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11/10/2018 | FRANCE | N°16/21992

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 2, 11 octobre 2018, 16/21992


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 2 - Chambre 2





ARRÊT DU 11 OCTOBRE 2018





(n° 2018 -293, 6 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/21992 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZ5WQ





Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Septembre 2016 -Tribunal de Commerce de Paris - RG n° [...]






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Monsieur Jürgen X...


Né le [...] à TRIBERG (ALLEMAGNE)


[...]








Représenté par Me Jean-Baptiste Y... de l'AARPI OCEAN Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0575


Assisté à l'audience de Valér...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 11 OCTOBRE 2018

(n° 2018 -293, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/21992 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZ5WQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Septembre 2016 -Tribunal de Commerce de Paris - RG n° [...]

APPELANT

Monsieur Jürgen X...

Né le [...] à TRIBERG (ALLEMAGNE)

[...]

Représenté par Me Jean-Baptiste Y... de l'AARPI OCEAN Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0575

Assisté à l'audience de Valérie Z..., avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMÉE

La société THEOLIA FRANCE, prise en la personne de son représentant légal

N° SIRET : [...]

[...]

Représentée par Me Philippe A... de la SCP TUFFAL- NERSON DOUARRE et Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0505

Assistée à l'audience de Me Bertrand B..., avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Septembre 2018, en audience publique, devant la cour composée de:

Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre Madame Patricia LEFEVRE, conseillère

Madame Marie-José BOU, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Fatima-Zohra AMARA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre et par Madame Fatima-Zohra AMARA, greffière présente lors du prononcé.

**************

Vu l'appel interjeté le 3 novembre 2016 par M. Jürgen X... d'un jugement rendu le 28 septembre 2016 par le tribunal de commerce de Paris qui a :

* Dit que M. Jürgen X... n'a pas formulé de demande au titre de sa rémunération fixe,

* dit que la SAS Theolia France a résilié à bon droit la convention conformément aux

stipulations de son article 7.1,

* débouté M. Jürgen X... de sa demande de primes de succès,

* dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté les parties de leurs demandes plus amples, autres, ou contraires aux présentes dispositions,

* condamné M. Jürgen X... aux dépens ;

Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 6 juin 2018, par lesquelles M. Jürgen X... demande à la cour d'infirmer cette décision et de :

* Principalement, condamner la société Theolia France SAS à lui payer une somme de 554 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

* subsidiairement, la condamner à lui payer une somme de 15 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

* la condamner à lui payer la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir en application des dispositions de l'article 1153-1 du code civil,

* la condamner aux entiers frais et dépens ;

Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 30 mars 2017, aux termes desquelles la société Theolia France prie la cour, au visa des articles 1134 et 1184 (anciens) du code civil et 9 du code de procédure civile, outre divers Constater et Dire, de confirmer cette décision et de :

* Débouter M. X... de l'ensemble de ses demandes,

* y ajoutant, condamner M. X... à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de la SCP Tuffal-Nerson Douarre & Associés, avocats ;

SUR CE, LA COUR,

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il convient de rappeler que :

*Le 12 mars 2010, la SAS Theolia France, ayant pour activité le développement et la construction de projets éoliens, ayant racheté en 2006 la société Natenco, a poursuivi les relations contractuelles de celle-ci avec M. Jürgen X... en signant un contrat de développeur avec ce dernier ;

* le 28 février 2012, un second contrat à durée indéterminée a été conclu entre la société Theolia et M. X..., comprenant en annexe la liste de huit projets dénommés, en raison de leur implantation, Biesles, Dainville, Demange, Vesaignes, Saint Blin, Montigny, La Pique et Badonvilliers ; M. X... avait pour mission d'assister la société Theolia dans le développement de projets, de faire à cet effet toute recommandation, d'obtenir, au nom et pour le compte de la société les droits et autorisations nécessaires à leurs construction et exploitation; sa rémunération comportait une partie fixe d'un montant mensuel de 1 500 euros hors taxes et des primes de succès de 10 000 euros par mégawatt, dont devait être déduite la part fixe; la résiliation de la convention pouvait intervenir, notamment pour manquements contractuels, passé le délai d'un mois après une mise en demeure ;

* le 22 janvier 2013, M. X... a vainement mis en demeure la société Theolia de régler ses factures restées impayées, représentant la part fixe de sa rémunération pour la période de juin à décembre, d'un montant de 10 500 euros ;

* le 3 mai 2013, la société Theolia France a résilié la convention de prestations de services, au motif de manquements contractuels de M. X... ;

* le 27 décembre 2013, M. X... a fait assigner la société Theolia France en paiement de la somme de 458 000 euros au titre de ses factures mensuelles et de primes contractuelles;

Sur la résiliation du contrat :

Considérant que M. X... conteste la résiliation de la convention du 28 février 2012 en application de son article 7.1, au motif de l'inexactitude des manquements reprochés antérieurement au mois de juin 2012 et du défaut de paiement de ses factures postérieurement à cette date, lui ôtant tout pouvoir de représenter la société et lui permettant d'opposer l'exception d'inexécution ;

Qu'il fait valoir le rapprochement des parties, en juillet 2012, aux fins de rupture amiable de leurs relations contractuelles ;

Considérant que la société Theolia soutient l'existence de manquements contractuels, qu'elle énumère par projet, constatés au cours de l'année 2012 et justifiant la résiliation de la convention le 3 mai 2013 ;

Qu'elle observe que les négociations du mois de juillet 2012 invoquées par M. X... ne sont pas établies et affirme que seuls les manquements constatés ont justifié la suspension de sa rémunération fixe ;

Qu'elle conteste le retrait du pouvoir de M. X... de la représenter antérieurement au mois de mai 2013 et observe que les conventions de réservation des sites de Saint Blin et de Vesaignes sont devenues caduques antérieurement à 2012 pour les premières et en 2007 pour la seconde ;

Considérant que selon l'article 7 Sanction des manquements contractuels du contrat du 28 février 2012, 7.1 Au cas où surviendrait un Manquement Contractuel, la Partie Victime pourra résilier la Convention par anticipation, sans préjudice de tous dommages-intérêts qu'elle pourrait être en droit de réclamer. Cette résiliation interviendra de plein droit, un (1) mois après une mise en demeure dûment notifiée par la Partie Victime à la Partie Défaillante (...), indiquant l'intention de faire application de la présente clause et restée infructueuse ;

Qu'aux termes de l'article 8 Résiliation de la convention, 8.1 La Convention pourra à tout moment être résiliée unilatéralement par les Parties, sous réserve du respect d'un préavis de 2 mois calendaires ;

Considérant que l'attestation délivrée par M. C... le 18 janvier 2017, selon laquelle il avait été annoncé par le directeur général de la société Theolia à M. X..., au cours d'une réunion portant sur le montant de la prime de succès du projet de Dainville, au mois de juin ou juillet 2012, qu'il était mis fin à leurs relations contractuelles, ne peut établir une résiliation de la convention à cette date, faute de mise en demeure dans les termes du contrat ;

Qu'en revanche, le courrier adressé par la société Theolia le 3 mai 2013 mentionne la résiliation encourue, faute par M. X... de régulariser les manquements énuméréset constitue la mise en demeure contractuellement prévue ;

Que la charge de la preuve des manquements incombe à la partie qui les invoque à l'appui de sa décision de résiliation, soit à la société Theolia ;

Qu'à cet égard, celle-ci produit,

- pour le projet de Saint-Blin, la convention de réservation de site en date du 17 décembre 2004 et les arrêtés préfectoraux de refus de permis de construire en date des 18 novembre 2009, 13 juillet et 26 juillet 2012,

- pour le projet de Vesaignes, la convention de réservation de site en date du 14 décembre 2004, l'arrêté préfectoral de refus de permis de construire en date du 13 juillet 2012 et le courrier adressé à la préfecture demandant l'instruction du permis de construire à la suite de l'annulation le 29 avril 2014 par le tribunal administratif de l'arrêté du 13 juillet 2012,

- pour le projet de Dainville, la convention de réservation de site en date du 10 janvier 2008 et le procès-verbal de constat par huissier de justice du 11 octobre 2010 de l'affichage du permis de construire et de l'arrêté préfectoral autorisant le défrichement;

Que ces éléments disparates n'établissent aucun manquement de la part de M. X..., notamment quant à la caducité de conventions de réservation de site, antérieur au mois de juin 2012, date à laquelle celui-ci est en droit d'opposer une exception d'inexécution résultant du défaut de paiement de la part fixe de sa rémunération ; que, faute de mise en demeure et de tout justificatif, la société Theolia ne peut se prévaloir de cette même exception pour justifier l'arrêt du versement de la rémunération fixe de M. X... ;

Qu'il s'ensuit que la résiliation initiée par la société Theolia s'inscrit dans le cadre de l'article 8.1, comme unilatérale, et non de l'article 7.1, pour manquements contractuels, de la convention ;

Sur les rémunération dues à M. X... :

Considérant que M. X... demande l'application de l'article 8 de la convention, modulant les primes dues à l'époque de la résiliation suivant l'état d'avancement des projets, pour une somme totale de 554 000 euros ;

Qu'il détaille ainsi dans ses écritures l'état des projets de Dainville, Demange, Vesaignes, Saint Blin, La Pique et Badonvilliers, dont les primes ne lui ont pas été versées ;

Considérant que la société Theolia réplique que le foncier de Vesaignes, Saint Blin, La Pique et Badonvilliers n'est pas sécurisé, que les demandes de permis de construire des sites de Saint Blin et de Vesaignes ont été refusés et que le projet de Vesaignes a du être abandonné en raison de son implantation ;

Qu'elle conteste l'attribution de primes au titre des projets de Dainville et Demange, où elle a elle-même sécurisé le foncier, suppléant ainsi à la carence de M. X... ;

Considérant que selon l'article 4.5 de la convention du 28 février 2012, Le montant de la Prime relative à un Projet déterminé sera de EUR 10.000 par MW composant le Projet faisant objet du financement ou de la cession prévus à l'article 4.2 b), desquels seront déduites les Rémunérations de base perçues depuis le paiement de la dernière Prime.

En tout état de cause, le montant de la Prime ne pourra être inférieur à zéro ;

Qu'aux termes de son article 8.3, Dans l'hypothèse d'une résiliation unilatérale à l'initiative du Bénéficiaire :

(a) les Rémunérations de Base versées resteront acquises au Prestataire ;

(b) le Prestataire pourra se voir payer :

(i) un montant égal à 100% des Primes qu'aurait perçu le Prestataire au titre des Projets pour lesquels les permis de construire purgés de touts recours ont été obtenus au jour de résiliation de la Convention;

(ii) un montant égal à 50% des Primes qu'aurait perçu le Prestataire au titre des Projets pour lesquels les demandes de permis de construire y relatifs ont été déposées au jour de résiliation de la Convention;

(iii) un montant égal à 25% des Primes qu'aurait perçu le Prestataire au titre des Projets pour lesquels l'étude d'impact environnementale a été commandée au jour de résiliation de la Convention;

(iv) un montant égal à 10% des Primes qu'aurait perçu le Prestataire au titre des Projets pour lesquels :

(A) aucune demandes de permis de construire n'a été déposé au jour de résiliation de la Convention; et

(B) l'étude d'impact environnementale n'a pas été commandée au jour de résiliation de la Convention ;

Que ces paiements modulés ne sont assortis d'aucune autre condition ;

Que M. X... produit les arrêtés préfectoraux accordant un permis de construire pour les sites de [...] le 29 septembre 2010 et de Demange-aux-Eaux le 21 août 2012 ; que l'existence de recours à l'encontre de ces autorisations n'est pas alléguée par la société Theolia ; que les primes de ces projets sont intégralement dues à M. X... ;

Qu'il justifie du dépôt du permis de construire pour les sites de Vesaignes le 23 février 2006 et de Saint Blin le 27 février 2006 ; qu'il lui est dû 50 % du montant des primes qu'il aurait perçues ;

Qu'il établit l'existence du projet du site de [...] par le procès-verbal des délibérations du conseil municipal de cette commune en date du 19 juin 2005, approuvant le projet et autorisant l'enquête pour son élaboration ; qu'il lui est dû à ce titre 10 % du montant des primes qu'il aurait perçues ;

Que le surplus des pièces produites ne mentionne pas le site de La Pique, dont l'état n'est pas justifié ;

Que les puissances des projets, soit 24 mégawatts pour le site [...], 18 mégawatts pour le site [...], 10 mégawatts pour le site Vesaignes, 12 mégawatts pour le site Saint Blin et 12 mégawatts pour le site [...] ne sont pas contestées par la société Theolia ;

Qu'il résulte de ces éléments que, par infirmation du jugement, la société Theolia sera condamnée à verser à M. X... la somme totale de 542 000 euros (240 000 + 180 000 + 50 000 + 60 000 + 12 000), avec intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2013, date de l'assignation, dans les termes de la demande ;

Sur les autres demandes:

Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que la société Theolia ne saurait bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en revanche, l'équité commande de la condamner, sur ce même fondement, à verser à M. X... la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'il sera rappelé que les condamnations à indemnité emportent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en application de l'article 1231-7 du code civil ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Statuant à nouveau,

Condamne la société Theolia à payer à M. Jürgen X... la somme de 542 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2013 ;

Condamne la société Theolia à payer à M. Jürgen X... la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Theolia aux dépens.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 16/21992
Date de la décision : 11/10/2018

Références :

Cour d'appel de Paris C2, arrêt n°16/21992 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-11;16.21992 ?
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