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08/06/2018 | FRANCE | N°16/231467

France | France, Cour d'appel de Paris, G1, 08 juin 2018, 16/231467


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

ARRÊT DU 08 JUIN 2018

(no , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/23146

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Octobre 2016 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG no 14/04482

APPELANTE

SA SAFER DE L'ILE DE FRANCE (SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL DE L'ILE DE FRANCE) agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants lég

aux domiciliés [...]

Représentée par Me Anne D... de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au bar...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

ARRÊT DU 08 JUIN 2018

(no , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/23146

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Octobre 2016 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG no 14/04482

APPELANTE

SA SAFER DE L'ILE DE FRANCE (SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL DE L'ILE DE FRANCE) agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés [...]

Représentée par Me Anne D... de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111
Assistée sur l'audience par Me Thierry X..., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 233

INTIMÉS

Monsieur Claude Y...
né le [...] à

demeurant [...]

non représenté
Signification de l'assignation le 5 janvier 2017 et des conclusions le 15 février 2017 par acte délivré en vertu de l'article 659 du Code de Procédure Civile.

Monsieur Ayoub Z...

demeurant [...]

Représenté et assisté sur l'audience par Me Anne-constance C... E... C..., avocat au barreau de PARIS, toque : E0653, substitué sur l'audience par Me Maria-Kim A..., avocat au barreau de PARIS, toque : E653

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 Mai 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre
M. Dominique GILLES, Conseiller
Mme Christine BARBEROT, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Dominique DOS REIS dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier lors des débats : M. Christophe DECAIX

ARRÊT : DÉFAUT

- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre, et par Christophe DECAIX, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

Suivant notification du 1er février 2013, la Société d'Aménagement Foncier et
d'Établissement Rural d'île de France (SAFER IDF) a été destinataire d'une déclaration d'intention d'aliéner (DIA) établie par M. B..., notaire à Dourdan, relative à la vente par M. Claude Y... à M. Ayoub Z... d'une parcelle de terre classée en zone agricole (NC) sise [...] (91), cadastrée Section [...] , d'une surface de 42 ares, au prix de 4.000 € et libre de toute occupation mais comportant un hangar en construction et d'autres abris, édifiés par M. Z....

Par lettres recommandées en date du 28 mars 2013 distribuées le 2 avril 2013 à M. B... et le 30 mars 2013 à M. Z..., la SAFER IDF leur a fait connaître sa décision d'exercer son droit de préemption sur ladite parcelle, libre de tout bail. Un avis a été publié en mairie de [...], le 22 avril 2013.

Par lettre du 17 avril 2013, le conseil de M. Z... s'est opposé à la décision de la SAFER IDF aux motifs que celui-ci exerçait sur cette parcelle une activité d'éleveur négociant d'ovins et bénéficiait d"un bail emphytéotique consenti par M. Y... le 14 janvier 2011, dans le cadre duquel M. Y... avait autorisé M. Z... à édifier sur la parcelle divers bâtiments nécessaires à son exploitation.

C'est dans ces conditions que, suivant actes extra-judiciaires des 19 mai et 2 juin 2014, la SAFER IDF a assigné M. Ayoub Z... et M. Claude Y... aux fins d'entendre ordonner la réalisation forcée de la vente de la parcelle litigieuse à son pro t.

Par jugement du 3 octobre 2016 le tribunal de grande instance d'Évry a :

- déclaré la SAFER IDF forclose dans l'exercice de son droit de préemption de la parcelle de terre sise [...] (91), cadastrée Section [...] appartenant à M. Claude Y....
- débouté la SAFER IDF de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la SAFER IDF à verser à M. Ayoub Z... la somme de 1.800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouté la SAFER IDF de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à l'encontre de M. Claude Y... et de M. Ayoub Z...,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement,
- condamné la SAFER IDF au paiement des dépens.

La SAFER IDF a relevé appel de ce jugement et demande à la Cour, par dernières conclusions du 8 février 2017, de :

Vu les articles L 141-1 et suivants, L 143-1 et suivants, R 143-4 et L 412- 8 et suivants du Code rural et l'article 1589 du Code civil,
Vu les articles L 331-2 et suivants du Code rural,
Vu l'article 28 du Décret du 4 janvier 1955,
Vu les articles L 451-1 et suivants du Code rural,
Vu la décision de préemption de la SAFER de l'île de France en date du 28 mars 2013,
Vu le Décret du 5 mars 2009 autorisant pour une nouvelle période de cinq années la SAFER de l'île de France à exercer son droit de préemption,

- infirmer le jugement du 3 octobre 2016 du Tribunal de Grande Instance d'Évry,
- dire que M. Z... est irrecevable à soutenir qu'elle ne peut préempter en raison d'une DIA comportant une erreur et de toutes ses demandes plus amples visant la DIA du 1er février 2013,
- débouter M. Z... de l'ensemble de ses autres demandes comme étant non fondées,
constater qu'elle a fait valoir son droit de préemption dans les conditions fixées par les articles L 143-1 et suivants, L 412-8 et R 143-6 du Code rural et de la Pêche Maritime,
- dire que les parcelles sont libres de toute occupation, M. Z... ne disposant pas d'un titre opposable à la SAFER de l'île de France,
- constater, en tant que de besoin, la nullité absolue du bail dont il se prévaut et en tout état de cause l'inopposabilité de cet acte à la SAFER de l'île de France,
- constater que la décision de préemption vaut acceptation de l'offre de vente exprimée par la déclaration d'intention d'aliéner qu'elle a reçue de M. B... concernant la vente par M. Claude Y... de la parcelle sise [...] constater la perfection de la vente de cette parcelle au profit de la SAFER de l'île de France, - en conséquence, ordonner la réalisation forcée de la vente sous astreinte de 500 € par jour de retard à la charge de M. Girault, - dire que celui-ci sera convoqué par M. Chanson pour régulariser la vente de la parcelle [...] à [...] au profit de la SAFER de l'île de France sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt,
- dire qu'à défaut, elle pourra procéder à la publication du présent arrêt qui vaudra acte de vente à son profit de la parcelle sise sur la commune de [...] (91) cadastrée [...] pour une contenance totale de 42a 00ca,
- dire que l'acte sous seings privés du 14 janvier 2011 entre MM. Y... et Z... visant la parcelle [...] Commune de [...] est entaché de nullité absolue pour cause de fraude aux droits de la SAFER de l'île de France,
- dire que cet acte lui est en tout état de cause inopposable,
- dire que M. Z... est sans titre opposable et lui faire injonction d'avoir à libérer la parcelle [...] commune de [...] de toute occupation de son chef sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt,
- prononcer en tant que de besoin l'expulsion de M. Z... comme de tout occupant, d'objet ou d'ouvrage, de son chef ou de celui de M. Y... avec, si nécessaire, l'assistance de la force publique, faute d'avoir libéré la parcelle [...] commune de [...] (91) dans un délai de huit jours à compter de la signification du présent arrêt,
- condamner M. Z... à lui payer une somme de 20.000 € en tant que dommages-intérêts pour abus de droit,
- condamner solidairement « les défendeurs » à lui verser une somme de 23.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

M. Ayoub Z... prie la Cour, par dernières conclusions signifiées le 14 avril 2017, de :

Vu les articles L.451-1 à L.451-13, L. 143-8, L. 412-8 du code rural,
Vu les articles 122, 700 du code de procédure civile,
Vu les pièces versées aux débats,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- condamner la SAFER à payer à lui payer la somme 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. Y..., régulièrement assigné, n'a pas constitué avocat.

SUR CE
LA COUR

Au soutien de son appel, la SAFER IDF fait valoir essentiellement que son droit de préemption est régi par l'article R.143-6 du code rural qui n'impose pas de notifier l'exercice de son droit au vendeur, lequel est représenté par son notaire, que M. Z... est sans qualité pour se prévaloir d'une erreur viciant la régularité de la DIA, laquelle présente le bien objet de la vente comme étant libre d'occupation, qu'il ne peut prétendre bénéficier d'un bail emphytéotique qui n'est ni enregistré ni publié et qui vise au demeurant une activité d'éleveur d'ovins qui est commerciale et non agricole ;

M. Z... réplique qu'il a conclu avec M. Y..., le 14 mai 2011, un bail emphytéotique agricole sur la parcelle dont s'agit afin d'exercer l'activité d'éleveur d'ovins et d'équidés, en attendant la finalisation de la vente, que son activité agricole a fait l'objet d'une déclaration et d'un enregistrement à la chambre de commerce et d'industrie de l'Essonne, qu'il est affilé à la MSA, qu'il a édifié sur ladite parcelle des bâtiments nécessaires à son exploitation, qu'alors même que la vente était parfaite entre lui-même et M. Y..., et le prix payé, M. B... n'a établi aucun acte authentique et a cru devoir adresser à la SAFER, le 1er février 2013, une nouvelle DIA qui a déclenché la préemption de celle-ci ; il indique qu'en réponse à l'envoi d'une première DIA du 20 septembre 2011, la commune avait répondu que la parcelle litigieuse n'était pas située dans le périmètre soumis au droit de préemption urbain et que la SAFER, n'avait pas exercé son droit de préemption dans les deux mois de cet envoi, de sorte qu'elle est à présent forclose pour le faire ; il soutient avoir qualité pour agir en tant qu'acquéreur évincé et titulaire d'un droit réel sur le bien et que la SAFER aurait dû notifier, en tout état de cause, l'exercice de son droit de préemption à M. Y..., vendeur, non représenté par le notaire B... à l'égard de cette notification ;

Sur la qualité pour agir de M. Z...

M. Z..., en sa qualité d'acquéreur évincé et soutenant bénéficier d'un droit réel sur la parcelle objet de la DIA, a qualité pour agir en nullité de la préemption de la SAFER ;

Sur la forclusion de l'exercice du droit de préemption de la SAFER

D'une part, l'envoi par le notaire B... à la SAFER, le 1er février 2013, d'une DIA concernant certes la même parcelle que celle objet d'une première DIA du 20 septembre 2011, mais pour un prix distinct de 4.000 € au lieu de 4.500 €, a ouvert un nouveau droit de préemption à la SAFER ;

D'autre part, l'article R. 143-6 du code rural n'impose pas à la SAFER de notifier l'exercice de son droit de préemption au vendeur, lequel est représenté par son notaire, investi du pouvoir de représenter son client dans la cadre des formalités nécessaires à la perfection de la vente ;

Il suit de ces considérations que la SAFER n'est pas forclose pour exercer son droit de préemption sur la parcelle litigieuse ;

Sur la validité de la DIA

M. Z... prétend que la DIA, en ce qu'elle mentionne inexactement que la parcelle mise en vente est libre de toute occupation, ne peut faire l'objet d'une préemption de la part de la SAFER, alors qu'il bénéficie d'un bail emphytéotique sur ce bien et y exerce une activité agricole ; toutefois, d'une part, il ne produit aucun justificatif de ses assertions relatives à l'enregistrement et la publication du bail emphytéotique conclu sous seings privés avec M. Y... le 14 janvier 2011, qui n'a donc pas date certaine et n'est pas opposable aux tiers à défaut de publication au service de la publicité foncière, d'autre part, son activité de négociant en ovins, de nature commerciale et non agricole, ne lui confère aucun droit au maintien dans les lieux ;

Sur l'exercice du droit de préemption de la SAFER

La SAFER ayant valablement exercé son droit de préemption sur la parcelle objet de la DIA du 1er février 2013, il sera fait droit à sa demande tendant à la perfection de la vente, suivant les mentions du dispositif ci-après, et M. Z... devra, à défaut de quitter volontairement les lieux, en être expulsé ;

L'exercice d'une action en justice par une partie qui fait une appréciation inexacte de ses droits n'est pas, en soi, constitutif d'une faute, à moins que cet exercice ne soit accompagné de circonstances particulières de nature à le faire dégénérer en abus par malice, légèreté blâmable ou intention de nuire, circonstances non caractérisées au cas d'espèce, de sorte que la SAFER sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

L'équité ne justifie pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en la cause.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et par défaut,

Dit M. Z... recevable à agir,

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau,

Dit que la décision de préemption de la SAFER IDF vaut acceptation de l'offre de vente exprimée par la déclaration d'intention d'aliéner qu'elle a reçue de M. B... concernant la vente par M. Claude Y... de la parcelle sise commune de [...], [...], cadastrée [...] pour 42 a 00 ca,

Dit la vente parfaite et ordonne la signature de l'acte authentique de réitération sous astreinte de 500 € par jour de retard à la charge de M. Y..., passé trois mois de la signification du présent arrêt,

Dit qu'à défaut pour ce dernier de se présenter en l'étude de M. B..., notaire à Dourdan, dans ce délai de trois mois, le présent arrêt vaudra acte authentique de vente et sera publié comme tel, entre :

- d'une part, M. Claude Y..., né le [...] , demeurant [...]
- d'autre part, la SAFER IDF, ayant son siège social [...] ,

et portant sur la parcelle sise sur la commune de [...] (91) cadastrée [...] pour une contenance totale de 42 a 00 ca, lieudit [...],

Enjoint à M. Z... de libérer la parcelle cadastrée [...], commune de [...], de toute occupation de son chef sous astreinte de 500 € par jour de retard passé trois mois à compter de la signification du présent arrêt, et, en tant que de besoin, prononce son expulsion ainsi que celle de tout occupant, objet ou ouvrage, de son chef ou de celui de M. Y..., avec, si nécessaire, l'assistance de la force publique,

Rejette toute autre demande,

Condamne M. Z... aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : G1
Numéro d'arrêt : 16/231467
Date de la décision : 08/06/2018
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2018-06-08;16.231467 ?
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