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06/03/2018 | FRANCE | N°16/04106

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 06 mars 2018, 16/04106


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4



ARRÊT DU 06 MARS 2018



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/04106



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Décembre 2015 -Tribunal d'Instance de PARIS - 8ème Arrondissement - RG n° 11-15-000035



APPELANTE



SNC FONCIERE CHAMBIGES, prise en la personne de son gérant

SIRET N ° : 753 942 143 00011r>
[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Maître Marie-Catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010



Ayant pour avocat plaidant Maître ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4

ARRÊT DU 06 MARS 2018

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/04106

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Décembre 2015 -Tribunal d'Instance de PARIS - 8ème Arrondissement - RG n° 11-15-000035

APPELANTE

SNC FONCIERE CHAMBIGES, prise en la personne de son gérant

SIRET N ° : 753 942 143 00011

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Maître Marie-Catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Ayant pour avocat plaidant Maître David BILLARD, avocat au barreau de PARIS, toque : D1441

INTIMEE

Madame [Z] [N]

née le [Date naissance 1] 1945 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 1]

Représentée et ayant pour avocat plaidant Maître Emmanuelle CHOUAIB-MARTINELLI de la SELAFA K B R C & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0025

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Janvier 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sabine LEBLANC, conseillère faisant fonction de présidente et Mme Sophie GRALL, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Sabine LEBLANC, conseillère faisant fonction de présidente

Mme Sophie GRALL, conseillère

M. Philippe JAVELAS, conseiller

qui en ont délibéré.

En application de l'ordonnance de Mme La Première Présidente de la Cour d'Appel de PARIS, en date du 05 janvier 2018.

Le rapport ayant été lu par Mme Sabine LEBLANC, conseillère faisant fonction de présidente, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Mélodie ROSANT

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Sabine LEBLANC, conseillère faisant fonction de présidente et par Mme Mélodie ROSANT, greffière présente lors de la mise à disposition.

***

Le 15 janvier1973, la CANSSM, a donné en location à Madame [Z] [N] un appartement de 66 m² au 5ème étage puis, le 23 décembre 1978, un appartement de 35 m² au rez-de-chaussée de l'immeuble du [Adresse 3]), ces deux baux étant soumis à la loi de 1948 et accessoires à son contrat de travail.

Madame [Z] [N] a été mise à la retraite en janvier 2002 et n'a pas restitué les appartements.

Après achat de l'immeuble en octobre 2012, la SNC FONCIERE CHAMBIGES a fait assigner Madame [Z] [N] devant le tribunal d'instance de Paris du 8ème arrondissement pour voir constater qu'elle est occupante sans droit ni titre puisqu'elle est à la retraite, obtenir son expulsion ou, à titre subsidiaire, la signature d'un bail soumis à la loi du 6 juillet 1989 ainsi que la réparation de son préjudice.

Par jugement du 10 décembre 2015, non assorti de l'exécution provisoire, le tribunal d'instance du 8ème arrondissement de Paris, a :

- débouté la SNC FONCIERE CHAMBIGES de sa demande d'expulsion,

- constaté que les baux liant les parties relèvent de la loi du 1er septembre 1948,

- débouté la SNC FONCIERE CHAMBIGES de sa demande en régularisation d'un contrat écrit soumis à la loi du 6 juillet 1989,

- débouté la SNC FONCIERE CHAMBIGES de sa demande indemnitaire,

- condamné la SNC FONCIERE CHAMBIGES à payer à Madame [Z] [N] la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- fait injonction à la SNC FONCIERE CHAMBIGES de délivrer à Madame [Z] [N] des quittances des loyers contractuels acquittés depuis janvier 2013,

- assorti cette injonction, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la signification de la décision, d'une astreinte provisoire de 50 euros par jour,

- condamné la SNC FONCIERE CHAMBIGES à payer à Madame [Z] [N] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

La SNC FONCIERE CHAMBIGES a interjeté appel de cette décision en date du 15 février 2016.

Suivant conclusions déposées et notifiées le 18 décembre 2017 par le RPVA, la SNC FONCIERE CHAMBIGES, appelante, demande à la cour d'infirmer totalement le jugement entrepris et de :

- régulariser les baux de Madame [Z] [N] en lui enjoignant de conclure un bail écrit soumis à la loi du 6 juillet 1989 ou, le cas échéant, aux conditions de loyer fixées par la cour,

- condamner Madame [Z] [N] à lui verser la somme de 123 065,09 euros au titre de son préjudice,

- rejeter les demandes indemnitaires de Madame [Z] [N],

Et, à titre subsidiaire,

- prononcer l'expulsion de Madame [Z] [N],

- la condamner, en toutes hypothèses, à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Suivant conclusions déposées et notifiées le 16 janvier 2018 par le RPVA, Madame [Z] [N], intimée, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il :

- a décidé que les parties aux baux litigieux avaient entendu nover par renonciation au terme prévu audits baux et maintenir sans discontinuité les baux soumis à la loi de 1948 malgré sa mise à la retraite,

- a condamné la SNC FONCIERE CHAMBIGES et l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes.

A titre subsidiaire, l'intimée demande à la cour, si elle retenait l'arrivée du terme des baux conclus, de :

- constater qu'un nouveau bail a été conclu entre les parties à la date du 6 avril 2002 et qu'il relève de la loi du 6 juillet 1989,

- de lui donner acte de ce qu'elle accepte de régulariser un contrat écrit formalisant les conditions du nouveau bail aux mêmes conditions que celles précédemment convenues entre les parties.

Dans tous les cas, l'intimée demande à la cour de :

- constater que la SNC FONCIERE CHAMBIGES a engagé sa responsabilité contractuelle par son attitude déloyale et abusive lui ayant occasionné un préjudice moral,

- constater, à titre subsidiaire, que la SNC FONCIERE CHAMBIGES a engagé sa responsabilité délictuelle,

- porter le montant des dommages et intérêts réparatoires à la somme de 50 000 euros,

- condamner la SNC FONCIERE CHAMBIGES à lui verser une indemnité de 18 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens avec application de l'article 699 du code procédure civile .

Après report, l'ordonnance de clôture a été prononcée le 23 janvier 2018.

SUR CE, LA COUR,

* Sur le terme des baux

Considérant que la SNC FONCIERE CHAMBIGES critique le jugement entrepris qui a retenu une novation et rappelle qu'en vertu de l'article 1273 du code civil, la novation ne se présume pas et qu'il faut en identifier les éléments probatoires de nature à l'établir ;

Qu'elle souligne que l'émission de quittances ne le permet pas ;

Qu'elle prétend qu'en l'espèce, les baux initiaux ont bien pris fin 3 mois après le départ à la retraite de Madame [Z] [N], à savoir le 6 avril 2002 comme prévu aux contrats ;

Que le bailleur de l'époque n'a, selon elle, jamais exprimé clairement, ni même implicitement, sa volonté de renoncer à se prévaloir de l'expiration des baux initialement conclus en 1973 et 1978 et que la simple émission de quittances de loyers n'indique rien d'autre qu'une simple bienveillance à l'égard de la locataire ;

Qu'elle soutient que le tribunal s'est livré à une interprétation qui dénature les termes employés par la CANSSM puisqu'au contraire, les courriers mentionnés ne montrent que son renoncement avant de céder l'immeuble ; que dès lors, le tribunal a irrégulièrement présumé la présence d'une novation ;

Qu'elle rappelle que cette absence de novation se retrouve lors du transfert de propriété à son profit, puisqu'elle a clairement porté à la connaissance de la locataire sa volonté de faire cesser l'occupation irrégulière, ce que celle-ci ne conteste d'ailleurs pas ;

Qu'elle fait valoir qu'en vertu de la loi de 1948, lorsque le preneur n'exerce plus ses fonctions et que son contrat de location est accessoire au contrat de travail, il ne peut prétendre être maintenu dans les lieux ;

Que la SNC FONCIERE CHAMBIGES rappelle que Madame [Z] [N] a mis un terme à ses fonctions du fait de son départ à la retraite le 6 janvier 2002, que les baux ont donc expiré comme prévu trois mois après, soit le 6 avril 2002 ;

Qu'elle avance encore qu'aucun avenant ou autre élément n'indique la volonté de la CANSSM de renoncer au terme des baux, et que son inaction n'a pour seul effet de ne donner aucune conséquence pratique immédiate sans qu'il soit possible d'en tirer aucune conclusion juridique ;

Que Madame [Z] [N] objecte, quant à elle, que dans l'ensemble des courriers adressés postérieurement à sa mise en retraite, la CANSSM l'a toujours désignée comme locataire des logements occupés ; qu'elle lui a d'ailleurs délivré des quittances de loyers ;

que Madame [Z] [N] soutient donc que la CANSSM a renoncé de manière certaine et non équivoque au terme du bail prévu dans les conventions de sorte que sa situation locative de la locataire s'est poursuivie malgré sa mise à la retraite intervenue le 6 janvier 2002 ;

Qu'elle fait valoir qu'il est constant que la CANSSM a décidé de maintenir ses salariés arrivés à l'âge de la retraite dans leurs locaux, comme c'est le cas pour elle mais également pour Madame [E] ;

Que lors de l'acquisition de l'immeuble, la SNC FONCIERE CHAMBIGES était parfaitement au courant de la situation locative de l'immeuble et des engagements pris par la CANSSM et a reconnu l'occupation de bonne foi des locataires figurant sur l'annexe 20 de l'acte de vente, dont elle faisait partie ;

Que le 20 novembre 2012, la SNC FONCIERE CHAMBIGES l'a d'ailleurs invitée à discuter de la poursuite de son « bail », ce qui prouve encore une fois que la situation locative était très claire dans l'esprit de la société ;

Considérant que, certes le 25 mars 2009, la CNANSSM a notifié un bail de sortie de 8 ans en application de la loi de 1986, qui n'a jamais été signé et qui a été abandonné par le bailleur par lettre du 8 avril 2009 ; que certes l'acte de vente conclu en 2012 au profit de la SNC FONCIERE CHAMBIGES en page 23 prévoit « le vendeur déclare que la situation locative de l'immeuble est celle récapitulée dans l'état locatif dont l'acquéreur déclare avoir parfaite connaissance » et que dans cette annexe, les baux consentis à Madame [Z] [N] sont indiqués comme des baux loi de 48 consentis le janvier 1973 et le 1er octobre 1983 mais que, dès son acquisition, la SNC FONCIERE CHAMBIGES par ses lettres a contesté l'application de la loi 1948 à la situation locative de Madame [Z] [N] ;

Qu'en effet les baux consentis à Madame [Z] [N] étaient des baux portant sur des logements de fonction qui font l'objet d'une réglementation spécifique de la loi du 1er septembre 1948 ; qu'il ne peut être contesté que les baux litigieux avaient un terme contractuel fixé à 3 mois après le départ à la retraite de la locataire , soit le 6 avril 2002, ce qui est conforme aux dispositions d'ordre public de la loi de 1948 pour un logement de fonction ;

Qu'une simple tolérance au profit de Madame [Z] [N], qui n'a pas le droit au maintien dans les lieux selon la loi de 1948, et la délivrance de quittances sont insuffisants à établir la renonciation du bailleur de l'époque au terme de ces baux, fixé conformément à l'article 10 8° de ladite loi, ce qui est expressément rappelé dans le bail en première page, conformément au règlement intérieur du personnel de la caisse ;

Qu'aucun avenant n'a été signé entre les parties pour poursuivre ces baux et revenir sur l'engagement contractuel de la locataire de libérer les lieux au terme des deux baux ; que les baux portant sur des logements de fonction ont donc bien pris fin le 6 avril 2002 ;

Que l'annexe au contrat de vente avait pour objet d'informer l'acquéreur sur le montant des loyers mensuels dus par chaque locataire et ne constituaient l'engagement ni du vendeur ni de l'acquéreur de consentir un bail soumis à la loi de 1948 à Madame [Z] [N], qui n'avait déjà plus droit au maintien dans les lieux aux termes de l'article 10 8° de cette loi , ce qui est de nature à expliquer la renonciation de la caisse à proposer un bail de sortie ; que d'ailleurs, par lettre du 5 décembre 2008, la caisse des dépôts qui gérait désormais l'immeuble a indiqué que le paiement des loyers pourrait être mensuel par prélèvement automatique et non plus prélevé trimestriellement comme en matière de bail soumis à la loi de 1948 ;

Qu'il ne peut donc être valablement contesté que les 2 baux portant sur des logements de fonction ont pris fin à leur terme ;

* Sur la loi applicable

Considérant que la SNC FONCIERE CHAMBIGES avance que si le tribunal de première instance a justement considéré que les baux étaient expirés, il n'en a pas tiré les bonnes conséquences ;

Que la SNC FONCIERE CHAMBIGES fait valoir, à cet effet, qu'à supposer que l'occupation des locaux ait donné lieu à la conclusion de contrats de baux tacites, ils ne pourraient pas être soumis à la loi de 1948 ;

Qu'à ce titre, l'appelante rappelle que la loi de 1986, d'ordre public, impose à tout nouveau contrat conclu après son entrée en vigueur, sur des locaux vacants d'être soumis à la loi de 1989 et prétend qu'en l'espèce, les locaux ont nécessairement été juridiquement vacants à compter de l'expiration du bail, en avril 2002, puisqu'occupés sans titre ;

Qu'ils devaient donc être soumis à la loi de 1989  puisqu'en effet, selon elle, la cour de cassation ne retient pas seulement une vacance matérielle mais aussi une vacance juridique, rendant la loi de 1986 applicable ; qu'il s'ensuit que la loi de 1948 ne pouvait pas valablement leur être appliquée ;

Qu'elle soutient donc qu'en vertu des lois de 1986 et 1989, elle est fondée à ce qu'il soit enjoint à Madame [Z] [N] de conclure un bail écrit soumis à la loi de 1989 ;

Que Madame [Z] [N] fait valoir, suivie en cela par le tribunal, que contrairement à ce que soutient la SNC FONCIERE CHAMBIGES il y a eu continuité de son occupation des appartements et que dès lors, les locaux n'ont jamais été « vacants » et que la loi de 1986 n'a pas vocation à s'appliquer et permet le maintien l'application de la loi de 1948 aux locaux ;

Mais considérant que le 6 avril 2002, les baux consentis à Madame [Z] [N] portant sur les logements de fonction ont pris fin et qu'il ne peut être dérogé par les parties à l'article 25 de la loi du 6 juillet 1986, qui est d'ordre public ;

Que dès lors, s'il y a bien eu accord des parties sur le montant du loyer en contrepartie de l'occupation et donc sur un bail verbal, celui-ci a pris effet après l'entrée en vigueur de la loi du 23 décembre 1986, et était donc nécessairement soumis à la loi du 6 juillet 1989 ;

Qu'en effet il ne pouvait y avoir continuation des baux puisque le local n'était plus, à compter de cette date, un logement de fonction et que le nouveau bail était un simple bail d'habitation dont l'objet était un logement d'habitation de droit commun ;

* Sur la demande de conclusion d'un bail écrit

Considérant que la SNC FONCIERE CHAMBIGES fait valoir qu'en tout état de cause, le bail doit être régularisé par écrit et demande à la cour de procéder à l'estimation du loyer dû mais sans suivre le raisonnement de l'intimée réclamant l'application des loyers actuels pour le bail régularisé soumis à la loi de 1989, car cela reviendrait à appliquer la loi de 1948 sous couvert de la loi de 1989 ;

Considérant que Madame [Z] [N] fait valoir que l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989 invoqué par l'appelante en vue de l'établissement d'un contrat écrit ne peut pas être soulevé par le bailleur qui ne peut pas se prévaloir de la violation des dispositions dudit article et indique que la loi se contente de laisser un droit à toute partie de régulariser la situation de façon rétroactive mais ne confère aucun droit au bailleur pour modifier les éléments du bail ; qu'elle précise pourtant son accord pour la signature d'un bail aux mêmes conditions que celles antérieurement en application ;

Qu'en tout état de cause, Madame [Z] [N] soutient que la cour ne saurait qu'enjoindre aux parties de régulariser la situation aux conditions déjà prévues par la conclusion verbale voire tacite des nouveaux baux à l'issue du terme des premiers baux ; qu'à ce titre, l'intimée fait valoir que la preuve des éléments essentiels constitutifs des baux qui auraient pris effet le 6 avril 2002 est amplement rapportée, notamment par les 129 appels et quittances de loyer établis à compter de cette date jusqu'au mois de janvier 2013 ; que l'appelante ne saurait imposer ainsi, sous couvert de régularisation, de nouvelles conditions lui permettant de réviser les loyers de façon totalement contraire à la loi, qu'en effet les quittances font preuve du montant du loyer et que la SNC FONCIERE CHAMBIGES ne saurait obtenir une augmentation du loyer sans respecter la procédure prévue à la loi du 6 juillet 1989 ;

Que les deux baux verbaux étaient valables et ont régi les relations entre les parties du 6 avril 2012 jusqu'à ce jour ; qu'en conséquence il y a lieu d'inviter les parties à régulariser un bail écrit qui sera soumis aux dispositions d'ordre public de la loi du 6 juillet 1989 avec application du loyer convenu par les parties dans le bail verbal dont le montant est établi par les quittances délivrées ;

* Sur le préjudice de la la SNC FONCIERE CHAMBIGES

Considérant que, pour solliciter l'infirmation du jugement attaqué, l'appelante fait valoir que Madame [Z] [N] occupe et sous-loue depuis le 6 avril 2002 deux appartements en bénéficiant de manière irrégulière d'une application de la loi de 1948 et de l'encadrement des loyers qui en découle ; que la SNC FONCIERE CHAMBIGES prétend subir ainsi un préjudice égal à la différence entre le loyer justifié par les caractéristiques des biens occupés et celui que Madame [Z] [N] consent à verser conformément aux dispositions de la loi de 1948 illégalement appliquée ; qu'elle chiffre donc son préjudice au cumul des loyers que Madame [Z] [N] aurait dû verser depuis le mois de janvier 2013, soit 123 065,09 euros ;

Que pour demander à la cour de débouter la SNC FONCIERE CHAMBIGES de ses demandes, Madame [Z] [N] fait valoir qu'elle a réglé le loyer fixé régulièrement qui correspond à celui appelé par la SNC FONCIERE CHAMBIGES le 21 décembre 2012 pour le 1er trimestre 2013 et qu'en outre, aucune fraude ne saurait être caractérisée par le fait pour une partie de continuer à exécuter les obligations d'un contrat non modifié ;

Qu'elle considère donc que l'appelante ne démontre pas la réalité du préjudice qu'elle invoque  ;

Qu'en effet que rien ne justifie une augmentation rétroactive du loyer à défaut d'avoir suivi la procédure prévue par la loi de 1989, la bailleresse ne peut justifier d'aucun préjudice et se verra déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts puisque le bail verbal soumis à la loi du 6 juillet 1989 a pris effet au 6 avril 2002 aux mêmes conditions de loyers établis par les quittances et l'appelante ne peut donc invoquer un préjudice ;

* Sur la sous location du grand appartement au 5ème étage à la fille de la locataire

Considérant la SNC FONCIERE CHAMBIGES soulève en premier lieu que le second appartement n'est pas habité par Madame [Z] [N] , qu'il n'est pas vacant mais sous loué et occupé par des personnes tierces sans autorisation du bailleur ;

Que la sous-location ou le prêt illicite constituent des violations du contrat de bail qui autorisent l'expulsion du locataire, peu important l'empire de la loi sous lesquels se trouvent les baux  et que la circonstance que les personnes tierces fassent partie de la famille de Madame [Z] [N] est inopérante ;

Que pour solliciter de la cour le rejet de la demande d'expulsion, Madame [Z] [N] nie totalement une sous-location et indique que les locaux sont occupés personnellement par elle et sa famille comme l'autorisent les baux initialement conclus  et que dès lors la demande d'expulsion est sans fondement et doit être rejetée ;

Que cependant les baux étant soumis à la loi du 6 juillet 1989, la sous-location ou la cession de bail non autorisée par le bailleur est prohibée par l'article 8 de la loi du 6 juillet 1989 ; que l'occupation par sa fille de l'appartement du 5ème étage, avec laquelle elle ne cohabite pas puisqu'elle habite au rez-de-chaussée, ne constitue pas un hébergement de sa famille ; qu'en conséquence il convient de prononcer la résiliation du bail de l'appartement du 5ème étage pour défaut d'occupation et cession du bail ;

Que les délais légaux prévus à l'article L412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution devront être respectés puisqu'il n'y a pas eu voie de fait ; qu'en revanche Madame [Z] [N] occupe régulièrement le studio du rez-de-chaussée et l'appelante sera déboutée de sa demande d'expulsion ;

* Sur la demande d'indemnisation de Madame [Z] [N]

Considérant que Madame [Z] [N] sollicite de la cour la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a reconnu son préjudice moral mais demande que le montant de la réparation de ce préjudice soit porté à 50 000 euros, en raison de l'attitude particulièrement abusive dont a fait preuve l'appelante dans cette procédure ; qu'elle fait valoir que la SNC FONCIERE CHAMBIGES a abusé de son statut face à une locataire âgée de 70 ans en place depuis plus de 40 ans en prétendant d'abord à la modification unilatérale du loyer avant de se livrer à un véritable harcèlement par l'intermédiaire du gestionnaire, le cabinet [R], notamment au regard des relances incessantes pour des paiements par chèque prétendument jamais reçus créant des incidents de rejet pour opposition et autres désagréments bancaires ; qu'elle souligne également que la SNC FONCIERE CHAMBIGES s'est également livrée à une procédure abusive initiée devant la formation de référé du Tribunal d'Instance, puis au fond, puis dans sa résistance à l'exécution des termes de l'ordonnance de référé ; que les menaces d'expulsion, les incidents de gestion, la persistance des appels de loyers majorés, le refus de délivrer des quittances régulières ont fortement porté atteinte à son moral ;

Que pour solliciter de la cour le rejet des demandes reconventionnelles de Madame [Z] [N], la SNC FONCIERE CHAMBIGES fait remarquer que l'intimée sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions sans interjeter appel incident, ce qui l'empêche de formuler une réclamation de 50 000 euros ;

Que cependant Madame [Z] [N] demande la confirmation du jugement sur le principe de la réparation et non sur son montant et que sa demande est recevable ;

Que la SNC FONCIERE CHAMBIGES souligne que Madame [Z] [N], en quelque sorte, lui reproche d'avoir tenté de rechercher des solutions amiables, d'avoir saisi un juge ou d'avoir interjeté appel, c'est-à-dire son exercice d'un droit reconnu à l'ensemble des justiciables ;

Qu'en effet aucune faute caractérisée de la la SNC FONCIERE CHAMBIGES à l'origine d'un préjudice moral n'est prouvée par Madame [Z] [N] se verra débouté e de sa demande ;

* Sur les frais de procédure

Considérant que la solution du litige conduit à ne pas faire application de l'article 700 du code procédure civile et à laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

PAR SES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe ;

Infirme le jugement entrepris sauf sur le débouté de la demande indemnitaire de la SNC FONCIERE CHAMBIGES, la remise de quittances sous astreinte ;

Statuant à nouveau ;

Dit que les rapports locatifs des parties sont soumis, depuis le 6 avril 2012, aux dispositions d'ordre public de la loi du 6 juillet 1989 ;

Dit que les parties devront régulariser un bail écrit soumis aux dispositions d'ordre public de la loi du 6 juillet 1989 portant sur l'appartement du rez-de-chaussée et aux conditions antérieures convenues entre elles depuis le 6 avril 2012 avec un loyer dont le montant sera fixé au montant payé par Madame [Z] [N] selon les quittances délivrées concernant ce seul appartement ;

Prononce la résiliation à compter de ce jour du bail de l'appartement du 5ème étage occupé par la fille de Madame [Z] [N] et ordonne l'expulsion de Madame [Z] [N] et de tout occupant de son chef de ce seul appartement avec la force publique si besoin est, dans le respect des délais légaux prévus à l'article L 412-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

Déboute l'appelant de sa demande de résiliation du bail de l'appartement du rez-de-chaussée occupé par Madame [Z] [N] ;

Déboute Madame [Z] [N] de sa demande de réparation d'un préjudice moral ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article sur le fondement de l'article 700 du code procédure civile du code de procédure civile ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

LA GREFFIÈRE P/LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 16/04106
Date de la décision : 06/03/2018

Références :

Cour d'appel de Paris G4, arrêt n°16/04106 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-06;16.04106 ?
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