Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1
ARRÊT DU 23 FÉVRIER 2018
(no , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/05179
Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Juin 2014 -Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE - RG no 12/00237
APPELANTS
Madame Louisette, Andrée X...
née le [...] à POURRAIN (YONNE)
demeurant [...]
Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018
Assistée sur l'audience par Me Régine PASCAL VERRIER de la SCP S.C.P.PASCAL VERRIER , avocat au barreau d'AUXERRE
Monsieur Joël A...
né le [...] à POURRAIN (YONNE)
demeurant [...]
Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018
Assistée sur l'audience par Me Régine PASCAL-VERRIER de la SCP S.C.P.PASCAL-VERRIER, avocat au barreau d'AUXERRE
Monsieur Didier A...
né le [...] à [...] (YONNE)
demeurant [...]
Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018
Assistée sur l'audience par Me Régine PASCAL VERRIER de la SCP S.C.P.PASCAL-VERRIER, avocat au barreau d'AUXERRE
INTIMÉE
Madame Sonia, Estelle B...
née le [...] à JOIGNY
demeurant [...]
Représentée et assistée sur l'audience par Me Jean-jacques LETU de la SCP LETU ITTAH ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0120, substitué sur l'audience par Me Barbara PERON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0120
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Janvier 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Présidente
Monsieur Dominique GILLES, Conseiller
Madame Christine BARBEROT, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : M. Christophe DECAIX
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Dominique DOS REIS, Présidente, et par M. Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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* *
Reprochant à Mme Sonia B... d'avoir installé des clôtures et un portail sur une cour commune cadastrée section [...] située à [...] (Yonne), lieudit « [...] », afin de les empêcher d'accéder à leur hangar situé sur la parcelle cadastrée section [...] , et d'avoir branché une canalisation d'eaux usées sur leur canalisation d'évacuation d'eaux pluviales, Mme Louisette X... veuve A... et MM. Joël et Didier A... ont, par acte extra-judiciaire du 14 février 2012, assigné Mme Sonia B... afin de l'entendre condamner sous astreinte à supprimer ces diverses installations.
Par jugement du 30 juin 2014, le tribunal de grande instance d'Auxerre a :
- débouté Mme Louisette X... veuve A... et MM. Joël et Didier A... de leur action possessoire et de leur demande tendant au retrait des clôtures et portails installés par Mme Sonia B... sur la parcelle no [...],
- ordonné la suppression du raccordement de la récupération d'eaux pluviales de Mme Sonia B... sur la canalisation des consorts A... et ce, dans le délai de deux mois de la signification du jugement,
- rejeté les autres demandes,
- ordonné l'exécution provisoire,
- laissé à chaque partie la charge de ses dépens.
Mme Louisette X... veuve A... et MM. Joël et Didier A... ont relevé appel de ce jugement dont ils poursuivent l'infirmation, demandant à la Cour, par dernières conclusions du 5 janvier 2018, de :
- dire que la parcelle [...] est une cour commune qui permet à tous les propriétaires riverains d'accéder à leur propriété,
- dire que MM. Joël et Didier A... ne peuvent accéder à leur hangar à bois et à matériel agricole, clos sur trois côtés, que par la parcelle [...] qui est une cour commune et qui conduit à la seule ouverture pour accéder à ce hangar,
- dire qu'ils accèdent à la parcelle [...] par un portail qui a toujours existé et qui a été, à tort, obstrué par un grillage posé par Mme Sonia B...,
- condamner Mme Sonia B... à retirer les clôtures et portail installés sur la parcelle [...] pour les empêcher d'accéder à leur hangar, portail qui donne accès de la parcelle [...] à la parcelle [...], sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du présent arrêt,
- condamner Mme Sonia B... au paiement de la somme de 10.000 € de dommages-intérêts pour privation de jouissance de leur hangar,
- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la suppression du raccordement de la récupération d'eaux pluviales de Mme Sonia B... sur la canalisation de leur fonds,
condamner Mme Sonia B..., sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du présent arrêt, à effectuer les travaux pour y parvenir et à en justifier dans le mois du même arrêt,
- condamner Mme Sonia B... à leur payer, au titre des dégradations du puisard et des canalisations d'eaux pluviales, la somme de 4.784 € selon devis,
- condamner Mme Sonia B... à leur payer une somme de 4.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.
Mme Sonia B... prie la Cour, par dernières conclusions du 21 juillet 2015, de :
- constater que Mme Louisette X... veuve A... et MM. Joël et Didier A... ne disposent d'aucun droit sur la parcelle [...] ,
- en conséquence, les débouter de leurs demandes,
- dire qu'elle n'est pas responsable des prétendues dégradations affectant les installations d'écoulement des eaux des consorts X... A... et les débouter de leurs demandes indemnitaires,
- les condamner au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.
SUR CE
LA COUR
Sur le droit des consorts X... A... à la cour commune (AC 269)
Mme Louisette X... veuve A... et MM. Joël et Didier A... font valoir, au soutien de leur appel, qu'ils ont « toujours » passé, de même que leurs auteurs, sur la parcelle [...] pour se rendre de chez eux à leur hangar, les trois autres côtés dudit hangar ne disposant d'aucune ouverture et affirment que leurs parcelles ont droit à la cour commune en se prévalant de l'acte d'acquisition par adjudication de la parcelle [...] (alors lot no 14) du 28 juillet 1951 ;
L'acte d'acquisition du lot no 14 (parcelle [...] ) par adjudication du 28 juillet 1951 désigne le lot vendu comme :
« lot 14 : jardin, terre et pré (avec hangar), Commune de [...], de 39 a 84 ca, lieudit « [...] », tenant d'un long à A..., d'autre long à Joux, d'autre bout au rû et l'autre bout à cour commune cadastrée section [...] , numéros 26-81, 45, 46, 82, 47, 83, 49 » ;
L'acte de vente de maison d'habitation située sur la parcelle [...] , lieudit « [...] », conclu les 19 et 21 novembre 1947 entre M. E... et Adrien A..., auteur des consorts X... A..., décrit le bien objet de la vente comme « une petite propriété d'habitation comprenant un corps de bâtiment à usage d'écurie, grange et hangar, cour commune » ;
L'acte de vente entre Christophe GUERRE et Mlle Sonia B... en date du 31 octobre 2006 décrit la parcelle ultérieurement cadastrée [...] comme « un ensemble immobilier comprenant une maison d'habitation... deuxième bâtiment séparé du premier par le passage commun.. chemin d'accès commun avec puits, cadastré section [...] .. » ;
Il ne résulte pas de la confrontation de ces actes que Mme B... ait droit à la cour commune cadastrée section [...] , dès lors que son acte prévoit seulement un droit de passage sur cette parcelle, ce qui ne l'autorise en aucune manière à y poser clôture ou portail ou à y faire stationner son véhicule afin de faire obstacle au passage des tiers, qu'ils aient droit ou non à la cour commune sur laquelle elle ne démontre détenir de son côté aucun droit ; par ailleurs, si le lot no 14 est indiqué comme « tenant à une cour commune » et non comme y ayant droit en qualité de co-propriétaire, l'ouverture sur cette cour commune de la seule porte du hangar situé sur la parcelle [...] , clos sur les trois autres côtés, constitue un signe matériel attestant de ce droit, de même que la circonstance que la SCI des Grandes Pâtures, anciennement propriétaire de plusieurs lots ayant droit à la cour commune, ait convoqué au mois de juin 2002 les consorts A... en qualité de copropriétaires, comme l'a également fait le géomètre qui a établi un procès-verbal d'arpentage ;
Au vu de ces éléments, le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté Mme Louisette X... veuve A... et MM. Joël et Didier A... de leur action possessoire et de leur demande tendant au retrait des clôtures et portails installés par Mme Sonia B... sur la parcelle no [...], et la Cour, statuant à nouveau, dira que la parcelle [...] a droit à la cour commune cadastrée [...] et fera droit aux demandes d'enlèvement des consorts A... comme précisé au dispositif ci-après ;
Mme B... sera condamnée à régler aux consorts X... A... une somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour les avoir privés de la jouissance de leur hangar par la pose de clôtures et portail sur la cour commune ;
Sur les canalisations
Les consorts A... évacuent leurs eaux pluviales par une canalisation débouchant sur un ruisseau en contrebas de leur fonds ; suivant acte authentique du 4 mars 1993, Mlle F..., auteur de Mme Sonia B..., a été autorisée à raccorder la canalisation d'évacuation de ses propres eaux pluviales sur le puisard des consorts A... ; il était spécifié qu'au cas où M. A... désirerait mettre fin à cette autorisation, Mlle F... n'aurait aucun droit à la continuation de cette servitude ; il s'agissait donc d'une autorisation précaire et personnelle et non d'une servitude créée sur un fonds pour l'usage d'un autre fonds ;
Un constat d'huissier de M. G... du 2 février 2011 a révélé que Mme Sonia B... avait également raccordé sa canalisation d'eaux usées sur l'installation des consorts A... et non seulement l'évacuation des eaux pluviales de sa propriété ;
Mme Sonia B... ne conteste pas devoir débrancher le raccordement d'eaux usées opéré irrégulièrement sur le puisard des consorts A... ni devoir également débrancher l'évacuation de ses eaux pluviales, mais refuse de régler des frais de remise aux normes du puisard qu'elle estime inutiles au regard de dégradations non justifiées ;
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté les consorts A... de leur demande en paiement d'une somme de 4.786 € dont il n'est pas établi qu'elle correspondrait à la réfection d'installations endommagées par les branchements de Mme Sonia B... ;
En revanche, ajoutant au jugement, la Cour assortira d'une astreinte journalière de 100 € passé deux mois de la signification du présent arrêt, l'obligation mise à la charge de Mme Sonia B... de supprimer les branchements susdits de ses eaux pluviales et usées sur les canalisations des consorts A... ;
L'équité justifie de condamner Mme B... à payer aux consorts A... une somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement en ce qu'il a débouté Mme Louisette X... veuve A... et MM. Joël et Didier A... de leur action possessoire et de leur demande tendant au retrait des clôtures et portails installés par Mme Sonia B... sur la parcelle no [...],et la Cour dira que la parcelle [...] a droit à la cour commune cadastrée [...] ,
Statuant à nouveau,
Dit que la parcelle cadastrée section [...] à [...] a droit à la cour commune cadastrée [...] appartenant aux consorts A..., qui permet d'accéder à leur hangar à bois et à matériel agricole,
Condamne Mme Sonia B... à retirer les clôtures et portail installés sur la parcelle [...] sous astreinte de 100 € par jour de retard passé deux mois de la signification du présent arrêt,
Ordonne la publication du présent arrêt au service de la publicité foncière compétent,
Condamne Mme Sonia B... au paiement de la somme de 5.000 € de dommages-intérêts aux consorts X... A... pour privation de jouissance de leur hangar,
Confirme le jugement en ce qu'il a ordonné la suppression du raccordement de la récupération des eaux pluviales et usées de Mme Sonia B... sur la canalisation de leur fonds,
Y ajoutant, assortit d'une astreinte journalière de 100 € passé deux mois de la signification du présent arrêt l'obligation mise à la charge de Mme Sonia B... de supprimer les branchements de ses eaux usées et pluviales sur les canalisations des consorts A...,
Condamne Mme B... à payer aux consorts X... -A... ensemble une somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
Condamne Mme B... aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, La Présidente,