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03/04/2018 | FRANCE | N°16/04665

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 03 avril 2018, 16/04665


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4



ARRÊT DU 03 AVRIL 2018



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/04665



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Décembre 2015 -Tribunal d'Instance de PARIS - 8ème arrondissement - RG n° 11-14-000510



APPELANTS



Monsieur [N] [C]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 1]

[Adresse 1]
>[Localité 2]



Représenté et ayant pour avocat plaidant Maître Richard Ruben COHEN de la SELAS SELASU RICHARD R. COHEN, avocat au barreau de PARIS, toque : C1887



Madame [R] [J] épouse [...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4

ARRÊT DU 03 AVRIL 2018

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/04665

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Décembre 2015 -Tribunal d'Instance de PARIS - 8ème arrondissement - RG n° 11-14-000510

APPELANTS

Monsieur [N] [C]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté et ayant pour avocat plaidant Maître Richard Ruben COHEN de la SELAS SELASU RICHARD R. COHEN, avocat au barreau de PARIS, toque : C1887

Madame [R] [J] épouse [C]

née le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 3] (93)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté et ayant pour avocat plaidant Maître Richard Ruben COHEN de la SELAS SELASU RICHARD R. COHEN, avocat au barreau de PARIS, toque : C1887

INTIME

Monsieur [C] [L]

né le [Date naissance 3] 1962 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Maître Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

Ayant pour avocat plaidant Maître JAECK François, avocat au barreau de BLOIS

PARTIE INTERVENANTE (intervention forcée)

Société KER TRANSACTION, au capital de 1000 €, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

SIRET : 441 588 456 00018

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Maître Pascale NABOUDET-VOGEL de la SCP SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

Ayant pour avocat plaidant Maître Michèle BECIRSPAHIC, avocat au barreau de PARIS, toque : C1377

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Mars 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sabine LEBLANC, conseillère faisant fonction de présidente et Mme Sophie GRALL, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Sabine LEBLANC, conseillère faisant fonction de présidente

Mme Sophie GRALL, conseillère

M. Philippe JAVELAS, conseiller

qui en ont délibéré.

En application de l'ordonnance de Mme La Première Présidente de la Cour d'Appel de PARIS, en date du 05 janvier 2018.

Le rapport ayant été lu par Mme Sabine LEBLANC, conseillère faisant fonction de présidente, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Mélodie ROSANT

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Sabine LEBLANC, conseillère faisant fonction de présidente et par Mme Mélodie ROSANT, greffière présente lors de la mise à disposition.

****

Par acte sous seing privé en date du 27 mars 2006, Monsieur [C] [L] a donné à bail aux époux [C] un appartement sis [Adresse 1]) moyennant un loyer de 2 950 euros pour une surface précisée de 93 m² pour une durée de 3 ans . Le bail s'est renouvelé tacitement en 2009, 2012 et 2015.

Par acte d'huissier du 2 septembre 2014, Monsieur [C] [L] a fait délivrer aux locataires un commandement de payer visant la clause résolutoire pour un montant en principal de 6 627,96 euros, déduction faite de la clause pénale et du coût du commandement, au titre des loyers impayés d'avril 2012 à août 2014.

Le 18 septembre 2014, les époux [C] ont fait mesurer l'appartement par ALLODIAGOSTIC qui a conclu à une surface de 78,42 m² soit 16 % de moins que ce que le bail annonçait et fait estimer la valeur locative par l'agence Paris Élysée investissement qui a estimé la valeur locative à 2 478 euros.

Par exploit d'huissier en date du 27 octobre 2014, les locataires ont formé opposition au commandement de payer et ont assigné le propriétaire devant le tribunal d'instance de Paris du 8ème arrondissement.

Le bailleur a, par assignation du 3 juin 2015, appelé en garantie le syndicat des copropriétaires ainsi que la société KER TRANSACTION, son mandataire.

Par jugement rendu le 10 décembre 2015 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal d'Instance de Paris du 8ème arrondissement, a :

- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par les époux [C],

- débouté Monsieur [N] [C] et Madame [R] [J] épouse [C] de leur demande en nullité du commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 2 septembre 2014,

- déclaré irrecevable la demande reconventionnelle de Monsieur [C] [L] en constat de l'acquisition de la clause résolutoire et en ses demandes accessoires subséquentes (expulsion, séquestration des meubles, indemnités d'occupation),

- condamné Monsieur [N] [C] et Madame [R] [J] épouse [C] à verser à Monsieur [C] [L] les sommes de 1 619,36 euros au titre des loyers et charges impayés entre avril 2012 et août 2014, avec intérêts à taux légal à compter du commandement du 2 septembre 2014 et 161,94 euros au titre de la clause pénale,

- débouté Monsieur [C] [L] pour le surplus de sa demande en paiement,

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par Monsieur [C] [L],

- débouté les époux [C] de leurs demandes en restitution du trop perçu pour la période du 1er avril 2006 au mois de juin 2015 inclus et en diminution du loyer,

- débouté les époux [C] de leur demande de dommages intérêts,

- rejeté la demande d'expertise sur les désordres affectant les parties communes,

- fait injonction à Monsieur [C] [L] de délivrer aux époux [C] les quittances des loyers acquittés intégralement et des reçus des loyers qui n'ont été acquittés que partiellement, depuis la prise d'effet du bail jusqu'à la décision,

- assorti ces injonctions à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la signification du jugement, d'une astreinte provisoire de 50 euros par jour pendant trois mois,

- rejeté le surplus des demandes de communication sous astreinte des époux [C],

- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné les époux [C] à payer à la société KER TRANSACTION d'une part et au syndicat des copropriétaires du [Adresse 1]) d'autre part, la somme de 500 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les époux [C] ont interjeté appel de cette décision par déclaration du 22 février 2016.

Par conclusions déposées le 5 février 2018, les époux [C], appelants, sollicitent l'infirmation du jugement dont appel en toutes ses dispositions et demandent à la cour, statuant à nouveau, de :

- juger que Monsieur [C] [L] a manqué à son obligation de délivrance et de le condamner à payer la somme de 56 640 euros à titre de dommages et intérêts,

- juger que le loyer contractuel mensuel sera de 2 478 euros,

- et, à défaut, annuler le bail conclu pour vice du consentement,

- fixer le montant d'indemnité d'occupation à 2 478 euros par mois,

- et, en conséquence, condamner Monsieur [C] [L] à leur rembourser la somme de 56 640 euros au titre du surplus de loyer perçu.

En toute état de cause, ils demandent à la cour de condamner Monsieur [C] [L] à :

- communiquer les quittances, les décomptes par nature de charges ainsi que le mode de répartition entre les locataires, depuis la prise d'effet du bail, et ce sous astreinte de 500 euros par jour,

- leur payer la somme de 10 000 euros pour préjudice moral, ainsi que celle de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 5 février 2018, Monsieur [C] [L], intimé, sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il :

- a débouté les appelants de leurs demandes,

- les a condamné à lui verser les sommes correspondant aux loyers et charges impayés ainsi que la clause pénale,

- a rejeté la demande d'expertise.

L'intimé sollicite l'infirmation du jugement pour le surplus en ce qu'il a dit que les demandes des appelants n'étaient pas prescrites et qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur l'appel en garantie formé contre la société KER TRANSACTION. Il demande à la cour, statuant à nouveau, de condamner la société KER TRANSACTION :

- à le garantir des sommes qu'il viendrait à être condamné à verser,

- à lui payer, à titre de dommage intérêts, la différence entre le loyer initialement convenu et le loyer le cas échéant réduit par la cour.

En tout état de cause, il demande la condamnation des appelants à verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 16 septembre 2016, la société KER TRANSACTIONS, partie intervenante forcée, demande à la cour de dire sans objet la demande en appel provoqué et de la mettre hors de cause.

A titre subsidiaire, elle demande à la cour de juger que Monsieur [C] [L] ne pourrait prétendre à l'indemnisation d'une perte de chance et de condamner l'intimé ou tout succombant, à payer la somme de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 20 février 2018.

SUR CE, LA COUR,

* Sur le respect de la procédure de modification de loyer et la forclusion

Considérant que Monsieur [C] [L] soutient, que le bail signé le 27 mars 2006 est soumis à la loi du 6 juillet 1989 dont l'article 17 impose la saisine de la commission de conciliation dans le délai de 2 mois pour une réclamation avant de saisir le tribunal, faute de quoi le contrat est reconduit de plein droit aux conditions antérieurs du loyer ;

Que les époux [C] répondent qu'ils n'étaient pas tenus de saisir la commission de conciliation de leurs réclamations portant sur le loyer dans la mesure où le cas d'espèce ne rentre pas dans les prévisions de l'article 17 de la loi du 6 juillet 1989 ; qu'ils précisent que la loi ALUR ne s'applique pas à l'espèce qui ne concerne pas un loyer supérieur au loyer de référence majoré ;

Considérant que Monsieur [C] [L] souligne que les locataires n'ont critiqué le montant du loyer que par leur assignation du 27 octobre 2014, soit après 8 ans de location ; Qu'en tout état de cause, il rappelle qu'en vertu des dispositions de la loi du 6 juillet 1989, les locataires ne sont plus recevables à contester les conditions du loyer antérieurement à la période triennale en cours, soit antérieurement au 1er avril 2015, de telle sorte que leur action est forclose ;

Considérant que pour solliciter l'infirmation du jugement dont appel, les époux [C] prétendent à titre liminaire que leur action n'est pas forclose ; qu'à ce titre, ils rappellent qu'en tout état de cause, ils n'ont eu connaissance de la réelle superficie des lieux qu'en date du 18 septembre 2014 ;

Que, cependant, le litige porte sur la superficie de l'appartement et non sur une augmentation du loyer qui serait manifestement sous-évalué eu égard à ceux pratiqués dans le voisinage ou sur une diminution de loyer encadré dans une zone tendue et qu'en conséquence les articles 17 et suivants de la loi du 6 juillet 1989 avant ou après la loi du 24 mars 2014 ne sont pas applicables à l'espèce ; qu'enfin la loi du 24 mars 2014 ne peut s'appliquer à un loyer convenu en 2006 et la forclusion invoquée par le bailleur n'a pas à s'appliquer ;

* Sur la prescription

Considérant que les locataires demandent la restitution du trop perçu loyer pour la période du 1er avril 2006 à juin 2015 inclus ;

Considérant que Monsieur [C] [L] et la société KER TRANSACTION retiennent comme point de départ de la prescription l'entrée dans les lieux des appelants le 1er avril 2006, date à laquelle ils pouvaient avoir connaissance de la surface et soutiennent que l'assignation n'ayant été délivrée que le 27 octobre 2014, toute demande de restitution se heurte à la prescription de l'article 2224 du code civil ;

Que Monsieur [C] [L] rappelle que les locataires ne peuvent soutenir n'avoir eu connaissance d'une erreur de surface à l'origine de leur action que le 18 septembre 2014, puisqu'il ressort d'une attestation délivrée par l'agent immobilier, que les locataires avaient déjà sollicité l'agence, 5 mois plus tôt, en avril 2014, et obtenu par fraude une expertise de la valeur vénale et de la valeur locative du bien en se prévalant d'une fausse qualité de propriétaire; qu'à ce titre, le point de départ de la prescription ne saurait dépendre d'une fraude dissimulée au tribunal ;

Que les locataires, les époux [C], objectent qu'ils n'ont eu connaissance de l'erreur de métrage, qui ne pouvait pas être décelée par des profanes autrement qu'avec l'expertise, qu'à compter du 18 septembre 2014 de telle sorte que la demande ne se heurte pas à la prescription ; Qu'ils prétendent que le propriétaire ne rapporte aucune preuve de la connaissance par eux de cet état de fait avant l'expertise du 18 septembre 2014 ;

Que le premier juge a retenu comme point de départ de la prescription de la demande en restitution de loyer, la connaissance par les locataires de l'erreur de surface à compter du 18 septembre 2014 et considéré que la demande en diminution de loyer n'était pas prescrite ;

Que cependant le caractère mansardé de l'appartement rend son mesurage mal aisé par des profanes ; que les époux [C] produisent aux débats une expertise immobilière réclamée par eux, d'ailleurs à titre de propriétaire, en date du 23 avril 2014 qui établit leur connaissance d'une surface moindre à cette date ; qu'il convient d'en déduire que la demande en restitution de loyers formée dans l'assignation du 27 octobre 2014 est prescrite pour la période du 1er avril 2006 au 26 octobre 2009, mais ne l'est pas pour la période postérieure du 27 octobre 2009 à juin 2015 inclus ;

* Sur la violation de l'obligation de délivrance et la mention de la surface

Considérant que les locataires prétendent, en premier lieu, que Monsieur [C] [L] a manqué à son obligation de délivrance prévue à l'article 1719 du Code civil et, en second lieu, qu'il n'a pas satisfait à l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 25 mars 2009 qui exige la mention de la surface habitable de la chose louée, dans le bail ;

Considérant que Monsieur [C] [L] souligne que les locataires sont entrés dans les lieux le 1er avril 2006, date à laquelle aucune disposition légale n'imposait la mention d'une surface habitable dans le bail, de sorte que si les locataires avaient souhaité en faire une condition substantielle de leur engagement, il leur appartenait de faire opérer un métrage de la surface habitable, dans les cinq ans à compter de leur entrée dans les lieux, ce qu'ils pouvaient parfaitement faire, soit jusqu'au 1er avril 2011 ;

Que pour solliciter l'octroi de dommages et intérêts, les époux [C] font valoir que, conformément à l'article 1719 du code civil, le bailleur a obligation de délivrer un bien correspondant aux caractéristiques du bail conclu, et qu'à défaut les locataires ont droit à des dommages et intérêts ;

Qu'ils soulignent qu'il n'est pas nécessaire d'avoir fait de la superficie un élément déterminant de leur consentement car seule la preuve de la différence entre la superficie promise et la superficie donnée suffit à établir un préjudice au regard de l'obligation de délivrance conforme ; Que les époux [C] rappellent que le bail précisait une surface de 93 m² alors que l'appartement est d'une surface réelle de 78,42 m² soit une différence de plus de 16 % ;

Que Monsieur [C] [L] fait valoir que les pièces à l'appui de la demande des appelants sur la surface habitable ne sont pas probantes et ont été obtenues par fraude en usurpant la qualité de propriétaire pour obtenir des attestations sans visite de l'agent immobilier, ce que ce dernier confirme ;

Que Monsieur [C] [L] rappelle que le montant du loyer est librement fixé entre les parties et n'est pas déterminé par le nombre de mètres carrés ; que le bien constitue un bien d'exception comme le reconnaissent les locataires eux -mêmes qui n'ont pas donné son consentement que sur la base de la superficie habitable ; qu'il souligne que les locataires ont librement visité l'appartement et ont établi l'état des lieux détaillé qu'ils n'ont pas contesté pendant près de 9 années ;

Qu'en effet Monsieur [N] [C] et Madame [R] [J] épouse [C] ne peuvent valablement soutenir que l'appartement donné en location et occupé par eux depuis le 1er avril 2006 n'est pas celui qu'ils ont visité et qui est l'objet du bail qui leur a été consenti ; que dès lors ils soutiennent vainement que Monsieur [C] [L] n'a pas satisfait à son obligation de délivrance ; que la mention d'une surface jugée inexacte par eux est sans effet à cet égard, l'appartement étant habitable et occupé ;

Considérant que Monsieur [N] [C] et Madame [R] [J] épouse [C] font valoir, à titre subsidiaire, que leur demande peut également se fonder sur l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 25 mars 2009, qui impose au bailleur l'obligation de mentionner la surface réelle du bien remis en location ;

Que les locataires rappellent que la loi ALUR est entrée en vigueur le 27 mars 2014 et s'applique dès son entrée en vigueur, peu important que le bail ait été conclu antérieurement ;

Qu'ils soutiennent que peu importe que la loi ALUR soit applicable ou non à l'espèce, puisqu'ayant été renouvelé par trois fois après l'entrée en vigueur de la loi de 2009, l'obligation pesait sur le bailleur ;

Que les locataires prétendent qu'ils auraient contracté à des conditions différentes en ayant eu connaissance de la surface réelle de l'appartement ; Qu'ils soulignent qu'ils ont payé un loyer supérieur à la surface réelle pendant de nombreuses années au lieu du loyer de 2 478 euros ce qui constitue un trop perçu de 56 640 euros ;

Que Monsieur [C] [L] fait valoir que la fixation du loyer d'un bail conclu à effet du 1er avril 2006 est soumis à la loi du 6 juillet 1989 modifiée par la loi de 1994 et donc à la liberté dans la fixation du loyer ;

Qu'il souligne que la loi du 6 juillet 1989 ne rend pas obligatoire la mention d'une surface habitable ; que cette obligation n'est issue que de la loi de modification de 2009, inapplicable à l'espèce et aux baux en cours au jour de son entrée en vigueur ; que de même la loi ALUR ne saurait venir modifier les conditions des baux en cours depuis 2006 ;

Que c'est à bon droit que le premier juge a rappelé qu'aucune sanction n'est, en tout état de cause, prévue pour l'absence de mention exacte de la surface dans le bail prévue par la loi de 2009 et que le nouvel article 3 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 24 mars 2014 n'est pas applicable aux baux en cours selon l'article 14 de ladite loi qui fixe son application dans le temps ; qu'en conséquence Monsieur [N] [C] et Madame [R] [J] épouse [C] sont mal fondés à s'en prévaloir ;

Qu'enfin, les locataires ne rapportent pas la preuve d'un préjudice réparable qui résulterait de la seule erreur de surface mentionnée au bail alors qu'ils ne s'en sont préoccupés qu'en avril 2014 soit 8 ans après l'entrée dans les lieux, et qu'ils ne justifient s'en être plaints que dans leur assignation du 27 octobre 2014 en contestation du commandement de payer qui leur avait été délivré le 2 septembre 2014 ; que leur demande en dommages-intérêts sera donc rejetée ;

* Sur la nullité du bail

Sur le caractère nouveau de la demande et l'estoppel

Considérant que les locataires sollicitent la nullité du bail à titre subsidiaire ;

Que, Monsieur [C] [L] soutient qu'il s'agit d'une demande nouvelle irrecevable en cause d'appel et qu'il souligne que les appelants ayant été déboutés en première instance de leur demande d'application du bail, demandent désormais l'annulation du bail ; que Monsieur [C] [L] rappelle donc que tant le principe de l'estoppel que la prohibition des demandes nouvelles en appel rendent irrecevable la demande des appelants d'annulation du bail ;

Que les époux [C] font valoir que même si cette demande n'a pas été présentée devant le premier juge, elle ne revêt pas pour autant le caractère d'une demande nouvelle puisqu'elle tend aux mêmes fins c'est-à-dire d'obtenir le trop perçu ou subsidiairement la réfaction de ce qui a été payé ;

Qu'en effet Monsieur [N] [C] et Madame [R] [J] épouse [C] se prévalent dans les deux cas de la valeur locative de l'appartement, soit en comparaison du loyer fixé dans le bail, soit pour l'évaluation de l'indemnité d'occupation due par eux en cas nullité du bail et, dans les deux cas, obtenir la restitution des sommes versées, soit à titre de loyer, soit à titre d'indemnité d'occupation, excédant cette valeur locative ;

Qu'ils sont donc fondés à prétendre que les demandes tendent aux mêmes fins ;

Que, pour ce même motif, il n'existe pas de contradiction entre ces demandes et que dès lors la demande en nullité du bail est recevable ;

Sur l'erreur

Considérant que les époux [C] avancent que leur erreur sur la superficie habitable est forcément déterminante de leur consentement aux conditions du bail signé, compte tenu de la différence entre la superficie affichée et la superficie réelle ;

Que les locataires précisent qu'étant profanes dans les matières immobilières, ils n'avaient aucun moyen de déceler cette différence de telle sorte que leur erreur est excusable ;

Qu'ils font valoir, en tout état de cause, que quand bien même leur erreur serait inexcusable, le propriétaire leur a sciemment indiqué une superficie fausse pour emporter leur consentement se rendant coupable d'une man'uvre dolosive rendant leur erreur toujours excusable ;

Que les appelants rappellent qu'en cas d'annulation du contrat, il est anéanti de façon rétroactive de telle sorte que les indemnités d'occupation doivent être évaluées en fonction de la surface réelle du bien, soit 2 478 euros par mois, de telle sorte que la somme totale trop perçue des loyers s'élève à 56 640 euros ;

Que pour solliciter le rejet de la demande de nullité du bail, le bailleur prétend que les locataires ne rapportent pas la preuve que la superficie du bien constituait un élément déterminant de leur consentement ;

Que Monsieur [C] [L] ajoute que les appelants ne rapportent pas la preuve d'une quelconque man'uvre dolosive qui lui soit imputable ;

Que l'intimé souligne que dans le cas où la cour ferait droit à la demande d'annulation du bail, elle devrait en tirer la conséquence immédiate de déchéance de tout droit des locataires et ordonner leur expulsion ;

Que la société KER TRANSACTION souligne qu'il s'agissait d'un bien d'exception par son environnement, son adresse et le niveau des prestations proposées et que dès lors loyer n'était pas fixé en fonction de la seule surface du bien ;

Qu'ainsi que le premier juge l'a retenu, les appelants ne rapportent pas la preuve, par aucune pièce, que la surface de l'appartement a été déterminante de leur consentement pour la conclusion du bail et que s'ils avaient eu connaissance de cette erreur, ils n'auraient pas pris en location cet appartement ;

Qu'en effet, la durée de leur occupation montre qu'il ne s'agissait en réalité que d'une qualité accessoire de l'appartement dont ils ne se sont plaints qu'après la délivrance du commandement de payer et ils sont mal fondés, en tout état de cause, à invoquer une erreur sur la valeur locative du bien pour en déduire la nullité du bail ;

Qu'ils seront donc déboutés de leur demande ;

* Sur la demande de communication des quittances sous astreinte et des décomptes de charges

Considérant que Monsieur [N] [C] et Madame [R] [J] épouse [C] sollicitent la confirmation du jugement dont appel en ce qu'il a fait injonction au propriétaire de délivrer les quittances des loyers acquittés intégralement et partiellement ;

Que les appelants indiquent que malgré cette injonction, le propriétaire ne leur a jamais remis les quittances, ce qui justifie une astreinte de 500 euros par jour de retard ;

Que Monsieur [C] [L] fait valoir qu'en raison des modifications des demandes des locataires et de leurs fondements juridiques, notamment d'annulation, il se trouvait dans l'incapacité de délivrer des quittances de loyers sans avoir la décision de la cour sur la nature et le régime juridique devant être appliqués aux sommes versées ;

Que la société KER TRANSACTION fait valoir qu'elle n'a reçu aucun mandat de gérer le bien, de telle sorte qu'elle ne saurait être concernée par la demande ;

Que toutefois Monsieur [C] [L] ne peut valablement prétendre qu'il lui était impossible de délivrer des reçus des sommes perçues et qu'il convient dès lors de confirmer le jugement qui l'a condamné à remettre soit des quittances soit des reçus sous astreinte et de prévoir une astreinte identique après la signification de l'arrêt ;

* Sur le préjudice moral

Considérant que les appelants font valoir que les menaces d'expulsion ont engendré chez Madame [R] [J] épouse [C] une souffrance psychologique qui a rejailli sur son mari, qui a développé une forme agressive et douloureuse de zona ; qu'ils réclament à ce titre une indemnité de 10 000 euros sur le fondement de l'article 1382 du code de procédure civile ;

Qu'ils font valoir que l'octroi de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice est totalement indépendant de leur patrimoine ;

Que pour rejeter la demande d'indemnités en réparation du préjudice moral, Monsieur [C] [L] fait valoir que la demande est disproportionnée et n'est pas fondée dans la mesure où les appelants bénéficient d'un patrimoine conséquent et sont propriétaires d'un autre bien immobilier dans [Localité 1] ;

Considérant que l'intimée provoquée rejoint les écritures de l'intimé et fait valoir qu'étant propriétaires d'un bien, les appelants sont parfaitement au fait des aléas suscités par une telle procédure ;

Considérant qu'ainsi que jugé en première instance, il n'est pas établi de faute du bailleur ni de lien de cette faute alléguée avec l'état de santé des locataires qui seront donc déboutés de leur demande ;

* Sur l'appel provoqué

Considérant que Monsieur [C] [L], demandeur à l'appel provoqué , fait valoir que la société KER TRANSACTION a un mandat de gestion du bien prévoyant notamment l'établissement du bail litigieux et doit donc le garantir de toute condamnation à l'égard du propriétaire ;

Que la société KER TRANSACTION fait valoir l'irrecevabilité de la demande de Monsieur [C] [L] qui n'apporte pas de preuve et ne vise aucun fondement ;

Que la société KER TRANSACTION souligne qu'avant même de confier mandat, le propriétaire a lui-même fait figurer sur l'annonce la superficie habitable contestée ;

Que la société KER TRANSACTION prétend enfin qu'elle ne saurait être tenue à garantie des condamnations en restitution de Monsieur [C] [L], les sommes litigieuses ayant été perçue par lui seul,

Qu'en tout état de cause, cet appel en garantie sans objet puisqu'aucune conséquence de la surface mentionnée dans le bail n'est tirée au profit des appelants ;

* Sur les frais de procédure

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [C] [L] et de la société KER TRANSACTION la totalité des frais de procédure qu'ils ont été contraints d'exposer en appel ; Que si les dépens seront à la charge des appelants en cause d'appel, le partage prononcé en première instance sera confirmé ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf sur la prescription des demandes antérieures au 14 avril 2009 ;

Statuant de ce chef ;

Déclare prescrites les demandes en restitution de loyers antérieurs au 14 avril 2009 ;

Y ajoutant ;

Déclare recevable la demande de Monsieur [N] [C] et Madame [R] [J] épouse [C] en nullité du bail ;

Déboute Monsieur [N] [C] et Madame [R] [J] épouse [C] de leurs demandes en nullité du bail ;

Condamne Monsieur [C] [L] à remettre aux appelants des quittances et reçus des sommes perçues par lui, sous astreinte de 50 euros par jour, à compter de la signification du présent arrêt, pour une durée de 3 mois ;

Déclare sans objet l'appel en garantie de Monsieur [C] [L] contre la société KER TRANSACTION ;

Condamne Monsieur [N] [C] et Madame [R] [J] épouse [C] à verser, sur le fondement de l'article 700 du code procédure civile, à Monsieur [C] [L] et à la société KER TRANSACTION une somme de 1500 euros pour chacun ;

Condamne Monsieur [N] [C] et Madame [R] [J] épouse [C] aux entiers dépens d'appel avec application au profit du conseil de la société KER TRANSACTION de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE P/LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 16/04665
Date de la décision : 03/04/2018

Références :

Cour d'appel de Paris G4, arrêt n°16/04665 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-04-03;16.04665 ?
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