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23/11/2017 | FRANCE | N°16/01285

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 23 novembre 2017, 16/01285


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 23 novembre 2017

(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/01285



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Décembre 2015 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS RG n° 13/08871





APPELANTS

Monsieur [K] [J]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Joyce KTORZA, avocat au barreau de PARIS, toque : B

0053 substitué par Me Caroline TUONG, avocat au barreau de PARIS, toque : B53



Syndicat SNRT CGT FRANCE TELEVISIONS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Joyce KTORZ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 23 novembre 2017

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/01285

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Décembre 2015 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS RG n° 13/08871

APPELANTS

Monsieur [K] [J]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Joyce KTORZA, avocat au barreau de PARIS, toque : B0053 substitué par Me Caroline TUONG, avocat au barreau de PARIS, toque : B53

Syndicat SNRT CGT FRANCE TELEVISIONS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Joyce KTORZA, avocat au barreau de PARIS, toque : B0053 substitué par Me Caroline TUONG, avocat au barreau de PARIS, toque : B53

INTIMEE

SA FRANCE TELEVISIONS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Marion SIMONET, avocat au barreau de LYON, toque : 1733

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 30 mars 2017, en audience publique, double rapporteur devant la Cour composée de :

Madame Catherine BEZIO, Président de chambre

Mme Patricia DUFOUR, Conseiller

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Catherine BEZIO, Président de chambre

Mme Patricia DUFOUR, conseiller

Mme Camille-Julia GUILLERMET, Vice-président placé

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Véronique BESSERMAN-FRADIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine BEZIO, Président et par Madame Véronique BESSERMAN-FRADIN, greffier de la mise à disposition et à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Statuant sur l'appel formé par M.[K] [J] à l'encontre du jugement en date du 10 décembre 2015 par lequel le conseil de prud'hommes de Paris, présidé par le juge départiteur statuant seul après avis du conseiller présent , a, avec exécution provisoire,:

-requalifié en contrat à durée indéterminée à temps partiel , depuis le 22 janvier 2002, la relation contractuelle entre les parties et dit que celle-ci doit se poursuivre moyennant un temps de travail égal à 36 % d'un plein temps et un salaire mensuel brut mensuel de 1548 €

-condamné la société FRANCE TELEVISIONS à verser à M.[J] les sommes de

*10 000 € au titre de l'indemnité de requalification

* 2001, 70 € à titre de rappel de prime d'ancienneté

* 2308, 56 € au titre de la prime de fin d'année

* 427, 56 € au titre des mesures FTV

*2000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

-et, au SNRT ' CGT, la somme de 1000 € à titre de dommages et intérêts , outre 1000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Vu les conclusions remises et soutenues à l'audience du 30 mars 2017 par M.[J] qui prie la cour,

à titre principal,

de confirmer la requalification en contrat à durée indéterminée mais à temps complet

de fixer son salaire mensuel brut hors accessoires de salaire à la somme de 4300 €

de condamner la société FRANCE TELEVISIONS à lui payer la somme de 237 884 € à titre de rappel de salaire et 23 788 € de congés payés afférents

subsidiairement,

de fixer le salaire comme dit ci-dessus à la somme de 3357 € par mois

de condamner la société FRANCE TELEVISIONS à lui payer la somme de 153 014 € à titre de rappel de salaires et 15 301 € à titre de congés payés afférents

à titre subsidiaire,

- de requalifier la relation de travail en contrat à durée indéterminée à 58 % d'un temps complet

de fixer son salaire mensuel brut hors accessoire de salaire à la somme de 2494 €

de condamner la société FRANCE TELEVISIONS à lui payer la somme de 10 406 € à titre de rappel de salaire et 1040 € de congés payés afférents

subsidiairement,

de fixer le salaire comme dit ci-dessus à la somme de 1947 € par mois

de condamner la société FRANCE TELEVISIONS à lui payer la somme de 4389 € à titre de rappel de salaire de base et 438 € de congés payés afférents

en tout état de cause,

- de condamner la société FRANCE TELEVISIONS à payer , au titre du rappel de la prime d'ancienneté, la somme de 698 €, outre 69 € de congés payés afférents

-en tout état de cause,

-d'augmenter le montant de l'indemnité de requalification accordée par les premiers juges

-et de lui allouer les sommes réclamées au titre des accessoires de salaire liés à la requalification, en ce qui concerne les rappels de prime d'ancienneté avec congés payés, de prime d'ancienneté et de mesures FTV

-avec allocation de la somme de 7000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Vu les conclusions d'intervention volontaire du Syndicat National de radiodiffusion et de télévision groupe FRANCE TELEVISIONSS « SNRT-CGT »» à l'audience précitée du 30 mars 2017 qui sollicite la condamnation de la société FRANCE TELEVISIONS au paiement de la somme de 10 000 € de dommages et intérêts et celle de 1000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les écritures développées à la barre par lesquelles la société FRANCE TELEVISIONS

-demande acte de ce qu'elle ne conteste plus la requalification en contrat à durée indéterminée prononcée par le premier juge,

-mais, formant appel incident, sollicite que la cour infirme le jugement déféré, du chef de l'indemnité de requalification fixée à 10 000 € -et réduise le montant de celle-ci à la somme de 1548 €- ainsi que du chef des condamnations prononcées au titre des accessoires de salaire, non justifiées selon elle,

-subsidiairement, conclut à la confirmation du chef de ces dernières condamnations

-et, en tout état de cause, soutient l'irrecevabilité de l'intervention du SNRT-CGT

-avec condamnation de M.[J] au paiement de la somme de 5000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE LA COUR

Considérant qu'il résulte des pièces et conclusions des parties que l'appelant a été engagé, à compter du 21 janvier 2002 , en qualité de chef monteur , par la société FRANCE 3, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société FRANCE TELEVISIONS qui, depuis la loi du 5 mars 2009, a réuni en son sein l'ensemble des sociétés de l'audiovisuel public, dont, la société FRANCE 3 ;  

que M.[J] a exercé ses fonctions durant 14 ans en vertu de contrats à durée déterminée successifs alternant divers motifs de recours ;

que le 12 juin 2013, M.[J] a saisi le conseil de prud'hommes afin de voir requalifier en contrat à durée indéterminée, à temps plein, les divers contrats à durée déterminée qui l'avaient lié aux sociétés FRANCE 3 et FRANCE TELEVISIONS , d'obtenir le versement d'un rappel de salaire en conséquence, ainsi que les diverses sommes résultant de l'application, en sa faveur, des dispositions légales et conventionnelles dont bénéficie un « salarié statutaire » ou permanent ;

que par le jugement entrepris, le conseil de prud'hommes a accueilli la demande de M.[J], quant à la requalification en contrat à durée indéterminée mais à temps partiel, seulement, correspondant à 36 % d'un temps complet, -en se fondant sur le nombre de jours travaillés par le salarié pour les deux sociétés ; que le juge départiteur a fixé le salaire à 1548 €  et, sur la base de ce salaire, a alloué à M.[J] les sommes rappelées en tête du présent arrêt au titre de la prime d'ancienneté, la prime de fin d'année et les mesures de France télévision (ou MFT) ainsi qu'une indemnité de requalification de 10 000 € ;

qu'enfin, le conseil de prud'hommes a condamné la société FRANCE TELEVISIONS à verser au SNRT-CGT la somme de 1000€ à titre de dommages et intérêts ;

Considérant que conformément aux dispositions de l'article R 1245-1 du code du travail  qui assortit la requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, de l'exécution provisoire de droit, la société FRANCE TELEVISIONS a proposé à M.[J] la signature d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel, selon elle, conforme aux dispositions du jugement; que c'est dans ce cadre que depuis le 1er janvier 2016, se poursuit actuellement la relation contractuelle ;

*

Considérant qu'il ressort des conclusions suvisées de la société FRANCE TELEVISIONS que celle-ci admet et ne conteste plus la requalification, en contrat à durée indéterminée, de la relation contractuelle entre les parties ;

Considérant que M.[J] est dès lors bien fondé à solliciter le versement par la société FRANCE TELEVISIONS d'une indemnité de requalification, conformément aux dispositions de l'article L 1245-2 du code du travail ;

Considérant que l'indemnité litigieuse a pour objet, à la fois, de sanctionner l'employeur qui ne s'est pas soumis à la règlementation sur les contrats à durée déterminée et de dédommager le salarié du préjudice subi en raison de la privation des avantages liés au statut de salarié permanent ;

que compte tenu de la longue durée de la relation contractuelle (14 ans) la cour, comme le premier juge, évalue, en l'espèce à 10 000 € l'indemnisation due à M.[J] en réparation de l'insécurité professionnelle qu' a créée la pratique de la société FRANCE TELEVISIONS et de la perte des divers avantages, conventionnels notamment, auxquels le salarié aurait pu prétendre;

Considérant que si la qualification juridique du contrat -à durée déterminée ou indéterminée- n'est ainsi plus en débat entre les parties, celles-ci demeurent opposées, quant à la durée du travail du salarié : temps complet ou temps partiel, et dans ce dernier cas, quel temps partiel ;

Sur la qualification du contrat liant les parties, à temps complet ou partiel

Considérant que la qualification de la relation contractuelle, en contrat à durée indéterminée, n'étant ainsi plus contestée, -ce dont il sera donné acte au dispositif- M.[J] entend voir encore juger que son contrat à durée indéterminée était à temps complet car ses contrats à durée déterminée n'étaient pas conformes aux dispositions de l'article L 3123-14 du code du travail  et il se tenait à disposition de la société FRANCE 3 ou FRANCE TELEVISIONS « 365 jours sur 365 », ses conditions de travail ne lui permettant nullement de connaître et d'organiser son emploi du temps ;

Considérant que la société FRANCE TELEVISIONS rappelle justement que si le contrat de travail à temps partiel est conforme aux exigences de l'article L 3123-14 précité du code du travail (avec indication de la durée, hebdomadaire ou mensuelle, prévue et de la répartition de la durée du travail, entre les jours de la semaine ou les semaines du mois), la requalification en contrat à temps complet suppose que le salarié apporte la preuve qu'il effectuait, en réalité, un travail à temps complet, en dépit de l'apparente régularité du contrat à temps partiel à lui consenti ;

qu'elle soutient qu'en l'espèce, les contrats de M.[J] étaient conformes aux exigences légales et qu'il appartient à l'appelant de démontrer que ces contrats à temps partiel correspondaient, en réalité, à des contrats à temps complet ;

que la société FRANCE TELEVISIONS expose également, avec raison, que la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée ne porte que sur la durée du contrat mais que les autres stipulations demeurent inchangées ;

Considérant il n'est pas discuté que le contrat de travail de l'appelant était un contrat à temps partiel, au regard de la durée du temps de travail figurant sur les contrats et sur les bulletins de paye de M.[J] ;

Considérant qu'il s'ensuit que la cour doit vérifier si, comme le soutient la société FRANCE TELEVISIONS et comme le conteste M.[J], les formalités prévues à l'article L 3123-14 précité étaient remplies, étant rappelé que, dans la négative, le contrat devrait être présumé à temps complet et qu'il appartiendrait, alors, à l'employeur de renverser cette présomption, en démontrant que le salarié était informé de la durée exacte de travail, hebdomadaire ou mensuelle convenue, et en établissant que M.[J] était matériellement en mesure de prévoir son emploi du temps et son rythme de travail, sans avoir à se tenir constamment à sa disposition ;

qu'à l'inverse, dans l'hypothèse où les exigences de l'article L 3123-14 auraient été satisfaites, ce serait à M.[J] d'administrer la preuve que son contrat à temps partiel était exécuté de telle sorte qu'il ne pouvait disposer de son temps et devait, en réalité, se tenir à la disposition permanente de la société FRANCE TELEVISIONS , celle-ci justifiant donc la requalification en temps complet, du contrat théoriquement à temps partiel ;

Or considérant qu'il résulte des pièces aux débats que si la plupart des contrats produits font état des jours et du nombre de jours de travail de l'appelant, ceux-ci ne prévoient pas la durée hebdomadaire et la répartition prévues à l'article L 3123-14 ;

que dans ces conditions M.[J] est bien fondé à se prévaloir de la présomption de contrat de travail à temps complet ;

Et considérant que pour combattre cette présomption, la société FRANCE TELEVISIONS se prévaut de la faible importance, selon elle, de l'activité professionnelle de M.[J] , en son sein, alliée à la perception régulière d' allocations de chômage, d'u montant non négligéable ;

Mais considérant que M.[J], produit des décomptes, effectués à partir de ses bulletins de paye -non utilement contredits par la société FRANCE TELEVISIONS- desquels il ressort que le nombre de ses jours de travail était bien supérieur à celui annoncé par les conclusions de la société FRANCE TELEVISIONS et atteignait, la centaine environ, par an  ; qu'en particulier pour l'année 2012, où FRANCE TELEVISIONS lui comptabilise -à partir des contrats de travail qu'elle produit- 29 jours de travail , pour les seuls trois premiers mois de l'année, les bulletins de paye qu'il verse, lui, aux débats établissent bien qu'il a travaillé d'avril à décembre 2012 ;

qu'il fait justement valoir, de plus, que le nombre de jours travaillés résulte du choix unilatéral de la société FRANCE TELEVISIONS et ne rend pas compte de l'état de disponibilité totale dans lequel il devait se tenir à l'égard de cette société, attendant que son employeur veuille bien faire appel à lui, dans des conditions d'imprévisibilité et d'inorganisation ; que les courriels produits établissent en effet que, contrairement à ses dires, la société FRANCE TELEVISIONS, la plupart du temps, n'avisait le salarié que tardivement (moins de 8 jours ) de ses « plannings », lesquels étaient de surcroît, modifiables ;

que pour illustrer cette politique de choix , propre à l'employeur, l'appelant cite , sans être contredit, l'exemple de la journée du 5 décembre 2016 où ont été successivement employés, sur l'antenne de France 3 [Localité 1], 5 chefs monteurs -sans spécialité particulière- dont la durée totale de travail équivalait à 3, 5 équivalents temps complet ;

que la collaboration de l'appelant avec la société FRANCE TELEVISIONS, régulière et ancienne, apparaît dès lors loin d'être anodine et insignifiante, comme celle-ci tente de le soutenir - d'autant que les déclarations fiscales de M.[J] démontrent que celui-ci ne disposait pas d'autre employeur - peu important les sommes perçues au titre de l'assurance chômage qui demeurent inférieures aux salaires perçus par M.[J], de FRANCE TELEVISIONS ;

Considérant qu'il résulte des énonciations qui précèdent que la présomption de contrat de travail à temps complet n'est pas renversée par la société FRANCE TELEVISIONS et que M.[J] sollicite à bon droit la requalification en ce sens, de son contrat à durée indéterminée ;

Sur le salaire de base et le rappel de salaire

Considérant que pour statuer sur la demande de rappel de salaire, omise par le premier juge, il convient de déterminer le salaire de base de M.[J] dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps complet ;

Considérant que M.[J] ne saurait cumuler les éléments appartenant à la situation qui était la sienne avant la requalification et ceux procédant de l'application du régime juridique du contrat à durée indéterminée devenu applicable par l'effet du jugement déféré auquel la société FRANCE TELEVISIONS acquiesce sur ce point ;

qu' il doit bénéficier seulement des dispositions qui, depuis l'origine, auraient dû lui être appliquées, en sa qualité de salarié titulaire d'un contrat à durée indéterminée ; que, cependant, la société FRANCE TELEVISIONS, du fait de la requalification du contrat, en contrat à durée indéterminée à temps complet, est tenue d'une obligation contractuelle au paiement du salaire correspondant à un temps complet qui ne peut être affectée par les revenus de remplacement dont a pu bénéficier le salarié ;

Considérant qu'il s'ensuit que M.[J] doit être débouté de sa demande, tendant à voir appliquer à son horaire à temps complet, le taux horaire prévu par ses contrats à durée déterminée ; qu'il y a lieu de déterminer en conséquence le montant du salaire, à temps complet, qu'aurait dû percevoir M.[J] ;

Considérant qu'au regard des conclusions des parties et des dispositions conventionnelles applicables il apparaît que M.[J] aurait dû être classé B 16, lors de son premier engagement en 2001 et que 10 ans plus tard, en octobre 2011, il aurait été automatiquement promu B 21-1 ;

que le montant de son salaire ne peut, dès lors, être celui, minimal, de 2777, 50 € avancé subsidiairement par la société FRANCE TELEVISIONS, qui correspond au minimum conventionnel d'un chef monteur sans expérience ;

que le salaire de 3357 € dont se prévaut l'appelant procède de la moyenne opérée entre les salaires perçus par des salariés exerçant les mêmes fonctions que lui et disposant d'une classification semblable à la sienne ; que, certes, la société FRANCE TELEVISIONS, conteste cette estimation mais, pour sa part, ne produit aucune pièce justifiant que des collègues de M.[J] , dans une situation identique à la sienne, perçoivent un salaire moindre à celui qu'il revendique  ;

Considérant que la cour retiendra donc la somme de 3357 € comme salaire de base de l'appelant ; que le montant du rappel requis sera accordé à M.[J] , majoré des congés payés afférents, comme dit au dispositif ci-après (soit 153 014 € et 15 301 €) ;

*

Sur les accessoires de salaires

Considérant que du fait de la requalification intervenue, M.[J] est en droit de bénéficier des dispositions légales et conventionnelles, applicables aux salariés « statutaires » ou permanents, titulaires d'un contrat à durée indéterminée ;

que ses revendications ont trait à la prime d'ancienneté, à la prime de fin d'année et aux mesures FTV  ;

*

Sur la prime d'ancienneté

Considérant qu' à ce premier titre, il convient d'allouer à M.[J] la somme réclamée en principal, soit 16 358 € , la société FRANCE TELEVISIONS produisant des décomptes fondés sur un contrat à temps partiel ou critiquant à tort le décompte de M.[J] qui , contrairement à ses prétentions n'a pris en considération la classification B 21-1 qu' à compter du 1er février 2012, seulement et non, dès son embauche ;

Considérant toutefois que M.[J] doit être débouté de sa demande en paiement des congés payés afférents à cette somme ;

qu'en effet, la prime litigieuse est versée au salarié tout au long de l'année, périodes de travail et de congés payés confondues, en sorte que son inclusion dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés aboutirait à la faire payer pour partie une seconde fois par l'employeur ; que par surcroît, la prime d'ancienneté n'étant pas la contrepartie d'un travail effectif , elle ne saurait supporter le paiement de congés payés afférents ;

°

Sur la prime de fin d'année

Considérant que M.[J] est également fondé à solliciter le paiement de cette prime accordée aux salariés statutaires par la société FRANCE TELEVISIONS ;

que cette dernière répond seulement que cette prime n'est pas due à l'appelant au motif que son statut de salarié à contrat à durée déterminée l'exclut du bénéfice de cet avantage ou, sans le démontrer, que la prime requise n'a pas d'existence et ne tient pas compte des dispositions de l'accord d'entreprise du 28 mai 2013 ;

que cependant au regard des dispositions qui précèdent M.[J], titulaire d'un contrat à durée indéterminée, doit se voir reconnaître ce bénéfice ; qu'en outre, M.[J] réplique et justifie que l' accord précité n'a supprimé la prime d'ancienneté qu' à compter de 2013, par son intégration au salaire de base ;

que M.[J] est dès lors fondé à solliciter le paiement de la somme due par la société FRANCE TELEVISIONS à ce titre jusqu'en 2012, soit 9383 € ;

°

Sur les mesures FTV

Considérant qu' à la suite des négociations annuelles obligatoires et jusqu'en 2011 une augmentation salariale collective, dénommée « mesure FTV », a été accordée aux salariés permanents de la société FRANCE TELEVISIONS ; que celle-ci, pour s'opposer à la demande, comme précédemment, fait valoir que ces mesures sont réservées aux salariés permanents ;

que toutefois il ressort des dispositions précédentes que M.[J] doit être considéré comme un salarié permanent et bénéficier en conséquence desdites mesures ;

que sans invoquer aucune disposition particulière, la société FRANCE TELEVISIONS affirme que les mesures litigieuses ne seraient applicables qu'aux journalistes et qu'aux salariés percevant un revenu annuel inférieur à 40 000€ ; que M.[J] produit aux débats des notes établies à la suite des Négociations Annuelles Obligatoires établissant le caractère injustifié de ces affirmations ;

qu'il convient donc d'accueillir la demande de l'appelant et de condamner la société FRANCE TELEVISIONS, à verser à celui-ci la somme de 1560 € due jusqu'en 2011 ;

*

Considérant que l'équité et la situation des parties commandent d'allouer à M.[J] la somme de 1500 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile , en sus de celle accordée en première instance sur le fondement du même texte ;

Sur les demandes du syndicat SNRT CGT

Considérant que la société FRANCE TELEVISIONS forme appel incident du chef des dispositions du jugement qui l'ont condamnée à verser des dommages et intérêts au syndicat SNRT CGT ;

Considérant que, comme l'ont estimé les premiers juges, le litige qui oppose M.[J] à la société FRANCE TELEVISIONS intéresse la pratique d'un employeur et les conditions de travail que celui-ci impose au salarié d'une profession particulière, spécialement défendue par le syndicat SNRT CGT ; que l'inobservation par la société FRANCE TELEVISIONS des dispositions légales et règlementaires applicables au contrat à durée indéterminée a pour objet ou pour effet de fragiliser, en la précarisant, cette profession, de sorte que l'atteinte à l'intérêt collectif professionnel dont cette organisation a la charge, justifie l'action de cette dernière et l'allocation à son profit des dommages et intérêts qui lui ont été justement accordés en première instance, en réparation du préjudice subséquent;

Considérant qu' en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile  , la société FRANCE TELEVISIONS versera à cette organisation syndicale la somme de 500 €, en sus de celle allouée par le juge départiteur ;

PAR CES MOTIFS

Donne acte à la société FRANCE TELEVISIONS de ce qu'elle ne conteste plus la qualification de contrat à durée indéterminée, donnée par le jugement entrepris à la relation contractuelle de cette société avec M.[J] à compter du 21 janvier 2002 ;

Confirme le jugement entrepris en ce que le jugement a condamné la société FRANCE TELEVISIONS, au paiement, en faveur de M.[J], de la somme de 10 000 € au titre de l'indemnité de requalification , aux dépens et au paiement de la somme de 2000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Confirme les condamnations prononcées dans le jugement entrepris au profit du Syndicat national de la radiodiffusion et de télévision du groupe FRANCE TELEVISIONS « SNRT-CGT » ;

Infirme pour le surplus le jugement entrepris et statuant à nouveau ;

Dit que le contrat à durée indéterminée de M.[J] est à temps complet

Condamne la société FRANCE TELEVISIONS à payer à M.[J]

-la somme de 153 014 € à titre de rappel de salaire et la somme de 15301 € à titre de congés payés afférents 

-la somme de 16 358 € au titre de la prime d'ancienneté

-la somme de 9383 € au titre de la prime de fin d'année

-la somme de 1560 € au titre des mesures FTV

l'ensemble des sommes ci-dessus portant intérêt au taux légal à compter du jour de la réception par la société FRANCE TELEVISIONS de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes ;

Déboute M.[J] de sa demande en paiement de congés payés afférents à la prime d'ancienneté ;

Condamne la société FRANCE TELEVISIONS à supporter les dépens d'appel et à payer à M.[J] la somme de 1500 € et au syndicat précité la somme de 500 €, en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 16/01285
Date de la décision : 23/11/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°16/01285 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-23;16.01285 ?
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