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15/05/2018 | FRANCE | N°15/00118

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 6, 15 mai 2018, 15/00118


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 6



ORDONNANCE DU 15 MAI 2018

Contestations d'Honoraires d'Avocat







Numéro d'inscription au répertoire général : 15/00118





NOUS, Anne LACQUEMANT, Conseillère, à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Madame le Premier Président de cette Cour, assistée de Sarah-Lisa GILBERT, Greffier au prononcé de l'ordonnance.





Vu

le recours formé par :









Maître [E] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 1]



Demandeur au recours RG n° 15/00118,

Défendeur au recours RG n° 15/00133,



contre une ...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 6

ORDONNANCE DU 15 MAI 2018

Contestations d'Honoraires d'Avocat

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/00118

NOUS, Anne LACQUEMANT, Conseillère, à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Madame le Premier Président de cette Cour, assistée de Sarah-Lisa GILBERT, Greffier au prononcé de l'ordonnance.

Vu le recours formé par :

Maître [E] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Demandeur au recours RG n° 15/00118,

Défendeur au recours RG n° 15/00133,

contre une décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS dans un litige l'opposant à :

Monsieur [Q] [B]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Comparant en personne, assisté de Me Nathalie REIN, avocat au barreau de PARIS, toque : C1945

Demandeur au recours RG n° 15/00133,

Défendeur au recours RG n° 15/00118,

Par décision contradictoire, statuant publiquement, et après avoir entendu les parties présentes à notre audience du 20 Mars 2018 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,

L'affaire a été mise en délibéré au 15 Mai 2018 :

Vu les articles 174 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991, l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi du 28 mars 2011 et les articles 10 et suivants du décret n°2005-790 du 12 juillet 2005 ;

Vu la décision rendue le 6 février 2015 par le délégué du bâtonnier du barreau de Paris qui a dit non prescrite l'action en fixation d'honoraires initiée par Me [E] [Y], fixé à la somme de 28 500 euros HT le montant total des honoraires dus par M. [Q] [B], constaté le règlement de la somme de 4 180,60 euros HT par M. [B] et de la somme de 710,70 euros HT par l'assureur protection juridique de ce dernier, dit en conséquence que M. [B] devrait verser à M. [Y] la somme de 23 608,70 euros HT, avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision, outre la TVA au taux de 19,60 %, ainsi que les frais d'huissier de justice, en cas de signification de la présente décision et débouté les parties de toutes autres demandes ;

Vu les notifications de cette décision par lettres recommandées datées du 6 février 2015, reçues le 7 février 2015 par M. [B] et le 9 février 2015 par M. [Y] ;

Vu le recours formé à l'encontre de la décision du bâtonnier, auprès du premier président de la cour, par M. [Y] selon déclaration déposée au greffe de la cour le 9 février 2015 ;

Vu le recours formé à l'encontre de la même décision, par M. [B] par lettre recommandée du 11 février 2015 ;

Vu la jonction des deux instances ordonnée à l'audience du 17 octobre 2017 ;

A l'audience du 20 mars 2018, M. [B] a in limine litis demandé qu'il soit sursis à statuer jusqu'à l'issue de la plainte qu'il a déposée entre les mains du doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Paris le 17 janvier 2017 et de la plainte adressée au procureur de la République du même tribunal par M. [Y] le 16 mars 2015.

Sur le sursis à statuer, M. [Y] a indiqué que les plaintes en cause ne justifiaient pas un sursis à statuer sur la demande de fixation de ses honoraires.

Invitées à présenter leurs observations sur le fond, les parties ont été entendues en leurs observations conformes à leurs écritures.

M. [Y] soulève, sur le fondement des articles 960 et 961 du code de procédure civile, l'irrecevabilité et la nullité des conclusions déposées par M. [B]. Il soutient à cet égard que M. [B] ne justifie pas qu'il réside à l'adresse qu'il mentionne dans les actes de la procédure alors que l'appartement à l'adresse duquel il se domicilie a été vendu sur adjudication le 19 mai 2016 et que la méconnaissance de son adresse réelle lui cause un grief dès lors que cet élément est nécessaire pour les besoins de la notification et de l'exécution de la décision à intervenir.

Il sollicite l'infirmation de la décision critiquée et la fixation de ses honoraires à la somme de 40 469,55 euros outre la condamnation de M. [B] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, M. [Y] fait valoir que M. [B] n'est pas fondé à contester le montant des honoraires dès lors qu'il a reconnu devoir les sommes réclamées à ce titre et ce à deux reprises, lors de la procédure de distribution du prix de vente de l'immeuble vendu sur adjudication sur les poursuites du syndicat des copropriétaires, faute pour lui d'avoir contesté le projet de distribution du prix, notifié à son avocat, et lorsqu'il a saisi la commission de surendettement en mentionnant les montants de ses créances.

Il s'oppose à la prescription soulevée qui ne peut courir avant la fin du mandat de l'avocat, soit à compter du 13 juin 2014, date à laquelle il a été mis fin à sa mission, soutient que la prescription a été interrompue en 2012 et en 2013, qu'en outre M. [B], par son comportement dans les instances introduites devant le juge de l'exécution et devant la commission de surendettement, a renoncé à se prévaloir d'une prescription qui aurait été acquise. A titre subsidiaire, il indique que la prescription biennale n'a pas vocation à s'appliquer dans les dossiers MP [M] et CIC qui étaient des dossiers revêtant un caractère professionnel et non personnel et que le dossier [W] n'était pas terminé lorsqu'il a été mis fin à sa mission par M. [B].

Enfin, M. [Y] conteste les paiements allégués par M. [B] et indique avoir toujours vivement contesté les deux règlements qui auraient été effectués par chèques pour un montant total de 5 000 euros TTC. Sur les diligences effectuées, il expose que celles-ci ne sont pas contestées et sont détaillées dans les fiches de diligences produites aux débats, M. [B] ayant par ailleurs connaissance du taux horaire de 350 euros HT pratiqué par le cabinet puisque ce dernier, en sa qualité de gérant de la société Sushis Market, avait sans protestation payé des factures d'honoraires mentionnant ce taux. Il explique qu'en raison des liens d'amitié existant entre eux, il n'avait pas été établi de convention d'honoraires ni adressé de courriers relatifs aux honoraires et qu'il avait été convenu que M. [B] le réglerait lorsque l'appartement dont il était propriétaire en indivision avec Mme [W] serait vendu, puis lorsqu'il aurait perçu les sommes lui revenant à l'issue du jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris en date du 10 juin 2013, la Cpam lui ayant versé une somme de 90 000 euros, qu'à la suite de la demande de paiement qu'il a formulée, M. [B] l'a dessaisi de l'ensemble de ses dossiers, ce qui l'a conduit à lui adresser les factures d'honoraires pour chacun de ces dossiers.

M. [B] sollicite l'infirmation de la décision entreprise, la fixation des honoraires de M. [Y] à la somme totale de 16 500 euros HT, le rejet de toutes les demandes formées à son encontre dès lors qu'il s'est acquitté de cette somme et la condamnation de M. [Y] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la question de son adresse, il déclare qu'il réside toujours [Adresse 2], occupant les lieux en dépit de la vente de l'appartement sur adjudication et qu'il a régularisé ses dernières conclusions en y mentionnant son adresse.

M. [B] invoque la prescription biennale de l'article L. 137-2 du code de la consommation s'agissant des honoraires réclamés pour les dossiers [M] et [W].

Il soutient avoir réglé les honoraires de M. [Y] par chèques et en espèces, en voulant pour preuve que ce dernier ne lui a jamais rien réclamé avant de saisir le bâtonnier en 2014, précisant que durant les quinze années au cours desquelles M. [Y] a traité pour son compte plusieurs dossiers, il n'a jamais reçu de factures et de relance et a toujours réglé son avocat, qui était aussi son ami, en espèces ou chèque, que dans cette relation de confiance, il n'y a jamais eu d'indication du coût prévisionnel du traitement des cinq dossiers en cause.

Il précise ainsi avoir réglé :

- pour le dossier [M] : 500 euros par chèque en 2006 puis 1 500 euros en espèces en novembre 2009,

- pour le dossier Cic : 1 500 euros en trois chèques de 500 euros émis sur la Bred entre 2007 et 2009 puis 2 000 euros en espèces, cette dernière somme lui ayant été prêtée par Mme [F] [T],

- pour le dossier [W] : six chèques de 500 euros entre 2004 et 2009 puis 1 000 euros en 2006, 3 000 euros en espèces en 2012 grâce au prêt consenti par Mme [T],

- pour le dossier Cpam : 1 000 euros payés par l'assurance Pacifica puis 1 000 euros en espèces à l'aide du prêt accordé par Mme [B] [J],

- pour le dossier SDC [Adresse 2] : le solde dû à l'aide du prêt consenti par Mme [T] en 2012,

et considère ainsi avoir rempli M. [Y] de ses droits.

MOTIFS

Les recours sont recevables comme introduits dans les formes et dans le mois de la décision déférée.

Sur le sursis à statuer

Il n'est pas justifié qu'à la suite de la plainte déposée le 17 janvier 2017, soit il y a plus d'un an, entre les mains du doyen du juge d'instruction du tribunal de grande instance de Paris, une consignation ait été fixée et payée par M. [B] et qu'un juge d'instruction ait été saisi.

En outre, l'issue de la plainte en cause déposée par M. [B] pour des faits d'escroquerie, extorsion de fonds, violation du secret professionnel et recel du secret professionnel n'apparaît pas de nature à avoir une incidence sur le présent litige concernant la fixation des honoraires de M. [Y].

Par ailleurs, M. [Y] a adressé le 16 mars 2015 au procureur de la République une plainte pour production de faux témoignages, notamment s'agissant des deux attestations établies par Mme [F] [T] [G] et par Mme [B] [J] et produites par M. [B]. Les services du parquet ont répondu le 13 novembre 2017 à M. [Y] que la plainte était en cours d'instruction au commissariat [Localité 3]. Il n'est ainsi pas justifié que des poursuites aient été à ce jour engagées, imposant de surseoir à statuer sur les demandes formées dans le présent litige. Eu égard au contenu des témoignages en cause, il n'est pas d'une bonne administration de la justice de surseoir à statuer sur les recours formés tant par M. [B] que par M. [Y], à l'encontre de la décision du bâtonnier fixant les honoraires de ce dernier.

La demande de sursis à statuer formée par M. [B] sera rejetée.

Sur la demande tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions de M. [B]

En vertu des articles 960 et 961 du code de procédure civile invoqués par M. [Y], les conclusions des parties ne sont pas recevables tant que les indications mentionnées à l'alinéa 2 de l'article 960, et notamment le domicile, n'ont pas été fournies.

M. [B] a mentionné dans ses conclusions adressées en vue de l'audience du 17 octobre 2017 puis dans les conclusions déposées le 20 mars 2018 que son adresse était située [Adresse 2]).

Contrairement à ce que soutient M. [Y], il n'appartient pas à M. [B] d'établir que sa déclaration d'adresse est exacte mais à celui qui la conteste de démontrer le caractère mensonger ou erroné de cette déclaration.

Or, M. [Y] ne produit pas d'élément de nature à établir que cette adresse ne serait plus celle de M. [B] qui résiderait en un autre lieu, ce dernier précisant qu'il se maintient sans droit ni titre dans les lieux en dépit de la vente sur adjudication de l'appartement dont il était propriétaire en indivision avec Mme [W]. Les convocations adressées par la cour par lettres recommandées à M. [B] l'ont été à cette adresse et ont été réceptionnées. Enfin, il sera précisé que M. [B] a produit à l'audience une attestation établie le 22 janvier 2018 par les services d'Edf mentionnant que celui-ci est titulaire d'un contrat auprès d'Edf pour le logement situé [Adresse 2].

La demande tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions de M. [B] sera par conséquent rejetée.

Sur la reconnaissance de dette alléguée par M. [Y]

M. [Y] soutient que M. [B] s'est reconnu débiteur de la somme de 40 500 euros à deux reprises : lors de la procédure de distribution du prix de son bien immobilier vendu sur adjudication et lors de la saisine de la commission de surendettement.

M. [Y] a été autorisé, à titre conservatoire, par ordonnance du juge de l'exécution du 25 août 2014, à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur l'immeuble appartenant à M. [B] en indivision avec Mme [W], pour un montant de 40 500 euros correspondant à la créance qu'il invoquait au titre de ses honoraires. L'hypothèque provisoire ainsi autorisée a été inscrite le 9 septembre 2014.

A la suite de la vente du bien sur adjudication le 19 mai 2016, le syndicat des copropriétaires, créancier poursuivant, a établi un projet de distribution en date du 20 décembre 2016, aux termes duquel la somme de 40 500 était attribuée à M. [Y]. Ce projet, notifié aux avocats des parties et notamment à celui de M. [B] le 21 décembre 2016, n'a pas été contesté dans le délai de quinze jours prévu à l'article R. 332-4 du code des procédures civiles d'exécution de sorte qu'il a été homologué par le juge de l'exécution par ordonnance du 30 mars 2017.

Contrairement à ce que soutient M. [Y], l'absence de contestation du projet de distribution ne vaut pas reconnaissance de dette par M. [B] de la somme mentionnée audit projet alors que cette créance n'était ainsi mentionnée qu'à titre provisoire, dans l'attente que le créancier obtienne un titre exécutoire, et que précisément ladite créance était contestée dans le cadre de la procédure en fixation d'honoraires qu'avait initiée M. [Y] devant le bâtonnier au mois de juin 2014.

Pour les mêmes motifs, l'autorité de la chose jugée attachée à l'ordonnance d'homologation du juge de l'exécution n'a pas eu pour effet d'attribuer définitivement à M. [Y] la somme de 40 500 euros mais de bloquer celle-ci qui ne pourra être versée à ce dernier que sous réserve qu'il ait obtenu un titre constatant l'existence et le montant de la créance revendiquée, laquelle faisait l'objet d'une contestation devant le bâtonnier puis devant la présente juridiction.

M. [Y] produit un état des créances de M. [B] en date du 26 janvier 2016, établi dans le cadre d'une procédure de surendettement, mentionnant la somme de 40 500 euros correspondant à des honoraires impayés de M. [Y]. Cependant ce tableau, dont il est au demeurant ignoré dans quelles conditions il a été renseigné et qui ne comporte aucune signature, ne remplit pas les conditions de la reconnaissance de dette prévues par l'article 1376 du code civil et ne permet pas de retenir que M. [B] a reconnu devoir cette somme, celui-ci expliquant qu'il a déclaré toutes les créances réclamées à son encontre sans pour autant s'en reconnaître débiteur, la reconnaissance alléguée étant contraire à l'attitude adoptée par M. [B] qui conteste, depuis la saisine du bâtonnier par M. [Y] le 30 juin 2014, être débiteur envers ce dernier.

Le moyen pris de la reconnaissance de dette pour voir fixer les honoraires de M. [Y] à la somme réclamée, sera par conséquent rejeté.

Sur la prescription

La demande d'un avocat en fixation de ses honoraires, dirigée contre une personne physique ayant eu recours à ses services à des fins n'entrant pas dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, est soumise à la prescription de l'article L. 218-2 du code de la consommation (ancien article L. 137-2) qui dispose que 'l''action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans».

La prescription de l'action de l'avocat pour le paiement de ses honoraires court à compter de la date à laquelle sa mission a pris fin. Cette mission prend fin à la date à laquelle une décision juridictionnelle mettant définitivement fin au litige a été rendue ou à la date à laquelle l'avocat a été dessaisi.

M. [Y], qui soutient qu'il était saisi d'une mission d'assistance générale pour un ensemble de dossier concernant M. [B] qui était en compte avec son avocat pour les honoraires dus pour l'ensemble des dossiers traités et que la fin de mission n'est pas en lien avec un seul dossier, la mission devant s'apprécier en considération de l'ensemble des prestations fournies, ne produit pas de lettre de mission de nature à démontrer l'existence de la mission générale qu'il invoque.

Il convient par conséquent d'apprécier la fin de sa mission pour chacun des dossiers qui lui ont été confiés dès lors qu'il n'existe pas de lien entre ces différents dossiers.

En vertu de l'article 2251 du code civil, 'la renonciation à la prescription est expresse ou tacite. La renonciation tacite résulte de circonstances établissant sans équivoque la volonté de ne pas se prévaloir de la prescription'.

Il a été retenu ci-dessus que tant à l'occasion de la procédure de distribution du prix de vente du bien sur adjudication que lors de la saisine de la commission de surendettement, M. [B] n'a pas reconnu devoir la somme de 40 500 euros réclamée par M. [Y]. Pour les mêmes motifs, l'attitude de M. [B] à l'occasion de ces deux procédures n'emporte pas renonciation à se prévaloir des prescriptions qui seraient acquises alors que ce dernier contestait les sommes réclamées par M. [Y] devant le bâtonnier saisi le 30 juin 2014.

M. [B] n'invoque pas, dans le cadre du recours qu'il a formé, la prescription de l'action relative au paiement des honoraires relatifs au dossier CIC et ne critique pas la décision du bâtonnier sur ce point, laquelle doit par conséquent être confimée en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir prise de la prescription concernant ce dossier.

S'agissant du dossier dit [M], M. [B] a chargé M. [Y] de la défense de ses intérêts alors qu'il était poursuivi devant le tribunal correctionnel de Paris pour avoir commis des violences à l'encontre de M. [M], faits qu'il contestait en soutenant avoir été lui-même victime de violences. Cette affaire n'entrant pas dans le cadre des activités professionnelles de M. [B], peu important le contexte des faits nés d'un différend opposant M. [B] à l'un de ses anciens salariés, la prescription applicable est celle prévue à l'article 218-2 précité. Ce dossier s'est terminé, après que la cour d'appel de Paris a infirmé le jugement du 24 janvier 2006, par arrêt du 21 février 2007, et condamné, par arrêt du 17 mars 2008 sur intérêts civils, M. [M] à payer à M. [B] la somme de 9 400 euros au titre des ses préjudices extrapatromiaux et une indemnité de procédure de 800 euros, par la décision de la commission d'indemnisation des victimes d'infractions rendue le 2 octobre 2009 et notifiée le même jour, ladite décision homologuant l'accord intervenu entre M. [B] et le Fonds de garantie. Par courrier du 8 octobre 2009, M. [Y] a adressé à M. [B] la décision de la CIVI lui précisant que les fonds devraient lui parvenir très rapidement.

La prescription de l'action en paiement de la somme de 6 900 euros HT (soit 8 280 euros TTC) au titre des honoraires afférents à ce dossier a par conséquent commencé à courir à compter de la décision de la CIVI, de sorte que cette action était prescrite lorsque M. [Y] a saisi le bâtonnier au mois de juin 2014, près de cinq ans après la fin de sa mission, sans qu'il soit justifié d'un acte interruptif de la prescription, les attestations établies par Mmes [J] et [T] qui déclaraient avoir prêté des fonds en 2012 et 2013 à M. [B] aux fins qu'il règle les honoraires de son avocat ne valant nullement reconnaissance par l'intéressé des honoraires dus au titre du dossier l'ayant opposé à M. [M].

La décision entreprise sera infirmée en ce sens.

S'agissant du dossier dit [W], cette affaire oppose depuis 2004 M. [B] à son ancienne compagne, Mme [W], concernant notamment la liquidation de leurs droits indivis sur l'immeuble qu'ils avaient acquis ensemble.

M. [B] ne justifie pas qu'une décision définitive ait été rendue dans ce litige avant qu'il ne dessaisisse M. [Y] de la défense de ses intérêts le 13 juin 2014. A cet égard, contrairement à ce qu'il soutient, le procès-verbal de difficultés dressé le 26 septembre 2011 par le notaire commis le 11 octobre 2007 à la suite du jugement du tribunal de grande instance de Paris du 2 mai 2006, n'a pas mis fin au litige et à la mission de M. [Y], laquelle a pris fin le 13 juin 2014, date à laquelle il a été dessaisi.

L'action en paiement des honoraires dont la fixation est sollicitée pour ce dossier n'est dès lors pas prescrite. La décision sera confirmée de ce chef.

Sur le montant des honoraires

Les parties n'ont pas signé de convention à cette fin de sorte que les honoraires revenant à l'avocat doivent être fixés en application des critères de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi du 10 juillet 1991, et de l'article 10 du décret du 12 juillet 2005, aux termes desquels les honoraires sont fixés à défaut de convention entre l'avocat et son client, 'selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de la notoriété et des diligences de celui-ci'.

Il doit en outre être rappelé que, même en l'absence de convention d'honoraires, l'avocat est tenu d'informer son client des conditions de fixation de sa rémunération. A cet égard, il ne peut être retenu que M. [B] ait été informé qu'un taux horaire de 350 euros HT lui serait facturé dans les dossiers pour lesquels M. [Y] est intervenu pour son compte personnel au motif que ce taux avait été accepté en 2010 et 2012 s'agissant des dossiers concernant la société Sushi Market dont il était le gérant et ayant donné lieu à des factures acquittées par la société.

Il résulte des déclarations des parties que celles-ci entretenaient des relations d'amitié et que la question du montant des honoraires de M. [Y] n'a pas été précisément abordée entre elles. Pour autant, M. [B] ne prétend pas que M. [Y] devait intervenir à titre gratuit pour défendre ses intérêts dans les dossiers qu'il lui avait confiés mais soutient qu'il a payé une somme de 16 500 euros correspondant aux diligences accomplies par son conseil.

Il convient, d'une part, d'apprécier les diligences accomplies par M. [Y] dans chacun des dossiers aux fins de fixer ses honoraires, d'autre part, d'examiner la réalité des paiements allégués par M. [B], étant à cet égard rappelé qu'il appartient à ce dernier de rapporter la preuve de ces paiements.

S'agissant des paiements que M. [B] soutient avoir effectué en espèces, celui-ci produit deux attestations. Cependant, l'attestation établie le 29 septembre 2014 par Mme [F][T][T] qui déclare avoir, le 13 décembre 2012, prêté à M. [B] la somme de 8 000 euros en espèces afin de l'aider à régler les différents honoraires de son avocat, ajoutant qu'à la même époque, en sa présence, 'Maître [Y] a remercié [Q] [B] de ce règlement en espèces', sans qu'elle indique avoir assisté à la remise d'une quelconque somme, ne démontre pas que M. [B] ait effectivement acquitté les honoraires dus à M. [Y] dans les dossiers objet du présent litige. De même, l'attestation établie le 1er octobre 2014 par Mme [B] [J] qui indique avoir prêté à M. [B] la somme de 2 000 euros en espèces afin qu'il puisse régler les honoraires de M. [Y] ne justifie pas de la réalité de paiement effectué au profit de ce dernier.

L'absence de relance et de facturation avant le mois de juin 2014 ne démontre pas que M. [Y] avait déjà été réglé de ses prestations alors qu'une telle attitude s'explique aisément par les relations amicales qu'entretenaient les parties.

Sur le dossier Cpam

M. [Y] a assuré la défense des intérêts de M. [B] dans le litige opposant ce dernier à la Cpam qui refusait de reconnaître le caractère professionnel d'un accident dont il avait été victime le 3 avril 2011. Il sollicite au titre de ses honoraires la somme de 2 846,53 euros soit 3 415,84 euros TTC, pour 11h38 de travail.

Il produit la fiche détaillée des diligences accomplies dans ce dossier : examen du dossier ainsi que des pièces et conclusions adverses, divers courriers, trois jeux de conclusions, audience devant le tribunal des affaires de sécurité sociale.

M. [B] ne conteste pas la réalité des diligences accomplies dont il est par ailleurs justifié par les pièces produites aux débats.

Au regard de ces diligences, de l'absence d'informations sur le taux horaire pratiqué, de la situation de M. [B] qui rencontrait des difficultés financières, ce que n'ignorait pas son avocat qui était aussi son ami, et de la nature de l'affaire qui ne présentait pas, à la lecture des conclusions de M. [Y] et de celles de la Cpam, de difficultés particulières, les honoraires de M. [Y] seront fixés à la somme de 1 750 euros HT soit 2 093 euros TTC compte tenu du taux de TVA applicable à la date des prestations.

Il est justifié que M. [Y] a perçu de l'assureur protection juridique de M. [B] la somme de 850 euros TTC le 28 août 2012. En revanche, M. [B] n'établit pas, ainsi que retenu ci-dessus, avoir versé à M. [Y] la somme de 1 000 euros en espèce en paiement des honoraires dus au titre de ce dossier.

M. [B] reste devoir au titre de ce dossier la somme de 1 243 euros TTC.

Sur le dossier CIC

M. [Y] a assisté M. [B] dans un litige opposant ce dernier au CIC qui l'avait assigné le 13 juin 2007 devant le tribunal de commerce de Paris en paiement d'une somme de 50 000 euros, outre intérêts contractuels, en sa qualité de caution de la société @Le Brec dont il était le dirigeant.

Il sollicite au titre de ses honoraires la somme de 5 590,13 euros HT soit 6 708,16 euros TTC pour 19h40 de travail.

Il produit la fiche détaillée des diligences accomplies dans ce dossier qui a donné lieu à un jugement du tribunal de commerce de Paris du 14 avril 2010 puis à un arrêt partiellement infirmatif de la cour d'appel de Paris du 4 novembre 2011 : examen du dossier, trois jeux de conclusions devant le tribunal de commerce, un jeu de conclusions devant la cour d'appel, analyse des conclusions du CIC, deux audiences devant le tribunal de commerce, une audience devant la cour d'appel.

M. [B] ne conteste pas la réalité des diligences accomplies dont il est par ailleurs justifié par les pièces produites.

Au regard de ces diligences, de l'absence d'informations sur le taux horaire pratiqué, de la situation de M. [B] qui rencontrait des difficultés financières, ce que n'ignorait pas son avocat qui était aussi son ami, et de la nature de l'affaire relative à une demande en paiement en exécution d'un acte de cautionnement du dirigeant, ne soulevant pas de complexité juridique particulière ainsi qu'il ressort de la lecture des conclusions rédigées par M. [Y], les honoraires de ce dernier seront fixés à la somme de 3 000 euros HT, soit 3 588 euros TTC.

M. [B] ne justifie pas des paiements qu'il indique avoir effectués par chèques à hauteur de 1 500 euros et en espèces à hauteur de 2 000 euros, les attestations qu'il produit n'établissant pas la réalité du paiement entre les mains de M. [Y] ainsi qu'il l'a été retenu ci-dessus.

M. [B] reste donc devoir au titre de ce dossier la somme de 3 588 euros TTC.

Sur le dossier SDC [Adresse 2]

M. [Y] a assisté M. [B] dans le litige opposant celui-ci au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] qui l'avait assigné le 3 juin 2010, avec Mme [W], en paiement des charges de copropriété.

Il sollicite au titre de ses honoraires la somme de 5 651,33 euros HT soit 6 781,60 euros TTC représentant 19h43 de travail.

Il produit la fiche détaillée des diligences accomplies dans ce dossier qui a donné lieu à un jugement du tribunal de grande instance de Paris du 7 décembre 2010 puis à un arrêt confirmatif de la cour d'appel de Paris du 23 janvier 2013 : examen du dossier, un jeu de conclusions devant le tribunal de grande instance, deux jeux de conclusions au fond devant la cour d'appel outre deux jeux de conclusions pour s'opposer à la demande de radiation de l'appel formée dans le cadre d'un incident devant le conseiller de la mise en état, analyse des conclusions du syndicat des coproprétaires et de Mme [W], divers courriers, une audience devant le tribunal, une audience devant le conseiller de la mise en état et une audience devant la cour d'appel.

M. [B] ne conteste pas la réalité des diligences accomplies dont il est par ailleurs justifié par les pièces produites.

Au regard de ces diligences, de l'absence d'informations sur le taux horaire pratiqué, de la situation de M. [B] qui rencontrait des difficultés financières ainsi que le plaidait son avocat et de la nature de l'affaire relative à une demande en paiement de charges de copropriété et ne soulevant pas de complexité juridique particulière ainsi qu'il ressort de la lecture des conclusions rédigées par M. [Y], lesquelles se limitaient à solliciter devant le tribunal des délais de paiement et à réitérer cette demande devant la cour en s'opposant à la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, les honoraires de M. [Y] seront fixés à la somme de 2 500 euros HT, soit 2 990 euros TTC.

M. [B] qui indique avoir soldé les honoraires de son avocat en décembre 2012 à l'aide d'un prêt que lui avait consenti Mme [T], ne justifie nullement du paiement ainsi allégué, dont le montant n'est pas même précisé.

M. [B] reste devoir au titre de ce dossier la somme de 2 990 euros TTC.

Sur le dossier [W]

M. [Y] a assisté M. [B] dans le litige opposant celui-ci à Mme [W] qui l'avait assigné le 18 novembre 2004 devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir ordonner les opérations de compte, liquidation et partage de leur indivision, laquelle portait pour l'essentiel sur un appartement situé [Adresse 2]) qu'ils avaient acquis le 23 juillet 2001.

Il sollicite au titre de ses honoraires la somme de 12 737,46 euros HT, soit 15 284,95 euros TTC représentant 45h31 de travail.

Il produit la fiche détaillée des diligences accomplies dans ce dossier qui a donné lieu, avant son dessaisissement, à un jugement du tribunal de grande instance de Paris du 2 mai 2006 qui a ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage et désigné un expert aux fins d'évaluation du bien immobilier indivis et de l'indemnité d'occupation, ainsi qu'à un jugement du 3 juin 2008 entérinant le rapport d'expertise, fixant la valeur du bien et le montant de l'indemnité d'occupation due par M. [B] et renvoyant les parties devant le notaire commis, d'un arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 mai 2009, puis d'un procès-verbal de difficultés en date du 26 septembre 2011. Il est ainsi fait état : de l'examen du dossier, de deux jeux de conclusions devant le tribunal, de l'examen des conclusions adverses, d'un incident devant le juge de la mise en état relatif à une demande de rabat de clôture, d'une audience de plaidoirie devant le tribunal, du suivi de l'expertise ayant donné lieu à plusieurs dires à l'expert, d'un jeu de conclusions à la suite du dépôt du rapport, de courriers échangés avec le notaire, de trois rendez-vous chez le notaire les 19 février et 25 mars 2010 et 26 septembre 2011.

M. [B] ne conteste pas la réalité des diligences accomplies dont il est par ailleurs justifié par les pièces produites.

Au regard de ces diligences, du temps important qui y a été consacré compte tenu de la nature du litige opposant deux anciens concubins dans un climat de conflit important, mais aussi de l'absence d'informations sur le taux horaire pratiqué et de la situation économique de M. [B] dont M. [Y] était informé, les honoraires de ce dernier seront fixés à la somme de 10 000 euros HT, soit 11 960 euros TTC.

M. [B] ne justifie d'aucun paiement au titre de ce dossier.

Par conséquent, M. [B] reste devoir à M. [Y] la somme totale de de 19 781 euros TTC, soit 15 904 euros HT.

Les frais de signification si celle-ci s'avérait nécessaire, seront à la charge de M. [B]. Pour des raisons d'équité, il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant en dernier ressort, publiquement, par ordonnance contradictoire et par mise à disposition de la décision au greffe,

Rejetons la demande de M. [Y] tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions de M. [B] ;

Disons n'y avoir lieu à surseoir à statuer ;

Infirmons la décision déférée sauf en ce qu'elle a dit non prescrites les demandes dans les dossiers CIC et [W] ;

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées ;

Déclarons prescrite la demande formée par M. [Y] à hauteur de 8 280 euros au titre des honoraires afférents au dossier [M] ;

Fixons les honoraires revenant à M. [Y] aux sommes suivantes :

- 1 750 euros HT dans le dossier Cpam

- 3000 euros HT dans le dossier CIC

- 2 500 euros HT dans le dossier SDC [Adresse 2]

- 10 000 euros HT dans le dossier [W] ;

Disons que ces sommes sont majorées de la TVA au taux de 19, 60 % ;

Constatons que la somme de 850 euros TTC a été réglée à M. [Y] dans le dossier Cpam ;

Condamnons M. [B] à payer la somme de 15 904 euros HT, soit 19 781 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision du bâtonnier ;

Déboutons les parties de leurs demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Disons que M. [B] supportera la charge de la signification de la décision si celle-ci s'avérait nécessaire.

Disons qu'en application de l'article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, la présente décision sera notifiée aux parties par le greffe de la Cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception.

ORDONNANCE rendue par mise à disposition au greffe de la Cour le QUINZE MAI DEUX MILLE DIX HUIT par Anne LACQUEMANT, Conseillère, qui en a signé la minute avec Sarah-Lisa GILBERT, Greffier, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues dans l'article 450 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA CONSEILLÈRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 15/00118
Date de la décision : 15/05/2018

Références :

Cour d'appel de Paris C6, arrêt n°15/00118 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-15;15.00118 ?
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