Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 28 FÉVRIER 2018
(n° , 14 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/17591
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Juillet 2016 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/05902
APPELANTE
Madame [S] [W]
née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 1] (SÉNÉGAL)
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044
assistée de Me Jean VEIL, avocat au barreau de PARIS, toque : T06
INTIMES
Maître [W] [L], Notaire
née le [Date naissance 2] 1967 à [Localité 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée et assistée par Me Barthélemy LACAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0435
Monsieur [Z] [W]
né le [Date naissance 3] 1962 à [Localité 3] (MADAGASCAR)
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représenté par Me Florence GUERRE de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018
assisté de Me Emmanuel RAVANAS de la SELURL ERAVANAS - AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1318
PARTIE INTERVENANTE
Maître [G] [A], Notaire, en sa qualité d'exécuteur testamentaire de [L] [W]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représenté par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075
assisté de Me Béatrice WEISS GOUT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0989
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 16 Janvier 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Dorothée DARD, Président
Mme Monique MAUMUS, Conseiller
Mme Nicolette GUILLAUME, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON
MINISTÈRE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au Parquet, qui a rendu son avis le 31.03.2017.
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Dorothée DARD, Président et par Mme Emilie POMPON, Greffier.
***
[L] [W], décédée le [Date décès 1] 2012, avait recueilli des 'uvres des de [K] [K] peintre et sculpteur espagnol contemporain de [M] ainsi que du frère de [K] [K], [Q], et de sa fille [J], qui étaient également des artistes peintres.
Par acte authentique du 21 juin 1985, [B] [F] et [L] [W] avaient fait donation à la circonscription administrative espagnole « Generalitat Valencia » d'importantes 'uvres de [K] [K], à charge notamment pour le donataire « d'exposer en permanence les 'uvres données dans le cadre d'un centre présentant les critères d'un centre international, ouvert au public et portant le nom de [K] [K] ».
L'Institut [Établissement 1] « Centre [K] [K] » (ci-après l'IVAM) fut créé le 13 février 1989.
[L] [W], avait pris les dispositions testamentaires suivantes :
* le 15 juillet 1999, elle a rédigé un testament déposé à l'office notarial [V] et [R], instituant M. [Z] [W] et Mme [S] [W], ses neveu et nièce, comme ' légataires universels conjointement avec accroissement entre eux' et leur a légué, en outre, à titre particulier, ses quatre biens immobiliers qu'elle répartissait entre eux de la façon suivante :
- à [S], les biens et droits immobiliers sis à [Adresse 5],
- à [Z], les biens et droits immobiliers sis à [Adresse 6],
- à [S] et [Z], en indivision, les biens et droits immobiliers sis à [Adresse 7]) composés de la « [Localité 4] », [Adresse 8], et la « [Localité 5] », [Adresse 9].
Aux termes de ce testament, [L] [W] demandait aux deux légataires universels de régler les droits de succession par dation en paiement des 'uvres d'art se trouvant dans les biens immobiliers précités autres que celles de [K] [K], comme l'avait elle-même fait [B] [F] dans son testament, et précisait que ' les 'uvres non retenues en dation leur appartiendront à parts égales '.
Elle léguait par ailleurs à l'IVAM, les 'uvres de [K] [K] qui se trouvaient dans son appartement parisien et les dessins et huiles de [Q] [K], outre un miroir et une plaque en bronze, ainsi que toutes les 'uvres de [J] [K] se trouvant dans sa propriété de [Localité 6].
Les 'uvres de [K] et de [Q] [K] qui se trouvaient à cette époque en dépôt chez l'agent artistique des 'uvres d'art de la succession [K], M. [H] [X], devaient quant à elles demeurer la propriété de [Z] et [S] [W].
* par testament olographe le 11 septembre 2001, elle désignait ' conjointement avec accroissement entre eux ' [S] et [Z] [W] comme légataires universels, en leur léguant, à titre particulier, les mêmes biens immobiliers que ceux précités, avec la même répartition entre eux.
* par testament olographe du 4 décembre 2002, elle a réitéré sa volonté de léguer l'ensemble de ses biens, à [S] et [Z] [W], en les instituant de nouveau « légataires universels » mais ils ne l'étaient plus « conjointement » mais à « concurrence de moitié chacun ».
Par codicille du 12 mars 2003, elle désignait M. [G] [A] comme exécuteur testamentaire.
Le 10 juin 2003, [L] [W] a été victime d'un accident vasculaire cérébral, entraînant une hémiplégie droite et une aphasie globale.
Elle a donné en avril 2004 un mandat de 'gérer et administrer' tous ses biens et notamment l''uvre de [K] [K] à son neveu M. [Z] [W].
Puis [L] [W] a, dans un testament authentique en date du 22 décembre 2005, institué son neveu, M. [Z] [W], légataire universel à charge pour lui de délivrer à Mme [S] [W] ' le legs particulier suivant net de frais et droits, consistant en tous (s)es actifs à la Société Générale'.
Par jugement du 5 juillet 2016, le tribunal de grande instance de Paris, saisi par Mme [S] [W], a :
- déclaré recevable l'intervention volontaire de Maître [G] [A] à la procédure,
- rejeté la demande de Mme [S] [W] en nullité du testament du 22 décembre 2005 sur le fondement des articles 90l et 414-l du code civil,
- rejeté la demande de Mme [S] [W] en nullité du testament du 22 décembre 2005 sur le fondement de l'artic1e 972 du code civil,
- rejeté la demande de Mme [S] [W] fondée sur l'inscription de faux,
- en toutes hypothèses déclaré valable le testament du 22 décembre 2005 en tant que testament international en application des règles de la convention de Washington du 26 octobre 1973,
- rejeté la demande de Mme [S] [W], fondée sur le recel successoral,
- rejeté la demande de Mme [S] [W] en responsabilité professionnelle de Maître [W] [L] et de M. [Z] [W],
- condamné Mme [S] [W] à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile :
- à M. [Z] [W] la somme de 3 000 euros,
- à Maître [W] [L] la somme de 2 000 euros,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- condamné Mme [S] [W] aux dépens, dont distraction au profit des avocats qui en ont fait la demande en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Mme [S] [W] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 17 août 2016.
Dans ses dernières conclusions du 17 novembre 2016, elle demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- statuant à nouveau :
1/ sur la requalification du testament notarié en acte sous seing privé
vu l'article 2 du décret n°71-941 du 26 novembre 1971,
vu les articles 970 et suivants, 1001 et 1318 du code civil,
- dire et juger que le testament notarié du 22 décembre 2005 doit être requalifié en acte sous seing privé,
- prononcer en conséquence la nullité du testament du 22 décembre 2005, faute de remplir les conditions de forme du testament olographe ou du testament mystique,
2/ sur l'inscription de faux
vu les articles 303 et suivants du code de procédure civile,
vu la convention de Washington du 26 octobre 1973 portant loi uniforme sur la forme du
testament international,
- dire et juger que la mention suivante ' Mme [L] [E] [W] (...) a dicté au
Notaire soussigné, en présence des deux témoins sus-nommés, son testament ainsi qu'il suit :
(')' du testament notarié du 22 décembre 2005 est inexacte et caractérise un faux en écriture authentique,
- dire et juger que nul ne pourra se prévaloir de cet acte authentique,
- dire et juger en conséquence que la mention selon laquelle [L] [W] ' a déclaré le bien comprendre, le trouver conforme à sa volonté et y persévérer' est dépourvue de toute valeur probante,
- dire et juger que le testament du 22 décembre 2005, nul pour non-respect de l'article 972 du code civil, ne saurait être requalifié en testament international en raison du non-respect de l'article IV de la loi uniforme sur la forme du testament international,
- dire et juger que le testament du 4 décembre 2002 devra être appliqué,
3/ Subsidiairement, sur l'insanité d'esprit
- constater l'état d'insanité de la testatrice au moment de l'acte et l'emprise exercée sur celle-ci par M. [Z] [W],
- dire et juger que [L] [W] ne disposait pas d'un discernement suffisant pour consentir en toute connaissance de cause au testament du 22 décembre 2005,
- prononcer en conséquence la nullité du testament du 22 décembre 2005,
- dire et juger que le testament du 4 décembre 2002 devra être appliqué,
sur les opérations de comptes, liquidation et partage
- ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [L] [W], sur la base du testament du 4 décembre 2002,
- désigner pour y procéder Me [V] [E], notaire à [Localité 2] avec le concours d'un commissaire-priseur de son choix afin de procéder aux inventaires des 'uvres d'art dépendant de la succession,
- dire et juger que la somme réservée chez Me [W] [L] au titre du legs à titre particulier prévu par le testament annulé, soit allouée sans délai à Mme [S] [W] à titre de provision à valoir sur le legs universel à concurrence de moitié dont la gratifient les dernières dispositions testamentaires du 4 décembre 2002,
- commettre un juge pour surveiller les opérations précitées, statuer sur les difficultés et faire rapport à la cour en cas de désaccord persistant des parties,
en tout état de cause,
Vu l'article 1382 du code civil,
- condamner M. [Z] [W] et Me [W] [L], in solidum, à verser à Mme [S] [W] une somme de 250.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices directement causés par les fautes qu'ils ont commises,
- condamner M. [Z] [W], sous peine d'astreinte de 1.000 € par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification de l'arrêt à intervenir, à remettre à Mme [S] [W] la déclaration de succession et les inventaires des biens successoraux ainsi que l'ensemble des documents (mails, lettres, conventions) échangés avec l'administration fiscale au sujet du montant des droits et des modalités de leur paiement,
- condamner M. [Z] [W] et Me [W] [L], in solidum, au paiement d'une indemnité de 50.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner de même M. [Z] [W] et Me [W] [L] aux entiers dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions du 13 janvier 2017, M. [Z] [W] demande à la cour de :
Vu les articles 414-1, 778, 901 et suivants et 1315 du code civil,
Vu le décret n°71-941 du 26 novembre 1971,
Vu la Convention de Washington du 28 octobre 1973 portant loi uniforme sur la forme d'un testament international,
Vu les pièces versées aux débats,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- statuant à nouveau,
- recevoir M. [Z] [W] en toutes ses demandes, fins et conclusions ; le déclarer bien fondé,
- à titre principal,
- constater que [L] [W] était saine d'esprit et en mesure de dicter son testament ;
- déclarer valable le testament authentique de Mme [L] [W], en date du 22 décembre 2005,
- en conséquence, débouter Mme [S] [W] de toutes ses demandes fins et conclusions,
- à titre subsidiaire,
- constater que le testament authentique en date du 22 décembre 2005 répond aux conditions de validité du testament international,
- déclarer valable le testament authentique de [L] [W] en date du 22 décembre 2005 en tant que testament international,
- en conséquence, débouter Mme [S] [W] en toutes ses demandes, fins et conclusions,
- en tout état de cause,
- débouter Mme [S] [W] de toutes ses demandes, fins et conclusions, - condamner Mme [S] [W] au paiement de la somme de 50.000 € au titre des frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance.
Dans ses dernières conclusions du 17 janvier 2017, Mme [W] [L] demande à la cour de :
confirmant le jugement entrepris
principalement,
Vu l'article 307 du code de procédure civile,
- dire valide en la forme authentique le testament litigieux au regard des dispositions de l'article 2 du décret du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires,
- dire que la forme du testament litigieux est, outre les dispositions du code civil, gouvernée par les dispositions de la Convention de Washington du 28 octobre 1973 relative au testament international,
- constater que la validité en la forme du testament litigieux au regard de la Convention de Washington n'est pas dans la dépendance d'une dictée de ses dernières volontés par le testateur,
- statuer sur la demande d'annulation pour vice de forme du testament litigieux au regard des règles de la Convention de Washington,
- dire valide en la forme le testament litigieux,
subsidiairement,
- débouter Mme [S] [W] de sa prétention à entendre déclarer faux l'énoncé porté au testament, de ce que 'Mme [L] [W] (') a dicté au notaire soussigné (') son testament, ainsi qu'il suit : ('). »
- dire en conséquence valide au regard des dispositions de l'article 972 du civil le testament litigieux,
en tous les cas,
- débouter Mme [S] [W] de sa demande indemnitaire dirigée contre la concluante,
- condamner Mme [S] [W] à payer à la concluante la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 code de procédure civile,
- condamner Mme [S] [W] aux entiers dépens, de première instance et d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions du 16 janvier 2017, M. [G] [A] demande à la cour d'appel de Paris de :
- prendre acte de son intervention volontaire,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement.
Le ministère public a conclu à la confirmation du jugement, notamment sur l'inscription de faux.
SUR CE, LA COUR,
sur la disqualification du testament du 22 décembre 2005
Considérant que Mme [W] soutient que le testament prétendument authentique reçu le 22 décembre 2005 par Me [L] doit être disqualifié en acte sous seing privé dès lors qu' aux termes de l'article 1318 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, 'l'acte qui n'est point authentique par l'incompétence ou l'incapacité de l'officier, ou par un défaut de forme, vaut comme écriture privée, s'il a été signé des parties';
Qu'elle expose que s'agissant des incapacités d'instrumenter, l'article 2 du décret n°91-941 du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires prévoit dans sa rédaction en vigueur à la date de signature du testament du 22 décembre 2005, que 'les notaires ne peuvent recevoir des actes dans lesquels leurs parents ou alliés, en ligne directe, à tous les degrés, et en ligne collatérale jusqu'au degré d'oncle ou de neveu inclusivement, sont parties, ou qui contiennent quelque disposition en leur faveur.
Les notaires associés d'une société titulaire d'un office notarial ou d'une société de notaires ne peuvent recevoir des actes dans lesquels l'un d'entre eux ou les parents ou alliés de ce dernier au degré prohibé par l'alinéa précédent sont parties ou intéressés';
Qu'en l'occurrence, force est de constater que Me [G] [A], qui était alors associé de la société civile professionnelle ' [G] [A], [N] [G], [I] [I], [A] [N], [U] [R] et [W] [L], notaires associés', était intéressé à l'acte puisqu'il y a été nommé exécuteur testamentaire ;
Considérant que les intimés et l'intervenant volontaire répliquent à juste titre que la seule désignation de Maître [G] [A] en tant qu'exécuteur testamentaire dans le testament authentique du 22 décembre 2005 ne fait pas de ce dernier une personne partie ou intéressée à l'acte et qu'il ne s'agit pas non plus d'une "disposition en sa faveur" au sens du texte susvisé ceci d'autant plus que Maître [G] [A] est exécuteur testamentaire "sans diamant", c'est à dire qu'il ne reçoit aucune rémunération en contrepartie de sa fonction, ni aucun legs de la testatrice ;
Qu'en effet, la qualité d'exécuteur testamentaire attribuée au notaire par le testateur, à condition de ne recevoir aucune rémunération n'a rien d'incompatible avec la réception du testament par le notaire qui ne devient ainsi ni partie, ni légataire, et qui, loin d'en tirer profit, se trouve privé du droit d'instrumenter comme officier public dans les actes où il figurera comme exécuteur ;
Que la demande de Mme [S] [W] tendant à obtenir la requalification du testament authentique en acte sous seing privé en raison d'une incapacité d'instrumenter de Maître [L] doit être rejetée ;
sur le faux en écriture authentique et sur la nullité du testament authentique du 22 décembre 2005
Considérant que l'appelante soutient que le testament litigieux constitue en toute hypothèse un faux en écriture authentique en ce qu'il mentionne de manière fallacieuse que ' Mme [L] [W] (') a dicté au notaire soussigné, (') son testament, ainsi qu'il suit : (')' et de manière corollaire que [L] [W] ' a déclaré bien le comprendre, le trouver conforme à sa volonté et y persévérer', dès lors qu'il est constant qu'elle était dans l'incapacité de le dicter et de formuler la déclaration susvisée ; qu'en application de l'article 1001 du code civil, la nullité du testament doit dès lors être prononcée pour non-respect de la formalité d'ordre public de la dictée par le testateur prévue à l'article 972 du code civil ;
Considérant que l'appelante expose que pour la jurisprudence comme pour la doctrine, le formalisme de la dictée doit être strictement respecté, la dictée étant le rite auquel la loi astreint le testateur pour éprouver la réalité et la densité de ses dernières volontés ; qu'en l'espèce, il est établi que le testament litigieux n'a pu être dicté par [L] [W] compte tenu des séquelles dont elle était affectée depuis son accident vasculaire cérébral ;
Considérant que Me [L] réplique que dès lors qu'il est allégué un faux à l'appui d'une demande en nullité et en responsabilité, les parties et la cour n'ont plus l'entière latitude d'ordonner et d'articuler les questions litigieuses eu égard au principe posé par l'article 307, alinéa 1 du code de procédure civile selon lequel, 'le juge se prononce sur le faux à moins qu'il ne puisse statuer sans tenir compte de la pièce arguée de faux'; que le litige doit ainsi être d'abord envisagé au regard des moyens, s'il en est, qui permettent sa solution sans qu'il soit statué sur le faux prétendu, celui-ci devant être réservé autant qu'il est possible ;
Que Me [L] soutient que l'article précité commande à la cour d'examiner :
- d'abord le moyen tiré de l'insanité d'esprit prétendue du testateur, et il n'y a lieu d'examiner le faux prétendu, qui commanderait la nullité en la forme du testament, si le testament apparaît encourir la nullité pour défaut de consentement du testateur, ce moyen de fond étant étranger au faux prétendu,
- secondairement, si la cour écarte, le moyen tiré de l'insanité d'esprit prétendue du testateur, elle examinera la validité du testament en la forme au regard des règles du testament international, et que ce n'est que si la cour déclare le testament valide pour être le produit d'un consentement sain et efficace d'une part, et si elle le jugeait irrégulier en la forme au regard des règles du testament international, qu'elle en viendra à examiner la question du faux prétendu afin d'apprécier si, contrairement aux énonciations de l'écrit authentique, le testateur n'aurait pas véritablement dicté ses dernières volontés, de sorte que le testament encourrait la nullité en la forme au visa de l'article 972 du code civil ;
Considérant que Mme [W] poursuit la nullité du testament du 22 décembre 2005 en se fondant sur plusieurs moyens, de sorte qu'il convient d'examiner l'ensemble de son argumentation en réservant pour la fin de l'analyse, l'allégation de faux qu'elle a présentée ;
sur l'insanité d'esprit
Considérant qu'aux termes de l'article 901 du code civil, 'pour faire une libéralité, il faut être sain d'esprit. La libéralité est nulle lorsque le consentement a été vicié par l'erreur, le dol ou la violence';
Considérant que la charge de la preuve de 1'insanité d'esprit du testateur et plus précisément de la concomitance du trouble avec l'établissement de l'acte incombe à celui qui agit en annulation du testament ;
Considérant que l'appelante produit le compte-rendu d'hospitalisation du 16 juillet 2003, des certificats médicaux des19 mars 2004, 24 mai 2004, 7 juillet 2004 et du 8 novembre 2012, ainsi que le rapport d'expertise amiable du docteur [P] [D] du 8 octobre 2014 ;
Qu'elle fait état de la mise sous sauvegarde de justice de sa tante à la demande de l'hôpital [Établissement 2] à l'occasion de son hospitalisation en juin 2003, du mandat que M. [Z] [W] s'est fait consentir en mai 2004, ce qui démontre l'incapacité de leur tante à gérer ses affaires, des éléments d'information fournis par l'orthophoniste, de la procédure pour abus de faiblesse diligentée par M. [Z] [W] à l'encontre d'une auxiliaire de vie ;
Considérant que M. [Z] [W] réplique que l'appelante n'établit cependant nullement que les troubles dont souffrait [L] [W] à la date du 16 juillet 2003 étaient de nature à porter durablement atteinte à son discernement, la durée de l'avis de protection était limitée puisque cet avis a été émis pendant six mois, du 8 août 2003 au 8 février 2004, suite à l'accident vasculaire cérébral ischémique gauche dont elle a été victime le 10 juin 2003 ;
Considérant qu'il observe que Mme [S] [W] se fonde sur le certificat médical du docteur [C] [P] du 29 mars 2004, qui indiquerait que [L] [W] 'présentait une pathologie neurologique aigue avec des séquelles neurologiques importantes avec des troubles moteurs du membre moteur droit et troubles aphasiques'et que ces troubles justifiaient, selon le médecin, une aide ' par une tierce personne pour accomplir ses actes de la vie quotidienne' et que force est de constater que le discernement n'est ici nullement en cause ; que l'appelante se fonde sur un certificat établi 21 mois avant la rédaction de l'acte dont il est demandé l'annulation et ne parvient pas à démontrer que [L] [W] souffrait d'une altération mentale au moment de la rédaction du testament ;
Qu'il souligne que si les troubles du langage sont aussi mentionnés par le docteur [Y] [U] dans un certificat du 7 juillet 2004, soit un an et demi avant la rédaction du testament, de tels troubles ne révèlent pas la perte de la faculté de discernement de [L] [W], condition de l'annulation d'une libéralité ;
Qu'enfin, il observe que l'appelante croit pouvoir se fonder sur le certificat du 8 novembre 2012 du docteur [T] [C], gériatre de la Fondation Rothschild où séjournait [L] [W] depuis des complications suite à une opération de la hanche en mai 2012, faisant état d'un syndrome démentiel sévère alors que ce certificat a été établi un mois avant le décès de la testatrice soit sept ans après la rédaction du testament et neuf ans après son accident vasculaire cérébral ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des éléments produits aux débats que l'AVC subi par [L] [W] en juin 2003 a considérablement diminué ses capacités physiques, et l'a notamment privée d'une expression orale normale, ce que retient même le rapport médical du docteur [B] du 26 octobre 2005 invoqué par M. [Z] [W] ;
Qu'en effet, le docteur [B] s'il conclut que 'les séquelles neurologiques, dont souffre [L] [W] à l'heure actuelle, principalement l'aphasie et l'hémiparésie droite, n'altèrent en rien ses facultés mentales et n'empêchent nullement l'expression de sa volonté à travers en particulier une modification testamentaire', a observé dans le corps de son rapport que 'l'aphasie de Broca a mal récupéré et elle présente toujours un trouble de langage majeur', notant également que 'les exercices d'écriture sont difficiles prenant en considération l'hémiparésie résiduelle';
Que les attestations produites par l'appelante de Mme [O] [O] du 25 janvier 2013, de Mme [D] [H] du 21 juillet 2014, de Mme [F] [Q] du 14 juillet 2014, de Mme [X] [Z] du 28 février 2013 et 3 juillet 2014, de Mme [O] [O] du 4 juillet 2014, de Mme [M] [J] du 26 janvier 2013, de Mme [BB] [Y] du 31 mars 2013 font toutes état de ce que [L] [W] ne s'exprimait plus que par l'émission des sons ' la la la' et qu'une conversation normale était impossible ;
Considérant que les attestations produites par M. [W] (attestations de M. [T] [S] [TT], de M. [WW] [SS] [XX], de Mme [AA] [UU], de Mme [II] [DD], de M. [CC] [LL] [YY]) révèlent une participation de [L] [W] à des échanges à caractère plus mondain, au cours desquels elle était toujours accompagnée de son neveu, la généralité des attestations ne permettant pas de dire qu'une conversation nourrie était poursuivie avec [L] [W] après juin 2003 ;
Considérant que le dépôt par M. [W] le 2 juillet 2004 d'une plainte pour vol et escroquerie ' facilités par l'état d'une personne particulièrement vulnérable' à l'encontre de l'une de ses auxiliaires de vie conforte également la fragilité de la défunte à cette époque ;
Considérant toutefois que les éléments médicaux antérieurs de plusieurs mois à l'établissement du testament litigieux, de même que ceux postérieurs au testament de plusieurs années sont trop éloignés dans le temps pour permettre de connaître l'état de santé mentale de la testatrice en décembre 2005 ;
Qu'en l'absence d'élément contemporain de l'élaboration du testament litigieux portant sur l'état de santé mentale de la défunte, la nullité du testament ne peut être prononcée au titre de l'insanité d'esprit au sens de l'article 901 du code civil ;
sur la validité du testament au regard de la convention de Washington
Considérant qu'en application de l'article 1 de cette convention, 'un testament est valable en ce qui concerne la forme, quels que soient notamment le lieu où il a été fait, la situation des biens, la nationalité, le domicile ou la résidence du testateur, s'il est fait dans la forme du testament international, conformément aux dispositions des articles 2 à 5 ci-après';
Que selon l'article 3, le testament doit être fait par écrit et n'est pas nécessairement écrit par le testateur lui-même ;
Qu'aux termes de l'article 4, 'le testateur déclare en présence de deux témoins et d'une personne habilitée à instrumenter à cet effet que le document est son testament et qu'il en connaît le contenu';
Que l'article 9 précise en outre que 'la personne habilitée joint au testament une attestation conforme aux dispositions de l'article 10 établissant que les obligations prescrites par la présente loi ont été respectées';
Considérant que le testament ne comporte pas la déclaration prévue à l'article 9, ce qui se comprend dès lors qu'il n'était pas prévu lors de son établissement de le soumettre à ce régime, étant précisé que l'article 10 indique que 'la déclaration doit être rédigée dans la forme suivante ou dans une forme équivalente' et que suivent une liste de mentions précises et nombreuses, aucune sanction n'étant toutefois attachée à l'absence de cette déclaration ;
Considérant que l'acte notarié du 22 décembre 2005 mentionne ' Me [W] [L] Notaire associé, soussigné, a fait écrire le testament à la machine à écrire par une de ses secrétaires, puis elle l'a lu à la testatrice qui a déclaré le bien comprendre, le trouver conforme à sa volonté et y persévérer ; le tout en la présence réelle, simultanée et non interrompue des deux témoins susnommées';
Considérant que Mme [S] [W] soutient qu'eu égard aux éléments relatifs à l'incapacité physique dans laquelle se trouvait [L] [W] de s'exprimer oralement et distinctement la condition de déclaration posée par la Convention de Washington n'a pas été remplie ; que la testatrice ne pouvait, le 22 décembre 2005, s'exprimer que par des onomatopées, compte tenu du ' trouble de langage majeur' dont elle était affectée, pour reprendre les termes employés par le docteur [B] lui-même et qu'elle était ainsi dans l'impossibilité de formuler la déclaration exigée ;
Qu'elle souligne que si l'auteur cité par M. [Z] [W] expose que la loi uniforme n'imposant aucune exigence supplémentaire, il est permis de penser que le testateur qui a perdu l'usage de la parole peut apposer une mention écrite de sa main et signée par lui, attestant que le document présenté au notaire et aux témoins est son testament, ce n'est ni par une mention manuscrite émanant de [L] [W], ni par l'attestation prescrite à cette fin par l'article 9 de la loi uniforme, conforme aux dispositions de l'article 10, lesquelles sont toutes deux inexistantes, que les intimés prétendent rapporter la preuve de la déclaration exigée par l'article 4.1 ; qu'ils se prévalent en effet de la seule mention dactylographiée et visiblement pré-rédigée du testament litigieux selon laquelle [L] [W] ' a déclaré le bien comprendre, le trouver conforme à sa volonté et y persévérer';
Considérant que M. [Z] [W] réplique qu'il ne faut pas confondre dictée et déclaration et rapporte l'analyse d'un auteur selon lequel le testateur peut être atteint d'un handicap qui l'empêche de dicter son testament, mais non de déclarer que le document qu'il s'apprête à signer est bien son testament. Il peut avoir perdu la parole nécessaire pour exprimer ses dernières volontés, mais avoir conservé la parole suffisante pour affirmer que tel document les contient. Il peut même l'affirmer par un signe en réponse à l'interpellation du notaire ; qu'il ne semble pas résulter du rapport d'expertise neurologique que [L] [W] ait été incapable de déclarer, d'un mot ('oui') ou d'un signe, que le document que venait de lui lire le notaire était bien son testament ;
Considérant que l'attestation du 10 octobre 2014 établie par M. [BB], orthophoniste qui a suivi la défunte en rééducation orthophonique entre septembre 2004 et juillet 2008 dans le cadre d'une aphasie de Broca est rédigée en ces termes :
'langage oral : - expression orale : * en langage spontané, la production orale est très pauvre et marquée par une jargonaphasie. Les erreurs sont du type itérations, substitutions et télescopages. On note également des écholalies sur les phonèmes [ l ] et [ t ] ('lalala, lololo, tititi...')
* en langage automatique, quelques automatismes verbaux sont présents : 'bonjour, au revoir, merci, je ne peux pas'. La production des jours de la semaine et de la chaîne numérique est fluctuante. La répétition de mots et de phrases courtes est difficile mais possible si on lui demande d'être bien concentrée.
- compréhension orale : le code oui-non est fiable. Le niveau de compréhension en situation conversationnelle est correct, mais Mme [W] reste gênée lorsque le message oral est long et/ou complexe et que le rythme de parole est rapide';
Considérant que les auteurs de la Convention ont entendu faire prévaloir la liberté du testateur et le respect de ses volontés sur tout formalisme qui ne serait pas nécessaire pour la garantie de la réalité des intentions du disposant ;
Considérant qu'il résulte des explications de M. [BB] lesquelles sont confortées par les attestations produites par l'appelante que [L] [W] n'a pas pu, s'agissant du testament du 22 décembre 2005 ' déclaré le bien comprendre, le trouver conforme à sa volonté et y persévérer' ;
Qu'il convient toutefois de s'affranchir des termes solennels de cette déclaration formelle dactylographiée figurant après l'indication manuscrite du nom du notaire instrumentaire et d'examiner la possibilité que [L] [W] ait pu manifester sa volonté de tester dans les termes du testament du 22 décembre 2005 ;
Considérant que force est de constater que les éléments fournis par l'orthophoniste, confortés par l'analyse faite par le docteur [D] dans son rapport amiable du 8 octobre 2014, qui ne sont pas utilement contredits par le certificat du docteur [B] qui mentionne lui-aussi une aphasie, que les troubles du langage et de la compréhension qui permettaient seulement à la défunte de suivre une conversation simple, mais qui occasionnaient une gêne lorsque le message est long et/ou complexe, conduisent à conclure qu'elle n'a pu, ni bien comprendre des dispositions testamentaires qui peuvent s'analyser comme un message complexe, ni les trouver conformes à sa volonté, étant souligné qu' aucun doute ne doit exister sur cette volonté ;
Considérant que la seule trace d'une expression orale de [L] [W] aux termes de cet acte du 22 décembre 2005 est la suivante 'je veux que mon chat qui se nomme [PP] soit pris en charge par [Z] [W]', montrant qu'elle a pu proférer 'lolo' qui est une constante de son mode d'expression, étant observé que cette mention ne correspond pas à la réalité dès lors que son chat était nommé 'Juta' ou 'Gjuta'ainsi que cela résulte des dispositions testamentaires antérieures de la défunte et de l'attestation de la clinique vétérinaire du 26 janvier 2013 ;
Que l'attestation du 5 février 2016 de Me [KK] conseil de la défunte depuis 1999 (qui ne respecte pas les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, à supposer qu'elle respecte celles relatives au secret professionnel) qui indique que sa cliente lui avait confié en 2003 la défense de ses intérêts dans le cadre d'un contentieux qui l'opposait à la société Blondeau ayant donné lieu à un jugement le 18 mai 2006 et qu'elle 'avait une parfaite compréhension des moyens de droit et de fait que je lui ai suggérés de soutenir dans le cadre de ce contentieux et a su me donner des instructions précises malgré ses difficultés de langage' vise pour partie une période antérieure à l'AVC de la défunte et doit être prise avec la circonspection qu'impose le mandat général donné à M. [Z] [W] le 3 avril 2004 portant notamment sur 'toute décision pour protéger l'oeuvre de [K] [K]' qui lui permettait de poursuivre l'action engagée par sa tante ;
Considérant que la lettre de Mme [GG] ancienne notaire assistante de l'Etude, adressée à l'Etude le 9 mars 2015 et qui indique 'je vous confirme que dans le cadre de mes fonctions à votre Etude, j'ai eu à traiter différents dossiers concernant Mme [L] [W], de l'année 2002 à l'année 2006, c'est à dire, avant après les problèmes de santé de cette dernière(...) et qu'elle 'pouvait, même après son AVC, parfaitement se faire comprendre malgré un amoindrissement de ses facultés d'élocution' ne peut, s'agissant d'une simple lettre à des notaires avec lesquels l'auteur de l'écrit travaillait et non d'une attestation conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile apporter un démenti sérieux à l'ensemble des éléments d'information précités indiquant que [L] [W] ne s'exprimait plus que par onomatopées, ce que M. [Z] [W] avait lui même déclaré au service des urgences le 14 septembre 2011qui l'interrogeait téléphoniquement sur l'état de sa tante en signalant 'AVC en 2002, ne prononce que 'la la la' depuis mais comprend';
Considérant que la mention ' Me [W] [L] Notaire associé, soussigné, a fait écrire le testament à la machine à écrire par une de ses secrétaires, puis elle l'a lu à la testatrice qui a déclaré le bien comprendre, le trouver conforme à sa volonté et y persévérer ; le tout en la présence réelle, simultanée et non interrompue des deux témoins susnommées' ne répond pas aux exigences des dispositions de la convention de Washington en ce qu'il s'agit d'une formule type sans aucune précision tenant à la situation de la testatrice souffrant d'aphasie et recueillie auprès d'une personne dont la capacité de compréhension, suffisante pour les échanges de la vie quotidienne ou même mondains, ne pouvait lui permettre de comprendre des dispositions testamentaires, au demeurant très différentes de ses précédents testaments, et pour partie indéterminées, dès lors qu'eu égard au mandat général donné à M. [Z] [W] en avril 2004, à une période où elle était très diminuée, ses avoirs à la Société Générale dont elle gratifiait sa nièce pouvaient être considérablement réduits et mêmes inexistants ;
sur la validité du testament comme testament authentique
Considérant qu'aux termes des articles 971 et 972 du code civil, si le testament est reçu par un notaire assisté de deux témoins, il doit être dicté par le testateur, le notaire l'écrivant lui-même ou le faisant écrire à la main ou mécaniquement ;
Considérant que le testateur doit énoncer lui-même et de façon orale ses dispositions et il ne peut être suppléé par de simple signes, fussent-ils aussi expressifs et aussi peu équivoques que possible ;
Considérant que ce formalisme qui s'impose à peine de nullité en application des articles précités et de l'article 1001 du code civil n'a pu être respecté en l'espèce dès lors que [L] [W] était incapable de procéder à la moindre dictée, de sorte que la mention ' Mme [L] [E] [W] (...) a dicté au Notaire soussigné, en présence des deux témoins sus-nommés, son testament ainsi qu'il suit : (')' du testament notarié du 22 décembre 2005 est inexacte et fausse ;
Considérant que le testament authentique du 22 décembre 2005 qui n'a pas été dicté est nul et qu'il convient de dire que c'est donc le testament du 4 décembre 2002 qui doit être appliqué ;
Qu'il y a lieu en conséquence d'ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [L] [W] et pour ce faire de désigner le président de la chambre interdépartementale des notaires de Paris avec faculté de délégation et de remplacement et de désigner un magistrat pour surveiller ces opérations ;
Considérant que l'appelante qui ne justifie ni en droit, ni en fait de sa demande de provision doit en conséquence en être déboutée ;
sur les dommages intérêts
Considérant que l'appelante sollicite 200 000 € au titre de son préjudice matériel et 50 000 € au titre de son préjudice moral ;
Qu'elle précise que les préjudices matériels subis par elle, résultant du comportement frauduleux de M. [Z] [W] et de la violation des obligations du notaire instrumentaire sont constitués par la privation de jouissance de la moitié des biens compris dans la succession ;
Considérant toutefois qu'en application du présent arrêt, il appartiendra à M. [Z] [W] de produire devant le notaire le compte des fruits qu'il a perçus ou qu'il aurait du percevoir afin d'en restituer la moitié à sa soeur, de sorte que le préjudice de cette dernière n'est pas actuel et certain et que sa demande au titre du préjudice matériel doit être rejetée ;
Considérant que s'agissant de son préjudice moral, elle indique que les déménagements des 'uvres par M. [Z] [W] dans la semaine qui a suivi le décès, voire le jour même l'ont profondément inquiétée alors qu'elle ignorait tout du testament de 2005 ; que sa lecture le 3 janvier 2013 par Me [W] [L] lui a causé un terrible choc, compte tenu de la confiance bafouée qu'elle avait accordée à son frère lorsqu'il s'était opposé en 2004 à toute mesure de tutelle pour mieux se faire consentir, à l'insu de sa s'ur, le mandat frauduleux aux termes duquel il s'est octroyé les pleins pouvoirs sans le moindre contrôle ;
Considérant qu'aux termes de ce mandat, M. [Z] [W] avait le pouvoir au nom de sa tante notamment de 'contracter tous engagements' 'se faire ouvrir tous comptes', 'toucher toutes avances', ' consentir (') tous engagements', 'retirer toutes valeurs déposées en garantie' , ' recevoir tous dividendes', 'vendre et transférer (') toutes actions, obligations et valeurs mobilières (')', 'acquérir tous biens', 'obliger le constituant solidairement', 'agir en ses lieux et place', ' agir en justice, transiger (')', le mandat n'étant nullement limité à la gestion et au rayonnement de l'oeuvre de [K] [K] ;
Considérant que M. [Z] [W] qui ne conteste pas ne pas avoir informé avant 2012 sa soeur du mandat général du 3 ou 5 avril 2004 portant sur l'ensemble du patrimoine de sa tante, dont la signature a été officialisée par Me [A] le 5 juillet 2004 a, par ce silence empêché sa soeur de nourrir la moindre suspicion à son égard qui l'aurait conduite à demander l'ouverture d'une mesure de protection pour qu'un tiers protège les intérêts de sa tante et que soient contrôlées les conditions dans lesquelles, se serait ou non, exprimée la volonté de la défunte de tester de manière différente après son AVC par rapport à ses dispositions testamentaires antérieures ;
Considérant que la dissimulation de ce mandat à sa soeur qui était très proche de leur tante démontre la volonté de M. [Z] [W] de s'emparer de tous les pouvoirs sur les biens de leur tante, volonté qui s'est prolongée dans l'établissement du testament du 22 décembre 2005 et s'est manifestée également dans le fait que le testament de 2005 ne prévoyait pas, en cas de décès du légataire universel, l'institution de sa soeur, ce qui se serait situé dans la cohérence des dispositions antérieures de [L] [W], mais Mme [GG] [XX] que M. [Z] [W] a épousée le 23 juin 2012 ainsi que cela résulte de l'acte de notoriété du 7 janvier 2013 ;
Considérant que cette attitude de trahison de la confiance de sa soeur a causé à cette dernière un choc à la lecture du testament de 2005 que rien ne permettait d'anticiper, de sorte qu'en réparation de ce préjudice moral, M. [Z] [W] doit être condamné à verser à Mme [S] [W] la somme de 15 000 € ;
Considérant que l'appelante ne fait état que de la confiance bafouée par son frère pour fonder sa demande au titre du préjudice moral, de sorte que sa demande à l'égard du notaire doit être rejetée à défaut d'argumentation à son encontre ;
Considérant qu'il convient enfin de condamner M. [Z] [W], avec une astreinte de 1.000 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du présent arrêt, à remettre à Mme [S] [W] la déclaration de succession et les inventaires des biens successoraux ainsi que l'ensemble des documents (mails, lettres, conventions) échangés avec l'administration fiscale au sujet du montant des droits et des modalités de leur paiement ;
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'intervention volontaire de Maître [G] [A] à la procédure, rejeté la demande de Mme [S] [W] en nullité du testament du 22 décembre 2005 sur le fondement des articles 901 et 414-l du code civil, rejeté la demande de Mme [S] [W] fondée sur le recel successoral
L'infirme pour le surplus,
Dit que le testament du 22 décembre 2005 ne peut être considéré comme un testament international valable,
Dit que le testament du 22 décembre 2005 est nul pour défaut de dictée,
Dit que le testament du 4 décembre 2002 doit être appliqué,
Ordonne l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [L] [W],
Désigne pour y procéder le président de la chambre interdépartementale des notaires de Paris avec faculté de délégation et de remplacement,
Commet un magistrat du siège de la deuxième chambre, première section du tribunal de grande instance de Paris pour surveiller ces opérations de comptes, liquidation et partage,
Condamne M. [Z] [W] à payer à Mme [S] [W] la somme de 15 000 € à titre de dommages intérêts,
Rejette le surplus de la demande de dommages intérêts,
Condamne M. [Z] [W] sous astreinte de 1.000 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du présent arrêt, à remettre à Mme [S] [W] la déclaration de succession et les inventaires des biens successoraux ainsi que l'ensemble des documents (mails, lettres, conventions) échangés avec l'administration fiscale au sujet du montant des droits et des modalités de leur paiement,
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [Z] [W] et Me [L] à payer à Mme [S] [W] la somme de 25 000 €, et rejette les demandes sur ce même fondement à l'égard de Mme [S] [W] tant en première instance qu'en appel,
Condamne M. [Z] [W] et Me [L] aux dépens de première instance et d'appel et accorde à l'avocat de Mme [S] [W] le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,