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19/10/2018 | FRANCE | N°12/22721

France | France, Cour d'appel de Paris, 19 octobre 2018, 12/22721


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS






COUR D'APPEL DE PARIS


Pôle 4 - Chambre 1


ARRÊT DU 19 OCTOBRE 2018


(no , pages)


Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 12/22721 - No Portalis 35L7-V-B64-BQTSS


Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Novembre 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 11/00152




APPELANTS


Maître Vincent Z... es qualité de mandataire liquidateur de la société Azur Pr

omotel
intervenant volontaire
demeurant [...]


SARL AZUR PROMOTEL (L.J.) Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette quali...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

ARRÊT DU 19 OCTOBRE 2018

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 12/22721 - No Portalis 35L7-V-B64-BQTSS

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Novembre 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 11/00152

APPELANTS

Maître Vincent Z... es qualité de mandataire liquidateur de la société Azur Promotel
intervenant volontaire
demeurant [...]

SARL AZUR PROMOTEL (L.J.) Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...]
SIRET No : 440 165 777 00028

Représentés par Me Anne H... de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111
Ayant pour avocat plaidant Me Frédéric B..., avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉES

Société KAUFMAN AND BROAD MEDITERRANEE prise en sa délégation de Marseille sis [...]

SA KAUFMAN & BROAD Société Anonyme, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 702 022 724. Représenté par son Président en exercice et tous représentants légaux, domiciliésaudit siège en cette qualité [...]
SIRET No : 702 022 724 00174

Représentés par Me Laurence I... , avocat au barreau de PARIS, toque : P0241
Ayant pour avocat plaidant, Me Christophe C..., de la SCP ZURFLUH-LEBATTEUX-C... & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque: P 154

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Septembre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Claude CRETON, Président
M. Dominique GILLES, Conseiller
Mme Christine BARBEROT, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Dominique GILLES dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : M. Amédée TOUKO-TOMTA

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M.Claude CRETON, Président et par Mme Nadia TRIKI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire..

***

FAITS & PROCÉDURE

Par acte sous seing privé daté du mois de décembre 2006 et enregistré le 2 mars 2007, la SA Azur promotel et la SARL Kaufman & Broad Méditerranée ont conclu un contrat intitulé "convention de partenariat", indiquant avoir pour objet l'octroi, par celle-ci à celle-là, d'un prêt d'un montant de 1 070 000 €, stipulé remboursable, en tous les cas, avant le 30 novembre 2008, au taux d'intérêts de [(T4M+2%)/2] calculés pro rata temporis et commençant à courir à compter du 1er février 2007.

L'acte précise que les parties avaient des partenariats en cours, par l'intermédiaire de société civiles immobilières (SCI) détenues en commun pour chaque opération immobilières, à raison de trois projets de construction et de vente d'immeubles à Marseille et qu'elles envisageaient de réaliser trois nouvelles opération dans la même ville.

Le contrat précise que la SA Azur promotel devait employer la somme prêtée pour le "montage" de ces trois nouvelles opérations, à savoir : pour le paiement des indemnités d'immobilisation afférentes à toute promesse unilatérale de vente d'immeuble conclue en vue de l'acquisition des terrains, pour le paiement de tout apport de fonds propre en vue de souscrire les prêts destinés à financer l'acquisition des terrains et pour le paiement du prix de toute étude technique préalable aux acquisitions foncières.

Pour les besoins de la réalisation de ces opérations nouvelles, la SA Azur promotel a souscrit l'engagement, aux termes de ce contrat, d'une part, de se substituer les futures SCI dans les droits des promesses de vente signées avec les vendeurs des terrains et, d'autre part, de transférer aux mêmes SCI futures le bénéfice des autorisations administratives de démolir et de construire.

Le contrat prévoit que le remboursement du prêt s'effectuerait de manière différente selon que la SARL Kaufman & Broad Méditerranée participerait ou non aux nouvelles opérations. Au cas de participation de la SARL Kaufman & Broad Méditerranée à la réalisation commune de ces nouvelles opérations, le contrat prévoit que les SCI à constituer, majoritairement détenues par celle-ci, "rembourseront à Azur promotel, lors de l'achat du premier des trois terrains correspondant à la réalisation de l'une ou l'autre des opérations, la somme de 1 070 000 € correspondant aux sommes versées pour l'opération réalisée[...] et inscrite en compte courant d'associé de Azur promotel".

La SA Azur promotel, selon ce contrat, s'est engagée simultanément à employer sans délai ce remboursement de compte courant pour rembourser à son tour la SARL Kaufman & Broad Méditerranée du montant du prêt. A défaut de réalisation commune de ces trois opérations à venir, le contrat mentionne que le prêt serait remboursable par tous moyens.

Les opérations en commun projetées n'ont pas été réalisées. Invoquant le bénéfice des dispositions de ce contrat, la SARL Kaufman & Broad a allégué que la SA Azur promotel n'avait pas remboursé le prêt à la date de son échéance, en dépit d'une sommation de payer signifiée à l'emprunteur le 2 décembre 2008 ; elle a ainsi obtenu, pour sûreté de sa créance et par ordonnance définitive du juge de l'exécution du 10 février 2009, l'autorisation d'inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur un immeuble marseillais de la SA Azur promotel.

Par acte extrajudiciaire du 16 mars 2009, la SARL Kaufman & Broad Méditerranée a assigné la SA Azur promotel en remboursement du prêt, réclamant les intérêts conventionnels à compter du 2 mars 2007.

C'est dans ces conditions que le tribunal de grande instance de Paris, par jugement du 27 novembre 2012, a :

- condamné la SA Azur promotel à payer à la SARL Kaufman & Broad Méditerranée une somme de 1 070 000 € en remboursement du prêt de même montant qui lui a été consenti le 1er mars 2007, ladite somme produisant intérêt au taux conventionnel (T4M +2% le tout divisé par deux) depuis le 2 mars 2007,
- débouté la SA Azur promotel de ses demandes reconventionnelles en dommages-intérêts pour procédure abusive et pour immobilisation du bien grevé d'hypothèque judiciaire provisoire,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné la SA Azur promotel à payer à la SARL Kaufman & Broad Méditerranée une somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SA Azur promotel aux dépens.

La société Azur promotel a interjeté appel de la totalité de ce jugement le 13 décembre 2012 et la société Kaufman & Broad Méditerranée a fait de même le 6 février 2013. Ces appels ont été joints.

La société Azur promotel, en 2014 est devenue une société à responsabilité limitée. Elle a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Marseille du 21 juin 2017, qui a désigné M. Vincent Z... en qualité de liquidateur. Par ordonnance du 29 septembre 2017, le conseiller de la mise en état de cette Cour a constaté l'interruption de l'instance en raison de la procédure collective. M. Vincent Z..., ès qualités, est alors intervenu volontairement à l'instance.

Par dernières conclusions, la société Azur promotel et M. Vincent Z..., ès qualités de mandataire liquidateur de celle-ci, intervenant volontaire, demandent à la Cour de :

- recevoir l'appel et l'intervention volontaire ;
- réformer entièrement le jugement entrepris ;
- débouter la SARL Kaufman & Broad Méditerranée de ses demandes ;
- dire que la convention de partenariat n'est pas un prêt ;
- dire que le règlement de la somme de 1 070 000 € correspond à des commissions qui lui sont dues ;
- condamner la SARL Kaufman & Broad Méditerranée à lui payer à titre de dommages-intérêts une somme de 50 000 € pour procédure abusive et une somme de 100 000 € pour avoir fait pratiquer une hypothèque judiciaire provisoire sur un bien immobilier en vertu d'un contrat comportant une fausse cause ;
- condamner la SARL Kaufman & Broad Méditerranée à lui payer une somme de 7 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus.

Par dernières conclusions du 20 août 2018, la SA Kaufman & Broad SA et la SARL Kaufman & Broad Méditerranée prient la Cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SA Azur promotel à rembourser le prêt ;
- mais, compte tenu de la procédure collective :
- fixer la créance de la SARL Kaufman & Broad Méditerranée à ce titre au montant de la somme de 2 968 813 € au passif de la SA Azur promotel représentée par son liquidateur M. Vincent Z... ;
- à titre subsidiaire, si la Cour considérait que le prêt de 1 070 000 € consenti aux termes de la convention de partenariat du 7 décembre 2006 était un "acte occulte" ayant pour objet le paiement de commissions d'apporteur d'affaires :
- dire que cet acte serait de nature à payer à la SA Azur promotel un supplément de prix ;
- prononcer la nullité de la convention du 7 décembre 2006 ;
- fixer la créance de la SARL Kaufman & Broad Méditerranée au montant de la somme de 2 968 813 € au passif de la SA Azur promotel représentée par son liquidateur M. Vincent Z... ;
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SA Azur promotel de ses demandes reconventionnelles et en ce qu'il l'a condamnée à lui payer une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. Vincent Z..., ès-qualités, à lui payer une indemnité complémentaire de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. Vincent Z..., ès-qualités, aux dépens de première instance et d'appel.

SUR CE,
LA COUR

Les moyens soutenus par la SARL Azur promotel en liquidation, au soutien de son appel relatif à la qualification du contrat litigieux - qui, selon elle, ne serait pas un prêt, mais en réalité une stipulation de commissions à son bénéfice, exclusive d'obligation de remboursement à sa charge - ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connu et auxquels il a répondu par des motifs exacts que la Cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation.

A ces justes motifs, il convient d'ajouter que la SARL Azur promotel, qui soutient que le prêt prétendu serait en réalité l'acte ostensible dissimulant le paiement par la SARL Kaufman & Broad Méditerranée de commissions qui lui étaient dues pour des opérations déjà en cours au moment où le contrat litigieux a été conclu, a la charge de prouver la simulation qu'elle allègue.

Or, il importe à cet égard de rappeler que le contrat litigieux précise que les parties, au moment de sa conclusion, ont déjà des partenariats en cours pour trois projets de construction et de vente d'immeubles à Marseille, par le biais d'autant de SCI détenues en commun et dédiées à chaque opération repérée par son adresse : boulevard de la Fabrique, boulevard des Libérateurs et traverse les Martegaux.

Le contrat énonce que les parties envisagent de réaliser ensemble trois nouvelles opérations, pour lesquelles les pourparlers sont avancés en vue de la constitution de sociétés civiles, mais pour lesquelles la SARL Kaufman & Broad Méditerranée reste en attente, d'une part, des autorisations administratives de démolir et de construire purgées de tout recours des tiers et, d'autre part, de la validation par son propre comité foncier.

Le contrat précise que ces opérations nouvelles sont prévues aux adresses marseillaises suivantes : 1, place Tarquin, où la SA Azur promotel est déjà propriétaire du terrain ; impasse des Petits champs quartier Sainte-Marthe, où la SA Azur promotel bénéficie d'une promesse unilatérale de vente du terrain ; 29, rue Toussaint quartier Belle de Mai, où la SA Azur promotel bénéficie également d'une promesse de vente du terrain.

Le contrat indique également que la SA Azur promotel doit employer la somme prêtée pour le "montage" des trois opérations, à savoir pour le paiement des indemnités d'immobilisation afférentes à toute promesse unilatérale de vente, pour le paiement de tout apport de fonds propre en vue de souscrire les prêts destinés à financer l'acquisition des terrains et pour le paiement du prix de toutes études techniques préalables nécessaires et justifiées par la production des factures correspondantes.

Au cas de participation de la SARL Kaufman & Broad Méditerranée à la réalisation commune de ces nouvelles opérations, le contrat prévoit que les SCI à constituer, majoritairement détenues par la SARL Kaufman & Broad Méditerranée, "rembourseront à Azur promotel, lors de l'achat du premier des trois terrains correspondant à la réalisation de l'une ou l'autre des opérations, la somme de 1 070 000 € correspondant aux sommes versées pour l'opération réalisée[...] et inscrite en compte courant d'associé de Azur promotel".

La SA Azur promotel s'est engagée en même temps à utiliser sans délai ce remboursement de compte courant pour rembourser la SARL Kaufman & Broad Méditerranée de la somme prêtée. La SA Azur promotel a consenti par avance dans ce contrat à déléguer la SCI, dès que celle-ci serait constituée, pour procéder au paiement entre les mains de la SARL Kaufman & Broad Méditerranée de "toutes sommes qui leur seraient dues à quelque titre que ce soit, à concurrence de la somme" empruntée de 1 070 000 €. Toujours à titre de garantie du remboursement de la somme prêtée par la SARL Kaufman & Broad Méditerranée, la SA Azur promotel a consenti dans le contrat au nantissement au bénéfice du prêteur de ses parts sociales dans les SCI déjà constituées et afférentes aux trois opérations déjà en cours.

La Cour relève tout d'abord que l'appelante échoue à rapporter la preuve de ce qu'elle affirme quand elle prétend décrire le cadre général du partenariat mis en oeuvre par les parties, en amont du contrat litigieux. Rien ne prouve en particulier que la réalité des accords intervenus fut, ainsi qu'elle le soutient expressément, qu'elle s'était engagée à vendre à la SARL Kaufman & Broad Méditerranée les terrains dont elle-même était déjà propriétaire et à lui transférer le bénéfice de promesses de vente dont elle était titulaire sur d'autres terrains également convoités par la SARL Kaufman & Broad Méditerranée, ainsi qu'à lui transférer l'ensemble des autorisations administratives de construire qu'elle avait elle-même sollicitées.
En particulier, alors que la société Azur Promotel invoque elle-même un échange de lettres entre les parties du mois de mai 2006 qui établit le recours, pour chaque opération, à une SCI détenue par les deux partenaires, la SARL Kaufman & Broad étant toujours l'associée majoritaire avec 51% des parts, et la seule gérante, il n'apparaît pas que la SARL Kaufman & Broad Méditerranée ait jamais entendu racheter elle-même à la société Azur Promotel les terrains servant d'assiette foncière à ces opérations menées en commun. Il apparaît au contraire que chaque opération a été ou devait être réalisée au moyen d'une SCI détenue en commun qui devait devenir propriétaire du terrain et titulaire des droits de construire.

En outre, si la société Azur Promotel reproche à la SARL Kaufman & Broad Méditerranée d'avoir manqué à son obligation, née du même échange de lettres, de requérir son accord préalable pour tout engagement de plus de 15 000 € qu'elle prendrait à la charge de chaque SCI, et si la société Azur Promotel impute à ce manquement la découverte tardive de fortes pertes par rapport aux bilans prévisionnels de chaque opération, à supposer même qu'un tel manquement soit établi, il serait impropre à prouver la simulation prétendue.

La société Azur Promotel ne prouve pas que son représentant, ainsi qu'elle l'affirme, ne s'était pas rendu à Neuilly pour signer le contrat litigieux comme le document le mentionne, et, d'ailleurs, si ce représentant avait accepté de signer le contrat malgré une inexactitude sur ce point, cela serait sans emport pour prouver la simulation. Contrairement à ce que soutient la société Azur Promotel, le contrat litigieux n'est nullement équivoque en ce que son obligation de remboursement du prêt y est clairement exprimée, que ce soit en cas de participation de la SARL Kaufman & Broad Méditerranée aux opérations communes ou en l'absence d'une telle participation. Il est établi également que les modalités de remboursement prévues au contrat au cas de réalisation des opérations communes ont été minutieusement prévues d'accord entre les parties.

Mais, surtout, la société Azur Promotel échoue à prouver qu'aux termes de leurs derniers accords faisant la loi des parties, elle devait percevoir des commissions de la SARL Kaufman & Broad Méditerranée, indépendamment du prix de vente du terrain, destinées à lui rembourser les frais de portage de l'opération et les frais financiers inhérents à l'immobilisation des terrains le temps de l'instruction des demandes de permis de construire.

En effet la société Azur Promotel prétend étayer sa démonstration par son analyse de l'opération du boulevard de la Fabrique et de celle du boulevard des Libérateurs, dont les réalisations ont fait l'objet, chacune, d'un protocole d'accord spécifique signé entre les parties et la SCI commune, daté du 31 octobre 2006, faisant apparaître l'un et l'autre une commission d'apporteur d'affaire à son bénéfice pour un montant global de 1 072 703 €.

La société Azur Promotel soutient que la SARL Kaufman & Broad Méditerranée s'est aperçu après coup d'un inconvénient juridique et fiscal à lui payer ces commissions alors qu'elle était également vendeur des terrains, ce qui aurait motivé de les régler sous la forme d'une avance, par la SARL Kaufman & Broad, à valoir sur les honoraires dus par les SCI communes au titre des opérations à venir, sous forme d'un prêt simulé, destiné à n'être jamais remboursé puisqu'il se serait agi, en réalité, pour la SARL Kaufman & Broad Méditerranée de s'acquitter d'un dû.

La société Azur Promotel, pour démontrer la simulation, entend se fonder sur la rédaction de deux autres protocoles d'accord pour les mêmes opérations boulevard de la Fabrique et boulevard des Libérateurs apparemment datés également du 31 octobre 2006, mais, selon elle, antidatés, dont les éléments de comptes prévisionnels visés et annexés par les parties, à la différence des documents ci-dessus, ne mentionnent plus les commissions d'apporteur d'affaire et sont édités en date du 8 décembre 2006.

S'il doit être admis que les protocoles d'accord qui ne mentionnent pas les commissions ont été établis dans un second temps, la Cour relève que seul l'enregistrement du contrat litigieux présente une date certaine, celle du 2 mars 2007, soit le lendemain du jour du versement effectif des fonds par virement bancaire, la différence sur ce point d'avec la lettre du contrat qui prévoyait la remise d'un chèque le jour de la signature étant dépourvue de conséquence sur la qualification du contrat, ainsi que l'a valablement indiqué le tribunal dans le jugement entrepris.

Toutefois, les protocoles datés du 31 octobre 2006, qu'ils mentionnent ou non une commission d'apporteur d'affaire, sont dépourvus de date certaine et ce nonobstant les mentions de l'édition informatique des documents comptables prévisionnels annexés à ceux qui ne mentionnent plus ces commissions.
Contrairement à ce que soutient l'appelante, la formalité de l'enregistrement ne confère pas au contrat litigieux la qualité d'acte ostensible venant nécessairement donner aux protocoles d'accord non enregistrés le caractère d'actes secrets valant contre-lettres.

La société Azur Promotel affirme d'ailleurs sans le prouver le caractère obligatoire des seuls protocoles d'accord mentionnant les commissions d'apporteur d'affaires.

Par conséquent, le jugement entrepris doit être approuvé d'avoir retenu que les protocoles d'accord qui ne prévoient pas les commissions d'apporteur d'affaire avaient annulé et remplacé les précédents qui les prévoyaient.
Si la société Azur Promotel se prévaut d'un courriel du 27 décembre 2007 de M. Z... de Kaufman & Broad, demandant de faire signer à M. D..., de la société Azur Promotel, des "avenants" à des protocoles d'accord et si ce courriel précise que ces avenants "ont simplement pour objet de régulariser fiscalement la façon dont les honoraires doivent être perçus par les associés", sans rien changer aux accords existants, il n'est pas établi que ce courriel se réfère aux opérations des boulevards de la Fabrique ou des Libérateurs.
Si la société Azur promotel se prévaut encore d'une lettre que son avocat-conseil, M. E..., lui a envoyée le 12 mars 2009, à sa demande, pour relater les circonstances d'une réunion du 20 novembre 2006 avec les représentants de le société Kaufman & Broad, et s'il y est indiqué qu'il avait bien été envisagé par Kaufman & Broad, à cette date, que les commissions d'apporteur d'affaire des opérations "La Fabrique" et "les Libérateurs" soient versées sous forme de prêt, cet avocat, qui marque ses distances avec une telle solution, écrit avoir indiqué à son client l'incompatibilité de cette solution avec l'accord des parties et n'avoir plus été consulté sur ce point par la suite.
Si Mme F..., de la SARL Kaufman & Broad Méditerranée, en réponse à une sommation interpellative du 20 mars 2009, a écrit que M. E... était favorable au prêt, contrairement à ce que celui-ci a écrit, elle ajoute que la convention de partenariat de décembre 2006 litigieuse "reflète précisément la volonté des parties", termes qui excluent toute notion de simulation et toute notion d'avance non remboursable. Les déclarations de M. G..., ancien mandataire social de la SARL Kaufman & Broad Méditerranée, qui affirme qu'il ne s'agit pas d'un prêt mais d'une avance sur honoraires remboursable par les seules SCI communes ne sont donc pas revêtues de la force probante permettant de les retenir.
Rien ne démontre que ne serait pas conforme à la réalité les documents prévisionnels afférents aux opérations "La Fabrique" et "les Libérateurs" qui consacrent la disparition des commissions d'apporteur d'affaire, établissent une nouvelle répartitions des avantages de l'opération entre les associés, caractérisée par la réduction des honoraires de gestions de la SARL Kaufman & Broad Méditerranée et par l'augmentation corrélative de la marge prévisionnelle de la société Azur promotel.

Faute de production de tout élément comptable probant nouveau en appel, le jugement doit encore être approuvé d'avoir retenu qu'il n'était pas prouvé que l'enregistrement comptable de l'opération conclue au moyen du contrat litigieux n'ait pas été conforme à cet acte officiel et apparent ou que le prêt apparent ait eu une fausse cause. Il en résulte que l'avance consentie au moyen du prêt litigieux était bien remboursable et ce malgré la circonstance que cet accord des parties soit venu se substituer à un précédent accord qui prévoyait des commissions d'apporteur d'affaire pour un montant équivalent au bénéfice de la société Azur promotel.
La société Azur promotel, en acceptant cette substitution, a renoncé en connaissance de cause aux commissions d'apporteur d'affaire et a sciemment pris le risque de se trouver exposée à une action en remboursement en cas de non réalisation des opérations projetées.

- Sur les autres demandes :

Il résulte de ce qui précède que la SARL Azur promotel doit être déboutée de ses demandes reconventionnelles et accessoires.

S'il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a statué sur les dépens et l'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile, les sommes mises à la charge de la SARL Azur promotel, depuis lors placée en liquidation judiciaire, ne peuvent plus faire l'objet de condamnation mais doivent être fixées au passif de la liquidation judiciaire.

La SARL Azur promotel en liquidation représentée par M. Vincent Z... sera condamnée aux dépens d'appel.

En équité, la SARL Kaufman & Broad Méditerranée ne versera pas d'indemnité complémentaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Azur promotel à rembourser à la SARL Kaufman & Broad Méditerranée le prêt litigieux de la somme de 1 070 000 € , consenti le 1er mars 2007 et stipulé remboursable depuis le 30 novembre 2008, ladite somme portant intérêt au taux conventionnel depuis le 2 mars 2007,

Mais, compte tenu de la liquidation judiciaire de la société Azur promotel survenue après le jugement entrepris :

Fixe la créance de la SARL Kaufman & Broad Mediterranée au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Azur promotel, représentée par M. Vincent Z..., à la somme de 1 070 000 €, outre les intérêts au taux conventionnel à compter du 2 mars 2007,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Azur promotel de toutes ses demandes,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a mis les dépens de première instance à la charge de la SARL Azur promotel et en ce qu'il a mis à sa charge une somme de 6 000 €, au bénéfice de la SARL Kaufmann & Broad Méditerranée, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Mais, compte tenu de la liquidation judiciaire intervenue depuis le jugement entrepris :

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Azur promotel, représentée par M. Vincent Z..., d'une part, les dépens de première instance et, d'autre part, à la somme de 6 000 €, la créance au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la SARL Kaufman & Broad Mediterranée, s'agissant des frais de première instance,

Y ajoutant :

Condamne M. Vincent Z... ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Azur promotel aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

Déboute la SARL Kaufman & Broad Méditerranée de sa demande complémentaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 12/22721
Date de la décision : 19/10/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-19;12.22721 ?
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