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16/10/2018 | FRANCE | N°16/12353

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 16 octobre 2018, 16/12353


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 8



ARRET DU 16 OCTOBRE 2018



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/12353 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZWNB



Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Septembre 2016 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° F 15/00392





APPELANTE

SARL SOIB

[...]
>Représentée par Me Pierre X..., avocat au barreau de PARIS, toque : E0235





INTIMEE

Madame Y... DA SILVA

[...]

Représentée par Me Nathalie Z..., avocat au barreau d'ESSONNE





COMP...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRET DU 16 OCTOBRE 2018

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/12353 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZWNB

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Septembre 2016 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° F 15/00392

APPELANTE

SARL SOIB

[...]

Représentée par Me Pierre X..., avocat au barreau de PARIS, toque : E0235

INTIMEE

Madame Y... DA SILVA

[...]

Représentée par Me Nathalie Z..., avocat au barreau d'ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 25 Janvier 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:

Madame Catherine BEZIO, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Benoît DEVIGNOT, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Catherine BEZIO dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier: Mme Géraldine GAGGIOLI, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la COUR, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile. Prorogé à ce jour.

- signé par Madame Nadège BOSSARD, Conseiller pour le Président empêché et par Madame Géraldine BERENGUER, greffier de la mise à disposition et à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Statuant sur l'appel formé le 3 octobre 2016 par la SARL SOCIETE DE L'OUTILLAGE INDUSTRIEL ET DU BATIMENT (SOIB) à l'encontre du jugement en date du 7 septembre 2016 par lequel le conseil de prud'hommes de Longjumeau a dit que le licenciement de Mme Y... DA SILVA par l'appelante était sans cause réelle et sérieuse et a condamné celle-ci à verser en conséquence à son ancienne salariée les indemnités de rupture dues et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 21 900 €, outre un rappel de salaire après reclassification de Mme DA SILVA dans la catégorie cadre et 1000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

Vu les conclusions de la société SOIB -intitulées «conclusions récapitulatives et en réponse 2» -, tendant à voir infirmer le jugement entrepris et en tant que de besoin l'ordonnance du 10 juin 2015, débouter en conséquence Mme DA SILVA de toutes ses demandes et condamner cette dernière au paiement de la somme de 2000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

Vu les écritures de Mme DA SILVA qui, formant appel incident, prie la cour de déclarer nul son licenciement et de lui allouer la somme de 43 000 € de dommages et intérêts au titre de l'illicéité du licenciement , à titre subsidiaire, de lui allouer la même somme -ou subsidiairement, de confirmer les condamnations prononcées à son profit par les premiers juges et en tout état de cause, de condamner en outre la société SOIB à lui verser la somme de 15 000 € de dommages et intérêts pour harcèlement moral, manquement à son obligation de sécurité et exécution déloyale du contrat de travail ' Mme DA SILVA réclamant enfin l'allocation de la somme de 4000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

SUR CE LA COUR

Sur les faits et la procédure

Considérant qu'il résulte des pièces et conclusions des parties que Mme DA SILVA -qui travaillait précédemment pour le compte de l'expert comptable de la société SOIB ' a été embauchée verbalement à compter du 12 mars 2001, par la société SOIB, en qualité d'aide- comptable, puis de comptable en février 2003,ainsi que ces qualifications résultent des mentions portées sur les bulletins de salaire;

que du 12 novembre 2014 au 5 février 2015 Mme DA SILVA a été en arrêt maladie et la société SOIB ne lui a pas versé le complément de salaire destiné à maintenir celui-ci, comme le prévoyait la convention collective du commerce de gros, applicable à la relation de Mme DA SILVA et de la société SOIB; qu'elle a adressé sans succès diverses lettres recommandées à son employeur pour lui rappeler son obligation conventionnellealors que , de son côté, la société SOIB écrivait à la salariée afin qu'elle justifie de diverses absences, l'accusant dans une de ses correspondances d'avoir «maladroitement transformé» une des dates de l'arrêt de travail qu'elle lui avait adressé;

que Mme DA SILVA s'expliquait dans ses réponses sur les absences reprochées ,en rappelant notamment que la société SOIB lui déduisait des jours d'absence correspondant à des congés payés; qu'elle informait son employeur du grave préjudice financier qu'elle subissait du fait de l'absence de maintien de son salaire et l'avisait en conséquence le 5 décembre 2014 qu'elle allait porter plainte contre elle pour harcèlement moral, compte tenu, en outre de ses «propos et attitudes de dénigrement répétés» envers elle;

que le 24 décembre 2014 la société SOIB a convoqué Mme DA SILVA à un entretien préalable à son éventuel licenciement, fixé au 8 janvier suivant; que par lettre recommandée du 6 février 2015, la salariée a été licenciée pour faute lourde; que Mme DA SILVA a contesté ce licenciement dans une lettre à son employeur du 26 février 2015

en soutenant que les griefs invoqués n'étaient pas justifiés; que par cette même correspondance Mme DA SILVA rappelait à la société SOIB qu'elle n'avait toujours pas satisfait à ses demandes; qu'elle réitérait ses précédentes explications, quant aux absences reprochées, et plainte relative au harcèlement moral, précisant que celui-ci justifiait d'ailleurs ses absences;

que dans l'intervalle, la visite de reprise passée par Mme DA SILVA , à l'issue de son congé maladie, avait donné lieu à une conclusion d'inaptitude provisoire au poste le 22 janvier 2015 puis à une fiche d'inaptitude définitive au poste le 9 février 2015;

que le 7 mai 2015 Mme DA SILVA a saisi le conseil de prud'hommes dont le bureau de conciliation par ordonnance du 10 juin 2015 lui a alloué de ce chef une provision de 2000€; que Mme DA SILVA a tenté de recouvrer cette somme par la voie d'une saisie attribution, qui a été vainement contestée par la société SOIB devant le juge de l'exécution lequel a rejeté le recours de la société;

que par le jugement entrepris, le conseil de prud'hommes a estimé que le licenciement de Mme DA SILVA était dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la société SOIB à lui payer les indemnités de rupture et la somme de 21 900 € à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse mais a débouté Mme DA SILVA du surplus de ses demandes notamment celle tendant à l'allocation de dommages et intérêts pour harcèlement moral;

Considérant qu'au soutien de son appel, la société SOIB fait valoir que le licenciement pour faute lourde de Mme DA SILVA est justifié; que pour sa part, Mme DA SILVA expose que ce licenciement est nul -dès lors qu'il procède de la dénonciation qu'elle a faite à son employeur du harcèlement moral qu'il lui a fait subir- et, à tout le moins, sans cause réelle et sérieuse- Mme DA SILVA reprenant, en outre, devant la cour les demandes de dommages et intérêts écartées par les premiers juges;

*

Sur le maintien du salaire pendant les arrêts maladie de Mme DA SILVA

Considérant que Mme DA SILVA revendique le statut de cadre et en cette qualité le bénéfice de certaines dispositions (article 6 de l'avenant I de la convention collective) prévoyant en faveur des cadres le versement par l'employeur d'une indemnité complémentaire des prestations journalières de la sécurité sociale, en cas de maladie ou d'accident;

qu'elle affirme relever en sa qualité de comptable du niveau VIII échelon 2 de la classification conventionnelleet sollicite en conséquence le complément de salaire litigieux;

Considérant que si le conseil de prud'hommes a accueilli cette prétention de Mme DA SILVA c'est sur la foi des affirmations de celle-ci, reprises devant la cour, et sans autre élément que les mentions figurant sur ses bulletins de paye;

que cependant, ces mêmes bulletins de paye indiquent que la salariée appartient à la catégorie «employés»; que l'indication du niveau précité de Mme DA SILVA est dès lors incompatible avec cette catégorie, de sorte que la cour ne peut retenir le niveau allégué par Mme DA SILVA;

Or considérant qu'il n'est pas discuté que lors de son embauche par la société SOIB , en mars 2001, Mme DA SILVA était aide-comptable; qu'il n'est fourni aucune pièce, ni explication qui justifierait le passage au statut cadre, deux ans plus tard (elle est devenue comptable sur les bulletins de paye en mars 2003) alors que le montant du salaire de Mme DA SILVA est demeuré inchangé par la suite;

Considérant que faute pour Mme DA SILVA d'établir la qualité de cadre qu'elle invoque, la cour ne peut que débouter celle-ci de sa demande de complément de salaire, fondée sur des dispositions applicables aux seuls cadres;

que le jugement entrepris sera donc infirmé sur ce premier point;

*

Sur le licenciement pour faute lourde de Mme DA SILVA

Sur la nullité du licenciement

Considérant que Mme DA SILVA fonde sa demande de nullité de licenciement , sur le seul moyen tiré de sa dénonciation, auprès de la société SOIB, du harcèlement moral qu'elle déclarait avoir subi du fait des agissements de son employeur;

Considérant que les articles L 1152-2 et L 1152-3 du code du travail protègent, il est vrai, le salarié du licenciement prononcé à raison de son refus de subir des agissements répétés de harcèlement moral de son employeur ou des témoignages et relations qu'il a pu faire, à propos de ce harcèlement moral;

Mais considérant qu'en l'espèce, Mme DA SILVA invoque les termes de sa correspondance précitée du 5 décembre 2014à la société SOIB, dans laquelle elle a «dénoncé» , selon elle, le harcèlement moral au sens des articles qui précèdent;

qu'il ne ressort pas du contenu de cette lettre à son employeur, qui ne constitue qu' une plainte de la salariée auprès de celui-ci , que, ce faisant, Mme DA SILVA a accompli l'une des démarches visées par l'article L 1152-2;

Considérant que Mme DA SILVA n'est dès lors pas fondée à se prévaloir de la nullité de son licenciement;

*

Sur le bien fondé du licenciement

Considérant que les griefs imputés à Mme DA SILVA dans la lettre de licenciement sont les suivants:

-de nombreuses absences injustifiées depuis le 3 mars jusqu'au 14 octobre 2014

-des erreurs d'enregistrement de TVA pour les années 2010, 2011 et 2012 révélées à la suite d'un contrôle fiscal qui a conduit le contrôleur des impôts à réclamer la somme de 600 000 € à la société SOIB

-Mme DA SILVA a fait état, auprès de la société SOIB, d' «une qualification professionnelle de nature comptable (...) dont (elle) n'a jamais justifié» et ce manquement professionnel constitue une faute extrêmement grave

-en juillet 2013, profitant de l'accident grave du dirigeant de la société SOIB et de son absence consécutive , Mme DA SILVA s'est octroyée une prime exceptionnelle d'un montant de 1937, 29 €, résultant d'un chèque de ce montant établi par elle le 5 août 2013 -la lettre de licenciement conclut qu'il est donc reproché à Mme DA SILVA un «détournement de fonds à (son) profit»;

Considérant que les premiers juges ont pertinemment estimé qu'aucun de ces reproches n'était caractérisé et ne pouvait fonder le licenciement pour faute lourde notifié à la salariée, étant rappelé que la faute lourde suppose, de la part du salarié, une intention de nuire à l'employeur dans la commission du fait fautif;

Considérant en effet que s'agissant, tout d'abord,des absences prétendument injustifiées, Mme DA SILVA objecte à raison que les absences listées dans la lettre de licenciement sont antérieures de plus de deux mois à l'engagement de la procédure de licenciement le 24 décembre 2014;

Considérant qu'en tout état de cause, la société SOIB ne démontre pas en quoi les absences litigieuses traduiraient la volonté de la salariée de lui porter préjudice;

Considérant que la société SOIB justifie du redressement qu'elle s'est vu infliger par l'administration fiscale à la suite de déclarations erronées de TVA; que Mme DA SILVA ne saurait cependant se voir imputer, seule, la responsabilité de cette anomalie comptable alors que la société SOIB disposait d'un expert-comptable qui selon sa propre attestation

avait pour mission la surveillance générale de la comptabilité de la société SOIB et l'établissement des bilans de fin d'exercice; que comme précédemment pour les absences reprochées, l'appelante ne prouve nullement que ce manquement imputé à Mme DA SILVA aurait eu un caractère intentionnel à son égard;

Considérant que s'agissant de la qualification professionnelle «de nature comptable», qu'elle reproche à Mme DA SILVA d'avoir invoquée sans en justifier, la société SOIB ne démontre ni que Mme DA SILVA ait fait état de quelconque diplôme ou qualification, ni qu'elle-même ait demandé à la salariée de justifier de ceux-ci , sinon lorsque le litige est né entre les parties [...]; que de plus, les qualités professionnelles de Mme DA SILVA n'avaient pas été mises en cause durant les quatorze années de sa collaboration antérieure avec la société SOIB, de sorte que ce prétendu mensonge qui lui est prêté apparaît exempt de tout caractère intentionnelenvers son employeur;

Considérant qu'enfin, n'est pas davantage prouvé le détournement de la somme de 1937, 29 € reproché à Mme DA SILVA à raison de la signature par elle d'un chèque de ce montant , le 5 août 2013, pris sur le chéquier de la société;

que d'abord le chèque datant du 5 août 2013, plus de deux mois s'étaient écoulés lors de l'engagement de la procédure de licenciement le 24 décembre 2014, de sorte que la prescription fait échec à la poursuite de ces faits; que, certes, la société SOIB objecte qu'elle n'a découvert ces faits qu'après un audit qu'elle a fait réaliser à la fin de l'année 2014 par son expert comptable, à la suite du contrôle fiscal effectué à la fin de l'année 2013; que néanmoins la société ne verse aux débats aucun élément permettant de dater précisément la connaissance tardive qu'elle dit avoir eue du «détournement du chèque»-l'attestation de l'expert-comptable sur ce point demeurant très vague, en évoquant une mission «confiée à la fin de l'année»;

qu'il résulte des énonciations qui précèdent que les faits relatifs à l'émission de ce chèque tombent sous le coup de la prescription et que la société SOIB n'établit pas la date à laquelle elle prétend en avoir eu connaissance; qu'ils ne peuvent motiver le licenciement de Mme DA SILVA;

qu'en tout état de cause, ce grief n'est pas fondé;

qu'en premier lieu, il y a lieu de relever que le fait incriminé consiste dans le détournement d'une somme de 1937, 29 €à laquelle, d'après l'employeur, la salariée ne pouvait prétendreet non, dans la signature d'un chèque de la société- Mme DA SILVA reconnaissant avoir imité la signature du dirigeant de la société SOIB, comme il lui arrivait, selon elle, de le faire, avec l'accord de celui-ci; que la signature du chèque n'est en effet nullement incriminée, en elle-même, dans la lettre de licenciement , comme elle le sera, en revanche, plus tard , dans sa plainte avec constitution de partie civile (toujours à l'instruction) déposée le 7 novembre 2016, après classement de sa plainte adressée au procureur de la République le 21 septembre 2015;

qu'en second lieu, le débat étant ainsi circoncrit, les explications et justifications fournies par Mme DA SILVA permettent de conclure que la somme litigieuse correspond, comme elle le prétend, à des congés payés acquis en grand nombre par Mme DA SILVA qui lui ont ainsi été partiellement rémunérés conformément aux mentions des bulletins de paye de la salariée et la société SOIB est mal venue de prétendre que l'accumulation d'un tel nombre de jours serait impossible légalement, alors que tant avant qu'après la période litigieuse (juillet ' août 2013) les bulletins de salaire -établis pourtant par l'expert comptable- mentionnent fréquemment plus de 40 jours de congés acquis, non pris et néanmoins reportés, comme il est licite de le faire en accord avec l'employeur;

que si le dirigeant de la société SOIB était, il est vrai, souffrant et absent de l'entreprise, à l'époque du «détournement» reproché, son état de santé ne le mettait pas pour autant, comme le soutient l'appelante, dans l'incapacité de suivre et de gérer ses affaires ainsi que l'établissent ses propres déclarations, lors de ses diverses plaintes où il admettait, par exemple, signer le bordereau des virements de salaires;

que rien dans l'argumentation de Mme DA SILVA n'apparaît dès lors contestable tandis que la société SOIB , qui doit, seule, apporter la preuve de la faute lourde alléguée, ne produit aucun élément caractérisant le comportement frauduleux imputé à Mme DA SILVA;

qu'ainsi, non seulement, il n'est pas apporté la preuve du détournement reproché à Mme DA SILVA mais celle-ci réclame à juste titre le solde de congés payés non pris et non payés, soit 2644, 39 €;

Considérant qu'en définitive, face à la carence de la société SOIB dans l'administration de la preuve qui lui incombe, c'est à juste titre que le conseil de prud'hommes a dit le licenciement de Mme DA SILVA sans cause réelle et sérieuse;

Considérant que sur le montant des sommes dues à Mme DA SILVA , la cour se doit de rectifier les dispositions du jugement relatives aux indemnités de rupture que Mme DA SILVA a calculé en fonction d'une qualité de cadre , jugée précédemment indue;

qu'il s'en suit que le préavis de trois mois réservé au cadre doit être ramené à la somme de 6122, 08 €, outre les congés payés afférents ; que de même le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement doit être calculé en fonction des dispositions régissant les employés et non les cadres; qu'à défaut de conclusions des parties et d'éléments permettant à la cour de recalculer cette indemnité il sera statué comme dit au dispositif ci-après;

Considérant que compte tenu de l'ancienneté conséquente de Mme DA SILVA et du caractère aussi humiliant qu'injustifié du licenciement pour faute lourde dont elle a été l'objet,il y a lieu de porter à 30 000 € l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse que lui ont allouée les premiers juges;

*

Sur le harcèlement moral , l'obligation de sécurité de santé et l'exécution loyale du contrat de travail

Considérant que la cour approuve le conseil de prud'hommes d'avoir débouté Mme DA SILVA de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral;

Considérant que les faits invoqués à ce titre par Mme DA SILVA se situent , en effet, à compter du mois de novembre 2014, alors que la salariée était en arrêt maladie; que les correspondances échangées entre les parties ont trait pour Mme DA SILVA au versement du complément de salaire conventionnel non réglé par la société SOIB tandis que celle-ci s'insurge du caractère injustifié des absences de Mme DA SILVA;

Considérant un tel comportement, alors même que l'employeur sait écrire à une salariée malade et en arrêt de travail, traduit un manquement certain de la société SOIB tant, à son obligation de sécurité en matière de santé et sécurité de son personnel, qu'à son obligation de loyauté qui doit inspirer les relations contractuelles, à travers, en particulier, le respect de la personne du salarié;

que la cour, retenant les divers certificats médicaux produits, dont, le dernier, à l'origine de la déclaration d'inaptitude du 9 février 2015constate que Mme DA SILVA a éprouvé des troubles de stress et de dépression à la même époque; que si les médecins n'opèrent pas eux-mêmes le lien entre ces manifestations pathologiques et le comportement de la société SOIB, il apparaît que la communication violente et irrespectueuse instaurée par la société SOIB pendant l'arrêt de maladie de Mme DA SILVA a effectivement causé à celle-ci un préjudice que la société SOIB doit indemniser; que la cour dispose des éléments suffisants pour évaluer à 3000 € la réparation de ce préjudice;

Considérant qu' en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile la société SOIB versera à Mme DA SILVA la somme de 4000 € qu'elle réclame, en sus de celle allouée de ce chef en première instance;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris, sauf en ce que le conseil de prud'hommes a dit le licenciement de Mme DA SILVA dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la société SOIB aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1000 € en faveur de Mme DA SILVA en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

Statuant à nouveau,et y ajoutant,

Déboute Mme DA SILVA de la demande tendant à voir déclarer nul son licenciement;

Déboute Mme DA SILVA de la demande tendant à sa classification dans la catégorie cadres et de la demande subséquente de complément de salaire;

Condamne la société SOIB à payer à Mme DA SILVA

la somme de 2644, 39 € à titre de reliquat de congés payés

la somme de 6 122, 08 € à titre d'indemnité compendatrice de préavis, outre 612, 20 € à titre de congés payés afférents

une indemnité de licenciement conventionnelle, dont le montant doit être calculé selon les dispositions de la convention collective du commerce de gros, applicable aux employés

la somme de 30 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

la somme de 3000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement de la société SOIB à son obligation de sécurité en matière de santé et sécurité et à son obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail

Condamne la société SOIB aux dépens d'appel et au paiement de la somme de 4000 € au profit de Mme DA SILVA en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .

Le Greffier Le Conseiller

Pour le Président empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 16/12353
Date de la décision : 16/10/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°16/12353 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-16;16.12353 ?
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