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22/11/2017 | FRANCE | N°16/01397

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 22 novembre 2017, 16/01397


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2017



(n° , 14 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/01397



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Décembre 2015 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/01696





APPELANTE



Madame [X] [V] veuve [R]

née le [Date naissance 1] 1933 à [Localité 1]

[A

dresse 1]

[Adresse 1]



représentée et assistée par Me Christian HUON, avocat au barreau de PARIS, toque : D0973







INTIMÉES



Madame [C] [S] [R]

née le [Date naissance 2] 1954 à [Localité ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2017

(n° , 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/01397

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Décembre 2015 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/01696

APPELANTE

Madame [X] [V] veuve [R]

née le [Date naissance 1] 1933 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée et assistée par Me Christian HUON, avocat au barreau de PARIS, toque : D0973

INTIMÉES

Madame [C] [S] [R]

née le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

assistée de Me Philippe TOISON de l'ASSOCIATION TOISON - ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : R087

Madame [F] [A] [R]

née le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

assistée de Me Juliette GRISET, avocat au barreau de PARIS, toque : R193

Madame [Y] [L] [R] épouse [O]

née le [Date naissance 4] 1961 à [Localité 1]

[Adresse 3]

[Adresse 1]

représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la société BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1119

assistée de Me Xavier LOUBEYRE, avocat au barreau de PARIS, toque : R196

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 03 Octobre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Dorothée DARD, Président

Mme Monique MAUMUS, Conseiller

Mme Nicolette GUILLAUME, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Dorothée DARD, Président et par Mme Emilie POMPON, Greffier.

***

[H] [R], marié avec Mme [X] [V] sous le régime de la communauté réduite aux acquêts le 8 juin 1954, les époux ayant par acte du 9 septembre 1981, homologué par jugement du tribunal de grande instance de Paris du 15 janvier 1982, adopté le régime de séparation de biens, est décédé le [Date décès 1] 2012.

Trois filles sont nées de leur mariage, [S], [F] et [Y].

[H] [R] disposait d'un patrimoine important composé essentiellement de :

- sa collection de dessins et tableaux de maîtres, d'une valeur de près de 11 millions d'euros,

- son appartement situé à [Adresse 1],

- des valeurs mobilières dans diverses sociétés, notamment dans la société Scorimar,

- les parts sociales qu'il détenait dans la société civile GJP Gestion.

Le 28 mai 2002, [H] [R] avait établi un testament authentique rédigé comme suit :

' Je prive mon épouse [X] de toutes dispositions légales présentes ou à venir relatives au droit du conjoint sur le domicile conjugal et les meubles meublant le garnissant, prenant par ailleurs, par testament olographe subséquent d'autres dispositions à son égard'.

Par testament olographe du 24 mai 2005, il prenait les dispositions suivantes :

'Je lègue à mon épouse, si elle me survit

- le droit d'usage et d'habitation pendant cinq ans à compter de mon décès de la partie qu'elle occupe de l'appartement à [Adresse 1] avec ses dépendances ainsi que le contenu le garnissant.

Pour l'exercice de ses droits, mon épouse sera dispensée de faire un inventaire et de fournir caution.

- Une somme de cinq cent mille Euros (500.000 €) réévaluée annuellement à compter

de ce jour sur la base de 3% l'an, jusqu'au jour de mon décès... »

Par codicille du 18 février 2010, il portait la somme léguée à son épouse à 1.000.000 d'euros.

Le 19 juillet 2010, il prenait les dispositions suivantes :

' Par les présentes, je confirme toutes les dispositions testamentaires prises en faveur de mon épouse [X], s'imputant sur la quotité disponible de mes biens à mon décès.

Je lègue le surplus de la quotité disponible après imputation des dispositions relatives à mon épouse, par moitié chacune à mes deux petites filles [K] et [W] [O]'.

Le 31 janvier 2011, il établissait un codicille ainsi rédigé :

' La somme de 500.000 Euros initialement léguée à mon épouse (testament du 18 février 2010) et portée par la suite à 1.000.000 Euros (codicille du 18 février 2010) est portée à la somme de 1.500.000 Euros.

Outre ce legs de somme d'argent, je lègue à mon épouse l'usufruit de ma collection de dessins et de bronzes sa vie durant.

Pour l'exercice de cet usufruit, elle sera dispensée de fournir caution'.

Le 9 mars 2011, il prenait les dispositions suivantes : ' Relativement à la société Scorimar, j'annule toutes les dispositions antérieures à ce jour et décide que le lot de ma fille [Y] comprendra par priorité et nécessairement les 52,56% des parts que je détiens en direct dans la Société.

La part de ma fille [S] comprendra par priorité toutes mes autres détentions

directes/indirectes de parts dans la société.

Relativement à la quotité disponible de mes biens, je révoque toutes dispositions antérieures à ce jour, à l'exception de celle en faveur de mon épouse [X]. Je lègue le surplus de la quotité disponible, après exécution des dispositions en faveur de mon épouse, à ma fille [Y]'.

Par jugement du 15 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Paris, a :

- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [H] [R],

- dit que les legs particuliers contenus dans les dispositions testamentaires prises par [H] [R] en faveur de son épouse sont une charge de la succession,

- ordonné la délivrance à Mme [X] [R], par Mmes [S] et [F] [R], des legs particuliers qui lui ont été consentis par son époux, à concurrence de leur quote part indivise :

- du droit d'habitation d'une durée de cinq ans, de la partie qu'elle occupe de l'appartement sis [Adresse 1] et du droit d'usage mobilier la garnissant,

- de l'usufruit de la collection de dessins et de la collection de bronzes ayant appartenu au défunt,

- de la somme d'argent d'un million cinq cent mille euros (1.500.000 €) qui lui a été attribuée par son époux, soit pour Mesdames [S] et [F] [R], la somme de sept cent cinquante mille euros (750.000 euros),

- dit que cette délivrance de legs devra intervenir dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, et passé ce délai, sous astreinte de 100 € par jour de retard,

- enjoint, en tant que de besoin à Mmes [S] et [F] [R], d'intervenir auprès du notaire chargé de la liquidation de la succession, afin que les fonds disponibles dans le compte de succession soient employés pour payer le legs de somme d'argent attribué à Mme [X] [R], dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement et passé ce délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

- dit que Mme [Y] [R] pourra prétendre au remboursement des deniers personnels qu'elle a avancés pour permettre la délivrance à Mme [V] veuve [R] de son legs de sommes d'argent,

- dit que le legs de la somme de 1.500.000 euros fait en pleine propriété à Mme [X] [R] s'imputera sur la quotité disponible ordinaire et que les legs d'usufruit et de droit d'usage et habitation s'imputeront sur l'usufruit de la réserve héréditaire à concurrence de la quote part indivise des héritières réservataires,

- ordonné qu'il soit fait inventaire de la collection de dessins et de bronzes grevée de l'usufruit de Mme [V] veuve [R],

- dit qu'il sera apposé des scellés sur chacun des encadrements de dessins,

- dit qu'une visite annuelle de la collection sera faite par les héritières, accompagnées d'un expert de leur choix,

- fait interdiction de déplacer les 'uvres sans l'autorisation unanime des trois indivisaires,

- débouté Mme [F] [R] et Mme [S] [R] du surplus de leurs demandes,

- renvoyé les parties devant le notaire pour le surplus,

- dit qu'en équité, il ne sera pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné Mme [F] [R] et Mme [S] [R] aux dépens et accordé à Me Huon et Me Loubeyre le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Mme [X] [R] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 4 janvier 2016.

Dans ses dernières conclusions du 27 juillet 2016, elle demande à la cour de :

Vu le testament et les codicilles du défunt [H] [R],

Vu les articles 578 et suivants, 587 et 599 alinéa 1 du code civil,

Vu les causes et pièces de ce dossier,

- la dire recevable et bien fondée en ses demandes,

à titre principal

- infirmer partiellement le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux mesures conservatoires concernant la collection de dessins et de bronzes grevée de son usufruit et le confirmer en toutes ses autres dispositions,

à titre subsidiaire,

- limiter aux déplacements à l'étranger l'interdiction de déplacer la collection de dessins et de bronzes sans l'autorisation unanime des trois indivisaires,

- dire que l'expert choisi par les héritières en vue de la visite annuelle de la collection devra

être approuvé préalablement par elle,

en tout état de cause

- confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions,

- débouter Mesdames [S] et [F] [R] de leurs appels incidents,

- condamner Mme [S] [R] à lui la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 27 juillet 2017, Mme [S] [R] demande à la cour de :

Vu notamment les codicilles des 8 et 9 mars 2011,

Vu les dispositions des articles 1157 et 1161 anciens du code civil,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation partage de la succession de [H] [R],

- rappelé que les parties devront remettre au notaire commis toutes les pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,

- rappelé que le notaire commis devra dresser un projet d'état liquidatif dans le délai d'un an à compter de sa désignation,

- rappelé qu'à défaut pour les parties de signer cet état liquidatif, le notaire devra transmettre au greffe de la 2ème chambre (1ère section) un procès-verbal de dires et son projet de partage,

- dit que les legs particuliers contenus dans les dispositions testamentaires prises par [H] [R] en faveur de son épouse sont une charge de la succession,

- dit que les fonds disponibles dans le compte de succession soient employés pour payer le legs de somme d'argent attribué à Mme [X] [R],

- dit qu'en application de l'article 1016 du code civil, les frais de la demande de délivrance des legs au profit de [X] [V] sont à la charge de la succession,

- dit que le legs de la somme de 1.500.000 euros fait à [X] [V] s'imputera sur la quotité disponible ordinaire,

- ordonné qu'il soit fait inventaire de la collection de dessins et de bronzes grevée de l'usufruit de [X] [V], veuve [R],

- dit qu'il sera apposé des scellés sur chacun des encadrements de dessins,

- dit qu'une visite annuelle de la collection sera faite par les héritières, accompagnées d'un expert de leur choix,

- fait interdiction de déplacer les 'uvres sans l'autorisation unanime des trois indivisaires,

- dire et juger que le legs de 1.500.000 euros en argent doit être délivré à Mme [V] par prélèvement sur les fonds successoraux et dire que le notaire détenteur desdits fonds, Maître [R] [H], notaire à Meudon, devra verser les sommes disponibles en son étude à [X] [V], à concurrence de ce qui lui reste dû, soit 350.000 euros,

- constater qu'elle a exécuté le jugement déféré en ce qu'il lui enjoignait d'intervenir auprès dudit notaire et la décharger de toute responsabilité à cet égard,

Statuant à nouveau,

sur l'interprétation du codicille du 9 mars 2011,

à titre principal

- constater l'accord de [S] et [Y] [R] sur l'interprétation du codicille du 9 mars 2011, par lequel [H] [R] a entendu léguer :

o les 74.910 actions (52,56 % de 142.524) qu'il détenait directement dans le capital de la société Scorimar à [Y] [R] (par priorité et nécessairement),

o les 67.613 actions (47,44 % de 142.524) qu'il détenait directement dans le capital de la société Scorimar à [S] [R] (par priorité),

o les 364.490 actions qu'il détenait indirectement par l'intermédiaire du Plan Epargne Entreprise (PEE) dans le capital de société Scorimar à [S] [R] (par priorité),

o la totalité de ses 3.538 parts sociales dans le capital de la société GJP GESTION détenant elle-même 168.319 actions de société Scorimar, et permettant la détention indirecte des actions Scorimar, à [S] [R].

- constater que [F] [R] s'en rapporte à l'accord exprimé par ses s'urs,

- juger que le notaire liquidateur devra tenir compte de ces legs et de cette répartition dans son projet de partage,

subsidiairement,

- interpréter le codicille du 9 mars 2011 de la manière exposée précédemment,

très subsidiairement,

- constater que [H] [R] dans son codicille du 9 mars 2011 a entendu léguer :

o 52,56 % des 507.014 actions (142.524 + 364.490) qu'il détenait dans le capital de la société Scorimar à [Y] [R] soit 266.486 actions,

o 47,44% des 507.014 actions qu'il détenait dans le capital de la société Scorimar à [S] [R] soit 240.528 actions,

o la totalité de ses 3.538 parts sociales dans le capital de la société GJP GESTION détenant elle-même 168.319 actions de société Scorimar, et permettant la détention indirecte des actions Scorimar, à [S] [R],

- juger que le notaire liquidateur devra tenir compte de ces legs et de cette répartition dans

son projet de partage,

Sur la qualification juridique des dispositions du codicille du 9 mars 2011,

à titre principal

- juger que les dispositions du codicille du 9 mars 2011 relatives à la société Scorimar concernant [S] [R] sont des legs rapportables devant s'imputer sur la part réservataire de chaque héritier gratifié et, à titre subsidiaire, sur la quotité disponible par ordre de priorité suivant :

1°) legs à [Y] [R] de 52,56% des 142.524 actions que [H] [R] détenait en direct dans la Société Scorimar,

2°) legs à [S] [R] de toutes les autres détentions directes/indirectes de parts de [H] [R] dans la société Scorimar,

3°) legs consentis à [X] [R],

4°) legs de l'éventuel surplus de la quotité disponible à [Y] [R],

- juger qu'en déclarant léguer à [Y] [R] « le surplus de la quotité disponible après exécution des dispositions en faveur de son épouse », [H] [R] a voulu établir prioritairement les legs particuliers consentis à son épouse après exécution des legs particuliers faits à [Y] [R] et [S] [R] concernant les actions de la société Scorimar,

à titre subsidiaire,

- juger que les dispositions du codicille sont des v'ux,

en tout état de cause,

- dire et juger que lesdits legs s'imputent sur la quotité disponible ordinaire, [Y]

[R] ne pouvant prétendre, le cas échéant, qu'au surplus de ladite quotité disponible

après imputation des legs consentis à [S] [R] puis à [X] [V],

- dire et juger que la valeur des parts de Scorimar et de GJP GESTION dans le cadre

du partage sera déterminée à partir de la valeur retenue par l'expert [W] diminuée des dividendes versés à l'indivision et diminuée ou augmentée de la variation des capitaux propres postérieurement au 31 décembre 2013,

- dire et juger que la valeur de la nue-propriété de la collection de dessins sera fixée à 80% de la valeur de la pleine propriété,

- dire et juger que la quote-part indivise de chacune des héritières dans la succession devra être révisée à la vue de l'interprétation qui sera donnée du codicille du 9 mars 2011 et que la quote-part indivise de [S] [R] est de :

- 48.28% de la succession dans l'hypothèse où elle bénéficierait d'un legs de l'ensemble des actions directes et indirectes de Scorimar à l'exclusion des 74.910 actions (52,56 % des 142.524 actions) que [H] [R] détenait directement dans le capital de la société Scorimar,

- 27.22 % de la succession dans l'hypothèse où elle bénéficierait d'un legs de 240.528

actions que [H] [R] détenait dans le capital de la société Scorimar,

- débouter les autres parties de l'ensemble de leurs demandes fins et prétentions,

- condamner [X] [V] aux dépens de l'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamner [X] [V] à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 31 août 2017, Mme [Y] [R] demande à la cour de :

Vu les testament et codicille de [H] [R],

Vu les dispositions des articles 1075, 1079, 1080 et 924 du code civil,

- infirmer le jugement concernant les mesures conservatoires ordonnées sur les collections de dessins et bronzes dépendant de la succession,

- confirmer pour le surplus le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter les co-intimées de leurs appels incidents et de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner Mme [F] [R] à payer à l'indivision successorale, a minima, la somme de deux cents quatre-vingt-onze mille soixante euros (291.060 €) au titre de l'indemnité dont elle est redevable au titre de son occupation privative et exclusive du bien indivis sis [Adresse 1],

- dire et juger que l'indemnité d'occupation à la charge de Mme [F] [R] sera due jusqu'à la libération complète des lieux,

- le cas échéant, renvoyer les indivisaires devant le notaire liquidateur aux fins de fixation, au besoin après expertise, du quantum de l'indemnité d'occupation due par [F] [R] à l'indivision successorale jusqu'à sa libération complète et effective des lieux, - dire et juger que compte tenu de l'erreur commise à l'ouverture de la succession lors de la détermination des droits respectifs des héritières indivises, le notaire liquidateur devra, dans le cadre des opérations de partage, rétablir [Y] [R] dans la quote-part réelle de ses droits, qui est inférieure à 50%, au besoin après expertise s'il l'estime utile,

- dire et juger que le codicille du 9 mars 2011 constitue un testament partage des titres Scorimar entre [S] et [Y] [R],

- dire et juger que le testateur a alloti la concluante des 52,56 % des titres qu'il détenait en PEE,

- condamner [S] [R] à lui payer à titre de réduction, une indemnité égale à la valeur des titres recueillis qui excéderaient le montant de sa réserve héréditaire,

- et en tout état de cause, dire et juger que cette indemnité sera égale à toute somme nécessaire pour reconstituer la réserve héréditaire et la totalité de la quotité disponible qui lui a été léguée,

- condamner Mme [S] [R], appelante, à payer une somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner le paiement des dépens en frais de partage avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 18 septembre 2017, Mme [F] [R] demande à la cour de :

Vu les articles 815-2 et 1094-3 du code civil,

- constater que les mesures conservatoires sur les oeuvres d'art du défunt ordonnées par le tribunal de grande instance de Paris sont dans l'intérêt de l'indivision,

en conséquence :

- confirmer le jugement dont appel sur l'ensemble de ses dispositions, sauf en ce qu'il a dit que les legs consentis à Mme [V] en usufruit et en droit d'usage et d'habitation s'imputent sur la réserve à concurrence de la quote-part indivise des héritières réservataires, et en ce qu'il a ordonné l'apposition de scellés sur l'ensemble de la collection de dessins du défunt,

- infirmer le jugement rendu sur ces deux points,

- dire et juger que lesdits legs s'imputent sur la quotité disponible ordinaire, Mme [Y] [R] ne pouvant prétendre qu'au surplus de ladite quotité disponible, après imputation du legs en argent et des legs en usufruit et droit d'usage et d'habitation,

- rejeter les demandes formulées par Mme [X] [V] dans ses conclusions d'appel,

- s'agissant des oeuvres d'art de la collection de [H] [R] :

A titre principal :

- infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné 1'apposition de scellés sur les dessins de la collection, et, reconventionnellement, autoriser les héritières de [H] [R] à placer en garde-meuble sécurisé les pièces de la collection d'oeuvres d'art qu'elles souhaitent, à compter du 18 avril 2017,

- dire que Mme [X] [V] pourra sélectionner, chaque année, avec l'accord des trois indivisaires, une cinquantaine d'oeuvres de son choix qu'elle pourra conserver à son domicile afin de pouvoir les admirer,

à titre subsidiaire, si la mise en garde-meuble sécurisé à compter du 18 avril 2017 n'était pas autorisée aux nues-propriétaires des oeuvres par la cour, confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné l'apposition de scellés sur la collection,

A titre reconventionnel, dire que la valeur de l'usufruit de la collection devra être fixée en fonction de l'age de Mme [X] [V] au jour du partage, soit une valeur d'usufruit de 20%, et donc une valeur de la nue-propriété à 80% de la valeur de la pleine propriété, soit de 8.742.667,20 €,

- dire qu'en cas de déplacement des oeuvres de la collection de [H] [R] par Mme [X] [V], tant en France qu'à l'étranger, sans accord unanime des trois nues-propriétaires, cette dernière sera condamnée à les remettre en place, sous astreinte de dix mille euros (10.000 €) par jour et par oeuvre,

- donner acte de ce que Mme [Y] [R] n'a formulé aucune demande régulière au titre d'une éventuelle indemnité d'occupation due par elle pour l'appartement du [Adresse 4],

- rejeter la demande de Mme [Y] [R] de la condamner à payer à l'indivision successorale une somme minimum de 291.060 € au titre d'une indemnité d'occupation relative à l'appartement du [Adresse 4],

S'agissant de la valeur des quotes-parts des indivisaires dans la succession du défunt, dire

que si la déclaration de succession ne fige aucun droit, les calculs de ces quotes-parts ne

pourront être effectués qu'à l'issue de la mission de Maître [P], notaire en charge des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession,

- S'agissant de la valorisation des parts des sociétés Scorimar et GJP Gestion, dire qu'il convient de retenir, dans le cadre des opérations de partage, la valeur retenue par l'expert [O] [W] au 31 décembre 2013, et non d'y retrancher quelque somme que ce soit, y compris toute distribution de dividendes,

- condamner Mme [X] [V] aux entiers dépens d'appel.

SUR CE, LA COUR

sur l'appel de Mme [X] [R]

Considérant que Mme [X] [R] demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux mesures conservatoires concernant la collection de dessins et de bronzes grevée de son usufruit ;

Considérant que les premiers juges ont ordonné qu'il soit fait inventaire de la collection de dessins et de bronzes grevée de l'usufruit de Mme [R], dit qu'il sera apposé des scellés sur chacun des encadrements de dessins, dit qu'une visite annuelle de la collection sera faite par les héritières, accompagnées d'un expert de leur choix et fait interdiction de déplacer les 'uvres sans l'autorisation unanime des trois indivisaires ;

Considérant qu'aux termes du codicille du 31 janvier 2011, [H] [R] a pris les dispositions suivantes ' je lègue à mon épouse l'usufruit de ma collection de dessins et de bronzes sa vie durant.

Pour l'exercice de cet usufruit, elle sera dispensée de fournir caution';

Considérant qu'eu égard à la valeur de cette collection dont fait état l'ensemble des parties, cette dispense de caution révélait de la part du défunt une particulière confiance dans l'usage que sa veuve ferait de cet usufruit ;

Considérant qu'aucune initiative déraisonnable ne peut être reprochée à l'usufruitière de nature à justifier des mesures conservatoires, le seul fait invoqué, à savoir le prêt d'une oeuvre de cette collection à un prestigieux musée américain ne pouvant pas sérieusement être considéré comme tel, alors que ce type de circulation des oeuvres relève d'un usage courant et contribue au contraire à la valorisation d'une collection ;

Considérant, en conséquence, que les mesures conservatoires ordonnées, dont la faisabilité pour l'une d'entre elles, l'apposition de scellés est problématique, doivent être infirmées dans leur intégralité, étant observé, s'agissant de l'inventaire, qu'un inventaire des 'uvres d'art a été entrepris par Maître [H] à l'ouverture de la succession et que le notaire liquidateur, dans le cadre des opérations de comptes, liquidation et partage pourra procéder également à un inventaire de la collection, de sorte que l'inventaire à titre conservatoire est inutile ;

Considérant que le placement des oeuvres dans un garde-meubles sécurisé sollicité à titre subsidiaire par Mme [F] [R] est dépourvu de fondement en l'absence de démonstration d'une mise en péril de la collection par sa mère et contreviendrait totalement au droit d'usufruitière de cette dernière, de sorte que cette demande subsidiaire doit être rejetée ;

sur l'imputation des legs faits au conjoint survivant

Considérant que le 28 mai 2002, [H] [R] a établi un testament authentique rédigé comme suit, ' Je prive mon épouse [X] de toutes dispositions légales présentes ou à venir relatives au droit du conjoint sur le domicile conjugal et les meubles meublant le garnissant, prenant par ailleurs, par testament olographe subséquent d'autres dispositions à son égard';

Considérant, par ailleurs, que par testament olographe du 24 mai 2005, il prenait les dispositions suivantes :'Je lègue à mon épouse, si elle me survit

- le droit d'usage et d'habitation pendant cinq ans à compter de mon décès de la partie qu'elle occupe de l'appartement à [Adresse 1]

avec ses dépendances ainsi que le contenu le garnissant.

Pour l'exercice de ses droits, mon épouse sera dispensée de faire un inventaire et de

fournir caution' ;

Que le 31 janvier 2011, il a établi un codicille ainsi rédigé,' La somme de 500.000 Euros initialement léguée à mon épouse (testament du 18 février 2010) et portée par la suite à 1.000.000 Eros (codicille du 18 février 2010) est portée à la somme de 1.500.000 Euros.

Outre ce legs de somme d'argent, je lègue à mon épouse l'usufruit de ma collection de

dessins et de bronzes sa vie durant.

Pour l'exercice de cet usufruit, elle sera dispensée de fournir caution'et que par codicille du 9 mars 2011, il prenait les dispositions suivantes : ' Relativement à la société Scorimar, j'annule toutes les dispositions antérieures à ce jour et décide que le lot de ma fille [Y] comprendra par priorité et nécessairement les 52,56% des parts que je détiens en direct dans la Société.

La part de ma fille [S] comprendra par priorité toutes mes autres détentions

directes/indirectes de parts dans la société.

Relativement à la quotité disponible de mes biens, je révoque toutes dispositions antérieures à ce jour, à l'exception de celle en faveur de mon épouse [X]. Je lègue le surplus de la quotité disponible, après exécution des dispositions en faveur de mon épouse, à ma fille [Y]';

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que [H] [R] a consenti à son épouse :

- le legs de l'usufruit de sa collection d'oeuvres d'art,

- le legs du droit d'usage et d'habitation pendant cinq ans à compter de son décès de la partie qu'elle occupe de l'appartement à [Adresse 1] avec ses dépendances ainsi que le contenu le garnissant,

- le legs de la somme de 1 500 000 € ;

Considérant que Mmes [S] et [F] [R] estiment que l'ensemble des libéralités consenties par leur père à leur mère s'impute sur la quotité disponible eu égard aux termes du codicille de 9 mars 2011 ('Je lègue le surplus de la quotité disponible, après exécution des dispositions en faveur de mon épouse, à ma fille [Y]'), tandis que Mme [X] [R] et Mme [Y] [R] soutiennent que le défunt n'a nullement exhérédé son conjoint survivant et qu'il s'agit d'une question d'imputation des libéralités et non d'interprétation du codicille ;

Qu'elles exposent que pour l'imputation de la libéralité consentie au conjoint survivant, il convient d'effectuer une distinction suivant l'objet de celle-ci, si la libéralité est en pleine propriété, elle doit s'imputer en premier lieu sur la quotité disponible en pleine propriété et subsidiairement sur l'usufruit de la réserve, où elle sera réduite par voie de retranchement et si la libéralité est en usufruit, elle est imputée sur l'usufruit de la réserve et subsidiairement sur la quotité disponible, qu'il en résulte que les libéralités faites en usufruit ou en droit d'usage et d'habitation au conjoint survivant s'imputent sur l'usufruit de la réserve, le seul point à vérifier étant que la réserve des enfants leur revienne en totalité en nue-propriété, ce qui est le cas en l'espèce ;

Considérant qu'aux termes de l'article 764 du code civil, la privation des droits d'habitation et d'usage exprimée par le défunt dans le testament du 28 mai 2002 'est sans incidence sur les droits d'usufruit que le conjoint recueille en vertu de la loi ou d'une libéralité, qui continuent à obéir à leurs règles propres' ;

Considérant que les libéralités faites en usufruit ou en droit d'usage et d'habitation au conjoint survivant s'imputent sur l'usufruit de la réserve, la réserve des enfants devant leur revenir en totalité en nue-propriété, tandis que la libéralité en pleine propriété de 1 500 000 € s'impute sur la quotité disponible ordinaire, de sorte que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a jugé de ce chef ;

sur l'indemnité d'occupation due par [F] [R]

Considérant que Mme [Y] [R] expose que Mme [F] [R] occupe privativement et exclusivement une partie de l'immeuble indivis sis [Adresse 1], d'une surface de 150 mètres carrés, que d'après des avis de professionnels en matière immobilière, la valeur locative mensuelle moyenne par mètre carré d'un appartement situé à Paris 7ème est de 30,8 euros, l'estimation la plus haute étant de 37 euros par mètre carré, qu'en fourchette haute, le loyer mensuel serait de 5.550 euros par mois (150 x 37 €), qu'elle n'a jamais eu accès à ce logement dont Mme [F] [R] a fait son domicile principal, cette occupation privative ayant exclu la même utilisation par les deux autres co-indivisaires qui ne détiennent même pas les clés de cet appartement, qu'ainsi, depuis au moins le décès du de cujus, soit depuis 63 mois, [F] [R] est occupante sans droit ni titre du bien indivis ;

Considérant que Mme [F] [R] demande de lui donner acte de ce que Mme [Y] [R] n'a formulé aucune demande régulière au titre d'une éventuelle indemnité d'occupation due par elle pour l'appartement du [Adresse 4] ;

Considérant que selon l'article 815-9, alinéa 2, du code civil, l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité, de sorte que Mme [Y] [R] est bien fondée à former une demande à ce titre, Mme [F] [R] ne pouvant se prévaloir d'une absence de demande régulière en ce sens ;

Considérant qu'il résulte du rapport établi le 17 juillet 2017 par l'expert M. [I], mandaté par la Scp [P], que l'appartement occupé par Mme [F] [R] est situé dans un immeuble de très haut standing, au sein d'un quartier résidentiel, calme et recherché, que cependant situé au premier étage avec une faible luminosité, il présente un état d'usage avancé, les prestations intérieures étant limitées au regard du standing attendu à cet emplacement ;

Que l'expert estime la valeur locative mensuelle de ce bien à 3 796 HT/HC au jour de l'expertise , soit 45 550 € par an et appliquant une indexation à rebours, il estime cette valeur locative en 2012 à 44 384 € ;

Considérant qu'au vu de l'ensemble de ces éléments portant sur les caractéristiques du bien et eu égard à la précarité de l'occupation de l'indivisaire par rapport à la situation du locataire, il convient de fixer à 3 000 € par mois le montant de l'indemnité d'occupation due à l'indivision par Mme [F] [R] à compter du décès jusqu'à la libération effective des lieux et de dire que l'indivision dispose d'une créance au jour des conclusions de Mme [Y] [R] d'un montant de 3 000 € X63 mois = 189 000 € ;

sur le codicille en date du 9 mars 2011 en ce qui concerne les actions de la société Scorimar

Considérant qu'aux termes de ce codicille, [H] [R] a pris les dispositions suivantes :

'Je décide que le lot de ma fille [Y] comprendra par priorité et nécessairement les 52,56 % des parts que je détiens en direct dans la société. La part de ma fille [S] comprendra par priorité toutes mes autres détentions, en direct ou indirectes, des parts dans la société';

Considérant que Mme [S] [R] soutient qu'un accord est intervenu sur l'interprétation de ce codicille lors de la réunion du 21 décembre 2016 réitéré dans le procès-verbal de dires signé le 22 février 2017 chez Me [P], notaire ;

Considérant que la rédaction de ce dernier document est peu claire et qu'il a d'ailleurs été suivi d'une lettre postérieure du notaire du 19 mai 2017 faisant état d'une erreur s'étant glissée dans le projet  ;

Considérant, en tout état de cause, qu'il y a lieu de constater que le procès-verbal du 22 février 2017 se borne à reprendre les thèses de chacune et ne peut en aucun cas être interprété comme valant accord des parties de ce chef, le paragraphe signé par Mme [Y] [R] se concluant ainsi ' dans l'hypothèse où les héritières ne partageraient pas cette analyse, elle entend que le testament soit interprété judiciairement', mention qui suffit à elle seule, à établir qu'aucun accord n'était formalisé par les mentions antérieures ;

Considérant, en conséquence, que Mme [S] [R] doit être déboutée de sa demande tendant à voir 'constater l'accord de [S] et [Y] [R] sur l'interprétation du codicille du 9 mars 2011";

Considérant que l'analyse que chacune fait de ce codicille est la suivante ;

Considérant que pour Mme [Y] [R] ces dispositions constituent un testament partage répartissant les titres de la société Scorimar ;

Qu'elle soutient que les termes mêmes du codicille ainsi que l'intention du testateur sont parfaitement clairs et non ambigus, son lot étant constitué des 52,56 % des parts détenues en direct dans la société, les 52,56 % correspondant scrupuleusement aux 364.490 titres détenus en PEE par [H] [R], ce chiffre précis à la décimale près n'ayant pas d'autre signification que celle d'identifier les titres détenus en PEE, étant observé que la détention par le PEE qui n'a pas la personne morale, est une détention directe à la différence de la société GJP détenant 168.319 titres de la société Scorimar, le PEE n'étant qu'une enveloppe fiscale et n'assurant aucune interposition de personnes juridiques dans la possession des titres ;

Que selon elle, cette interprétation est la seule qui soit cohérente au regard de l'identification scrupuleuse d'un pourcentage à la virgule près, soit 52,56 %, de la concordance exacte avec la détention directe détenue dans une enveloppe fiscale ISF, et de la volonté de confier les rênes du groupe à [Y] en lui conférant la majorité du capital, alors que l'attribution invraisemblable de 52,56 % de 142.524 actions aboutirait à lui conférer 10,8 % du capital ;

Considérant que selon Mme [S] [R], [H] [R] a entendu léguer :

- les 74.910 actions (52,56 % de 142.524) qu'il détenait directement dans le capital de la société Scorimar à [Y] [R] (par priorité et nécessairement),

- les 67.613 actions (47,44 % de 142.524) qu'il détenait directement dans le capital de la société Scorimar à [S] [R] (par priorité),

- les 364.490 actions qu'il détenait indirectement par l'intermédiaire du Plan Epargne Entreprise (PEE) dans le capital de société Scorimar à [S] [R] (par priorité),

- la totalité de ses 3.538 parts sociales dans le capital de la société GJP GESTION détenant elle-même 168.319 actions de société Scorimar, et permettant la détention indirecte des actions Scorimar, à [S] [R] ;

Qu'elle soutient qu'il a feint de donner à sa fille [Y] la majorité des actions de Scorimar en faisant délibérément référence à la portion de 52,56% sachant que cette fraction correspondait exactement aux 364.490 actions détenues au travers du PEE, imposé à [Y] de recevoir dans son lot des actions de Scorimar afin de la contraindre ' dans tous les cas ' à respecter l'engagement collectif de conservation des titres, que ce codicille correspond pleinement au tempérament et à la réputation de son auteur rompu au droit des sociétés et aux montages financiers les plus complexes et connu pour ses opérations boursières d'envergure, et est également conforme à la volonté de [H] [R] de préserver l'organisation conçue en prenant la précaution de préserver discrètement, mais de manière certaine, l'équilibre qu'il a toujours souhaité entre ses filles ;

Considérant que [H] [R] détenait environ 549.049 actions soit 79,17 % du capital social de la société Scorimar se décomposant comme suit :

- 142.524 actions .........................soit 20,55% du capital de Scorimar

- 364.490 actions dans son PEE... soit 52.56% du capital de Scorimar

- environ 42.035 actions par sa participation dans GJP GESTION, soit 6,06 % du capital de Scorimar ;

Considérant qu'en attribuant aux termes de son codicille les 52,56 % des parts qu'il détenait en direct dans la société à [Y] et en lui léguant dans le même acte le surplus de la quotité disponible, après exécution des dispositions en faveur de son épouse, [H] [R] a entendu allotir sa fille [Y] de la majorité du capital social de la société Scorimar, correspondant aux 364.490 actions dans son PEE, la détention par un tel plan ne pouvant être qualifiée de détention indirecte en l'absence de personne morale interposée dans cette détention, contrairement à la détention par le biais de sa participation dans la société GJP gestion ;

Qu'en outre, eu égard à la valorisation de ces 364.490 actions, et à la composition de la succession telle qu'elle est exposée par les parties, l'attribution de la quotité disponible à [Y] est cohérente ;

Considérant que c'est d'ailleurs ainsi que Mme [S] [R] a initialement compris les dispositions prises par son père puisque dans son assignation en référé devant le tribunal de commerce de Paris du 27 novembre 2012, elle indiquait que ' [Y] [R] a vocation à recueillir 52,56 % du capital de Scorimar' et que dans ses conclusions du 11 décembre 2012, elle indiquait que [H] [R] 'a donc émis le voeu que sa fille cadette [Y] reçoive, dans le cadre du partage de sa succession, les actions qu'il détenait sous PEE dans Scorimar, soit 52,56 %.

Sa fille [S] ayant vocation à recevoir le reste, soit 20,56 % détenus en direct et sa participation dans la société GJP détentrice de 24,27 %.

Ainsi, une forte minorité détenue par [S] [R] devait coexister avec la majorité dévolue à [Y] [R]';

Qu'il convient donc de faire droit à la demande de Mme [Y] [R] et de dire que le défunt lui a attribué 52,56 % des titres qu'il détenait en PEE ;

Considérant que les dispositions du codicille du 9 mars 2011 en ce qu'elles constituent la distribution et le partage par le défunt, entre deux de ses héritières, d'un élément prépondérant de son patrimoine, doivent être qualifiées de testament partage, peu important que tous les biens ou droits que le testateur laisse au jour de son décès n'aient pas été compris dans le partage, de sorte que l'ensemble des demandes de Mme [S] [R] sur l'ordre d'imputation des 'legs' sont sans objet ;

sur la valeur des parts de Scorimar et de GJP GESTION dans le cadre du partage

Considérant que Mme [F] [R] demande que pour la valorisation des parts des sociétés Scorimar et GJP Gestion dans le cadre des opérations de partage, soit retenue la valeur fixée par l'expert [O] [W] au 31 décembre 2013, 'et non d'y retrancher quelque somme que ce soit, y compris toute distribution de dividendes';

Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article 829 du code civil, 'en vue de leur répartition, les biens sont estimés à leur valeur à la date de la jouissance divise telle qu'elle est fixée par l'acte de partage, en tenant compte, s'il y a lieu des charges les grevant.

Cette date est la plus proche possible du partage' ;

Considérant, en conséquence , que la valorisation des parts des sociétés précitées devra être faite conformément à ces dispositions, à une date la plus proche du partage ;

sur la valeur de la nue-propriété de la collection

Considérant que la valeur de la nue-propriété de la collection d'oeuvres d'art doit être fixée à 80% de la valeur de la pleine propriété, ainsi que le demandent Mmes [S] et [F] [R], Mme [X] [R] n'ayant formé aucune contestation à cette proposition ;

sur la demande d'indemnité de réduction formée par Mme [Y] [R]

Considérant que Mme [Y] [R] soutient que toute valorisation des titres Scorimar recueillis par Mme [S] [R] au-delà du montant de sa réserve héréditaire justifiera le paiement d'une indemnité à son bénéfice pour reconstituer sa propre part de réserve et la quotité disponible qui lui a été léguée ;

Considérant que seul l'établissement du projet d'état liquidatif par le notaire chargé du règlement de la succession permettra de déterminer les masses de calcul de la réserve globale, de la réserve individuelle et de la quotité disponible, que ce n'est qu'à ce stade que pourra être examiné le bien-fondé de la demande d'indemnité de réduction formée par Mme [Y] [R], de sorte qu'il convient de renvoyer les parties devant le notaire aux fins d'établissement des opérations de comptes, liquidation et partage qui sont le préalable au calcul de toute indemnité de réduction ;

sur la quote-part des droits de Mmes [S] et [Y] [R]

Considérant que Mme [Y] [R] demande à la cour de dire et juger que compte tenu de l'erreur commise à l'ouverture de la succession lors de la détermination des droits respectifs des héritières indivises, le notaire liquidateur devra, dans le cadre des opérations de partage, la rétablir dans la quote-part réelle de ses droits, qui est inférieure à 50%, tandis que Mme [S] [R] formule plusieurs hypothèses de calcul de sa quote-part ;

Considérant que Mme [F] [R] réplique à juste titre que les calculs de ces quotes-parts ne pourront être effectués qu'à l'issue de la mission de Maître [P], notaire en charge des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession ;

Considérant, enfin, que la demande de Mme [S] [R] tendant à se voir 'décharger de toute responsabilité' en ce qui concerne le legs de 1 500 000 € à l'égard de sa mère est en l'espèce, dépourvue de fondement, ce legs étant une charge de la succession et partant, des cohéritiers qui doivent en assurer l'exécution ;

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a ordonné qu'il soit fait inventaire de la collection de dessins et de bronzes grevée de l'usufruit de Mme [V] veuve [R], dit qu'il sera apposé des scellés sur chacun des encadrements de dessins, dit qu'une visite annuelle de la collection sera faite par les héritières, accompagnées d'un expert de leur choix, fait interdiction de déplacer les 'uvres sans l'autorisation unanime des trois indivisaires,

Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à aucune mesure conservatoire portant sur de la collection de dessins et de bronzes grevée de l'usufruit de Mme [X] [R],

En conséquence, rejette les demandes tendant à ce qu'il soit fait inventaire de la collection de dessins et de bronzes grevée de l'usufruit de Mme [V] veuve [R], apposé des scellés sur chacun des encadrements de dessins, fait une visite annuelle de la collection par les héritières, accompagnées d'un expert de leur choix, fait interdiction de déplacer les 'uvres sans l'autorisation unanime des trois indivisaires, ainsi que la demande subsidiaire de placement des oeuvres dans un garde-meubles sécurisé,

Dit que Mme [F] [R] doit à l'indivision successorale une indemnité d'occupation mensuelle de 3 000 € pour son occupation de partie de l'appartement situé à [Adresse 1] jusqu'au partage ou jusqu'à la libération effective des lieux,

Fixe la créance de l'indivision à l'égard de Mme [F] [R] à ce titre à la somme de 189 000 € au mois de juillet 2017 inclus,

Dit qu'aux termes du codicille du 9 mars 2011 qui constitue un testament partage, [H] [R] a attribué à Mme [Y] [R] 52,56 % du capital social de la société Scorimar, le surplus du capital social détenu par lui directement ou indirectement, étant attribué à Mme [S] [R],

Dit que les parts des sociétés Scorimar et GJP Gestion doivent être évaluées au jour le plus proche du partage,

Dit que la valeur de la nue-propriété de la collection d'oeuvres d'art doit être fixée à 80% de la valeur de la pleine propriété,

Dit qu'il ne peut être statué sur la demande d'indemnité de réduction formée par Mme [Y] [R] avant l'établissement du projet d'état liquidatif par le notaire,

Rejette toute autre demande,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes,

Ordonne l'emploi des dépens en frais de partage,

Rappelle que l'emploi des dépens en frais de partage ne peut donner lieu à application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 16/01397
Date de la décision : 22/11/2017

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°16/01397 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-22;16.01397 ?
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