l'accident", il y a lieu de relever, en l'espèce, qu'aucune demande n'a été faite dans le délai de deux ans imparti ;

Qu'en conséquence, l'action devra être déclarée irrecevable comme étant prescrite ;

Considérant que la MACSF, soutenue par la CPAM, répond que la Convention de Varsovie et le code de l'aviation civile ne peuvent pas s'appliquer aux faits, ces textes s'appliquant uniquement aux transporteurs qui assurent une prestation à titre professionnel ;

Que, même s'il était fait application de la Convention de Varsovie, elle rappelle que le transport est soumis à la délivrance d'un billet de transport et qu'en l'absence d'un tel titre, les limites et conditions d'indemnisation doivent être déclarées inopposables aux victimes;

Qu'enfin, si le code de l'aviation civile disposait en son article L322-3 in fine que

« la responsabilité du transporteur par air ne peut être recherchée que dans les conditions et limites prévues ci-dessus, quelles que soient les personnes qui la mettent en cause et quel que soit le titre auquel elles prétendent agir », aucune disposition ne permet à l'assureur de responsabilité de l'aéronef de se prévaloir de cette limite temporelle ;

Que l'assureur est pour sa part soumis au droit commun de l'indemnisation des préjudices, ce qui signifie qu'il a vocation à se plier au principe de la réparation intégrale, et qu'il ne peut se considérer libéré de la charge de l'indemnisation d'un préjudice corporel, alors même que la victime n'est pas encore consolidée ;

Qu' à cet égard, il est assujetti aux dispositions de l'article L-114-1 du code des assurances qui prévoit en son 3ème alinéa que « La prescription est portée à dix ans dans les contrats d'assurance sur la vie, lorsque le bénéficiaire est une personne distincte du souscripteur et, dans les contrats d'assurance contre les accidents atteignant les personnes, lorsque les bénéficiaires sont les ayants droit de l'assuré décédé » ;

Qu'en tout état de cause, le point de départ de la prescription est la consolidation des victimes et que l'assureur, qui n'est pas un transporteur aérien, ne peut se prévaloir des dispositions du code de l'aviation civile, sauf pour ce qui concerne le respect des règles de circulation et la détermination des responsabilités ;

SUR CE

Considérant que la responsabilité du transporteur aérien de personnes est régie par les seules dispositions de la Convention de Varsovie du 12 octobre 1929, auquel renvoie l'article L.322-3 ancien du code de l'aviation civile, peu importe qu'il s'agisse d'un transport à titre gratuit effectué par un non professionnel ;

Considérant qu'en application de la règle d'ordre public fixée par l'article 29 de ladite convention, 'l'action en responsabilité doit être intentée, sous peine de déchéance, dans le délai de deux ans à compter de l'arrivée à destination ou du jour où l'aéronef aurait dû arriver, ou de l'arrêt du transport' ;

Considérant, en l'espèce, que c'est à l'arrivée du vol à la date du 14 juillet 2010, que le sinistre s'est produit, de sorte que la prescrition étant acquise le 14 juillet 2012, l'action l'était au jour de l'assignation, le 5 décembre 2013 ;

Qu'il convient, en conséquence de confirmer le jugement déféré ;

Sur les frais irrépétibles :

Considérant que l'équité commande de condamner tant la MACSF que la CPAM de SAONE et LOIRE à payer à la société AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE la somme de 1 200 euros chacune, qu'en revanche, il n'y a pas lieu de faire droits aux demandes de la MACSF et de la CPAM présentées à ce titre ;

PAR CES MOTIFS

Statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré et, y ajoutant,

Condamne tant la MACSF que la CPAM de SAONE et LOIRE à payer chacune à la société AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE la somme de 1 200 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

Déboute la MACSF et la CPAM de SAONE et LOIRE de leurs demandes à ce titre et les condamne aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 17/18805
Date de la décision : 04/12/2018

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°17/18805 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-04;17.18805 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award