Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 2
ARRÊT DU 18 JANVIER 2018
(n° 2018- , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/02605
Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Novembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 07/16699
APPELANT
Monsieur [F] [Q] [Y]
[Adresse 1]
[Adresse 1] (ESPAGNE)
Représenté et assisté à l'audience de Me Laurent FELDMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1388
INTIMES
Monsieur [W] [Y]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Mireille ABENSOUR GIBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0525 substituée à l'audience par Me Murielle BAUMET, avocat au barreau de PARIS, toque : A0525
Madame [J] [U], divorcée [X]
[Adresse 3]
[Adresse 3])
Représentée et assistée à l'audience de Me Patrick MERY de la SELEURL MERY DURAND VILLETTE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0173
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 décembre 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre et de Madame Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère, chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre
Madame Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère
Madame Isabelle CHESNOT, conseillère
qui en ont délibéré
Greffière, lors des débats : Madame Fatima-Zohra AMARA
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Marie-Hélène POINSEAUX, présidente et par Mme Fatima-Zohra AMARA, greffière présente lors du prononcé.
***********
Vu l'appel interjeté le 21 janvier 2016, par M. [F] [Q] [Y] d'un jugement en date du 26 novembre 2015, par lequel le tribunal de grande instance de Paris a principalement, sous le bénéfice de l'exécution provisoire':
- Condamné M. [F] [Y] à payer à Mme [J] [U] la somme de 81 560 euros, avec intérêts au taux conventionnel de 8 % l'an à compter du 3 mars 20001 et capitalisation,
- ainsi qu'une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- condamné M.[F] [Y] aux entiers dépens en ce compris les frais de l'expertise qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par les avocats qui en auront fait la demande ;
Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 8 novembre 2017 aux termes desquelles M. [F] [Y] demande à la cour, au visa des articles 1108, 1134, et 1326 du code civil, de :
- Débouter Mme [U] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- ordonner la main levée d'hypothèque conservatoire pour les sommes réclamées, prise par celle-ci suite au jugement du 26 novembre 2015,
- la condamner au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 28 juillet 2016, par Mme [J] [U] tendant à voir pour l'essentiel confirmer la décision entreprise et :
- Condamner M. [F] [Y] à lui payer la somme de 10'000 euros à titre de dommages et intérêts,
- le condamner à lui payer la somme de 6'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens qui seront recouvrés par la SELARL Mery Durand Villette conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 12 octobre 2017 par M. [W] [Y] visant à voir':
- Déclarer irrecevable et mal fondé l'appel de M. [F] [Q] [Y],
- déclarer irrecevable et mal fondé l'ensemble des demandes, fins et conclusions de Mme [U],
- confirmer le jugement en date du 26 novembre 2015 rendu par le tribunal de grande instance de Paris en toutes ses dispositions,
En conséquence,
- débouter l'appelant de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- débouter Mme [U] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner M. [F] [Y] au paiement de la somme de 3'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;
SUR CE, LA COUR :
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties, il convient de rappeler que :
* Mme [U] divorcée [X], propriétaire des murs de deux boutiques situées 90 avenue Poincaré à Paris, les a donné à bail aux frères [W] et [F] [Q] [Y], puis les a vendu finalement au seul [W] [Y], alors que subsistait une importante dette de loyers et qu'une partie du prix d'achat a fait l'objet d'un prêt de sa part 'hors la comptabilité du notaire' ;
* le 15 octobre 1997, M. [W] [Y] et M. [F] [Y] ont signé au profit de Mme [U] un document dactylographié par lequel ils reconnaissent devoir la somme écrite de manière manuscrite en chiffre et en lettres, de 535'000 francs, 'pour prêt de pareil somme (...) par suite du non acquittement du solde du prix de vente et de cession de pas de porte et solde de loyers impayés' et s'engagent à la lui rembourser en 13 fractions de 40'000 francs du 15 décembre 1997 au 15 janvier 1999, le montant dû pour la dernière échéance étant de 55'000 francs, et un intérêt de 8'% l'an étant stipulé ;
* cet acte autorisait Mme [X] à inscrire une hypothèque sur un appartement situé [Adresse 4] ;
* après plusieurs mises en demeures à compter du 7 septembre 1998 restées infructueuses, Mme [U] a fait assigner le 30 novembre 2007 les frères [Y] devant le tribunal de grande instance de Paris ;
* par jugement du 17 mars 2011, ce tribunal a :
- dit que l'acte du 15 octobre 1997 est valide et répond aux exigences de l'article 1426 du code civil et qu'il doit recevoir exécution,
- avant dire droit au fond, ordonné une expertise en écriture confiée à Mme [I] [W], au motif qu'il subsistait un doute relativement à l'auteur des mentions manuscrites et des signatures figurant sur l'acte,
* l'expert a déposé son rapport le 23 octobre 2013 et relevé une identité de signature avec les signatures témoins produites par Mme [U], en ce qui concerne le seul M. [F] [Y],
* le 26 novembre 2015 est intervenue la décision dont appel.
Sur l'étendue de la saisine de la cour :
M. [F] [Q] [Y] a fait appel du jugement qui l'a condamné seul à rembourser à Mme [U] les sommes réclamées, il sollicite la réformation du jugement et le débouté des demandes à son encontre.
Mme [U] n'a formé aucun appel incident et ne sollicite que la confirmation du jugement en sa faveur, de sorte qu'aucune demande n'est formulée à l'encontre de M. [W] [Y] à l'égard duquel le jugement du 26 novembre 2015 est d'ores et déjà confirmé.
Sur la reconnaissance de dette :
L'article 1326 ancien devenu 1376 du code civil dispose : L'acte juridique par lequel une seule partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l'acte sous seing privé vaut pour la somme écrite en toutes lettres.
Dans un jugement aujourd'hui définitif rendu le 17 mars 2011, le tribunal de grande instance de Paris a jugé que cet acte est valide, répond aux exigences de l'article 1326 du code civil et doit recevoir exécution. Il a par ailleurs ordonné une expertise en écriture aux fins de "dire si les signatures et les mentions manuscrites figurant sur l'acte du 15 octobre 1997 émanent de M. [F] [Q] [Y] ou de M. [W] [Y]".
La validité et la porté de cet acte sont dès lors définitivement tranchées, seule restant à déterminer l'identité du ou des débiteurs de l'obligation souscrite.
Le jugement déféré a parfaitement relevé que, faute pour M. [F] [Y] d'avoir apporté son concours à l'expertise graphologique, l'expert ayant dû écarter les échantillons d'écritures réalisés devant elle en raison de leur manque de spontanéité, il convenait de se reporter à des éléments graphologiques antérieurs figurant sur documents issus des relations d'affaires entre les parties en dehors de tout litige entre elles.
L'expert a conclu que la signature attribué à M. [F] [Y] dans le document du 15 octobre 1997 "a tout son écho" dans les signatures de comparaison qui n'ont pas été reconnues par lui.
Il s'agit de :
- la photocopie d'un chèque en date du 14 janvier 1997, au bénéfice de Mme [U] à tirer sur le compte bancaire de M. [F] [Y] qui n'a jamais indiqué avoir perdu le chèque en question,
- des accusés de réception postaux en date des 5 octobre 1998 et 3 juin 1999,
- un bail commercial en date du 17 septembre 1996 entre Mme [U] et l'intéressé, portant sur la boutique sise [Adresse 5],
- un chèque en original de 135 000 francs, non daté, mais remis selon la demanderesse au moment de la signature de la reconnaissance de dette litigieuse,
- une promesse de vente de biens et droits immobiliers entre les mêmes parties en date du 17 septembre 1996 et du 25 septembre 1996 portant sur la boutique sise [Adresse 5],
- une cession de droit au bail des mêmes dates, sur les mêmes locaux et entre les mêmes parties,
- une lettre manuscrite en date du 5 novembre 1996 émanant de M. [F] [Y] et destinée à Mme [U].
La cour peut elle-même se convaincre que les signatures de ces documents versés aux débats présentent de nombreuses similitudes et sont identiques avec celle apposée au bas à gauche de l'acte litigieux en partie sur la mention "Bon pour reconnaissance de dette" .
Cette signature recouvre également en partie la signature apposée après la mention "bon pour acceptation" de Mme [X], nom sous lequel travaillait Mme [U] à cette époque. Le fait que cette signature, qui n'est pas contestée par Mme [U], soit difficilement identifiable est sans conséquence sur la validité de l'acte, question définitivement tranchée.
Le fait que l'expert n'a pas pu identifier la signature figurant à droite en bas de page du document comme étant celle de M. [W] [Y] est indifférent et ne peut faire obstacle à la condamnation de son frère au motif que leur engagement était conjoint et que l'acte ne peut avoir d'efficacité que s'il est signé par les deux parties, étant observé que M. [F] [Q] [Y] ne formule aucune demande à l'encontre de M. [W] [Y].
Dans ces conditions le jugement déféré sera confirmé dans toutes ses dispositions.
Sur les autres demandes :
Mme [U] ne démontre pas que l'exercice par M. [Y] de la voie de recours qui lui est ouverte a pu dégénérer en abus ouvrant droit à réparation.
Il sera alloué à Mme [U] une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 26 novembre 2015 ;
Y ajoutant :
Condamne M. [F] [Y] à payer à Mme [J] [U] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette les autres demandes ;
Condamne M. [F] [Y] aux entiers dépens de l'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par la SCP Mery Durand Villette qui en fait la demande ;
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE