Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1
ARRÊT DU 13 AVRIL 2018
(no , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/16543
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2016 -Tribunal de Grande Instance d'Evry - RG no 13/00665
APPELANTS
Madame Thérèse X...
née le [...] à Paris (75015)
demeurant [...]
Représentée par Me Xavier LAUREOTE de la SELARL L.A.H. AVOCATS, avocat au barreau d'ESSONNE, toque : P0572
Monsieur Bernard X...
né le [...] à Paris (75015)
demeurant [...]
Représenté par Me Xavier LAUREOTE de la SELARL L.A.H. AVOCATS, avocat au barreau d'ESSONNE, toque : P0572
INTIMÉS
Mademoiselle Mélanie Z...
née le [...] à ORLEANS
demeurant [...]
Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753
Assistée sur l'audience par Me Gaël TYNEVEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : D0799
Monsieur Williams C...
né le [...] à BOIS GUILLAUME
demeurant [...]
Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753
Assistée sur l'audience par Me Gaël TYNEVEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : D0799
Monsieur Hubert D... exerçant sous l'enseigne "AGENCE DE SAVIGNY"
No SIRET : [...]
ayant son siège au [...]
Représenté par Me Jean-sébastien TESLER de la SELARL AD LITEM JURIS, avocat au barreau d'ESSONNE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Mars 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Christine BARBEROT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Présidente
Monsieur Dominique GILLES, Conseiller
Madame Christine BARBEROT, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : M. Christophe DECAIX
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique DOS REIS, Présidente, et par M. Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
Par acte sous seing privé du 3 janvier 2012, M. Bernard X... et sa soeur, Mme Thérèse X... (les consorts X...), propriétaires indivis d'un pavillon sis [...] , ont donné un mandat non exclusif à M. Hubert D..., agent immobilier sous l'enseigne Agence de Savigny (Orpi), de vendre ce bien au prix de 370 000 €, les honoraires de l'agent immobilier d'un montant de 15 000 € étant à la charge de l'acquéreur. Le 25 février 2012, M. D... a fait signer un bon de visite du bien à M. Williams C... et Mme Mélanie Z... (les consorts C... Z...), puis a adressé un compte-rendu de ses diligences aux vendeurs. Par lettre du 28 mars 2012, Mme X... a informé M. D... qu'elle-même et son frère avait signé le 10 mars 2012 un avant-contrat de vente au profit des consorts C... Z..., par l'entremise d'un autre agent immobilier. Par acte du 27 décembre 2012, M. D... a assigné les consorts X... et les consorts C... Z... en condamnation solidaire à leur payer la somme de 15 000 € de dommages-intérêts.
C'est dans ces conditions que, par jugement du 20 mai 2016, le Tribunal de grande instance d'Evry a :
- condamné in solidum les consorts X... et les consorts C... Z... à payer à M. D... la somme de 15 000 € de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
- condamné in solidum les consorts X... et les consorts C... Z... à payer à M. D... la somme de 2 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné in solidum les consorts X... et les consorts C... Z... aux dépens,
- ordonné l'exécution provisoire.
Par dernières conclusions du 25 octobre 2016, les consorts X..., appelants dans l'instance no 16/16543, demandent à la Cour de :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
- rejeter toutes les demandes de M. D...,
- déclarer la clause du paragraphe 3 du mandat comme clause pénale abusive,
- constater l'absence de préjudice de M. D... et le débouter de sa demande de dommages-intérêts,
- condamner M. D... à leur verser la somme de 3 500 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
Par dernières conclusions du 22 décembre 2016, les consorts C... Z..., appelants dans l'instance no 16/16718, prient la Cour de :
- dire que M. D... ne peut prétendre à aucune rémunération ou aucun dédommagement en application du bon de recherche et de visite du 25 février 2012,
- en conséquence, infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- débouter M. D... de ses demandes contre eux,
- condamner M. D... à leur payer la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
Par dernières conclusions du 13 décembre 2016, M. D... demande à la Cour de :
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- débouter les appelants de leurs demandes,
- les condamner in solidum à lui payer la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
SUR CE
LA COUR
Les instances enregistrées sous les numéros 16/16543 et 16/16718 ont un lien de connexité suffisant pour que leur jonction soit ordonnée.
Lorsqu'une personne a donné à plusieurs agents immobiliers un mandat non exclusif de vendre le même bien, elle n'est tenue de payer une rémunération ou une commission qu'à celui par l'entremise duquel l'opération a été effectivement conclue, au sens de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970, et cela même si l'acquéreur lui avait été présenté par un autre agent immobilier, sauf à ce dernier à prétendre à l'attribution de dommages-intérêts en prouvant une faute du vendeur qui l'aurait privé de la réalisation de la vente.
Au cas d'espèce, les consorts X... avaient donné un mandat non exclusif de vendre le même bien, d'une part, par acte sous seing privé du 29 décembre 2011, à la SARL Point de vue immobilier, d'autre part, par acte sous seing privé du 3 janvier 2012 à M. D.... Chacun des agents immobiliers a fait visiter le bien aux consorts C... Z.... La vente a été conclue au profit de ces derniers par l'intermédiaire de la société Point de vue immobilier aux termes d'un avant-contrat de vente du 10 mars 2012.
M. D... n'a donc pas droit à commission par application de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970.
Selon l'article 78 du décret du 20 juillet 1972, dans sa rédaction applicable au litige, lorsqu'un mandat est assorti d'une clause pénale, ou lorsqu'il comporte une clause aux termes de laquelle une commission sera due par le mandant, même si l'opération est conclue sans les soins de l'intermédiaire, cette clause ne peut recevoir application que si elle est mentionnée en caractères très apparents.
Le mandat que M. D... a fait signer aux consorts X... renferme la clause suivante, no 3 des déclarations et engagements du vendeur :
"Je devrai vendre le bien objet du mandat à tout acquéreur présenté par les agences du réseau ORPI aux prix, charges et conditions du mandat ou de ses avenants , et m'interdis de le vendre sans le concours de l'Agent immobilier ORPI, à un acquéreur qu'il m'aura présenté ou signalé. A défaut de respecter une seule de mes obligations prévues au présent paragraphe, je devrai à l'Agent immobilier ORPI, sur le fondement de l'article 1142 du Code civil, une indemnité forfaitaire de dommages-intérêts, d'un montant égal à celui des honoraires prévus au mandat".
La clause no 5 ajoute que le montant des honoraires était dû par le vendeur à l'agent immobilier lorsque la vente serait conclue "même après l'expiration de ce mandat, et ce durant 12 mois , avec un acheteur présenté par toute agence ORPI durant la validité du mandat".
C'est par des motifs pertinents que le Tribunal a dit que cette clause n'était pas abusive.
En concluant le 10 mars 2012, par l'entremise d'un autre agent immobilier, un avant-contrat de vente au profit des consorts C... Z... qui leur avait été antérieurement présentés par M. D..., les consorts X... ont violé la clause précitée, de sorte que celle-ci doit trouver application.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamné les consorts X... à payer à M. D... la somme de 15 000 € de dommages-intérêts.
M. D... a fait visiter le bien aux consorts C... Z... le 25 février 2012 dans le cadre du mandat du 3 janvier 2012 qu'il avait reçu des consorts X.... L'agent immobilier a d'ailleurs rendu compte de cette visite à ses mandants. C'est dans ce cadre que, par acte sous seing privé du 25 février 2012, M. D... a fait signer aux consorts C... Z... un "Bon de recherche et de visite" aux termes duquel ils déclarent l'avoir contacté et lui avoir demandé de "Rechercher pour mon compte une propriété, sans obligation d'achat ou de location de ma part et conserver par ailleurs toute liberté d'acquérir ou de louer toute autre propriété que celle présentée par ladite agence", s'obligeant à " négocier et conclure avec le concours de l'agence" avec cette précision qu'en cas de "manquement à ces obligations, et en cas d'achat ou de location par moi-même ou par personne interposée, même après expiration du mandat, je serai tenu à l'entière réparation du préjudice causé à l'agence par son éviction, et je lui devrai des dommages et intérêts fixés dès à présent à 7% du bien acquis", cet engagement étant pris pour une durée de 18 mois.
Ce bon de visite, qui n'a pas été inscrit au registre des mandats, ne peut produire les effets d'un mandat de recherche d'un bien, n'étant pas, de surcroît préalable à l'entremise pour avoir été conclu au cours de la visite. Par suite, et par application de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970, M. D..., agent immobilier, ne peut réclamer aucune somme en exécution de ce bon de visite dont la seule finalité consiste à prouver les diligences du mandataire à l'égard de son mandant.
M. D... n'établit aucune manoeuvre des consorts C... Z... dans le but, par collusion avec les vendeurs, de se soustraire au paiement de la commission, étant observé que les consorts C... Z..., dont il vient d'être dit qu'ils n'avaient aucune obligation d'acquérir par l'intermédiaire de M. D..., se sont engagés dans l'avant-contrat de vente du 10 mars 2012 à payer la commission à la société Point de vue immobilier par l'intermédiaire de laquelle la vente avait été effectivement conclue.
M. D... doit donc être débouté de toutes ses demandes à l'encontre des consorts C... Z..., le jugement entrepris étant infirmé en ce qu'il est entré en voie de condamnation contre ces derniers.
L'équité ne commande pas qu'il soit fait application en cause d'appel de l'article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Prononce la jonction des instances enregistrées sous les numéros 16/16543 et 16/16718 ;
Infirme le jugement entrepris, mais seulement en ce qu'il a condamné M. Williams C... et Mme Mélanie Z... à payer à M. Hubert D... les sommes de 15 000 € de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter du jugement et de 2 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile, et en ce qu'il les a condamnés aux dépens ;
Statuant à nouveau :
Déboute M. Hubert D... de toutes ses demandes formées à l'encontre de M. Williams C... et Mme Mélanie Z..., en ce compris celles fondées sur l'article 700 du Code de procédure civile et en paiement des dépens ;
Confirme le jugement entrepris pour le surplus ;
Rejette toute autre demande ;
Condamne in solidum M. Bernard X... et Mme Thérèse X... aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
Le Greffier, La Présidente,