Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1
ARRÊT DU 16 MARS 2018
(no , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/12487
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Avril 2016 -Tribunal de Grande Instance de MEAUX - RG no 11/01290
APPELANTS
Monsieur Michael X...
né le [...] à VALENCE (26000)
et
Madame Marie Y... épouse X...
née le [...] à LYON (69002)
demeurant [...]
Représentés tous deux par Me H... Z... de la SELARL MODERE etamp; ASSOCIES, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 43
INTIMÉS
Monsieur H... A...
né le [...] à NIORT (79000)
demeurant [...]
Représenté par Me François B... de l'AARPI B... I..., avocat au barreau de PARIS, toque : A0210
Madame ANNE-G... C... épouse A...
née le [...] à RUEIL MALMAISON (92500)
demeurant [...]
Représentée par Me François B... de l'AARPI B... I..., avocat au barreau de PARIS, toque : A0210
SA AXA FRANCE IARD venant aux droits de la Société AXA COURTAGE, es qualité d'Assureur de la Société IRC - agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
No SIRET : 722 057 460
ayant son siège au 313 TERRASSES DE L'ARCHE - [...]
Représentée par Me Anne J... de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111
Assistée sur l'audience par Me Stéphanie K... de la SELARL ARIANE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1538
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Février 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Présidente
Monsieur Dominique GILLES, Conseiller
Madame Christine BARBEROT, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : M. Christophe DECAIX
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Dominique DOS REIS, Présidente, et par M. Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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* *
Suivant acte authentique du 21 avril 2008, M. et Mme A... ont vendu à M. et Mme X... [...] , après y avoir fait effectuer par la société IRC des travaux de rénovation et de modification de l'emplacement des sanitaires.
Il était indiqué audit acte que le bien objet de la vente était « raccordé à l'assainissement communal, ainsi constaté par une lettre délivrée le 9 juin 2004 par le service d'assainissement communal dont l'original est demeuré ci-joint et annexé après mention ». Les vendeurs ont, par ailleurs, attesté le 23 novembre 2007 ne pas avoir « fait de travaux susceptibles de modifier le constat de conformité au réseau d'assainissement ».
Une partie du rez-de-chaussée de la maison ayant été inondé à la suite de violents orages survenus les 17 et 18 mai 2008, M. et Mme X... ont obtenu, par ordonnances de référé des 16 février 2009 et 28 septembre 2011 la désignation de M. D... en qualité d'expert, au contradictoire de M. et Mme A... et de la société Axa France IARD, assureur de la société IRC.
Le rapport d'expertise a été déposé le 30 juillet 2014 mais, entre-temps, M. et Mme X... avaient assigné, par acte extra-judiciaire du 9 février 2011, M. et Mme A..., sur le fondement de la garantie des vices cachés, et par acte extra-judiciaire du 4 juillet 2011, la société Axa France IARD en paiement, par voie d'action directe.
Par jugement du 28 avril 2016, le tribunal de grande instance de Meaux a :
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription,
- débouté M. et Mme X... de leurs demandes à l'encontre de M. et Mme A..., tant sur le fondement de la garantie des vices cachés que sur celui du défaut de conformité,
- débouté M. et Mme X... de leur action directe contre la société Axa France IARD,
- rejeté toute autre demande,
- condamné M. et Mme X... aux dépens.
M. et Mme X... ont relevé appel de ce jugement dont ils poursuivent l'infirmation, demandant à la Cour, par dernières conclusions du 22 juillet 2016, de :
au visa des articles 1604 et suivants, 1382 et suivants du code civil,
- confirmer le jugement en ce qu'il a dit leur action recevable,
- dire que le raccord vicieux des eaux pluviales, eaux vannes et eaux usées à une évacuation inappropriée d'un diamètre insuffisant est directement à l'origine des inondations et débordements constatés les 17 et 18 mai 2008 et constituent, de ce fait, une non-conformité de la chose à sa destination normale, justiciable des dispositions de l'article 1641 du code civil au titre de la garantie des vices cachés,
- dire que M. et Mme A... leur ont caché un vice affectant la propriété vendue au sens de l'article 1641 du code civil, vice qui, s'ils l'avaient connu, les auraient conduits à acquérir ce bien à un prix moindre,
- dire que M. et Mme A... connaissaient parfaitement le vice et non-conformité dont s'agit pour avoir eux-mêmes fait procéder au raccordement irrégulier des eaux pluviales au réseau sanitaire des eaux usées,
- dire, en conséquence, que la clause élusive des vices cachés est inefficace par application de l'article 1643 du code civil,
- dire que la mauvaise foi de M. et Mme A... établie par les éléments du dossier leur impose, par application de l'article 1645 du code civil, de prendre en charge les conséquences dommageables du vice caché,
- pour le cas où la responsabilité de la société IRC qui a réalisé les travaux à l'origine des dommages et la garantie de son assureur seraient retenues, ils seraient alors bien fondés à solliciter la condamnation de ceux-ci, par application des articles 1382 et suivants du code civil,
- subsidiairement, pour le cas où la garantie des vices cachés ne serait pas retenue, dire que M. et Mme A... ont manqué à leur obligation de renseignement et de délivrance de l'article 1604 du code civil en négligeant de les informer des travaux par eux réalisés sur les évacuations d'eaux pluviales et leur raccordement au réseau d'eaux usées, non-conformité des installations aux dispositions tant contractuelles que réglementaires qui engage sur ce même fondement leur responsabilité,
- dire qu'en vertu des dispositions de l'article 12 du code de procédure civile, la demande principale doublée d'une demande subsidiaire ne sont pas affectées par le cumul d'actions,
dire que l'imputabilité des dommages subis aux travaux réalisés par la société IRC ressort tant des pièces que des conclusions de l'expert,
- dire que la société Axa France IARD ne rapporte pas la preuve de l'application et du quantum de la franchise alléguée,
- condamner, en conséquence, solidairement et, en tant que de besoin, la société Axa France IARD en sa qualité d'assureur de la société IRC, au paiement des sommes suivantes :
- 3.399 € HT au titre de l'obligation de délivrance et, subsidiairement de la minoration du prix correspondant aux travaux de mise en conformité outre TVA en vigueur et indexation sur l'indice BT 01 du coût de la construction valeur juillet 2008,
- 12.943,51 € au titre des travaux de reprise ensuite des dégâts des eaux, à titre de dommages-intérêts,
- 19.698 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leurs privation et trouble de jouissance
- 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens de première et d'appel comprenant les frais de l'instance en référé et ceux d'expertise de M. D....
M. et Mme A... prient la Cour, par dernières conclusions du 25 novembre 2016, de :
au visa des articles 1134 et 1147 anciens, 1641 du code civil,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- condamner solidairement M. et Mme X... ainsi que la société Axa France IARD en sa qualité d'assureur de la société IRC, à leur payer la somme de 3.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.
La société Axa France IARD prie la Cour, par dernières conclusions du 24 janvier 2018, de :
au visa des articles 1382 et 1384 du code civil,
- confirmer le jugement en ce qu'il a considéré qu'aucun élément tangible ne permettait d'imputer les désordres subis par M. et Mme X... aux travaux de la société IRC et débouté ceux-ci de leur action directe contre elle en sa qualité d'assureur de cette entreprise,
- subsidiairement, dire que M. et Mme X... ne peuvent solliciter sa garantie, alors qu'ils ne fondent pas leur demande en droit et que les violents orages à l'origine des inondations présentaient un caractère imprévisible et irrésistible,
- dire que le sinistre est en partie dû à une cause étrangère,
- en conséquence, la dire fondée à opposer une exclusion de garantie,
- débouter M. et Mme X... de leur appel en garantie,
- plus subsidiairement, dire que le taux de TVA applicable aux travaux devrait être de 5,5 % au lieu de 19,60 %,
- dire que le devis de la société Cavanna du 29 septembre 2008 prévoyant la mise en conformité de l'installation pour 3.999 € HT constitue une amélioration de l'ouvrage et débouter M. et Mme X... de leur demande en paiement de la somme de 3.399 € HT à ce titre
- dire que sa police d'assurance ne couvre pas le préjudice de jouissance,
- dire que le montant des travaux de reprise des désordres ne saurait excéder la somme de 11.410,50 € TTC,
- débouter M. et Mme X... de leur appel en garantie au titre du préjudice de jouissance,
la dire fondée à opposer sa franchise contractuelle ainsi que les limites contractuelles du contrat souscrit par la société IRC en ses livres,
- en tout état de cause, rejeter les demandes formées par l'ensemble des parties contre la société IRC et elle-même,
- condamner in solidum M. et Mme X... et M. et Mme A... à lui payer la somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens de première instance et d'appel.
SUR CE
LA COUR
L'expert D... relate en son rapport qu'à l'origine, le réseau d'assainissement de la maison n'était pas dissocié et était commun aux eaux pluviales et usées, que, courant 2003, la commune de Champs-sur-Marne a créé un réseau distinct pour les eaux usées des habitations et a demandé aux riverains de brancher leurs canalisations d'évacuation de leurs eaux usées sur ce réseau ; que M. E..., père de Mme F..., auteur de M. et Mme A..., a fait procéder à ces travaux de raccordement et a séparé les eaux pluviales des eaux usées ainsi que l'a constaté la Compagnie Générale des Eaux dans un certificat de conformité du 9 juin 2004, le regard d'évacuation ne recevant plus les eaux pluviales qui se répandaient dans la cour devant la maison ; qu'après avoir acheté cette maison, le 29 avril 2005, M. et Mme A... ont fait pratiquer par la société IRC des travaux consistant en une modification de l'implantation des sanitaires du bâtiment par déplacement de la cuisine, de la salle de bains et remplacement des WC, avec création d'une descente extérieure en PVC des eaux usées de la salle de bains à l'étage et raccordement au réseau existant, que, le 21 avril 2008, à la suite de violents orages, un refoulement d'eau s'est produit à parti du siphon de sol situé dans la cuisine du pavillon raccordé sur le collecteur des eaux usées de la cuisine se dirigeant vers un regard extérieur, lequel était alimenté non seulement par les eaux usées de la salle de bains et de la cuisine de la maison mais également, par suite des travaux réalisés à une date et par une personne inconnues, les eaux pluviales du pavillon et du garage qui avaient été détournées en 2004 ; que ce défaut de conception était à l'origine du refoulement d'eau à travers le siphon de la cuisine ;
Au soutien de leur appel, M. et Mme X... font essentiellement valoir que M. et Mme A... ne pouvaient ignorer le vice affectant les évacuations du pavillon et qu'ils leur ont caché l'existence de travaux ayant abouti à dévoyer les eaux pluviales s'épandant auparavant dans la cour pour les raccorder à la canalisation des eaux usées de diamètre insuffisant pour absorber ces deux types d'eaux ; subsidiairement, ils reprochent aux vendeurs un manquement à leurs obligations d'information loyale et de délivrance conforme, dès lors qu'ils ont déclaré que l'installation d'assainissement de la maison était conforme à la réglementation ;
Ces moyens ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs exacts que la Cour adopte sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation ; en effet, M. et Mme A... peuvent valablement se prévaloir de la clause élusive des vices cachés insérée à l'acte de vente dès lors que, d'une part, rien ne prouve qu'ils auraient eu connaissance d'interventions sur le réseau d'assainissement de leur maison qui auraient modifié le réseau existant, réalisées par la société IRC ou une autre personne, l'expert ayant seulement indiqué que la société IRC avait « vraisemblablement » réalisé des travaux d'aménagement importants à l'origine des désordres en redirigeant les eaux pluviales dans le collecteur des eaux usées qui se déversaient auparavant dans la cour de la maison, d'autre part, qu'il n'est pas davantage démontré qu'ils auraient su, quoique profanes en la matière, que cette configuration de réseau était non conforme et susceptible de créer des refoulements qui ne se sont produits qu'après des orages d'une intensité exceptionnelle au mois de mai 2008 ;
S'agissant de la délivrance non conforme reprochée à M. et Mme A..., il sera rappelé qu'en droit, la non-conformité de la chose aux spécifications contractuelles constitue un manquement à l'obligation de délivrance tandis que la non-conformité de la chose à sa destination normale est constitutive d'un vice caché ; dés lors, c'est par de justes motifs que la Cour adopte que le premier juge a dit que la configuration des évacuations des eaux pluviales et usées se raccordant en commun sur un réseau sous-dimensionné, entraînant des remontées d'eau, constituait un vice caché inhérent à la chose vendue et non un défaut de délivrance conforme, les évacuations du pavillon étant, comme indiqué à l'acte de vente, raccordées au réseau communal ;
M. et Mme X... ne démontrent pas davantage que M. et Mme A... auraient failli à leur obligation pré-contractuelle d'information en manquant de leur signaler l'inadéquation du réseau d'assainissement du bien vendu, alors que rien ne prouve, au terme des conclusions dubitatives de l'expert, qu'ils auraient connu tant cette non-conformité à la réglementation en vigueur que les problèmes susceptibles d'en résulter, le premier juge relevant pertinemment à cet égard que l'obligation de séparation des eaux usées et pluviales n'était pas encore en vigueur au jour de la vente à M. et Mme X... ;
Enfin, l'action directe engagée par M. et Mme X... contre la société Axa France IARD ne saurait prospérer alors qu'il n'est pas établi que le branchement défectueux aurait été effectué par son assurée la société IRC dont le devis ne comporte aucune prestation de ce type, mais seulement des modifications d'aménagements intérieurs, outre la réalisation des évacuations en PVC et raccordement sur réseau existant (WC, baignoire, lavabo) et la réalisation d'une descente en PVC pour eaux usées, à l'extérieur ;
Au vu de ces éléments, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions ;
L'équité ne justifie pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en la cause.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Rejette toute autre demande,
Condamne M. et Mme X... aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, La Présidente,