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21/06/2018 | FRANCE | N°16/10454

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 21 juin 2018, 16/10454


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 21 Juin 2018

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/10454



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Juin 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 14/09745





APPELANTE

Mme Aline X...

Bât A

[...]

née le [...] à PARIS (75010)

comparante en personne
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INTIMEE

Société SOCIETE ORANGE

[...]

représentée par Me Sabine Y..., avocat au barreau de PARIS





COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 08 Mars 2018, en audience publiqu...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 21 Juin 2018

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/10454

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Juin 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 14/09745

APPELANTE

Mme Aline X...

Bât A

[...]

née le [...] à PARIS (75010)

comparante en personne

INTIMEE

Société SOCIETE ORANGE

[...]

représentée par Me Sabine Y..., avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Mars 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:

Catherine BEZIO, Présidente de chambre

Patricia DUFOUR, Conseiller

Benoît DEVIGNOT, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Géraldine BERENGUER, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la COUR, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile. Prorogé ce jour.

- signé par Madame Catherine BEZIO, Président et par Madame Géraldine BERENGUER, greffier de la mise à disposition et à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et prétentions:

En 1982, sous statut de fonctionnaire, Madame Aline X... est entrée au sein de FRANCE TELECOM en qualité d'ingénieur du Corps interministériel des télécommunications.

Le 1er juillet 1984, elle a été nommée au Centre National d'Etude des Télécommunications, entité qui a été placée ultérieurement sous la responsabilité de FRANCE TELECOM, qui venait d'être dotée de la personnalité morale.

A compter du 1er janvier 1993, Madame X... a été détachée à FRANCE TELECOM sur un emploi supérieur de 2ème niveau.

En application des la loi n°90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, par arrêté en date du 3 octobre 2002, Madame X... a été positionnée 'hors cadre' et détachée au sein de FRANCE TELECOM.

A la suite du décret n° 2006-96 du 1er février 2006, modifiant le décret n° 67-715 du 16 août 1997 relatif au statut particulier du corps des ingénieurs des télécommunications, l'ensemble des ingénieurs des télécommunications en position d'activité, en détachement ou 'hors cadre' chez FRANCE TELECOM, ont été rattachés pour leur gestion au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Après que Madame X... eut choisi entre les trois possibilités qui lui étaient offertes et eut opté pour le détachement d'office sous statut de fonctionnaire, par arrêté en date du 2 novembre 2006 le ministre de l'industrie a mis fin à sa position 'hors cadre', l'a réintégrée pour ordre dans son corps d'origine et l'a placée en position de détachement dans un emploi supérieur de la société ORANGE, anciennement dénommée FRANCE TELECOM.

Par arrêté en date du 21 novembre 2006 avec effet à compter du 3 février 2006, Madame X... a été détachée d'office auprès de la société ORANGE, anciennement dénommée FRANCE TELECOM. En 2009, toujours sous statut de fonctionnaire d' Etat, elle est devenue ingénieur des mines suite à la fusion du corps des ingénieurs des télécommunications avec le corps des ingénieurs des mines.

Le 21 juillet 2014, Madame X... a saisi le conseil de prud'hommes de Paris d'une demande tendant à voir condamner la société ORANGE au paiement de dommages et intérêts pour rupture de son contrat de travail en 2006, pour harcèlement moral et mise à pied et préjudice moral ainsi que d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 30 juin 2016, le conseil de prud'hommes a jugé les demandes de Madame X... irrecevables et l'a condamnée aux dépens.

Le 22 juillet 2016, Madame X... a fait appel de la décision.

Elle demande à la cour:

- d'annuler le jugement déféré,

- de déclarer recevables ses trois recours,

- de condamner la société ORANGE à lui payer les sommes suivantes:

** 189.296 € à titre de dommages et intérêts pour rupture injustifiée du contrat de travail dont elle disposait avant 2006,

** 306.848 € à titre de manque à gagner sur sa rémunération entre mai-2011 et mars 2018,

** 400.000 € à titre de compensation du préjudice moral subi du fait du harcèlement moral et de sa mise à pied,

- d' imposer à la société ORANGE de la faire bénéficier de tous les avantages liés à un contrat de travail à compter d'avril 2018,

- de condamner la société ORANGE aux dépens et au paiement de la somme de 7.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société ORANGE demande à la cour de:

- constater que les demandes de Madame X... se heurtent à l'autorité de la chose jugée attachée aux décisions rendues par le tribunal des conflits le 7 juillet 2014, le tribunal administratif de Paris, le 26 novembre 2015, et la cour administrative d'appel de Versailles, le 7 novembre 2017,

En conséquence,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes de Madame X... comme irrecevables,

- condamner Madame X... aux dépens et au paiement de la somme de 15.000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et celle de 10.000 € au titre de ses frais irrépétibles d'appel.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 8 mars 2018, reprises et complétées à l'audience.

MOTIVATION :

Selon les termes de l'article 445 du code de procédure civile, 'après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus par les articles 442 et 444".

En l'espèce, il s'avère que le président n'a, ni sollicité, ni accordé à Madame X... le dépôt d'une note à l'appui de ses observations après la clôture des débats.

Dès lors, il convient de rejeter la note en délibéré adressée à la cour par Madame X... le 9 mars 2018.

Sur la recevabilité des demandes:

Selon les termes de l'article 122 du code de procédure civile 'Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée'.

Toutefois, il résulte de l'application de ce texte que l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice.

Au surplus, le principe de la séparation des autorités administrative et judiciaire résulte de la loi des 16 et 24 août 1790 qui fait interdiction aux tribunaux de connaître des litiges administratifs et crée, à cet effet, des conseils de préfecture.

Ce principe a été réaffirmé par le décret du 16 fructidor an III et par la loi du 24 mai 1872 qui a permis au Conseil d'Etat de devenir juge administratif de droit commun et a recréé le tribunal des conflits, juridiction chargée de trancher les litiges de compétence entre les juridictions de l'ordre administratif et les juridictions de l'ordre judiciaire, dont les décisions ont autorité de chose jugée et s'imposent aux deux ordres de juridictions.

En l'espèce, Madame X... soutient que dans la présente instance, les trois recours qui sont présentés sont bien distincts de ceux adressés à la justice administrative.

A cet effet, elle expose que le premier recours est de la compétence du juge judiciaire puisqu'il s'agit d'une question portant sur l'existence ou la rupture par la société ORANGE, en février 2006, du contrat de travail dont elle bénéficiait antérieurement et sur son indemnisation.

Madame X... déclare que le second recours, qui est relatif au harcèlement moral, ne porte que sur des faits survenus entre mi-2011 et aujourd'hui, tandis que la requête pour harcèlement moral adressée au tribunal administratif, en application stricte de la décision du Tribunal des conflits, ne portait que sur la période 2007-mi 2011.

Enfin, elle considère que son troisième recours, qui prend acte de l'annulation par le juge administratif de la demande de la société ORANGE de la fin de son détachement, est fondé sur le fait que, tout en annulant la dite demande, le juge administratif ne s'est pas pour autant prononcé sur le dédommagement qu'elle avait sollicité. Dès lors, elle fait valoir que c'est un dédommagement du préjudice moral subi qu'elle réclame dans la présente instance.

Au vu des éléments précités, Madame X... demande à la cour d'annuler le jugement déféré et de la déclarer recevable en ses demandes.

La société ORANGE demande à la cour de confirmer le jugement déféré et expose que le Tribunal des conflits a jugé que les litiges élevés par Madame X... relevaient de la compétence exclusive de la juridiction administrative et qu'au surplus, les juridictions administratives, qu'il s'agisse du tribunal administratif de Cergy-Pontoise ou de la cour administrative de Versailles, saisies après la décision du Tribunal des conflits, par l'appelante, l'ont déjà déboutée de ses présentes demandes.

Au vu des textes précités et des pièces versées aux débats par les parties, il apparaît:

- que par arrêt en date du 13 février 2013, la cour d'appel de Paris a confirmé la compétence du conseil de prud'hommes pour connaître du litige opposant Madame X... à la société ORANGE et a rejeté le déclinatoire de compétence du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, quant à l'incompétence des juridictions judiciaires,

- que par arrêté en date du 4 mars 2014, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a élevé le conflit au motif que Madame X..., en sa qualité d'ingénieur des télécommunications, sous statut de fonctionnaire, avait bénéficié des dispositions légales particulières la mettant, en 2006, à la disposition de FRANCE TELECOM, devenue la société ORANGE, par la voie du détachement d'office et que les emplois supérieurs de FRANCE TELECOM, dont relevait celui de Madame X..., étaient exclusivement réservés à des fonctionnaires,

- que par décision en date du 7 juillet 2014, le Tribunal des conflits a confirmé l'arrêté de conflit pris le 4 mars 2014 par le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, et a déclaré nuls et non avenus la procédure engagée par Madame X... devant le conseil de prud'hommes de Paris, le jugement de cette juridiction en date du 14 mai 2013, la procédure engagée devant la cour d'appel de Paris et l'arrêt de cette cour en date du 13 février 2014.

Il résulte de cette décision du Tribunal des Conflits, qui s'impose aux juridictions judiciaires, qu' à la date du 7 juillet 2014, Madame X..., avait le statut de fonctionnaire et qu'aucun contrat de travail de droit privé ne la liait à son employeur, la société ORANGE, et qu'aucun contrat de travail ne l'avait jamais lié à cette société.

Dans la présente procédure, Madame X... soutient que ses trois présentes demandes relèvent de la compétence des juridictions judiciaires.

Il s'avère, toutefois, que Madame X... ne produit aux débats aucun élément probant établissant que depuis la décision du Tribunal des conflits, sa situation professionnelle a été modifiée, ainsi, par sa démission du statut de fonctionnaire et la signature d' un contrat de travail de droit privé avec la société ORANGE.

Il en résulte que sa situation professionnelle n'a pas été modifiée depuis la décision rendue par le Tribunal des conflits et qu'en application des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile précité, la dite décision a autorité de chose jugée à l'égard de la présente cour.

Dès lors, il convient de considérer que, compte-tenu de l'autorité de chose jugée dont est revêtue la décision du Tribunal des conflits en date du 7 juillet 2014, les demandes formées par Madame X... à l'encontre de la société ORANGE sont irrecevables devant les juridictions judiciaires.

Le jugement déféré est confirmé en ce qu'il a jugé les demandes irrecevables.

Madame X... est condamnée aux dépens.

Pour faire valoir ses droits, la société ORANGE dû engager des frais non compris dans les dépens. Madame X... est condamnée à lui payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel. La société ORANGE est déboutée de cette demande au titre de la procédure devant le conseil de prud'hommes.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

- rejette la note en délibéré adressée à la cour par Madame Aline X... le 9 mars 2018.

- confirme le jugement déféré ce qu'il a considéré comme irrecevables les demandes formées par Madame Aline X... à l'encontre de la société ORANGE,

Y ajoutant,

- condamne Madame X... aux dépens et au paiement à la société ORANGE de la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 16/10454
Date de la décision : 21/06/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°16/10454 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-21;16.10454 ?
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