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08/06/2018 | FRANCE | N°16/132527

France | France, Cour d'appel de Paris, G1, 08 juin 2018, 16/132527


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

ARRÊT DU 08 JUIN 2018

(no , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/13252

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Juin 2016 -Tribunal de Grande Instance de MELUN - RG no 14/03474

APPELANTE

SARL SCADIF EXPANSION prise en la personne de son Gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège
No SIRET : 413 967 357

ayant son siège au [...]

Re

présentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056
Assistée sur l'a...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

ARRÊT DU 08 JUIN 2018

(no , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/13252

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Juin 2016 -Tribunal de Grande Instance de MELUN - RG no 14/03474

APPELANTE

SARL SCADIF EXPANSION prise en la personne de son Gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège
No SIRET : 413 967 357

ayant son siège au [...]

Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056
Assistée sur l'audience par Me Cécile UZAN SELLAM, avocat au barreau de PARIS, toque : E0292

INTIMÉES

Société ARTHUR WILSON
No SIRET : 343 006 607 00067

ayant son siège au [...]

Représentée par Me Paul-gabriel CHAUMANET de l'ASSOCIATION CHAUMANET, CALANDRE - EHANNO, CAYLA - DESTREM, avocat au barreau de PARIS, toque : R101
Assistée sur l'audience par Me Hélène CAYLA-DESTREM, avocat au barreau de PARIS, toque : R 101

SAS FONTENAY INVEST
No SIRET : 798 592 267

ayant son siège au [...]

Représentée par Me Paul-gabriel CHAUMANET de l'ASSOCIATION CHAUMANET, CALANDRE - EHANNO, CAYLA - DESTREM, avocat au barreau de PARIS, toque : R101
Assistée sur l'audience par Me Hélène CAYLA-DESTREM, avocat au barreau de PARIS, toque : R 101

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 Mai 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre
M. Dominique GILLES, Conseiller
Mme Christine BARBEROT, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Dominique DOS REIS dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier lors des débats : M. Christophe DECAIX

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre, et par Christophe DECAIX, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

Le 11 février 2011, la commune de Fontenay-Trésigny (77) a promis de vendre à la société Arthur Wilson, qui s'est réservé la faculté d'acquérir, deux terrains sis dans la [...] , dans le but d'y faire édifier un ensemble immobilier à usage commercial. Cette promesse a expiré sans que l'option fut levée mais la commune a consenti, le 4 mars 2013, à la société Arthur Wilson une seconde promesse de vente expirant le 31 décembre de la même année.

La société Arthur Wilson a recherché des partenaires pour monter cette opération et, s'est, dans ce cadre, rapprochée de la société Scadif Expansion, adhérente du Groupe Leclerc. Cette dernière a adressé à la société Arthur Wilson, le 13 décembre 2011, une lettre d'intention exprimant son souhait d'acquérir au sein du parc de [...], sous diverses conditions suspensives, une coque en l'état futur d'achèvement au prix de 7.200.000 €, afin d'y créer une centre Leclerc de 2.500 m².

Les négociations entre ces deux sociétés se sont poursuivies en 2012 et 2013, mais n'ont pas abouti avant l'expiration, le 31 décembre 2013, de la seconde promesse de vente. Par la suite, la société Scadif Expansion a acquis directement le terrain litigieux, selon acte authentique du 13 mai 2014.

C'est dans ces conditions que, suivant acte extra-judiciaire du 23 septembre 2014, la société Arthur Wilson et la société Fontenay Invest qu'elle s'était substituée dans le bénéfice de la promesse de vente, le 13 décembre 2013, ont assigné la société Scadif Expansion en lui reprochant une rupture abusive de pourparlers, à l'effet de la voir condamner au paiement des sommes de 444.592 de dommages-intérêts et de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.

Par jugement du 7 juin 2016, le tribunal de grande instance de Melun a:

- dit irrecevable l'action de la société Fontenay Invest,
- dit que la société Scadif Expansion était responsable de la rupture abusive des pourparlers,
- condamné la société Scadif Expansion à payer à la société Arthur Wilson les sommes de:

- 31.380,96 € en remboursement des frais exposés en vain dans le cadre des négociations,
- 54.000 € au titre du temps passé en vain à l'occasion de la négociation,

- rejeté le surplus des demandes,
- condamné la société Scadif Expansion à payer à la société Arthur Wilson la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

La société Scadif Expansion a relevé appel de ce jugement dont elle poursuit l'infirmation, demandant à la Cour, par dernières conclusions du 27 janvier 2017, de:

- débouter la société Arthur Wilson de ses demandes,
- confirmer le jugement en ce qu'il a dit la société Fontenay Invest irrecevable en son action,
- dire la société Fontenay Invest irrecevable en son appel incident,
- condamner in solidum la société Arthur Wilson et la société Fontenay Invest à lui payer une somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.

La société Fontenay Invest prie la Cour, par dernières conclusions du 28 novembre 2016, de:

au visa de l'article 1382 ancien du code civil,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a dite irrecevable en son action,
- le confirmer en ce qu'il a dit que la société Scadif Expansion était responsable de la rupture abusive des pourparlers,
- condamner la société Scadif Expansion à payer à la société Arthur Wilson et à elle-même les sommes de:

- 66.653,75 € en remboursement des frais exposés en vain dans le cadre des négociations,
- 185.000 € au titre du temps passé en vain dans la négociation et le montage du dossier,
- 200.000 € au titre du comportement frauduleux de la société Scadif Expansion,

- débouter la société Scadif Expansion de ses demandes,
- la condamner au paiement de la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.

La société Arthur Wilson a été déclarée irrecevable à conclure par ordonnance du conseiller de la mise en état du 1er juin 2017.

SUR CE
LA COUR

Sur la qualité pour agir de la société Fontenay Invest

La substitution, opérée le 13 décembre 2013, de la société Fontenay Invest à la société Arthur Wilson, ne porte que sur les droits tenus par la seconde de la promesse de vente consentie par la commune de Fontenay-Trésigny et ne l'investit pas d'une action quelconque en réparation d'un dommage quasi-délictuel subi par la société Arthur Wilson en raison de la rupture de pourparlers engagés avec un tiers à la promesse; le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit la société Fontenay Invest irrecevable à agir;

Sur la rupture des pourparlers

La société Scadif Expansion conteste être à l'origine de la rupture des pourparlers entamés avec la société Arthur Wilson et soutient que cette rupture incombe à cette dernière qui a refusé d'accéder à ses légitimes réclamations au titre des travaux complémentaires, à la mise à disposition anticipée des bâtiments, aux pénalités en cas de retard d'ouverture, à un condition suspensive relative à la purge du recours engagé à l'encontre du nouveau PLU adopté par la commune et souligne que, lorsque la société Arthur Wilson lui a proposé, le 3 janvier 203, un rendez-vous de signature, elle n'était plus titrée sur le terrain, la promesse de vente étant expirée depuis le 28 décembre 2012 et la nouvelle promesse ne lui ayant été consentie que le mois suivant; elle expose que des désaccords persistants sur des points techniques ont nécessité plusieurs reports de signature et qu'en réponse à sa proposition d'organiser une réunion, le 8 juillet 2013, la société Arthur Wilson lui a notifié la rupture de tout engagement à son égard, que le courriel de transmission de la société Arthur Wilson en date du 27 août 2013 indique qu'elle refuse de saisir son conseil pour valider les accords si les demandes relatives aux points 12-20-21 n'étaient pas retirés, ajoutant qu'en dépit de ce refus, les pourparlers se sont poursuivis jusqu'au 5 septembre 2013; elle conteste le raisonnement du tribunal qui consiste à scinder artificiellement les discussions techniques et les questions juridiques et estime que ces questions juridiques, découlant des décisions prises sur des points techniques (création d'une mezzanine, garantie à première demande, notamment), étaient prégnantes et essentielles; enfin, elle souligne que la société Arthur Wilson poursuivait en parallèle d'autres négociations avec des concurrents (Super U, Carrefour);

Ces moyens ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs exacts que la Cour adopte sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation;

Il ressort en effet des nombreux courriels échangés entre les parties que, s'agissant des questions juridiques relatives à la promesse de vente, la société Arthur Wilson avait, dès le 19 juin 2012, proposé une réunion de concertation «strictement juridique, portant sur l'organisation de l'espace et la promesse de vente», proposition à laquelle la société Scadif Expansion n'a pas répondu tout en continuant à entretenir des échanges sur les seuls aspects techniques de l'opération, demandes auxquelles la société Arthur Wilson a accédé en faisant établir des plans, calculs, études et documents divers par des professionnels, tout en réitérant, le 23 novembre 2012, son intention de signer rapidement une promesse de vente, que, lors des réunions de «calage» qui se sont ensuivies, la société Scadif Expansion n'a soulevé aucun obstacle juridique, que, dans les mois suivants, la société Scadif Expansion n'a cessé de reporter les rendez-vous de signature en évoquant la nécessité de vérifier l'ensemble des pièces techniques relatives au dossier;

Il apparaît de ces circonstances que les problèmes juridiques dont fait état la société Scadif Expansion n'ont été soulevés qu'au printemps 2013, soit très tardivement, de façon artificielle et opportuniste eu égard au calendrier de signature d'un accord, alors que, par courriel du 1er mai 2013, elle avait indiqué à la société Arthur Wilson que, dès l'instant où les observations techniques étaient intégrées, une date de signature de la promesse pouvait être programmée, annulant toutefois le rendez-vous fixé à cet effet au 1er juillet 2013 sous le prétexte dilatoire d'adjoindre une mezzanine à la construction, puis multipliant à l'envie, à compter du mois d'août 2013 des exigences sur des points qui, soit, avaient été réglés lors de discussions antérieures (garantie à première demande, garantie des vices cachés, garantie d'achèvement), soit n'avaient pas été abordés (échelonnement de paiement du prix) lors des longues et détaillées négociations ayant donné lieu à ses deux lettres d'intention (13 décembre 2011 et 23 novembre 2012), alors qu'elle savait pertinemment que la promesse de vente accordée par la commune à la société Arthur Wilson expirait le 31 décembre suivant;

Ces tergiversations et atermoiements infondés ont eu pour effet de faire échouer les négociations entamées avec la commune, avec laquelle la Scadif avait dans le même temps, engagé des négociations à son profit ainsi que le démontre la rapidité de la signature d'une vente en la forme authentique, le 13 mai 2014, entre la commune de Fontenay-Trésigny et la Scadif, forte des plans, études et documents techniques d'implantation établis à sa requête par la société Arthur Wilson et des démarches entamées par celle-ci, tous documents qu'elle a exploités et utilisés à son bénéfice pour déposer et obtenir une autorisation d'aménagement de la part de la Commission Départementale d'Aménagement Commercial en présentant un projet quasi-similaire à celui défini antérieurement avec la société Arthur Wilson, sauf à remplacer un restaurant par une station-service, frustrant ainsi par ses manœoeuvres la société Arthur Wilson du fruit attendu de ses diligences et débours;

A cet égard, il est indifférent que la société Arthur Wilson ait mené des négociations parallèles avec d'autres acteurs de la grande distribution, rien ne prouvant que ces négociations fussent parvenues à des accords aussi avancés que ceux suivis avec la société Scadif Expansion;

Au vu des ces éléments faisant apparaître que la société Scadif Expansion a délibérément émis des exigences infondées à l'origine de la rupture d'accords quasi-finalisés avec la société Arthur Wilson, ce à seule fin de négocier directement le même projet avec la commune, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que la société Scadif Expansion était à l'origine de la rupture abusive des pourparlers;

Sur le préjudice de la société Arthur Wilson

au titre des frais engagés: la société Arthur Wilson justifie avoir réglé aux sociétés Expans, Sopardi et Terres Meulières, à la suite des demandes techniques formées par la société Scadif Expansion, les sommes de 200 €, de 2.870,40 €, de 741,52 €, de 425 € et de 139 €, soit un total de 4.375,92 €; les frais engagés pour la substitution de la société Fontenay Invest seront écartés comme n'ayant aucun lien avec la rupture des pourparlers, de même que les frais engagés par cette dernière société, irrecevable en son action, et au nom de laquelle la société Arthur Wilson n'a pas qualité pour former de quelconques demandes; à cet égard, la facture de l'architecte Weber qui a été réglée par la société Fontenay Invest ne peut être prise en compte; le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société Scadif Expansion à payer à la société Arthur Wilson la somme de 31.380,96 € en remboursement des frais exposés dans le cadre des négociations;

au titre des salaires réglés au dirigeant de la société Arthur Wilson et à ses associés pour le montage du dossier et des négociations: c'est par des motifs exacts que la Cour adopte que le tribunal a évalué cette dépense inutile de salaires en lien avec la rupture abusive des pourparlers à la somme de 54.000 € correspondant à la rémunération d'une personne à mi-temps pendant dix huit mois, dès lors que la privation d'honoraires sur négociation escomptés si l'opération avait été réalisée représente une perte de chance non indemnisable dans le cadre d'une rupture de pourparlers, la société Arthur Wilson n'étant fondée à réclamer que le remboursement des frais directement imputables à la rupture ;

L'équité ne justifie pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en la cause ;

Chacune des parties conservera à sa charge les dépens d'appel qu'elle a exposés.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement, sauf en ce qu'il a condamné la société Scadif Expansion à payer à la société Arthur Wilson la somme de 31.380,96 € en remboursement des frais exposés en vain dans le cadre des négociations,

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la société Scadif Expansion à payer à la société Arthur Wilson la somme de 4.375,92 € au titre des frais engagés,

Rejette toute autre demande,

Dit que chacune des parties conservera à sa charge les dépens d'appel qu'elle a exposés.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : G1
Numéro d'arrêt : 16/132527
Date de la décision : 08/06/2018
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2018-06-08;16.132527 ?
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