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19/12/2017 | FRANCE | N°16/05738

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 19 décembre 2017, 16/05738


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 5



ARRET DU 19 DECEMBRE 2017



(n° 2017/ 376 , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/05738



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Janvier 2016 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 12/11726





APPELANTE



SA AXA FRANCE IARD agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux do

miciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 722 057 460 01971



Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistée d...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRET DU 19 DECEMBRE 2017

(n° 2017/ 376 , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/05738

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Janvier 2016 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 12/11726

APPELANTE

SA AXA FRANCE IARD agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 722 057 460 01971

Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistée de Me Marie-José GONZALEZ de la SCP COURTEAUD-PELLISSIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P23

INTIMÉS

Etablissement Français du Sang (E.F.S.), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 428 822 852 02140

Représenté par Me Pierre-Yves FOURE de la SELARL HOUDART & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : A0294

Assisté de Me Liselotte LARLIE de la SELARL HOUDART & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : A 294

L'Office National d'Indemnisation des Accidents Médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par son Directeur Monsieur [C] [N] domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

N° SIRET : 180 092 330 00026

Représenté par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assisté de Me Sylvie WELSCH de la SCP UGGC AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0261, substituée par Me Clémence LEMETAIS D'ORMESSON de la SCP UGGC AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0261

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Novembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre

Monsieur Christian BYK, Conseiller

Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère, entendue en son rapport

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Catherine BAJAZET

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Catherine BAJAZET, greffier présent lors de la mise à disposition.

'''''

M. [R] [W] présente de lourds antécédents cardio-vasculaires et a subi des hospitalisations notamment au centre médico-chirurgical du [Établissement 1] (en 1978) et à l'hôpital [Établissement 2] (en 1981 et en 1983) au décours desquelles il a été transfusé.

A la suite d'une intervention chirurgicale à l'hôpital européen [Établissement 3] à [Localité 1], en décembre 1998, il lui a été demandé, en janvier 1998, de réaliser dans les trois mois suivants, une sérologie des hépatites, sérologie qui est revenue positive pour l'hépatite virale C, le 6 avril 1998.

M. [R] [W] a sollicité, en référé, l'organisation d'une mesure d'expertise et le professeur [K], désigné par ordonnance du 21 juillet 2005 et dont les opérations avaient été rendues communes à la SA AXA FRANCE IARD en qualité d'assureur responsabilité civile du centre de transfusion sanguine de [Localité 2], a déposé son rapport le 8 novembre 2007.

L'expert a notamment retenu, à l'issue d'une enquête transfusionnelle dont il dit qu'elle n'a pas pu être réalisée par défaut d'archives, les donneurs des vingt-deux produits demeurant parfaitement inconnus, 'qu'il est certain, qu'outre les deux produits reçus en 1978, M. [R] [W] a reçu de nombreux produits sanguins labiles au cours des deux interventions pratiquées à l'hôpital [Établissement 2] en 1981 et 1983 (...) et que l'ignorance parfaite où nous sommes du statut sérologique envers le VHC des donneurs de tous ces produits nous autorise à tenir pour vraisemblable la responsabilité transfusionnelle dans la contamination virale C qui a touché M. [W]'.

A la suite du rejet explicite de la demande préalable déposée le 22 février 2005 et du dépôt du rapport sus-mentionné, M. [R] [W], son épouse et ses enfants ont saisi le tribunal administratif de Melun, qui par jugement en date du 23 octobre 2009, a condamné l'Etablissement français du sang (EFS) légalement substitué dans les droits et obligations de l'AP-HP et du centre hospitalier de [Localité 2] pour leurs anciennes activités transfusionnelles. Le tribunal retenait, au visa de l'article 102 de la loi 2002-303 du 4 mars 2002 'qu'eu égard au nombre de donneurs potentiels en cause, à l'absence d'autres sources de contamination propres à M. [W] et au génotype du virus de l'hépatite C, le lien de causalité entre les transfusions et l'hépatite de celui-ci doit être considéré comme établi et la responsabilité de l'Etablissement français du sang engagée' et faisait partiellement droit aux demandes indemnitaires des consorts [W].

Cette décision a été déférée à la cour administrative d'appel de Paris et la procédure a été communiquée à l'ONIAM, en application des dispositions de l'article 67 IV de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 instituant la substitution de l'ONIAM à l'EFS et lui confiant la charge d'indemniser les victimes de contamination par le virus de l'hépatite C causée par une transfusion sanguine. Par arrêt rendu le 10 octobre 2011, la cour administrative d'appel a, au visa des textes articles 102 de la loi du 4 mars 2002 et 67 de la loi du 17 décembre 2008, rejeté la contestation de l'EFS auquel s'est substitué l'ONIAM quant à l'imputabilité de la contamination, faute de rapporter la preuve qui lui incombe et a porté l'indemnisation due aux consorts [W] à la somme de 60 000€.

Parallèlement à cette procédure menée devant les juridictions administrative l'EFS avait, par acte du 26 novembre 2009, fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris, la SA AXA FRANCE IARD (venant aux droits de l'UAP) assureur au moment des faits du centre de transfusion sanguine de [Localité 2]. Par jugement en date du 25 octobre 2010, le tribunal a, à la demande de l'EFS sursis à statuer 'dans l'attente d'une décision définitive de la juridiction administrative dans la procédure l'opposant aux consorts [W]'.

L'instance a été rétablie à la demande de l'EFS et compte tenu des modifications législatives intervenues depuis avec la loi n°2012-1404 du 17 décembre 2012, l'ONIAM est intervenu volontairement à la procédure pour obtenir la prise en charge de l'indemnisation des préjudices liés à contamination de M. [R] [W].

Par jugement en date du 25 janvier 2016, le tribunal de grande instance de Paris a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- reçu l'ONIAM en son intervention volontaire,

- dit l'EFS recevable à agir pour y avoir eu intérêt à la date de l'assignation,

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription,

- condamné la SA AXA FRANCE IARD à garantir l'ONIAM à hauteur de la somme de 54.750 € au titre de l'indemnisation versée du fait de la contamination de monsieur [W] par le virus de l'hépatite C,

- condamné la SA AXA FRANCE IARD à payer à l'EFS la somme de 1000€ et à l'ONIAM celle de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Le 4 mars 2016, la SA AXA FRANCE IARD a relevé appel de cette décision et aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 30 octobre 2016, elle demande à la cour, infirmant le jugement déféré, sous divers constats et dire et juger qui ne sont que la reprise de ses moyens, de déclarer l'EFS irrecevable et en tant que de besoin de le débouter de ses demandes y compris celle fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et, s'agissant des demandes de l'ONIAM, de surseoir à statuer dans l'attente d'une décision définitive de la juridiction administrative sur la responsabilité de l'EFS venant aux droits et obligations de l'ancien centre de transfusion sanguine de [Localité 2] et subsidiairement, de tirer les conséquences de droit du défaut d'établissement de cette responsabilité en déboutant l'ONIAM de sa demande. Très subsidiairement, au constat que cette responsabilité n'est pas établie, elle soutient également le débouté des prétentions de l'ONIAM.

Encore plus subsidiairement, dans l 'hypothèse où la Cour ferait droit à la demande de l'ONIAM et au constat que le centre de [Localité 2] a fourni deux des vingt-deux produits suspects, de déclarer irrecevable et en tout cas mal fondé l'appel incident formé par l'ONIAM et de juger que seule une somme de 5.590,90€ et subsidiairement celle de 30.750€ peut être mise à sa charge, et de confirmer le jugement en ce qu'il a décidé que l'indemnisation de l'ONIAM aurait lieu dans les limites du plafond contractuel, la garantie du contrat d'assurance n° 37887 0402402 K étant, en l'occurrence, plafonnée à 1.524.490,20€ par sinistre et par année d'assurance, étant précisé que 'le plafond par année se réduit et finalement s'épuise par tout règlement amiable ou judiciaire d'indemnités, quels que soient les dommages auxquels il se rapporte, sans reconstitution automatique de la garantie après règlement'.

A titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse d'une condamnation pour le tout, elle réclame au visa de l'article 1214 ancien (devenu 1317) du code civil, la garantie de l'EFS à hauteur de 20/22ème et sa condamnation à ce titre, sollicitant en tout état de cause la condamnation de tout succombant au paiement d'une indemnité de procédure de 12.000€ et entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 13 octobre 2017, l'EFS soutient la confirmation du jugement déféré, le débouté de la demande de garantie formulée à son égard et la condamnation de la SA AXA FRANCE IARD au paiement d'une indemnité de procédure de 1500€ et aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 13 octobre 2017, l'ONIAM sous divers constats et dire et juger reprenant ses moyens, soutient la confirmation de la décision déférée, en ce qu'elle a accueilli sa demande et son infirmation en ce qu'elle a limité la condamnation de la SA AXA FRANCE IARD, dont il réclame qu'elle soit portée à la somme de 71 549,54€ en principal, intérêts et frais, de débouter la SA AXA FRANCE IARD de toutes ses demandes et de la condamner au paiement d'une indemnité de procédure de 3 000€ et aux entiers dépens.

La clôture est intervenue le 13 novembre 2017.

SUR CE, LA COUR,

Considérant au préalable que la SA AXA FRANCE IARD n'a pas maintenu, dans ses dernières écritures, la fin de non-recevoir tirée de la prescription, la décision déférée devant dès lors être confirmée en ce qu'elle la rejette ;

Considérant en premier lieu, que la SA AXA FRANCE IARD soutient l'irrecevabilité des demandes de l'EFS, faisant valoir que nul ne plaide par procureur ; qu'elle lui dénie ainsi qualité et intérêt à agir, cet intimé rappelant qu'il pouvait seul agir à la date de son assignation et faire ensuite rétablir la procédure ;

Considérant qu'en application des lois n° 98-535 du 1er juillet 1998, n° 2000-1353 du 30 décembre 2000 et n°2005-1087 du 1er septembre 2005 les droits et obligations des établissements de transfusion sanguines étaient transférés à l'EFS qui avait désormais seul qualité pour agir ou défendre en justice et que la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 a confié à l'ONIAM la mission d'indemniser les victimes de contaminations transfusionnelles par le VHC, prévoyant, dans les contentieux en cours lors de son entrée en vigueur (soit au 1er juin 2010), la substitution de l'ONIAM à l'EFS ;

Qu'étant rappelé que la qualité et l'intérêt à agir s'apprécie à la date de l'introduction de l'instance, l'EFS avait seul, au 26 novembre 2009, date de l'assignation, qualité pour poursuivre l'exécution du contrat d'assurance souscrit par le centre de transfusion sanguine de [Localité 2], aux droits et obligations desquelles il venait en application des textes susmentionnés, sa condamnation par le tribunal administratif de Versailles par une décision, au surplus, exécutée, suffisant à établir son intérêt à agir, la décision déférée devant être confirmée sur ce point ;

Considérant en second lieu, que la SA AXA FRANCE IARD prétend que la cause du sursis prononcé le 25 octobre 2010 n'a pas disparu, faute de décision de la juridiction administrative sur la question préjudicielle de la responsabilité de l'EFS venant aux droits et obligations du centre de transfusion sanguine de [Localité 2], l'ONIAM soutenant la confirmation du jugement déféré ;

Considérant que seul le dispositif du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris, le 25 octobre 2010 a autorité de chose jugée sur la cause du sursis à statuer et celui-ci a été ordonné 'dans l'attente d'une décision définitive de la juridiction administrative dans la procédure l'opposant aux consorts [W]' ;

Que le prononcé de la décision de la cour administrative d'appel a mis fin au sursis et la procédure pouvait se poursuivre devant les juridictions de l'ordre judiciaire, la SA AXA FRANCE IARD ne pouvant sérieusement contester que celles-ci sont compétentes pour examiner le présent litige qui porte sur l'application d'un contrat de droit privé ;

Que dès lors, les demandes de l'ONIAM sont recevables et ne peuvent être rejetées au seul motif que les juridictions administratives n'auraient pas statué sur une prétendue question préjudicielle ;

Considérant au fond, que rappelant le régime d'indemnisation issu de l'article 67 de la loi du 17décembre 2008 et de la loi du 17 décembre 2012, la SA AXA FRANCE IARD fait valoir que les victimes sont désormais indemnisées, au titre de la solidarité nationale, par l'ONIAM y compris dans les procédures en cours, en substitution de l'EFS et que l'ONIAM dispose, en application du second texte, d'un recours en garantie au titre des sommes versées aux victimes de dommages par les assureurs des structures reprises par l'EFS ;

Qu'elle ajoute, que les nouvelles dispositions législatives permettent désormais à l'ONIAM d'exercer son recours subrogatoire sans avoir à administrer la preuve d'une faute commise par l'ancienne structure transfusionnelle, responsable de la contamination et ce, que ce soit à l'encontre de l'EFS venant aux droits et obligations de cette dernière ou directement à l'encontre de l'assureur de responsabilité de cette ancienne structure transfusionnelle et que pour autant nul ne peut prétendre rechercher la garantie de 1'assureur de responsabilité d'une ancienne structure transfusionnelle sans que la responsabilité de celle-ci soit préalablement établie ;

Qu'elle rappelle que la mobilisation des garanties d'une assurance de responsabilité suppose, en application des articles L 124-1 et L 124-1-1 du code des assurances, la démonstration d'une dette de responsabilité et donc la preuve de la fourniture des produits contaminant par le centre assuré et qu'en l'espèce, l'incertitude demeure sur la fourniture de produits par son assuré, le centre de transfusion sanguine de [Localité 2], ce qui est un obstacle à une action à son encontre ; qu'elle prétend que la décision de la cour administrative d'appel lui est inopposable, parce qu'il n'a pas été statué sur la responsabilité de son assuré et qu'elle n'était pas partie à cette instance ; que s'appuyant sur l'expertise judiciaire et au constat d'une absence d'enquête transfusionnelle, elle écarte toute preuve de la fourniture des produits injectés à M. [R] [W] par son assuré;

Considérant que l'ONIAM fait valoir, que sur la question du régime de la preuve applicable dans le cadre du recours dont il dispose contre les assureurs des établissements de transfusion sanguine, la Cour de cassation a, dans son arrêt du 20 septembre 2017 posé le principe que la garantie était due lorsque l'origine transfusionnelle d'une contamination est admise, que l'établissement de transfusion sanguine assuré a fourni au moins un produit administré à la victime et que la preuve que ce produit n'était pas contaminé n'a pu être rapportée ;

Considérant que selon l'article 102 de la loi du 4 mars 2002, en cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C, antérieure à la date d'entrée en vigueur de la loi, à une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang, le demandeur doit apporter des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a une telle origine ; qu'au vu de ces éléments, il incombe alors à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles et que le doute profite à la victime ;

Qu'il s'ensuit que la responsabilité des établissements de transfusion sanguine se trouve engagée lorsque, après avoir fourni des produits administrés au demandeur, celui-ci a présenté une contamination dont l'origine transfusionnelle a été admise et qu'ils n'ont pas été en mesure d'établir que leurs produits n'étaient pas contaminés ;

Qu'à l'issue d'une reprise par l'EFS des droits et obligations des établissements de transfusion sanguine, en application des articles 18 de la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998, 60 de la loi n° 2000-1353 du 30 décembre 2000 et 14 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005, l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 a confié à l'ONIAM la mission d'indemniser les victimes de telles contaminations par le virus de l'hépatite C selon la procédure de règlement amiable prévue par l'article L. 1221-14 du code de la santé publique et a précisé que l'office recherchait les circonstances de la contamination, notamment dans les conditions prévues à l'article 102 précité ;

Que la loi a réservé, sous certaines conditions, la possibilité d'une action subrogatoire de l'ONIAM contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les personnes tenues à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle, et a prévu une substitution de l'ONIAM à l'EFS dans les procédures en cours au titre des préjudices mentionnés à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable ;

Qu'en son article 72, la loi du 17 décembre 2012 a conféré à l'ONIAM le droit d'être garanti des sommes versées aux victimes de dommages par les assureurs des structures reprises par l'EFS, que le dommage subi par la victime soit ou non imputable à une faute;

Qu'il s'ensuit que, si le législateur a confié à l'ONIAM et non plus à l'EFS, venant aux droits et obligations des établissements de transfusion sanguine, la mission d'indemniser les victimes de contaminations transfusionnelles, il n'a pas modifié le régime de responsabilité auquel ces derniers ont été soumis et a donné à l'ONIAM la possibilité de demander à être garanti des sommes versées aux victimes de dommages par les assureurs de ces structures, sans avoir à prouver la faute des assurés ; qu'il s'ensuit que, hors les hypothèses dans lesquelles la couverture d'assurances est épuisée, le délai de validité de la couverture est expiré ou les assureurs peuvent se prévaloir de la prescription, leur garantie est due à l'ONIAM, lorsque l'origine transfusionnelle d'une contamination est admise, que l'établissement de transfusion sanguine qu'ils assurent a fourni au moins un produit administré à la victime et que la preuve que ce produit n'était pas contaminé n'a pu être rapportée ;

Considérant qu'en l'espèce, par un jugement du 23 octobre 2009, le tribunal administratif retient une contamination de M. [R] [W] par des produits sanguins labiles fournis (pour deux) par le centre de transfusion de [Localité 2] et par un poste de transfusion dépendant de l'AP HP et sur le fondement de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002, la responsabilité de l'EFS 'venant aux droits des centres de transfusion précités', l'arrêt de la cour administrative d'appel en date du 10 octobre 2011, reprenant ces considérations pour écarter le recours introduit par l'EFS, auquel s'est ensuite substitué l'ONIAM ;

Que la SA AXA FRANCE IARD ne peut pas prétendre ignorer ces décisions condamnant son assuré (au travers des personnes morales qui y ont été légalement substituées) et qui, constituant, pour elle, la réalisation du risque, lui sont opposables ;

Qu'au surplus, celles-ci ont été prises sur la base du rapport d'expertise judiciaire à laquelle la SA AXA FRANCE IARD a été appelée et représentée, l'échec de l'enquête transfusionnelle n'étant consécutive qu'à l'absence d'identification des donneurs, la provenance des produits labiles y étant mentionnée (sous le titre origine : [Localité 2] pour les deux premiers portant les numéros 4566731 et 4568457 et le poste de transfusion de [Établissement 2] pour les autres) ; qu'au cours de cette expertise, il a été remis à l'expert, un courrier de l'EFS dont les termes n'ont jamais été contestés et qui précise que le docteur [O] correspondant d'homovigilance du centre de transfusion sanguine de [Localité 2] a précisé que le centre hospitalier du [Établissement 1] se fournissait auprès de ce centre de transfusion sanguine en raison de la proximité géographique des deux établissements, l'absence d'archives de distribution permettant de retrouver la trace des produits sanguins administrés à M. [R] [W], cette précision ne remettant pas en cause l'assertion qui précède d'une fourniture des produits sanguins administrés aux patients de l'établissement du [Établissement 1] par le centre de transfusion de [Localité 2] ;

Que dès lors, et ainsi que l'ont retenu les premiers juges, la SA AXA FRANCE IARD doit sa garantie ;

Considérant que sur l'étendue de ce recours, l'ONIAM prétend qu'ayant indemnisé les victimes au titre de la solidarité nationale, il est fondé à réclamer la garantie de la SA AXA FRANCE IARD pour le tout, ce que celle-ci conteste ;

Considérant étant rappelé que l'EFS venait aux droits et actions de deux établissements transfusionnels ayant fournis les produits potentiellement contaminant et dont la responsabilité a été retenue par les juridictions administratives, l'ONIAM se substituant à l'EFS (tenu à un double titre) dans l'obligation d'indemniser les victimes, son action doit dès lors se diviser ; que s'agissant de la responsabilité sans faute de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002, le partage doit se faire par parts viriles soit en l'espèce par moitié ;

Qu'il s'ensuit, aucune contestation n'étant élevée sur les montants en principal, intérêts et frais versés aux consorts [W] (71 549,54€), la somme de 35 774,77€ doit être mise à la charge de la SA AXA FRANCE IARD assureur du centre de transfusion sanguine de [Localité 2], la décision déférée devant être réformée sur le montant de la créance de l'ONIAM ;

Qu'il convient, ainsi que le sollicite la SA AXA FRANCE IARD, de rappeler les limites du plafond contractuel, la garantie du contrat d'assurance n° 37887 0402402 K étant, en l'occurrence, plafonnée à l.524.490,20€ par sinistre et par année d'assurance, étant précisé que 'le plafond par année se réduit et finalement s'épuise par tout règlement amiable ou judiciaire d'indemnités, quels que soient les dommages auxquels il se rapporte, sans reconstitution automatique de la garantie après règlement' ;

Considérant que la SA AXA FRANCE IARD qui succombe pour l'essentiel doit être condamnée aux dépens d'appel et devra rembourser les frais irrépétibles des intimées ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe,

Réforme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SA AXA FRANCE IARD à payer à l'ONIAM la somme de 54 750€ et dit que la SA AXA FRANCE IARD est condamnée à garantir l'ONIAM à hauteur de 35 774,77€ et le confirme pour le surplus ;

Y ajoutant,

Dit que l'indemnisation de l'ONIAM aura lieu dans les limites du plafond contractuel, la garantie du contrat d'assurance n° 37887 0402402 K étant, en l'occurrence, plafonnée à l.524.490,20€ par sinistre et par année d'assurance, étant précisé que 'le plafond par année se réduit et finalement s'épuise par tout règlement amiable ou judiciaire d'indemnités, quels que soient les dommages auxquels il se rapporte, sans reconstitution automatique de la garantie après règlement' ;

Condamne la SA AXA FRANCE IARD à payer à l'EFS la somme de 1500€ et à l'ONIAM celle de 3000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 16/05738
Date de la décision : 19/12/2017

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°16/05738 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-12-19;16.05738 ?
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