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08/02/2018 | FRANCE | N°16/17798

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 2, 08 février 2018, 16/17798


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 2



ARRÊT DU 08 FÉVRIER 2018



RENVOI APRES CASSATION



(n° 2018- , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/17798



Décision déférée à la Cour :

Arrêt du 03 décembre 2013 - Cour d'appel de PARIS - RG n° 12/04453

Jugement du 12 Avril 2016 - Cour de Cassation de PARIS - RG n° E14-12.894




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Monsieur [O] [L]

Né le [Date naissance 1] 1933 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]



ET



Madame [S] [Z] épouse [L]

Née le [Date naissance 2] 1938 à [Localité 3]

[Adresse 1]...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 08 FÉVRIER 2018

RENVOI APRES CASSATION

(n° 2018- , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/17798

Décision déférée à la Cour :

Arrêt du 03 décembre 2013 - Cour d'appel de PARIS - RG n° 12/04453

Jugement du 12 Avril 2016 - Cour de Cassation de PARIS - RG n° E14-12.894

APPELANTS

Monsieur [O] [L]

Né le [Date naissance 1] 1933 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

ET

Madame [S] [Z] épouse [L]

Née le [Date naissance 2] 1938 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 2]

ET

Monsieur [V] [L]

Né le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 4]

ET

La SA ASSUR VOYAGE représentée par son mandataire liquidateur, SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [F] [T] - [Adresse 3]

N° SIRET : 400 045 514 00058

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentés par Me Thierry LAUGIER de la SCP GERARDIN LAUGIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0223

Assistés à l'audience de Me Stéphane DIDIER, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 167

INTIMÉE

La société de droit belge VMK ASSUR NV, anciennement dénommée ARTAS NV, agissant en la personne de son représentant légal

N° SIRET : 047 5.4 48. 567

[Adresse 5]

[Localité 6] (BELGIQUE)

Représentée par Me Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998

Assistée à l'audience de Me Didier LEBON, avocat au barreau de LILLE

PARTIE INTERVENANTE

Maître [F] [T] de la Selafa MJA, en qualité de liquidateur de la société ASSUR VOYAGE

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par Me Thierry LAUGIER de la SCP GERARDIN LAUGIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0223

Assistée à l'audience de Me Stéphane DIDIER, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 167

COMPOSITION DE LA COUR :

Mme Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre, ayant préalablement été entendue en son rapport dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 décembre 2017, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre

Madame Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère

Madame Isabelle CHESNOT, conseillère

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Mme Fatima-Zohra AMARA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente et par Madame Fatima-Zohra AMARA, greffière présente lors du prononcé.

***************

Vu le jugement rendu le 14 février 2012 par le tribunal de commerce de Paris, lequel, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a :

* Débouté la société Assur voyage de l'ensemble de ses demandes au titre de la responsabilité contractuelle et de la responsabilité délictuelle de la société VMK Assur anciennement dénommée Artas NV,

* débouté la société Assur voyage de sa demande d'annulation de l'accord du 18 septembre 2002 concernant l'assistance technique,

* dit que la société VMK Assur anciennement dénommée Artas NV était fondée à mettre fin aux accords de gestion par lettre du 20 mars 2008, et débouté la société Assur voyage de ses demandes à ce titre,

* condamné la société Assur voyage au paiement de la somme de 271 443,82 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2008, et ce, avec anatocisme dans les conditions fixées par l'article 1154 du code civil,

* débouté la société VMK Assur anciennement dénommée Artas NV de sa demande de dommages et intérêts,

* débouté la société VMK Assur anciennement dénommée Artas NV de ses demandes à l'égard des dirigeants de la société Assur voyage,

* condamné la société Assur voyage a payer à la société VMK Assur anciennement dénommée Artas NV la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

* condamné la société Assur voyage aux entiers dépens ;

Vu l'arrêt rendu le 3 décembre 2013 par la cour d'appel de Paris, qui, confirmant le jugement entrepris en toutes ses dispositions et y ajoutant, a :

* Déclaré M. [O] [L], Mme [S] [Z] épouse [L] et M. [V] [L] irrecevables en leurs demandes, comme étant prescrites à l'encontre de la société VMK Assur NV,

* condamné la SA Assur voyage à payer à la société VMK Assur NV la somme de  

3 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel,

* condamné la SA Assur voyage aux entiers dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Vu l'arrêt du 12 avril 2016 par lequel la Cour de cassation, sur le pourvoi formé par M. [O] [L], Mme [S] [L], M. [V] [L], la société Assur voyage, représentée par son liquidateur amiable, M. [O] [L], et la société MJA, représentée par Mme [F] [T] en qualité de mandataire judiciaire de la société Assur voyage, a cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il a dit irrecevable l'action ut singuli de MM. [O] et [V] [L] et de Mme [S] [L] à l'encontre de la société VMK Assur NV, l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris, remis la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Vu la déclaration de M. [O] [L], Mme [S] [L], M. [V] [L], la société Assur voyage, représentée par son mandataire liquidateur, la société MJA, prise en la personne de Me [F] [T], notifiée par voie électronique le 21 juin 2016, saisissant la juridiction de renvoi ;

Vu les dernières écritures en date du 5 décembre 2017, par lesquelles M. [O] [L], Mme [S] [L], M. [V] [L], la société Assur voyage, représentée par son mandataire liquidateur, la société MJA, appelants, et la Selafa MJA, prise en la personne de Me [F] [T] en qualité de liquidateur de la société Assur voyage, intervenante volontaire, poursuivant l'infirmation en toutes ses dispositions de la décision entreprise, demandent à la cour, outre divers Constater, Dire et Juger :

* Sur l'exception d'irrecevabilité pour prescription, au visa des articles 26 de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 et l'article L. 110-4 du code de commerce, de déclarer que l'action ut singuli des consorts [L] n'est pas prescrite,

* sur le moyen d'irrecevabilité de l'action ut singuli exercée en leur nom propre par les consorts [L], au visa de l'article L. 225-254 du code de commerce, de débouter la société VMK Assur de son moyen d'irrecevabilité,

* sur le moyen d'irrecevabilité de l'action ut singuli en lien avec la qualité de dirigeant de fait de VMK Assur au sein d'Assur voyage, de rejeter les exceptions d'irrecevabilité de l'action ut singuli soulevées par VMK Assur,

* sur l'appel incident formé par VMK Assur, au visa des articles 122, 125, 623 et 631 du code de procédure civile, principalement, de déclarer les demandes présentées par VMK Assur contre M. [O] [L], Mme [S] [Z] épouse [L] et M. [V] [L] irrecevables en raison de l'autorité de la chose jugée et subsidiairement, au visa des articles L. 225-251 et L. 225-257 du code de commerce, de rejeter l'ensemble de ses demandes,

* sur leurs demandes, statuant à nouveau au visa des articles L. 225-251 et L. 225-252 du code de commerce, de condamner la société VMK Assur (ex-Artas) à payer à la Selafa MJA, prise en la personne de Me [F] [T], en qualité de liquidateur de la société Assur voyage, à titre de dommages-intérêts, les sommes de :

- 115 110 euros en réparation du coût relatif aux frais de recrutement de MM. [O], [J] et [E],

-127 500 euros en réparation du préjudice résultant des conséquences des agissements d'Artas en matière sociale (rupture du contrat de M. [N], transactions conclues avec MM. [O] et [J]),

- 277 133,29 euros en réparation du préjudice subi par Assur voyage lors de la mise en 'uvre du premier plan social,

-145 972,23euros en réparation des conséquences judiciaires ou transactionnelles du second plan social,

- 536 005 euros au titre de la moitié des pertes d'exploitations constatées au 31 décembre 2006 ainsi que la totalité des pertes d'exploitation constatées au 31 décembre 2007 subies par Assur voyage pendant la direction de fait par VMK Assur,

- 128 378 euros en réparation du préjudice fixé aux termes du protocole d'accord entre les sociétés Assur voyage et Europ assistance,

- 740 149 euros au titre de la perte de valorisation de ses actifs lors des cessions des portefeuilles clients certains du 9 octobre 2007 et clients incertains du 31 décembre 2008,

* en toute hypothèse, de condamner la société VMK Assur à payer à la société Assur voyage, M. [O] [L], Mme [S] [Z] et M. [V] [L], une somme de 80 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* de condamner la société VMK Assur aux entiers dépens avec distraction ;

Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 28 novembre 2017, aux termes desquelles la société VMK Assur NV, anciennement dénommée Artas NV, prie la cour, outre divers Constater, Dire et Juger :

* Au visa des articles L. 225-251 et L. 225-232 du code de commerce et 2224 du code civil, de déclarer les consorts [L] et la Selafa MJA ès qualités irrecevables en leur action, principalement au motif de la prescription de l'action ut singuli, subsidiairement, faute de qualité à agir des consorts [L] et très subsidiairement, faute de qualité de la société Artas comme dirigeant de fait de la société Assur voyage,

* infiniment subsidiairement, au fond, de les débouter de leur demande,

* sur son appel incident, au visa des articles 1139, 1147, 1153, 1154, 1184, 1382 du code civil, L.225-251 et L.225-257 du code de commerce, de condamner in solidum M. [O] [L], directeur général, M. [V] [L], président du conseil de surveillance et Mme [S] [Z], membre du conseil de surveillance, au paiement de :

- la somme en principal de 792 902,34 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date d'exigibilité des différentes factures impayées et capitalisation des intérêts, sans préjudice des sommes qui seront devenues exigibles à la date du jugement à intervenir,

- la somme provisionnelle de 1 000 000 euros à titre de dommages et intérêts et de désigner un expert afin de chiffrer l'intégralité du préjudice subi par la société

Artas,

* en tout état de cause, de condamner in solidum M. [O] [L], M. [V] [L] Mme [Z] et la Selafa MJA en qualité de liquidateur de la société Assur voyage au paiement de la somme de 50 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction ;

SUR CE, LA COUR,

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il suffit de rappeler que :

* La société Assur voyage, fondée en 1995 par M. [O] [L], est une société de courtage d'assurance qui distribue et gère des produits d'assurance spécialisés dans les risques du tourisme et plus généralement dans les garanties liées aux déplacements à l'étranger ; elle a pour clients des agences de voyage et des tours opérateurs ;

* la société Artas, aujourd'hui dénommée VMK Assur NV, est une société d'assurance de droit belge, spécialisée dans les garanties liées aux voyage à l'étranger ;

* le 29 décembre 1999, la société Artas est entrée au capital de la société Assur voyage à hauteur de 25% , avec option pour 25% supplémentaires ; le même jour, un accord d'actionnaires a été signé entre M. [O] [L] et la société Artas ;

* le 18 septembre 2002, les sociétés Artas et Assur voyage ont signé un accord de coopération fixant les modalités de la vente et de la gestion par Assur voyage, des produits d'assurance Artas en France ;

* le 18 septembre 2002, par avenant à l'accord d'actionnaires du 29 septembre 1999, la société Artas et M. [O] [L], se portant fort pour Assur voyage, ont convenu qu'Artas fournirait à Assur voyage une assistance technique en marketing et management moyennant une rémunération annuelle de 40 000 euros ;

* le 21 octobre 2002, M. [R] [R] a été engagé par Assur voyage en qualité de directeur commercial ;

* le 4 février 2004, MM. [R] [R] et [O] [L] ont constitué une autre société de courtage d'assurance, la société Assur Travel, et le 15 février 2004, la société Assur voyage représentée par M. [L] a signé avec la société Assur Travel un protocole destiné à définir les modalités financières des relations entre les deux sociétés, dans le cadre de la distribution des produits d'assurance Artas ;

* en 2005, M. [O] [L] a cédé à M. [R] [R] 1 750 actions d'Assur voyage ; le capital d'Assur voyage était alors détenu à hauteur de 40% par M. [L] et sa famille, de 50 % par la société Artas et Sun assistance Invest et de 10 % par M. [R] ;

* M. [R] a déposé une plainte pour faux, aboutissant à un non-lieu, contestant être le signataire d'un pacte d'actionnaire que M. [L] considérait avoir contracté avec lui le 1er septembre 2005 ;

* le 3 janvier 2006, la société Artas a confié à la société Assur Travel la distribution exclusive en France des produits risque santé des français en France, risques santé expatriés et risques IARD ;

* en juin 2006, M. [R], démissionnaire d'Assur voyage, a saisi le conseil des prud'hommes de Lannoy, d'une demande en requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* le 30 juin 2006, l'assemblée générale d'Assur voyage a nommé M. [R] membre de son conseil de surveillance, lequel, le même jour, l'a nommé président du conseil de surveillance ; M. [B] [U] a été nommé président du directoire et Mme [W] [B], membre du directoire avec le titre de directeur général ; M. [L] a quitté son poste de direction ;

* suivant protocole du 6 juin 2007, les sociétés Artas et Sun assistance Invest, comme M. [R], ont cédé à M. [O] [L] les 8 750 actions leur appartenant dans le capital d'Assur voyage ;

* par acte du 31 juillet 2007, la société Artas a assigné en référé la société Assur voyage devant le président du tribunal de commerce de Lille en paiement de la somme de 464 073,25 euros au titre du solde de sa participation financière ;

* par ordonnance de référé du 22 novembre 2007, la société Assur voyage a été condamnée à payer à la société Artas la somme de 166 323,25 euros au titre des primes impayées, somme portée à 200 000 euros par arrêt de la cour d'appel de Douai du 22 septembre 2011 ;

* le 7 septembre 2007, la société Assur voyage et ses actionnaires, M. [O] [L], Mme [S] [L] et M. [V] [L], ont assigné la société Artas devant le tribunal de commerce de Paris en paiement de la somme de 1 191 315 euros en réparation du manquement à l'obligation d'exclusivité à laquelle celle-ci aurait été tenue en application de l'accord de coopération et de celle de 456 760 euros en réparation du préjudice résultant des fautes et négligences commises dans la gestion de fait de la société Assur voyage ;

* le 3 mars 2008, la société Artas a mis en demeure la société Assur voyage de présenter une garantie bancaire couvrant l'encours, de produire divers documents et de régler la somme de 222 429,10 euros, montant et prétentions que la société Assur voyage a contestés par lettre du 21 mars 2008 ;

* le 20 mars 2008, en cours de procédure, la société Artas a mis fin par lettre recommandée à l'accord de coopération et la société Assur voyage a alors ajouté, à ses demandes initiales, celle relative à la réparation du préjudice subi selon elle du fait de la rupture sans préavis de cet accord ;

* le 14 avril 2009, le tribunal de commerce de Paris a rejeté l'exception d'incompétence au profit des juridictions belges, soulevée par la société Artas, par jugement confirmé par arrêt de la cour d'appel de Paris, le pourvoi étant rejeté par arrêt de la Cour de cassation du 8 juillet 2010 ;

* par arrêt du 16 février 2011, la cour d'appel de Douai a dit que le tribunal de commerce de Lille n'était pas compétent pour connaître des demandes formées par la société Artas devenue VMK Assur NV contre la société Assur voyage et les consorts [L], en leur qualité d'anciens dirigeants de droit, et a renvoyé l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris ;

* le 9 août 2012, les consorts [L] ont intenté par conclusions une action ut singuli à l'encontre de la société VMK Assur NV ;

* le 9 octobre 2014, la société Assur voyage a été mise en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Paris, qui a désigné la Selafa MJA, mandataire judiciaire ;

Considérant qu'il importe de rappeler à titre liminaire qu'en vertu des dispositions de l'article 638 du code de procédure civile, la juridiction de renvoi juge à nouveau l'affaire en fait et en droit à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation de sorte que le litige est désormais circonscrit à la question, seule visée par la cassation, de l'action ut singuli de MM. [O] et [V] [L] et Mme [S] [L] à l'encontre de la société VMK Assur NV ;

Qu'il s'ensuit que les autres chefs de demandes présentés tant par la société Assur voyage et les consorts [L] que par la société VMK Assur ont été réglés définitivement par l'arrêt de la cour de Paris du 3 décembre 2013 ;

Sur les fins de non-recevoir :

Considérant que la société VMK Assur NV, au visa de l'article 2224 du code civil, fait valoir que les faits dommageables allégués par les consorts [L] et la Selafa MJA ès qualités se sont déroulés entre le 30 juin 2006 et le 6 juin 2007 et que l'action sociale ut singuli a été engagée par les consorts [L] par conclusions signifiées le 9 août 2012 ;

Qu'elle soutient que la prescription quinquennale applicable étant acquise au 6 juin 2012, l'action ut singuli se trouve prescrite ;

Considérant que les consorts [L] et la société Assur voyage représentée par la Selafa MJA ès qualités opposent les dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008, ayant réduit de dix à cinq ans le délai de prescription de l'article L. 110-4 du code de commerce et fixé à cinq ans celui de l'article 2224 du code civil ;

Considérant que selon l'article 26 de la loi du 17 juin 2008, II. ' Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

III. ' Lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation ;

Qu'en l'espèce, l'action ut singuli a été engagée par conclusions notifiées à la société VMK Assur NV le 9 août 2012, soit avant le 16 juin 2013, date d'acquisition de la prescription des actions fondées sur des faits commis du 30 juin 2006 au 6 juin 2007 ;

Considérant que la société VMK Assur NV soulève l'irrecevabilité de l'action engagée par les consorts [L] sur le fondement de l'article L. 225-254 du code de commerce, comme dirigée à l'encontre, non de dirigeants de droit, mais de dirigeants de fait ;

Considérant que les consorts [L] et la société Assur voyage, fondant exclusivement leurs demandes sur les articles L. 225-251 et L. 225-252 du code de commerce, contestent l'interprétation restrictive de ce texte ;

Considérant que selon l'article L. 225-251 alinéa 1 du code de commerce, Les administrateurs et le directeur général sont responsables individuellement ou solidairement selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés anonymes, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion ;

Qu'aux termes de l'article L. 225-252 du même code, Outre l'action en réparation du préjudice subi personnellement, les actionnaires peuvent, soit individuellement, soit par une association répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120 soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, intenter l'action sociale en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation de l'entier préjudice subi par la société, à laquelle, le cas échéant, les dommages-intérêts sont alloués ;

Que l'article L. 227-8 du même code dispose que Les règles fixant la responsabilité des membres du conseil d'administration et du directoire des sociétés anonymes sont applicables au président et aux dirigeants de la société par actions simplifiée ;

Considérant qu'en l'espèce, les consorts [L] et la société Assur voyage recherchent la responsabilité de la société Artas devenue VMK Assur NV, en tant que dirigeant de fait de la société Assur voyage ; que cette dernière, dont le pourvoi en cassation a été rejeté mais devant être dans la cause comme bénéficiaire des demandes en réparation, intervient volontairement devant la cour ;

Mais considérant que les textes susvisés ne s'appliquent qu'aux dirigeants de droit de la société et impliquent que la faute qui leur est reprochée ait été commise dans l'accomplissement du mandat social ; que l'action des consorts [L] et de la société Assur voyage est en conséquence irrecevable ;

Considérant par ailleurs que les consorts [L] demandent la condamnation de la société VMK Assur NV à payer à Me [T] ès qualités de liquidateur de la société Assur voyage des dommages et intérêts en réparation des préjudices correspondant : - au coût relatif aux frais de recrutement de MM. [O], [J] et [E],

- aux conséquences des agissements d'Artas en matière sociale (rupture du contrat de M. [N], transactions conclues avec MM. [O] et [J]),

- au préjudice subi par Assur Voyage lors de la mise en 'uvre du premier plan social,

- aux conséquences judiciaires ou transactionnelles du second plan social,

- au titre de la moitié des pertes d'exploitation constatées au 31 décembre 2006 ainsi que la totalité des pertes d'exploitation constatées au 31 décembre 2007,

- au préjudice fixé aux termes du protocole d'accord entre les sociétés Assur Voyage et Europ Assistance,

- au titre de la perte de valorisation de ses actifs lors des cessions des portefeuilles "clients certains" du 9 octobre 2007 et "clients incertains" du 31 décembre 2008 ;

Que le préjudice ainsi invoqué par les consorts [L] n'est pas distinct de celui subi par la société, la perte de valorisation des actifs causant un préjudice à la société et n'ayant qu'un effet indirect sur le patrimoine des associés ;

Qu'ainsi que le soulève la société VMK Assur NV, le préjudice réclamé n'est pas réparable dans le cadre d'une action ut singuli, faute de caractère personnel aux consorts [L] ; que les demandes des consorts [L] sont ainsi également irrecevables ;

Sur les autres demandes

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser totalement à la société VMK Assur NV la charge de ses frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement, dans les limites de la saisine de la cour, sur renvoi après cassation partielle de la décision de la cour d'appel de Paris du 3 décembre 2013, par arrêt de la Cour de cassation rendu le 12 avril 2016,

Déclare irrecevables les demandes formées par M. [O] [L], Mme [S] [Z] épouse [L] et M. [V] [L] à l'encontre de la société VMK Assur NV ;

Condamne in solidum M. [O] [L], Mme [S] [Z] épouse [L] et M. [V] [L] à payer à la société VMK Assur NV la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne in solidum M. [O] [L], Mme [S] [Z] épouse [L] et M. [V] [L] aux dépens et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 16/17798
Date de la décision : 08/02/2018

Références :

Cour d'appel de Paris C2, arrêt n°16/17798 : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-08;16.17798 ?
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